Page images
PDF
EPUB

mutuellement. Le zèle dont sans doute elles ont été animées autrefois dans les temps ignorés de leur établissement, puisqu'elles ont pu s'établir, a fait depuis longtemps place à l'indifférence, et leurs prêtres sont plus occupés à jouir qu'à acquérir.

Comment la religion a commencé à influer sur la politique intérieure et extérieure. Pourquoi le christianisme a été persécuté dans l'empire plutôt que les divinités étrangères, les sectes philosophiques et même le judaïsme. De son hétérogénéité avec les cultes établis.

Idée du christianisme. Comment lié au judaïsme. Comment il a étendu la sphère des bienfaits de Dieu sur toute la terre. De sa diffusion dans l'empire romain, principalement d'abord par les Juifs, ensuite par les Gentils, qu'il a regardés comme égaux aux Juifs.

Premier rapport des religions avec la politique; la persécution à laquelle elles sont exposées dans leur établissement. Effets de la persécution quand elle est destructive, et quand elle ne l'est pas; qu'elle est aux religions ce qu'est la taille aux arbres, qu'elle les détruit ou les fortifie. Idée des progrès des religions et des effets de la persécution sur elles relativement à ces progrès. Différence à cet égard d'une secte qui s'élève et d'une secte qui tombe. Difficulté d'arrêter l'une et l'autre dans son élévation ou dans sa chute.

Que la religion chrétienne a dû sa principale force à la vérité de ses dogmes comparée à l'absurdité du paganisme. Le fanatisme est une passion, et toutes les passions sont fondées sur la manière dont leurs objets agissent sur les hommes. Si on aime mieux une femme qu'une autre, elle a, par rapport à son amant, quelque avantage sur sa rivale. En fait d'opinion, c'est toujours la raison qui fonde cette passion. Il est vrai que la crainte et l'espérance l'augmentent beaucoup; ajoutons l'orgueil. Que les religions, même sous les dehors du fanatisme, se combattent par des raisons; que ces raisons ne tirent pas toujours leur force de la vérité, mais des opinions déjà établies et des préjugés. Que, lors même qu'elles agissent par la force de la vérité, ce n'est pas toujours par une vérité absolue, mais par une vérité relative qui se trouve d'erreur à erreur. Progrès du christianisme et son adoption par Constantin.

Deuxième rapport de la religion à la politique intérieure. Des secours mutuels que se prêtent la religion et le gouvernement. Mélange des deux puissances, ou plutôt usurpations mutuelles de l'une et de l'autre ; de là l'intolérance réduite en système et incorporée à la législation et à la constitution des États. Intolérance entre les parties d'un même peuple. Intolérance de peutple à peuple, d'où sont venues les guerres de religion.

Troisième rapport de la religion à la politique. Que l'intolérance est plus ou moins incorporée aux religions. Différence à cet égard entre le christianisme et le mahométisme. Intolérance du mabométisme différente de celle des chrétiens. Que les effets de l'intolérance varient suivant que les religions sont plus ou moins éloignées de leur origine et de leur première ferveur, et aussi suivant que les esprits sont plus ou moins éclairés.

Des différentes sectes dans une même religion; du gouvernement ecclésiastique et du lien qu'il peut former entre plusieurs États indépendants. Trois sortes de guerres de religion guerres faites par les mahométans et par les chevaliers teutoniques pour étendre leur religion. Guerres de religions défensives. · Croisades pour venger les lieux saints et pour

rétablir la religion dans les lieux où elle était établie. Enfin guerres pour défendre la liberté des consciences contre les persécutions; guerres des protestants. Influence de ces trois intérêts dans la politique. Liaison qu'établissent la diversité et la similitude des religions entre les sujets persécutés d'un prince et les princes voisins de la même religion. Moyens de remédier à ce mal.

[ocr errors]

Intolérance et tolérance. Fausseté, injustice et inutilité du premier système. Nécessité de la tolérance examen des différentes manières d'établir la tolérance; fausses idées à ce sujet; que nulle part on n'en a suivi toutes les conséquences: dangers de ces conséquences. Que la tolérance doit être sans bornes, même par rapport à l'exercice public, et qu'alors seulement la religion n'entrera plus dans la géographie politique, si ce n'est que parce qu'un État gouverné suivant le principe de la tolérance sera plus riche et plus peuplé qu'un autre.

Pourquoi le christianisme s'étendit dans l'empire romain; de ses progrès chez les barbares. Des disputes de l'arianisme; de leurs effets par rapport aux barbares.

État de l'empire depuis Constantin jusqu'à sa chute; ravages des barbares; de leurs causes; de leurs premiers mouvements sous Gallien. Faute des Romains de les avoir introduits dans leurs troupes. Faiblesse des empereurs qui achetèrent la paix. Fausse idée du président de Montesquieu sur la trop grande population du Nord, et sur le refoulement des peuples par les conquêtes des Romains.

Époque de Julien; faute qu'il fit d'attaquer les Perses. L'empire est ouvert des deux côtés. Des empereurs suivants. De la division absolue de l'empire sous Arcadius et Honorius. Cours des inondations des barbares dirigé vers l'Occident. Leurs établissements. Ils se chassent les uns les autres, se fixent, partagent l'empire. Inondation passagère des Huns; réflexions sur l'état de barbarie. Alors la géographie politique se retrouve, et les bornes anciennes des nations se rétablissent. De la nation des Francs. Idée des ligues formées par les Germains pour défendre leur liberté. Pourquoi l'établissement des Francs dans les Gaules fut plus solide. Qu'ils réunirent une domination étendue dans la Germanie avec la possession des Gaules. Par là ils conservèrent l'égalité du courage avec les autres Germains qu'ils domptaient par la supériorité de la puissance; le séjour des Gaules n'énerva point la nation. La puissance française devint le rempart de l'Europe, assura l'établissement des nations, et contribua même indirectement aux progrès des armes de Justinien en Italie et en Afrique contre les conquérants amollis de ces contrées.

Septième mappemonde politique. - L'Europe partagée entre les barbares immédiatement avant le règne de Justinien. Etat de l'empire grec; les contrées de la Germanie possédées par la nation maîtresse de la Gaule, deviennent un poids dans la balance des nations. Politique de Clovis et de Théodoric. Effets des disputes de l'arianisme dans la conquête des Francs. Idée du gouvernement intérieur de ces différents États. Des partages: de la dispersion des nations conquérantes dans l'intérieur des pays conquis, et de la forme du gouvernement qui en est résulté.

Idée de l'aristocratie. Considérations générales sur le mélange des nations: barbares avec barbares. Barbares avec policés. Effets de la rencontre de ces différentes nations, Romains, Gaulois, Francs. Leur mélange.

[ocr errors]

Nouveau point de vue sur la religion chrétienne qui, cessant d'être incorporée à un seul empire, devient un lien commun entre plusieurs États, et rend le siége Rome un point de ralliement entre les nations. Autorité des évêques plus grande, et pourquoi plus grande dans l'Église et dans l'État. Comment les évêques ont part au gouvernement et deviennent seigneurs, parce que le gouvernement devenant aristocratique, les évêques durent y rentrer, attendu qu'ils tenaient un rang considérable dans la nation. Examiner comment un gouvernement fondé par la voie des conquêtes est devenu aristocratique en Europe et non pas despotique.

Du gouvernement des Germains. Différence de leurs conquêtes avec celles des Tartares dans la haute Asie. Cette différence vient : 1o des mœurs mêmes des Germains et de la liberté qu'ils conservaient. Différence entre une nation guerrière et une armée de soldats. 2o De l'état des pays conquis déjà gouvernés par des lois supérieures à tout ce que les barbares pouvaient imaginer de plus beau. 3o Du partage des terres fait par les conquérants, qui augmenta la puissance des particuliers à proportion de celle de leurs chefs, et ne laissa à ceux-ci d'autre force que celle des vassaux, sans leur laisser le pouvoir de les opprimer. 4° De l'influence que prit la religion parmi ces nations.

État du commerce à cette époque; décadence des villes et du commerce intérieur, faiblesse de la marine. Route de la circulation générale sur le globe.

Réflexions sur la nation juive et sur le rôle qu'elle commençait à jouer dans le commerce d'Alexandrie, de Constantinople, et du reste de l'Europe. Misère de l'Italie.

Réflexions sur les deux principales puissances du monde, les Francs et l'empire grec. Guerres d'Italie et d'Afrique.

Comparaison des deux puissances; leurs avantages et leurs désavantages jugés par les principes de la géographie politique, et par les défauts de leur gouvernement intérieur.

De la Perse, des Arabes, des peuples du nord relativement à l'empire grec. Naissance de Mahomet. Réflexion sur la situation des Arabes; sur leur liberté qu'ils avaient conservée; sur la sécurité que leur désunion et leur pauvreté avaient toujours inspirée aux Romains; sur les avantages de leur situation pour faire des conquêtes 1. . .

Ce n'est pas une chose neuve de dire que les Pays-Bas et l'Italie ont ruiné l'Espagne.

Examiner si les princes espagnols n'ont pas pensé plusieurs fois à démembrer les Pays-Bas de leur monarchie; mais celui qui aurait proposé à Philippe II de les céder à quelque prince, eût été regardé comme un fou, et je ne sais de quel œil la reine de Hongrie regarderait aujourd'hui un homme qui lui ferait la même proposition. Il est du moins bien sûr que les Anglais, en faisant la guerre de 1700, ne croyaient pas rendre à la France et à l'Espagne le service le plus signalé, 1o en fomentant leur union; 2o en ôtant à la France un ennemi puissant; 5o en forçant l'Espagne à s'occuper de son véritable intérêt, la marine.

La maxime qu'il faut retrancher des provinces aux États, comme des

Il y a ici une lacune dans le manuscrit de M. Turgot, et nous ignorons combien de pages sont perdues. (Note de Dupont de Nemours.)

branches aux arbres, pour les fortifier, sera encore longtemps dans les livres avant d'être dans les conseils des princes. C'est un des grands objets de la géographie politique, de déterminer quelle province il est avantageux à un État de conserver; c'est à elle à démontrer qu'il y a des cas où l'on doit se croire heureux d'en perdre. Il est bien constant que l'ordre établi entre les puissances par la géographie politique, c'est-à-dire par les bornes que la nature a mises entre les États, aurait subsisté, et qu'un prince n'aurait jamais possédé que ce qu'il aurait été à portée de conserver, si la force, qui est le seul moyen de conserver, eût été le seul moyen d'acquérir. Mais le droit, héréditaire des princes, joint à l'extrême division des États introduite par le gouvernement féodal, a changé cet ordre naturel, et a mêlé les États des princes comme les terres des particuliers, parce que le sort des nations a été réglé par les mêmes lois que la distribution des héritages. L'unité du gouvernement n'est plus dans un corps de nation : le souverain est le seul point de réunion.

Dans le langage de l'Europe politique on doit distinguer une puissance d'un État. Le roi de Prusse est une puissance, le roi de France a un Etat. Charles-Quint n'avait qu'une puissance, et l'Espagne a été dans le même cas jusqu'à Philippe V; elle est devenue un État depuis cette époque; elle y a gagné une unité d'intérêt qui dirigera nécessairement ses forces, jusquelà partagées, aux seuls objets qui lui peuvent être utiles. Une puissance, en un mot, redevient un État, lorsqu'elle se réduit aux bornes que la nature lui a assignées. La géographie politique a tracé les limites des États, le droit public forme les puissances; mais à la longue la géographie politique l'emporte sur le droit public, parce qu'en tout genre la nature l'emporte à la longue sur les lois. On ne conserve longtemps que ce qu'on est à portée d'acquérir, parce qu'on doit toujours perdre à la longue ce qu'on ne peut recouvrer aisément quand on l'a perdu de nouveau.

Nous sommes bien loin de penser à examiner les idées que je vais proposer, et peut-être appartiennent-elles plus à la politique prise en général qu'à la géographie politique. Jusqu'ici les hommes ont joui de la fécondité de la terre, comme les sauvages jouissent des fruits des arbres qu'ils n'ont point plantés. Ils en ont profité sans songer à les faire naître. Je m'explique: je ne veux pas dire assurément que le produit annuel de cette fécondité ne soit pas dû à leurs travaux; sans doute la terre arrosée de leurs sueurs a plutôt vendu ses productions à leur industrie, qu'elle ne les a données à leurs besoins; mais ce travail et cette industrie se sont toujours bornés, si je l'ose ainsi dire, à cultiver la terre fertile. On a labouré, ensemencé, dépouillé quelques campagnes, on n'a point encore songé, du moins en grand, à travailler la terre même, et à tirer de notre globe le meilleur parti possible. La multitude des terrains qui sont encore incultes, malgré leur fécondité, nous a dispensés de chercher à découvrir de nouvelles ressources, quand celles qui sont connues sont si loin d'être épuisées; et en cela nous ressemblons encore aux sauvages, qui ne songent point à labourer la terre, parce que les fruits qu'elle produit sans culture, et les animaux qu'elle nourrit, suffisent aux besoins de leur petit nombre. Pourquoi désespérerions-nous de donner à de vastes terrains une fécondité qu'ils n'ont pas reçue de la nature? Celle-ci a-t-elle tout fait pour les hommes? Non. Mais elle leur a toujours offert des modèles à suivre, lorsqu'ils ont assez d'industrie et de courage pour imiter ses opérations. Voyons comment elle agit pour rendre les terrains

fertiles, et examinons si les mêmes moyens peuvent être mis en usage par l'industrie humaine.

Deux choses contribuent à la fertilité de la terre, la nature du sol et les arrosements. La nature du sol dépend de la combinaison des différents principes qui composent les terrains, sable, argile, craie, etc.; principes dont le juste mélange peut seul féconder le développement des germes, et qui, séparés des autres principes, rendent souvent de vastes régions stériles et inhabitables.

Les arrosements dépendent de la situation du sol, de la disposition des montagnes, de la pente irrésistible qui, depuis leur sommet jusqu'aux rivières et à la mer, dirige le cours des eaux que l'atmosphère, dans laquelle le soleil les tient suspendues, décharge de temps en temps sur la terre, où elles se distribuent suivant cette inclinaison variée des terrains qui les reçoivent. Cette pente doit être assez douce pour qu'une partie des eaux puisse s'insinuer dans les interstices des terrains supérieurs, en amollir les glèbes, en délayer les sucs et y charroyer ceux dont elle s'est chargée dans l'atmosphère; assez rapide en même temps pour qu'il parvienne assez d'eau pour abreuver à leur tour les terres inférieures; et cependant assez inégale pour que l'eau trouve à chaque pas des enfoncements où, comme dans des réservoirs, elle se rassemble en plus grande quantité sous une plus petite surface; afin que, d'autant moins exposée aux effets d'une évaporation trop prompte, elle se rende par mille détours dans d'autres réservoirs où, recueillie et conservée pour les besoins des animaux et des végétaux, elle forme des fontaines, des ruisseaux, et enfin des fleuves qui la reconduisent à la mer.

Par cette distribution, dont l'immense variété ne présente à nos sens que l'image du désordre, parce que l'ordre réel n'est jamais que dans l'ensemble, et qu'ici l'ensemble est trop vaste pour nos sens, la terre est rendue habitable et fertile. Je ne crois pas impossible aux hommes d'employer tantôt l'une, tantôt l'autre de ces deux voies, et toutes les deux même au besoin, pour donner à certains terrains une fertilité qu'ils n'ont pas et suppléer ainsi à la nature, ou plutôt la remplacer de la seule façon possible en l'imitant. Voyons d'abord ce qu'on peut faire pour corriger la nature du sol '.........

PLAN DE DEUX DISCOURS

SUR L'HISTOIRE UNIVERSELLE'.

Idée de l'introduction. Placé par son créateur au milieu de l'éternité et de l'immensité, et n'en occupant qu'un point, l'homme a des relations nécessaires avec une multitude de choses et d'êtres, en même temps que ses idées sont concentrées dans l'indivisibilité de son esprit et de l'instant pré

1 Il y a lieu de croire que ce plan d'ouvrage n'a jamais été terminé. Les lecteurs qui auront été frappés de l'immense chaine d'idées que ce cadre rassemble, de la multitude de connaissances qu'il suppose, des grandes vues qu'il présente, partageront à cet égard nos regrets. (Note de Dupont de Nemours.)

2 M. Turgot rendait à Bossuet l'hommage que méritent la hauteur de ses pensées et le nerf de son expression. Il admirait la marche noble et rapide, l'abondance, l'éléva

« PreviousContinue »