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ÉCHAPPÉES

A

L'OBSERVATEUR

ANGLOIS

E T AUX

MÉMOIRES SECRETS,

EN FORME DE CORRESPONDANCE;

POUR SERVIR DE SUITE A CES DEUX OUVRAGES.

par Pidansat de Mairobert

par

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i

CORRESPONDANCE

SECRETE,.

POLITIQUE & LITTÉRAIRE,

OU

MÉMOIRES pour servir à l'Histoire des Cours, des Sociétés et de la Littérature en France, depuis la mort de Louis XV.

ON

N

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De Paris, le 24 Juin 1775. Ox imprime un petit ouvrage servant de suite aux Epreuves du Sentiment, collection si inté ressante entreprise par M. d'Arnaud; son titre est Liebman: ce nom vous annonce, Monsieur, qu'il s'agit d'un Allemand; il est le héros de l'histoire dont le sujet est assez singulier. « Liebman difficile en amour, comme en amitié, quoique très-jeune, sent le peu de solidité, de ce que nous appellons attachement inclination; il a un besoin extrême d'aimer, et d'être aimé; il conçoit d'abord l'idée de se retirer dans une très-belle terre dont il est possessour et là livré à ses chimeres et à ses regrets, il desireroit comme un autre Pygmalion qu'une statue s'animat exprès pour lui. La femme d'un de ses jardiniers vient à accoucher d'une fille qui annonçoit toutes les graces réunies. Liebman forme le projet de choisir cette fille pour l'objet de tous ses vœux, et dans ce dessein, il ima

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gine de faire accroire à l'enfant, sitôt qu'elle ouvrira les yeux, qu'il n'y a qu'elle, sa mere, et lui Liebman, qui existent sur la terre. Ce plan en effet est mis en exécution Amélie est élevée dans l'idée qu'il n'y a d'autres créatures semblables à elle que sa mere et son amant, ce qui forme des situations neuves et singulieres. M. d'Arnaud en écrivain qui connoît parfaitement le cœur humain nous montre Liebman · ennuyé de son bonheur, et voulant réveiller son goût en découvrant à un de ses amis cette aventure qu'il tenoit cachée; cet ami, comme cela devoit nécessairement arriver, enleve Amélie. Liebman court par-tout, cherchant sa maîtresse; il la trouve enfin, mais expirante; elle lui raconte les divers événemens qui les ont séparés. Liebman, tourmenté par la jalousie, est charmé d'avoir retrouvé Amélie, mais il a le cœur déchiré par des soupçons, et ne veut plus l'épouser. Sa maitresse meurt, Liebman reconnoît son innocence et la douleur, peu de temps après, le plonge au tombeau. » Cette anecdote est pleine de ce sentiment, et de cette mélancolie si touchante qui caractérise les ouvrages de M. d'Arnaud; cet auteur y fait l'éloge de la nation Allemande, et lui témoigne hautement sa reconnoissance, ce qui fait honneur à son cœur ainsi qu'à ses talens. Cet écrivain est d'autant plus estimable qu'en ce moment où dans la littérature même il y a de la fermentation et de l'animosité, il n'est d'aucun parti, d'aucune secte, et ne répond à aucune critique, ou plutôt à nul libelle car c'est le ton à la mode; nos gens de lettres et nos avocats sont en général deux troupes de dogues furieux qui aboient et déchi

rent.

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L'histoire des causes célebres et la collection

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des mémoires curieux et singuliers qui ont amusé le public depuis trois ou quatre ans, formeront un ouvrage aussi considérable que ce qu'on avoit jusqu'alors rassemblé en ce genre. Il se prépare un nouveau procès qui servira encore d'aliment au goût qui s'accrédite de la lecture de ces sortes de productions. M. D*** mécontent des mœurs d'une épouse tendre, mais dont la tendresse avoit pour objet d'autres hommes que lui citoit une lettre de cachet pour la faire enfermer dans un couvent. Un beau jour cette femme disparoît; M. D*** persuadé que la crainte du châtiment qu'il lui destinoit l'a engagée à fuir n'est pas étonné de son absence: il fait des recherches inutiles pour découvrir le lieu de sa retraite. Au bout de quelque temps il est assigné en séparation; malheureusement pour lui, il fournissoit assez de motifs pour décider les juges contre lui: d'ailleurs sa femme étoit sans fortune ; aucune raison d'intérêt ne balançoit à ses yeux la satisfaction d'être délivré d'une compagne pour laquelle il avoit de l'aversion; il n'oppose qu'une foible résistance, la séparation est prononcée. Sur ces entrefaites il apprend la mort d'un oncle qu'il ne connoissoit pas, et qui étoit venu jouir à Cadix, de gros biens, qu'il avoit amassés dans l'Amérique Espagnole. M. D*** en étoit le seul héritier; retenu à Paris par des occupations importantes desquelles son état dépendoit, il ne peut aller lui-même recueillir cette succession; il remet sa procuration à un négociant de Cadix que lui indique un de nos premiers banquiers. Sa surprise fut extrême lorsqu'il en reçut cette lettre. « Votre procédé, Monsieur, » me paroît étrange, vous me chargez de re» couvremens que vous avez faits vous-inême; il ne vous reste plus rien à prétendre de la succes

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