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ment l'objet ; & pour cela n'y admettons pas la rédaction complette de toutes les procédures en présence du juré; car ces écritures & les jugemens sur l'examen de ces écritures seroient au physique & au moral l'anéantissement du juré.

Je demande à l'assembléé la permission d'interrompre l'opinion actuelle; il n'est pas possible à ma poitrine d'en dire d'avantage.

l'assemblée

M. l'abbé Maury: Il est malheureux pour que le rapport intéressant qu'elle vient d'entendre, n'ait pas pu être continué jusqu'à la fin. Je fais la motion que le discours de M. Thouret soit imprimé le plutot possible. Cette précaution sage sera déjà un commencement de preuve de l'indispensable nécessité de ne juger, dans le dix-huitieme siecle, des matieres sérieuses, que sur des preuves écrites Con rit sourdement du coté gauche). Je demande que par respect pour l'usage qui étoit établi dans la nation (on crie: il étoit mauvais); je demande, dis-je,, messieurs, que la question sur les preuves écrites ne soit décrétée par l'assemblée, que d'après le plus sérieux examen. Sans rien présumer de mes forces, sans engager prématurément une discussion qui ne pourroit pas en ce moment être entiere puisque l'universalité des moyens de M. Thouret ne nous est pas connue, je m'engage à réfuter victorieusement (on l'interrompt, en riant du coté gauche); je m'engage, disje, à réfuter victorieusement tous les moyens que nous avons entendus.

Il est prouvé dans l'Europe entiere, que dans les pays les plus libres, les faux témoins sont excessivement multipliés. Il faut prendre des précautions, messieurs, pour prémunir la nation contre cette grande calamité dont gémit l'Angleterre; car il y a plus de faux témoins en Angleterre, où l'on n'écrit pas les procédures criminelles, que dans toute l'Europe entiere et vous ne voulez certainement pas, messieurs, (on l'interrompt), favoriser les faux témoins. J'ignore si en Angleterre, la multitude des faux témoins n'a point d'autre cause que la regle de juger en matiere criminelle sans écrire; mais certainement cette méthode a beaucoup contribué à les y multiplier; et il sera facile de vous démontrer que les faux témoins recevront de vous un brevet, d'impunité si leurs dépositions ne sont pas écrites. Il ne faut donc pas, messieurs, chercher ici (on l'interrompt ).

M. Lavie M. le président, vous n'avez donné la parole à M. l'abbé Maury que sur la question du fonds.

M. l'abbé Maury Il ne faut pas vous laisser éblouir par

des maximes philosophiques qui tendent à une natnre idéale, que la nature humaine ne comporte point. Cette question ne peut pas occuper l'assemblée nationale pendant une heure, si on n'en fait pas un systême, si l'on veut chercher de bonne foi pour l'intérêt de la sûreté, l'intérêt de l'humanité et le grand intérêt de la société, à écarter de faux témoins.

M. Tronchet: Vous présumez bien que je ne me présente pas ici pour répondre au discours ou à la partie du discours que vient de prononcer M. Thouret; mais pour vous faire une observation d'ordre que je crois très-importante. Nous cherchons tous ici la vérité, nous cherchons tous à donner à la nation l'établissement le plus parfait, car je ne crois pas qu'on me soupçonne de mauvaise foi. (Non, crie-t-on.. et on l'applaudit). Les phrases qui ont été dites dans cette tribune, non certainement par M.Thouret, il est trop poli mais par le préopinant (M. Dumetz): Que si l'intention secrette, ce sont ses propres termes, l'intention des personnes qui demandent l'écriture étoit de détruire l'institution des jurés, ils y réussissoient parfaitement. Ce n'est pas par des phrases aussi insidieuses et aussi malhonnêtes qu'il s'agit de: juger ces intentions. (M. Dumetz se présente à la tribuneavec vivacité. L'observation d'ordre que je veux faire à l'as-semblée, c'est que le discours de M. Thouret se trouve interrompu précisément à mes yeux dans la phrase la plus importante. Vous avez pu déjà entrevoir que l'on s'est servi de cette explication; Si l'on veut une écriture complette. Vous n'avez pas oublié que l'on vous annonce déjà d'avance une espece de modification à la preuve écrite. C'est déjà un premier aveu que ceux qui demandent l'écriture, n'avoient pas das intentions aussi funestes qu'on le suppose. Il seroit fort dangereux que M. Thouret achevant son discours demain. dans la partie la plus essentielle à mes yeux, car je ne vois pas qu'il ait encore répondu un seul mot aux grands incon véniens que j'ai opposés au défaut d'écriture. En conséquence je fais la motion que ceux qui n'étant pas pleinement convaincus des raisons de M. Thouret, demanderoient la parole, soiens entendus sur cette matiere.

L'assemblée décrete la motion de M. Tronchet.

M. le président: Messieurs, j'ai à vous faire part d'une pétition qui nous est adressée de la part de madame Humbert, âgée de 33 ans, et qui a servi plusieurs années dans diffé rens régimens.

Sur ce on passe à l'ordre du jour, on proclame la vente de biens nationaux et la séance se leve....

Séance du soir 11 janvier 1791.

La séance commence par la lecture de différentes adresses ét par la connoissance que M. le curé de Soupes donne de la prestation du serment de tous les ecclésiastiques fonctionnaires publics de la ville de Nemours. (On applaudit).

M. de Saint-Simon: M. le président, c'est en mon nom et en celui de mes codéputés qui ont signé la lettre au département de la Manche, dénoncée au nom du club des amis de la constitution de Coutances, que je vais vous donner l'explication de ce fait d'une maniere franche et irréprochable. J'ai une observation plus importante à faire en vous dénonçant moi-même des personnes inconsidérées qui ont agi contre l'esprit de vos décrets. Je vous dénoncerai des abus d'autorité commis par des hommes en place contre la liberté publique et des attentats contre l'inviolabilité de vos

membres.

Vous avez ordonné il y a quelque tems l'impression et la distribution d'un projet de décret sur les successtonsab intestat.Ce projet a paru à plusieurs députés du département de la Manche partie de l'ancienne Normandie, mériterla plus sérieuse attention. Nous l'avons médité pendant long-tems avec toute l'attention dont nous sommes capables. Nos réflexions augmentant nos inquiétudes, nous avons desiré nous entourer des lumieres de nos concitoyens et connoître leur vou, avant d'émettre le notre. Nous nous sommes dit : Si cette loi leur paroît bonne, ils nous diront d'y concourir; et nous ue perdrons pas le tems de l'assemblée nationale dans une vaine discussion. Voici la lettre. Je la mettrai moi-même sur le bureau et je demanderai qu'elle aille au comité des rapports.

M. Bouche: Ce que demande M. l'opinant est fort juste ; je crois qu'il y a lieu à renvoyer au comité des rapports.

M. de Saint-Simon: Je vous dénoncerai des choses qui sont contraires à votre constitution. (A l'ordre du jour, s'écrie-ton). Messieurs, six de vos collegues sont inculpés dans les pamphlets.

M. le président: Monsieur, ce que vous dites-là n'est point dans l'ordre du jour.

M. de Saint-Simon: Un représentant de la nation ne peut pas se coucher sur une dénonciation sans se justifier

L'assemblée décide qu'elle passera à l'ordre du jour.

M. Moreau de Saint Mery annonce une motion d'ordre tendant à attribuer exclusivement au comité colonial tous les ob jets qui intéresseront les colonies.

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M. Péthion : J'avoue que je ne connois rien au despotisme que veut exercer dans le moment actuel votre comité coTonial. C'est une véritable dictature qu'il demande. L'assemblée doit juger et juge tous les jours à quel comité les affaires qui se présentent seront renvoyées. Je demande la question préalable.

L'assemblée nationale décrete qu'il n'y a lieu à délibérer, M. le rapporteur du comité des finances: Votre comité vous présentera sous peu de jours un projet de réglement pour la surveillance et l'organisation des monnoies, que l'abolition de la vénalité des offices et la suppression de la cour et autres jurisdictions des monnoies, rendent également instant et indispensable.

Vendredi dernier, un de mes collegues vous présenta, en mon absence, le projet du comité. Je ne puis que m'y référer, non parce qu'il est le meilleur, mais parce que, dans la circonstance, il me paroît le moins mauvais.

M. Alexandre de Lameth: Avant de traiter ce qui est relatif aux monnoies, il me semble que l'assemblée nationale doit statuer sur quelles questions elle croit devoir se fixer..

On dit souvent dans cette assemblée que l'on prolonge la session actuelle je ne connois qu'une véritable nécessité, c'est que l'assemblée nationale fasse ce qui est indispedsable, et qu'elle ne fasse rien de ce qui n'est pas indispensable. J'ai entendu dire très-souvent par M. Chapelier, que nos commettans pressoient le moment où l'assemblée nationale loveroit cette session. C'est trahir la nation que de dire à l'assemblée nationale: La nation desire voir arriver le moment où vous terminerez. Car si la nation voyoit l'assemblée nationale s'en aller en laissant une chose de grande importance sans être faite, une chose qui pourroit compromettre l'édifice, elle le trouveroit mauvais. Tout ce qui n'est pas indispensablement nécessaire, tout ce qui ne tient pas au succès de la révolution, nous devons le renvoyer à nos successeurs. Or, messieurs, dans ce moment, il est d'une très-grande importance pour le soulagement du peuple, de faire de la petite monnoie, et je crois que l'assemblée nationale doit s'occuper de la question. Quant au systême monétaire, je ne crois pas que nous soyons assez instruits, à moins d'une très-longue discussion, à laquelle nous ne pouvons pas donner une demi-heure, au lieu que la prochaine législature y donnera quinze jours. Nous devons renvoyer à nos successeurs ce qu'ils pourront faire, parce qu'ils le feront mieux que nous. (On applaudit) D'après cela, je demande que la discussion s'ouvre, non sur la question élémentaire, mais, sur le bilion.

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M. l'abbé Maury: Pour atteindre au but auquel vous êtes empressés d'arriver, j'examinerai toutes les questions relati vës au systéme monetaire, non que j'adopte l'universalité des principes, et sur-tout les conséquences qui vous ont été présentées par votre comité des monnoies, non que j'adopte les principes et les conséquences développés par M. de Mirabeau.

Je crois, messieurs, qué sans nous jetter dans des discussions scientifiques, nous avons pour nous guider une expérience très-récente à interroger. Au commencement du dernier regne, il fut question, comme à présent, de renouveller les monnoies. En 1718, M. de Noailles, alors président du comité des monnoies, fut préposé à la refonte dės monnoies. M. le maréchal de Noailles composa un mémoire très-savant sur cette matiere; il étoit tiré de l'ouvrage de M. le blanc, sur les monnoies; et il a été parfaitement développé par M. d'Aguesseau, lorsqu'il a combattu le systéme de M. Law. Il semble que ces principes lumineux invoqués au commencement de ce siècle avec le plus grand succés, puisque ce ne fut qu'en 1726 qu'on put enfin convenir d'un systéme monétaire, ayent êté totalement perdus de vue dans cette discussion; mais, MM., il seroit bien inutilé de vous les rappeller aujourd'hui, si vous ne voulez en appliquer l'universalité; car je soutiens qu'il faut changer en entier le systeme monétaire ou ne pas y toucher. Il seroit inconcevable, messieurs, que dans une nation où l'on estime que le numéraire est de deux milliards, on prit des précautions infi finies pour faire 15 millions de petite monnoie, tandis qu'on est obligé de frapper tous les ans 4 millions de monnoie nouvelle dans vos hotels des monnòiès, si vous voulez entretenir vos monnoies dans la proportion avec les mines du Pérou et du Mexiquè.

Il semble que 15 millions doivent ici opérer un grand chângement dans le commercè et dans le système des monnoies. Je ne le crois pas; ĉar annuellement on fait plus de 15 millions de monnoie, et annuellement on ne change pas le systême des monnoies. Votre systême monétaire tient non-seulement à votre commerce, mais à beaucoup d'égards il tient à vos mœurs; et vous ne pouvez pas répandre dans la circulation des pieces de 30 sols et de 15 sols pour remplacer cellede 24, 12 et 6 sols. Quand même cette ancienne division seroit mauvaise, elie deviendroit bonne par son unité; et il seroit du plus grand danger d'adopter ainsi perpétuellement des portions d'un systême nouveau qui, fut-il excellent dans son ensemble, ne présenteroit que des dangers si vous vou

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