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ou soldat, apprendra que són bonheur rea pose sur la fidélité et l'observation exacte de la discipline; il se convaincra qu'un gnerrier qui oublie ce qu'il doit à son honneur et à son serment, se couvre de mépris, se perd, et précipite la patrie dans des malheurs épouvantables. Quel amas de désor dres et de calamités n'a pas engendré la séduction pratiquée par d'Orléans parmi les gens de guerre! Ceux des militaires francois que l'or ou les intrigues de ce prince ont égarés, et qui auront survécu à nos troubles frémiront lorsque l'histoire leur présentera le dénombrement des soldats ou tués ou blessés par suite de l'insubordination de l'armée; ils seront épouvantés quand ils liront la liste de ceux de leurs parens ou amis que leur désobéissance a fait périr sur l'échafaud.

Les temps de délire ne dureront pas toujours; la justice redescendra sur cette terre désolée qu'elle a trop long-temps abandonnée. La patrie alors sondant la profondeur des plaies que lui a faites le soulèvement des armées, gardera toute son indulgence pour les soldats qui ont donné dans les piéges dont on les avoit environnés de toutes parts; mais elle déploiera toute son indignation, toute sa sévérité sur les officiers jacobins qui ont abusé de la simplicité de ces soldats et du crédit qu'ils avoient sur leur esprit pour les perdre, et nous perdre

avec eux.

J'annonce à ces officiers jacobins que leurs noms ont été recueillis avec soin, et qu'ils seront inscrits sur une colonne qu'on appellera la colonne de l'infamie. Les générations qui nous sucéderont, en fixant ce monument, maudiront les noms qu'il leur présentera; elles frémiront des forfaits qu'une telle nomenclature leur rappellera. Les François de ce temps que les assassins n'auront pas égorgés, diront à ces officiers jacobins: « C'est à vous, malheureux, à vous seuls, à nous rendre compte de nos fortunes et du sang de nos amis et de nos parens; c'est vous seuls qui nous en avez privés, en ôtant à la loi sa force, en déployant sur la patrie tous les fléaux de l'anarchie; c'est vous seuls qui restez responsables de tout le sang qui a inondé la France depuis 1789.

En attendant la vengeance de l'histoire, je dirai que ceux qui dès l'origine contribuèrent le plus aux manoeuvres de d'Orléans pour corrompre les armées, furent le comte de Mirabeau, le duc d'Aiguillon, les ducsde Biron, de Crillon, le baron de Montesquiou, Barnave, Laclos, Dubois de Crancé, Valence, Dumouriez, et les trois frères Lameth. Ces derniers sont mille fois plus coupables que tous les autres complices de d'Or-s léaus , parce qu'en manquant à leur devoir, ils n'ont pas seulement violé la religion du serment, ils ont encore donné le funeste exemple de compter pour rien les saints droits de la reconnoissance.

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Les malheureux n'avoient rien, ne possédoient rien qu'ils ne le tinssent de la libéralité du roi et de la reine. Nés dans un état complet d'indigence, ils leur devoient leur foriune, leur place, l'aisance de leurs parens; ils leur devoient tout, absolument tout, jusqu'aux vêtemens qui les couvroient. On a peine à concevoir comment de tels monstres d'ingratitude ne se font pas horreur à eux

mêmes.

Des femmes aussi se mêlèrent de cette œuvre infernale. Ainsi dès les premiers jours de la révolution, on vit la duchesse d'Aiguillon et la baronne de Staël fille de Necker, courir les casernes des Gardes - Fran- . çoises, et de leurs propres mains abreuver ces soldats d'eau-de-vie. Voilà encore ce qui persuade à la génération actuelle qu'au moins à cette époque Necker étoit dévoué à la faction d'Orléans, car s'il n'eût pas été orléaniste, eût-il enduré que sa propre fille se travestît avec cette impudence en vivandière pour servir le prince. Dans la suite, on vit la marquise de Sillery traînant avec elle la jeune fille du duc d'Orléans, parcourir les diverses garnisons, haranguer les soldats, prendre avec eux les manières d'une prostituée, et leur distribuer l'or de Philippe.

Ces diverses insurrections firent répandre par-tout le sang; il coula par forrens à Nancy. D'Orléans fidèle à son systême d'imposture, qui consistoit à rejetter sur le roi ses propres forfaits, le fit accuser par tous les journa Tome III.

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listes dont la plume lui étoit vendue, d'exciter ces soulevemens qui mettoient aux prises. les officiers avec les soldats, les corps avec les corps. Ainsi au compte de ces calomniateurs, c'étoit le roi dont l'existence reposoit sur la fidélité des troupes, qui semoit dans l'armée, des germes d'insubordination; c'étoit lui qui avoit voulu le soulevement des Gardes-Françoises, qui avoit payé le régiment de Flandres, pour que ce régiment l'abandonnât, et le livrât aux bandits de d'Orléans ; c'étoit lui qui à Nancy avoit donné cent louis à des assassins pour qu'ils égorgeassent le baron de Malseigne, un de ses meilleurs officiers. . . . Mais il y a tant d'absurdité dans ces impostures, que c'est insulter aux lecteurs, de s'appésantirà la leur rendre sensible. Cependant cette portion du public qui, soit par malice, soit par paresse, soit par envie envie, est toujours portée à croire ce qui est incroyable, ajouta foi à ces atroces imputations.

Voilà de quelle manière d'Orléans parvint à faire insurger en sa faveur presque tous les régimens. Son séjour à Londres, au moyen des services que lui rendoit le club des Jacobins, ne nuisoit point à ses intérêts. Luimême n'étoit pas oisif; il faisoit personnellement en Angleterre, et par ses agens en Hollande, de nouveaux emprunts. Tout cet argent venoit tomber dans la caisse du comité de trésorerie des jacobins, et n'en sor

toit que pour payer des insurrections soit parmi le peuple, soit parmi les soldats.

Mais ce qui met principalement ce conspirateur au-dessus de tous ceux qui l'ont précédé, c'est la vaste étendue de ses projets. On eût dit qu'il eût voulu usurper tous les trônes; ce n'étoit pas là ce qu'il avoit en vue; il vouloit seulement embrâser toute l'Europe. Il s'attendoit que lorsqu'il auroit pris la place de Louis XVI, tous les rois et principalement ceux de la maison de Bourbon, regarderoient la cause du roi détrôné comme la leur. Il entroit donc dans ses desseins, qu'au moment où ils voudroient déclarer la guerre à l'usurpateur, ils fussent arrêtés chez eux par des soulèvemens populaires. Une partie. de son argent et de ses efforts tendirent à allumer cette insurrection générale.

Je n'entrerai point dans les détails de cette étonnante conspiration; je dirai seulement qu'il ne réussit point mal en Angleterre. On jugera par ce qu il fit chez le peuple de la Grande-Bretagne, des succès qu'il eut chez les autres nations. Il attacha à ses intérêts. pendant son séjour à Londres, milord Stanhope et le docteur Price. Ces deux hommes étoient les membres les plus considérés d'une société qui se donnoit le titre de Société de la Révolution. Elle n'avoit, disoit- elle, d'autre objet que de maintenir la révolution qui avoit chassé Jacques II du trône de ses ayeux.

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