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» amène la guerre, sans doute il faut la subir, et » nous aurons pour la soutenir ces quinze cent » mille gardes nationaux, ces cinq cent mille soldats, » citoyens aussi , dont M. le président du conseil » nous a parlé à cette tribune. Je rends grâces à » M. le ministre de la guerre du brillant et véridique » tableau qu'il vient de nous tracer.

» On vous a cité un mot de M. Canning; ce n'est » pas comme lui , en fermant les yeux, mais les

yeux » bien ouverts, que nous emploierons nos forces; » et, pour rappeler un autre mot de ce ministre, » sur les auxiliaires patriotes qu'il prévoyait; ce qui, » de sa part, a pu passer pour un trait de vanité, il » nous serait facile, vous le savez, de le réaliser.

» J'en viens à l'affaire de la Belgique : Messieurs, » notre conduite à son égard, lorsque notre gou» vernement se formait à peine, a été, comme on » vous l'a dit , franche et généreuse. Il fut nettement » déclaré aux cours étrangères que si des troupes » prussiennes ou autres mettaient le pied en Belgi» que, nous y entrerions sur-le-champ. Nous avons » reconnu son indépendancè. Là j'aurais souhaité que

le

gouvernement du roi s'arrêtât. J'aurais dit » aux Belges : Voulez-vous former une république, » une Suisse septentrionale , dégagée d'aristocratie? » nous vous soutiendrons. Voulez-vous élire un » chef héréditaire, chez vous, ailleurs, tel qu'il soit? » c'est votre affaire; il ne tient qu'à vous; et si le >> choix bien libre était tombé sur le duc de Ne

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» mours , j'aurais conjuré, je conjurerais encore le » roi des Français de ne pas s'y refuser.

» Quant à la réunion à la France, la question ne » serait pas pour moi ce qu'en pensent d'autres per» sonnes; mais si vraiment la majorité du peuple » belge veut cette réunion, et, dans ce cas bien ave» ré, comme je pense que le roi n'a pas seul le droit » ou d'accepter ou de refuser cette réunion, c'est à » toutes les branches du pouvoir législatif que j'en » ferais la proposition. Et quelles puissances auraient » le droit de s'y opposer? Ce ne sont pas celles qui » ont fait les traités de Lunéville et d'Amiens. Au» raient-elles eu plus d'affection pour Napoléon que » pour Louis-Philippe? Nous craindraient-elles moins

aujourd'hui? Messieurs, ce serait de leur part une » grande erreur ; car, notre trône populaire n'a pas » craint de s'entourer d'une nation armée tout en» tière, nommant ses propres officiers, et notre force » est immense.

» Un plus habile diplomate que moi (1) vous a » si bien établi la situation de la Pologne, qu'il me » reste peu de chose à dire. Il serait étrange que le » gouvernement du roi, qui vient de défendre les » traités existans, ne réclamât pas énergiquement » l'exécution de celui qui, par hasard, est sorti du » congrès de Vienne, lorsqu'il consacre l'indépen» dance du royaume de Pologne, lorsqu'il protège

)

)

(1) M. Bignon.

a

» cette nation, notre plus fidèle amie, qui a versé » tant de sang pour nous, et dont l'existence forme » une barrière contre l'invasion des barbares du » Nord. N'est-il pas du devoir, de l'honneur du

gou» vernement de réclamer énergiquement l'exécu» tion de ces traités, le maintien de cette barrière?

» Jadis l'instinct du grand Frédéric lui avait ré» vélé les dangers du partage; il ne fit que

céder » aux instances de l'impératrice de Russie ; c'est lui » qui me l'a dit; l'Autriche elle-même, et ce n'est » pas un gouvernement libéral que je vous cite, a » souvent éprouvé la même impression, et, si je » suis bien informé, elle a été récemment exprimée » par M. de Metternich , le moins libéral de tous les » Autrichiens.

» Quant à l'Angleterre, Messieurs, dernièrement si » jalouse de la Russie, n'éprouverait-elle ce senti » ment qu'en faveur des Turcs? Ne vois-je pas d'ail» leurs à la tête de cette administration les hommes » illustres qui se sont si noblement honorés par » leurs discours contre les partages de la Pologne ? » N'y vois-je pas les membres de cette société, peu » nombreuse il est vrai, mais célèbre, d'où sortit le » meilleur et le plus énergique ouvrage en faveur de » l'indépendance polonaise?

» Espérons donc que le gouvernement, en rem» plissant un devoir sacré, trouvera des facilités

pour » servir efficacement la cause européenne. » Je dois des remercimens à un de nos honorables

» collègues (1), de m'avoir fourni une occasion

que » j'aurais craint d'usurper, pour annoncer du haut » de cette tribune qu'il existe un comité polonais » destiné à donner à nos frères de Pologne toutes » les preuves de sympathies, à leur envoyer tous les » secours qui dépendront de nous, et j'ai l'honneur » d'informer tous mes collègues de la Chambre que » leurs dons seront reçus par nous avec beaucoup » de plaisir et de reconnaissance.

» C'est ainsi que fut autrefois formé un comité » grec, et, à ce propos , j'exprimerai le vou que le » gouvernement s'occupe de fixer enfin des limites » larges et convenables à ce pays, en y comprenant » l'ile de Candie, d'autant plus intéressante, qu'au » moment où les Candiotes étaient armés pour ache» ver l'expulsion des Turcs, ils ont été arrêtés par » l'intervention des puissances maritimes.

» On vous a parlé hier du Portugal; Messieurs,

j'aime à penser que le gouvernement du roi s'oc» cupe partout à faire respecter le nom et les coun leurs de la France. On m'a parlé d'insultes contre » notre pavillon à Sétuval, d'un Français promené » et battu dans les rues d'une autre ville. Nous avons » été traités de scélérats dans un journal officiel, » écrit sous les auspices de l'assassin du marquis de » Loulé, le meilleur ami du roi son père.

» A ce mot de Portugal, je m'indigne qu'on ait » osé mêler le nom de souveraineté du peuple au

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(1) M. Dupin aîné.

))

» nom de ce lâche et cruel tyran, comme disait si » bien son protecteur, lord Aberdeen! C'est comme » si l'on appelait république le régime de 93, et re

ligion la Saint-Barthélemy! Qu'on ne traite donc » pas avec don Miguel, mais qu'il soit puni; il mé» rite d'être chassé ; il le sera...

» Messieurs, je vous ai soumis quelques principes » que je crois vrais, qu'il importe à notre existence » de soutenir, et dont nous devons admettre toutes » les conséquences.

Un mois après il disait : « Ma diplomatie belge a

toujours été fort simple. Se hâter de reconnaître. » l'indépendance de la Belgique, interdire aux puis» sances voisines l'entrée de leurs troupes sur ce » territoire : c'est ce qu'on a fait et bien fait. Ne » s'immiscer ni dans leurs institutions, ni dans » leurs choix : c'est ce qu'on aurait dû faire. Aujour» d'hui que nous sommes entrés dans la carrière » des protocoles, il reste au gouvernement français » à défendre l'intégrité du territoire des Belges, si » évidemment tracée par leur représentation aux » états-généraux et la déclaration d'indépendance » de leurs provinces. » Ne serait-il

pas bien inconséquent, Messieurs, » que les puissances qui, avec raison, ont reconnu » la séparation de la Belgique d'avec la Hollande, ) » voulussent regarder comme un même empire la » Russie et la Pologne, si distinctes sous tous les » rapports, et déclarées telles même par le congrès » de Vienne , et ne pas trouver une violation

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