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fidèles; il se flatta enfin que la manifestat it franche de ses sentimens et d'un arde amour pour le peuple, donneroit quelqu honte à ceux des députés qui s'étoient jettés dans la faction d'Orléans, et pourroit les porter à abandonner la cause d'un prince dont la déloyauté connue devoit convaincre les artisans de la nouvelle constitution, qu'il n'y avoit nul fond à faire sur sa protection.

L'événement a prouvé que Louis s'étoit trompé; mais je ne pense pas que la postérité le blâme d'avoir essayé de la seule ressource à laquelle il lui fût possible de recourir. Quoi qu'il en soit, son discours à l'assemblée nationale, sembla d'abord devoir produire des effets heureux et durables. Les royalistes et les impartiaux enchaînés par son exemple et par leur serment, ne laissèrent plus échapper aucun murmure sur ce qui étoit déjà fait, et attendirent en silence les nouvelles loix qui devoient completter le code constitutionnel. Le petit nombre des membres de l'assemblée nationale, qui ne tenoit ni aux royalistes, ni aux impartiaux, ni à d'Orléans, désira tomme le monarque, que tous les partis se rapprochassent, et que les convulsions de la France eussent un terme. Il se fit en un mot un tel changement dans l'esprit public, que les orléanistes craignirent plus qu'ils ne l'avoient encore fait, le retour de l'ordre et de la paix. Les heureuses dispo sitions où la démarche du roi avoit mis la

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sque-totalité du peuple, les allarma sé

eusemeat.

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D'Orléans instruit de ce qui se passoit en France, craignit de son côté que son parti ne fût entièrement ruiné, s'il ne revenoit se mettre à la tête des conjurés. L'ennui qu'il essuyoit à Londres, et les dégoûts qu'il y éprouvoit, achevèrent de le déterminer à ne tenir aucun compte des ordres qui l'y retenoient. Ses partisans, en attendant qu'il effectuât sa résolution qui fut d'abord tenue fort secrette firent tout ce qui dépendoit d'eux, pour lui préparer les voies. Ils ne cessèrent de répandre des soupçons sur la sincérité des vues que le roi avoit manifestées; leurs journalistes insinuèrent que sa confiance aux travaux de l'assemblée n'étoit qu'apparente, et n'avoit d'autre objet que d'endormir la vigilance des patriotes, et de détourner leur attention des mesures qui se prenoient dans l'intérieur du château pour la ruine de cette même constitution qu'on avoit juré de défendre.

La manière dont on prétendit prouver qu'il n'y avoit nulle sincérité dans les promesses du roi, est si bizarre que je dois la rapporter, pour donner une idée des folies qui se sont débitées et qu'on a crues dans ces derniers tems. Les écrivains orléanistes firent remarquer que le soir même du jour où Louis XVI avoit juré de protéger la constitution, il avoit reçu assis et couvert, la députation qui étoit venue lui porter les

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remerciens de l'assemblée. Le fait étoit vrai, mais il s'ensuivoit simplement que Louis XVI avoit cru de sa dignité de recevoir et d'entendre dans cette attitude, quelques membres de l'assemblée, et nullement qu'il n'eût point dans le cœur les promesses que sa bouche avoit proférées.

La faction certaine du retour de son chef, redoubla également d'activité ponr opérer l'entière défection des troupes, et elle n'eut dans ce genre d'intrigues que trop de succès. Les jacobins eurent de plus recours à un de ces moyens qu'ils appelloient une grande mesure. Ils arrêtèrent que l'assemblée nationale rendroit un décret qui ordonneroit à l'armée de ligne et à toutes les gardes nationales du royaume, d'envoyer à Paris un certain nombre de députés qui en leur propre nom, et au nom de leurs corps, prêteroient dans le Champ-de-Mars, le serment civique. Le jour de cette cérémonie fut fixé au 14 juillet. C'étoit à pareil jour que l'année précédente, les murs de la Bastille s'étoient écroulés, et que sa garnison avoit été égorgée.

L'assemblée nationale qui n'avoit d'autre volonté que celle du club des Jacobins, rendit le décret qu'on lui demanda. Les factieux le regardèrent comme le gage assuré de l'élévation de d'Orléans au trône. Ils se promirent de faire mouvoir de tels ressorts, que les députés sur lesquels le choix tomberoit, seroient ou déjà dévoués à d'Orléans, ou du

moins disposés à se livrer entièrement à lui. De cette manière le prince se seroit trouvé sans effort à la tête d'une nombreuse armée qu'on croyoit bien devoir le proclamer roi et contre laquelle l'imprévoyant la Fayette n'oseroit rien tenter.

Ce fut lorsqu'on eut obtenu ce décret qui donnoit à la faction les plus hautes espérances, qu'on décida irrévocablement que le prince reviendroit en France, et que luimême ne fit plus mystère de son retour.

Fin du Livre treizième.

HISTOIRE

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Efforts de la Fayette pour retenir d'Or léans en Angleterre. Le prince publie une apologie. Il écrit à l'assemblee nationale. Il est rappellé par son parti: il préte son serment civique. Tentatives inutiles de la faction pour séduire les fédérés. Menées de d'Orléans pour corrompre les juges du Châtelet. Ce tribunal estime qu il y a lieu à le décréter de prise-de-corps. Histoire de cette procédure et de ses suites.

L'ÉTONNEMENT de la Fayette fut grand lorsqu'il sut que d'Orléans avoit pris la résolution de revenir en France. Le général qui

Tome III.

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