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dans le fang innocent; laiffez à la loi tout fon em pire, & aux officiers publics le foin de la mettre à exécution. Vous objecerez peut-être que les grands & les riches échappent aux loix, comme les gros infectes aux toiles d'arraignées &qu'on ne pend pas une homme qui a cent mille écus. Oui, ces abus ont exifté; mais déformais la preffe & la publicité de la procédure forceront les juges à être impartiaux; & s'il exifte des princes parmi les conjurés, attendezvous à les voir ramer à côté du dernier malheureux qui fe feroit vendu aux ariftocrates.

Nous ne pouvons finir fur ce fujet fans parler d'une rufe qu'ils emploient pour nous égarer dans nos recherches. Ils fement qu'il fe tramoit quatre conjurations à la fois, & ils en mettent une fur le compte d'un de nos plus vertueux citoyens, de M. le duc d'Orléans; ils infinuoient que lui feul étoit affez riche pour foudoyer les 30000 hommes qu'on enrégimentoit; & que l'emprunt que M. de Limon tentoit en Hollande & en Flandres, n'avoit pas d'autre objet que d'alimenter le parti qu'il s'étoit formé; ils préfentent le voyage que ce prince va faire comme une retraite prudente, en cas que les conjurés arrêtés fourniffent des preuves contre lui. Les lâches qui femoient adroitement ces infâmes données, n'ont pas été peu furpris, lorfqu'ils ont appris que ce prince citoyen n'avoit demandé un paffeport à l'affemblée nationale & aux repréfentans de la commune de Paris, qu'en juftifiant. par une lettre de M. de Montmorin, qu'il étoit employé par notre roi à une négociation importante, dont il ne s'étoit chargé que, vu l'extrême utilité dont l'objet de fa miffion peut être pour le bien public (1). Le prince eft parti pour l'Angleterre le 14; on ne fait rien de certain fur l'objet de sa mission.

Nous apprenons que l'affemblée nationale vient d'autorifer le châtelet de Paris à procéder provifòire

(1) Ce font les expreffions d'une affiche imprimée chez Cellot, qui a été diftribuée & appofée au paffage du palais-royal, afin de prévenir les horribles infinuations des aristocrates.

ment contre les criminels de leze-nation jufqu'au jugement définitif exclufivement. Il n'étoit pas poffible de prendre un plus mauvais arti; il n'auroit pas fallu plus de tems & de réflexion pour organifer un juré ou un comité d'instruction (1) de dix à douze membres de l'affemblée. Cependant, il vaut mieux avoir des juges à charges vénales & depuis long-tems exercée aux manoeuvres ambidextres de l'ancien ordre judiciaire, que de n'en point avoir.

ORGANISATION ACTUELLE DES REPRÉSENTANS DE LA COMMUNE DE PARIS. COUP D'ŒIL SUR QUELQUES OPÉRATIONS ARISTOCRATIQUES.

Dans les pays où regne le defpotifme, lorfque le peuple ou les foldats ne peuvent plus fupporter les defpote, ils l'étranglent & mettent à fa place un autre defpote. Qui croiroit que les François, fur tout les Francois de la capitale, ne font pas plus éclairés en politique que les Turcs ou les Japonois, & qu'après avoir détruit un régime aristocratique, ils établiffent à fa place, de leurs propres mains, un régime aristocratique?

Comme l'affemblée des repréfentans de la commune de Paris a la prétention de fervir de modele à toutes les municipalités du royaume, que fon organisation eft directement contraire à la liberté civile, & qu'elle prend chaque jour de nouvelles forces, il eft urgent que tous les citoyens François en connoiffent les vices & les inconvéniens.

Nous fuppofons qu'on fe rappelle de la diftin&tion

(1) Meffieurs, j'ai traité la queftion des crimes de leze-nation dans une lettre adreffée à M. Lally-Tolendal: permettez - moi de prier, par la voie de votre journal, ceux qui l'ont lue ou qui la liront, de fuppofer qu'elle eft adreffee à MM. Pethion, Bouche, Dillon, Gregoire, ou tout autre qui lear reflemble. J'ai l'honneur d'être, figné, de Morancenne.

que nous avons établie entre les pouvoirs appartenans la commune (1): ils fe divifent en pouvoir de ftatuer par des réglemens fur les objets généraux, & c'est le pouvoir législatif municipal, & en celui de ftatuer fur les cas particuliers, & c'eft le pouvoir exécutif mus nicipal ou adminiftratif.

Tant que le premier appartient à la majorité des habitans de la commune, c'est-à-dire, que la pluralité des voix des individus, affemblés par diftrict, forme le réglement, le régime eft démocratique ou popu laire; mais quand il appartient à la minorité, ou à un petit nombre des habitans de la commune, le régime eft aristocratique.

L'auteur du plan de municipalité, avoit tendu aux parifiens un piege fort adroit, dans lequel ils ont donné. L'article premier du titre 2 portoit le pouvoir de régler & furveiller l'adminiftration de la ville de Paris, appartiendra à une assemblée de représentans.

Le mot régler, accollé à celui de furveiller, ne préfentoit pas toute la fignification que l'auteur & fes adhérans lui donnoient mentalement, c'est-à-dire, de faire des réglemens fur les cas généraux, d'exercer let pouvoir législatif municipal.

Cette idéé n'eft développée que dans l'article fuivant ; mais elle eft développée de maniere à ne pas trop frapper, parce que cet article ftatuant fur le pouvoir adminiftratif, toute l'attention fe porte fur cet objet principal, & non fur l'explication fecondaire du mot régler. L'adminiftration journaliere des objets attribués à la municipalité, la jurifdiction qui y ek attachée, le foin d'exécuter LES DÉCISIONS, RÉSOLUTIONS ET RÉGLEMENS FAITS PAR L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE feront confiés à 60 membres.

Vous devez voir, Parifiens, que fi l'on n'eût pas voulu vous induire en erreur, le premier article eût été ainfi conçu : Le pouvoir de faire des réglemens, de donner des décifions & réfolutions fur les cas généraux, appartiendra à une affemblée de repréfentans.

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Mais

Mais les articles auroient été clairs, intelligibles pour tous, & c'eft ce qui ne convenoit pas à ceux qui avoient intérêt de faire former une municipalité ariftocratique.

Voici ce qui en eft résulté: quarante diftricts ont donné des pouvoirs, non pas conformes au plan de municipalité, mais feulement conformes à un arrêté des repréfentans, du 30 août, qui demandoit que le plan de municipalité fût adopté provifoirement pour la partie qui concerne l'affemblee generale des repréfentans de la commune du confeil & du bureau de la ville, c'est-à-dire, felon l'arrêté, les titres 3, 4 & 5.

Ces quarante diftricts, formant la majorité, les trois cents fe font conftitués conformément à leurs mandats. Cependant, quoique le titre 2 ne fût pas adopté par les mandats des quarante diftricts, que par conféquent la commune n'eût point conféré aux repréfentans le pouvoir de faire des réglemens, il n'ont pas laiffé d'en faire, toutes les fois que l'occafion s'en eft présentée, contre le vœu des districts, c'est-à dire, du corps de la commune, qui, en ne leur conférant pas le pouvoir législatif municipal, fe l'étoit fuffifamment réfervé.

Par exemple, ils ont réglé que M. le maire prononceroit fur toutes les difcuflions relativement aux paiemens des impofitions, pour les fommes non excédant 25 liv. Il n'eft pas un membre de la commune qui ne fente qu'il auroit fallu confulter la volonté de tous les individus fur ce cas général. On auroit pu fuivre, pour acquérir le résultat certain de cette volonté générale, la marche que nous avons tracée ci-devant (1).

Il est d'autant plus étonnant que les trois cents ait oublié que le pouvoir de ftatuer fur les cas généraux appartenoit à la totalité des habitans réunis en diftricts, qu'ils viennent de le réconnoître dans la formation du confeil des foixante adminiftrateurs.

Dès l'epoque de la nomination des cinq députés douze diftricts avoient défigné celui des cinq qu'il fe eroyoit en droit d'élire, pour entrer dans le confeil des foixante adminiftrateurs. Vingt-neuf avoient demandé qu'il y en eût un par district fuccellivement; d'autres

(1) Numero IX, page .

No. XIV.

**C

Atricts s'étoient conformés au vœu des douze, enforte qu'il fe trouvoit trente-quatre districts qui avoient nommé un des foixante adminiftrateurs, ou qui s'étoient réfervés de les nommer. Les trois cens ont décidé qu'ils accéderoient à la majorité du væeu des diffrids. Le mot d'acceffion n'eft pas mieux placé là que dans la réponse du roi à l'affemblée nationale fur le premier article de la conftitution. Les trois cens devoient dire qu'ils fe foumettoient au vau de la majorité de la commune.

Le confeil des foixantes a donc été formé ; ils fe font divifés en Bureaux; le furplus des membres, au nombre de deux cens quarante, s'ekt reconftitué en affemblée des repréfentans de la commune. Telle eft l'organisation actuelle de la municipalité de Paris.

Nous demandons maintenant ce que c'eft que l'assemblée des deux cens quarante. Ce n'eft pas un corps adminiftratif: toute adminiftration appartient au confeil des foixante. Ce n'eft pas un corps légiflatif municipal deftiné à ftatuer fur les cas généraux; nous avons déjà dit qu'ils n'avoient pas reçu ce pouvoir. Voici les propres termes du procès-verbal de recenfement des pouvoirs. La majorité des diftricts fe réunit pour donner à l'affemblée le pouvoir d'adminiftrer la commune d'organifer provifoirement le corps des foixante membres qui doivent être chargés des fonctions municipales, & enfin de travailler à un plan d'organisation de la municipalité. Les deux premiers objets font remplis, le corps des foixante eft organife; l'adminiftration eft entre leurs mains; les deux cens quarante n'ont donc d'autre miffion d'autre devoir d'autre droit maintenant, que de travailler à un plan de municipalité,

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Hors de ce travail, l'affemblée des deux cens qua rante doit être abfolument nulle, & gardons - nous bien de leur donner quelques pouvoirs. Il importe à la liberté civile & à la bonne adminiftration qu'il n'y ait aucun corps intermédiaire entre la conmune & fes adminiftrateurs, il s'établiroit bientôt entre le corps intermédiaire & les adminiftrateurs un commerce de Tervice préjudiciable au bien public; les membres du corps intermédiaire, bien affurés de n'être pas vexés par les administrateurs, laifferoient tranquillement vexer

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