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néanmoins des terres des seigneurs ecclésiastiques ou séculiers, dans lesquelles ledit droit de banvin serait établi, et dans le temps ou la saison seulement qui sont fixés pour l'exercice dudit droit; le tout, en acquittant par lesdits propriétaires et autres, à l'entrée, sortie, transport et vente en gros ou en détail, tous les droits qui nous sont dus, à quelque titre que ce soit, les droits d'octrois par nous accordés à quelques provinces, villes, communautés, et les autres droits généralement quelconques, établis par titres valables.

VI. Faisons défense à tous maires, lieutenants de maire, échevins, jurats, consuls et autres officiers municipaux, même aux officiers composant le bureau des vins établi à Marseille et autres administrations semblables qui sont et demeureront supprimées par le présent édit, de porter aucun obstacle à la liberté de ladite circulation ou desdits emmagasinements, achats et ventes; de requérir aucune confiscation, amende ou autres condamnations pour raison de contravention aux édits, déclarations, arrêts ou règlements auxquels il est dérogé par l'article Ier du présent édit, ainsi que pour raison de contravention au droit de banvin qu'ils prétendraient appartenir auxdites villes; et ce, en quelque temps et sous quelque prétexte que ce puisse être ; à peine de demeurer personnellement responsables de tous frais, dépens, dommages et intérêts qui seront adjugés aux parties, pour lesquels ils n'auront aucun recours contre lesdites villes et communautés. Si donnons en mandement, etc. '.

EXTRAIT DE L'Arrêt du Conseil D'ÉTAT, du 21 avril 1776, qui confirme les différents règlements rendus sur la fabrication des cartes à jouer, et qui fixe les villes dans lesquelles la fabrication en est permise.

Cet arrêt, considérant que l'édit qui supprime les jurandes et établit la liberté générale du travail n'a point dérogé aux nombreux édits et déclarations qui ont établi les droits sur les cartes à jouer et en ont doté l'école militaire, confirme en tant que besoin serait ces édits et déclarations qu'il rappelle. Et en conséquence, fait défense de lever et établir des fabriques de cartes à jouer dans d'autres villes que celles comprises dans l'état annexé. Permet à toutes personnes d'en lever et établir dans lesdites villes, à la charge par ceux qui voudront fabriquer des cartes à jouer de se présenter au bureau de la régie des cartes établie dans la ville où ils voudront fabriquer, à l'effet d'y faire inscrire leurs nom, qualité, demeure et ateliers, à peine pour les contrevenants de 1,000 livres d'amende et de confiscation des outils et ustensiles.

1 Cet édit fut enregistré sans difficulté aux Parlements de Toulouse et de Dauphiné, et au Conseil souverain de Roussillon.

Il ne l'était pas encore aux Parlements de Bordeaux et de Provence quand M. Turgot fut disgracié.

Et quoique le roi y attachàt une grande et juste importance, il ne le fut à celui de Bordeaux que par une sorte de transaction, avec quelques restrictions et modifications. (Note de Dupont de Nemours.)

RAPPORT Sur la réclamation faite par la Chambre du commerce de Lille, contre les droits perçus à Lyon sur deux balles de soie expédiées de Marseille pour Lille.

Sire, les droits perçus à Lyon sur deux balles de soie étrangère, expédiées de Marseille au sieur Cuvelier, fabricant de Lille, par acquit-à-caution de transit, ont donné lieu à la contestation que je vais mettre sous les yeux de Votre Majesté. Il s'agit de décider si cette perception est régulière et juste ainsi c'est une question générale, plus intéressante encore pour la ville de Lyon et pour le commerce de la Flandre, que pour le négociant qui a payé des droits sur deux balles de soie.

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C'est la Chambre du commerce de Lille qui réclame, en faveur du commerce de la Flandre, l'exemption des droits de Lyon sur les soies. C'est le corps municipal de la ville de Lyon qui s'oppose à cette exemption. — La réclamation de la Chambre du commerce de Lille est fondée sur un arrêt du Conseil, rendu le 5 juin 1688, par lequel il est ordonné que les habitants des pays conquis par le roi dans les Pays-Bas jouiront de la liberté du transit pour les ouvrages de leurs manufactures et matières servant à leur fabrication, entrant et sortant du royaume sans payer aucuns droits d'entrée ni de sortie, péages, octrois ou autres, sous la condition de passer dans lesdits pays conquis par le bureau de Péronne, et d'être d'ailleurs soumis aux formalités ordinaires des visites, plombs, acquits-à-caution et autres.

Les titres de la ville de Lyon sont un édit du mois de janvier 1722, et un autre édit du mois de juin 1758, qui assujettissent toutes les soies, même celles d'Avignon et du Comtat, à passer par la ville de Lyon, et à y payer au profit de la ville un droit de 3 sous 6 deniers par livre pesant. Le corps municipal oppose à la réclamation de la Chambre du commerce de Lille, que les édits qui établissent la jouissance de la ville de Lyon ne renferment aucune exception en faveur de la Flandre et des pays conquis, et qu'étant postérieurs à l'arrêt de 1688, celui-ci ne peut être appliqué aux droits de la ville de Lyon.

La question consiste donc à savoir si la liberté du transit, accordée à la Flandre par l'arrêt de 1688, est applicable aux droits sur les soies établis en faveur de la ville de Lyon, comme aux autres droits de traite qui ont lieu dans les États de Votre Majesté. Réduite à des termes aussi simples, la question est si facile à décider, qu'elle

ne mériterait peut-être pas d'occuper vos moments. Aussi c'est moins à raison de son importance que je me suis déterminé à vous la présenter, que pour avoir une occasion de fixer les yeux de Votre Majesté sur les droits qui y donnent lieu.

Votre Majesté sait que les droits connus sous le nom de droits de traite sont un impôt qui se perçoit sur les marchandises lorsqu'on les transporte, et soit à raison de leur valeur estimée en argent, soit à raison de leur qualité et quantité, suivant des tarifs fixés par différentes ordonnances ou règlements. Ces droits sont payés les uns aux entrées et sorties du royaume; les autres à l'entrée et à la sortie de certaines provinces; d'autres dans certaines villes, ou dans les lieux déterminés sur certaines routes.

Les avis sont partagés sur les avantages et les inconvénients des droits de traite en général, par rapport à la prospérité du commerce, et même par rapport à l'intérêt des souverains qui en tirent un revenu; car, quoique l'existence de ce revenu ne soit pas douteuse, il est très-possible que ce ne soit pas la manière la plus avantageuse de procurer au gouvernement ce même revenu. Si les droits de traite sont, par leur nature, contraires au commerce, s'ils tendent nécessairement à en diminuer l'activité, à le surcharger de frais infiniment plus onéreux que le montant même des droits; et, s'ils l'écartent des lieux qu'il aurait fécondés, s'ils appauvrissent les sujets, ils ne peuvent enrichir le souverain. Ils le privent bien plutôt de l'accroissement de revenu qu'il eût pu retirer, par des voies moins onéreuses, de ses sujets devenus plus riches.

C'est donc par rapport à l'avantage du commerce qu'on doit disputer et qu'on dispute sur l'utilité des droits de traite. Quelques personnes prétendent que c'est un moyen de soulager les peuples, en faisant payer une partie des impôts aux étrangers par les droits de sortie sur les marchandises qu'ils achètent de nous. D'autres veulent que ce soit quand les marchandises étrangères payent des droits à leur entrée en France que les étrangers payent une partie de nos impôts. D'autres croient qu'il est nécessaire de charger de droits les marchandises de fabrique étrangère pour favoriser les manufactures nationales, en affranchissant ou chargeant de droits modérés les matières premières qui doivent alimenter nos manufactures; que, par une suite du même principe, il faut charger de gros droits la sortie des matières premières du crù du royaume, et n'im

poser que des droits modérés sur les marchandises fabriquées dans le royaume.

Ces avantages attribués aux droits de traite sont révoqués en doute par bien des gens. Ceux-ci soutiennent que l'idée de faire payer nos impôts aux étrangers est une chimère; qu'ils achètent d'autant moins nos marchandises qu'elles sout plus chargées de droits, et que le prix qu'ils donnent ou veulent en donner, ne passant point en entier aux cultivateurs ou aux fabricants qui les vendent, est autant de retranché sur ce que ces cultivateurs ou ces fabricants retireraient de leurs denrées ou de leurs marchandises si leur débit était exempt de droits; de sorte que ce ne sont point les étrangers, mais uniquement les nationaux qui acquittent ces droits de sortie. Ils ajoutent qu'il en est de même pour les droits d'entrée; que, l'étranger ne livrant sa marchandise à aucune nation qu'au prix que lui en donnent les autres, le droit d'entrée reste nécessairement à la charge de la nation qui l'a établi; et qu'en croyant encourager les manufactures par des droits diversement combinés sur les marchandises fabriquées et les denrés du crù, on ne favorise les manufacturiers qu'aux dépens des cultivateurs qu'on prive d'une partie de la valeur des matières premières qu'ils font produire à la terre, et auxquels on fait payer plus cher les marchandises ouvrées dont ils ont besoin; qu'on favorise très-peu ces manufactures, parce qu'en mettant des entraves au commerce on nuit à leur débit; que, si les droits sur les marchandises sont peu considérables, ils produisent peu et ne compensent pas, à beaucoup près, le tort que font au commerce les formalités gênantes que nécessite leur perception; que, s'ils sont très-forts, la contrebande trouve moyen de les éluder, et ajoute à la surcharge de l'impôt tout le poids des désordres attachés à l'existence de la contrebande; la perte, pour l'État, des hommes qui la font et de ceux qui l'empêchent, et qui sont également enlevés aux métiers honnêtes et utiles; les combats, les crimes, la vie vagabonde que mènent les contrebandiers, et le malheur pour l'État d'avoir à punir un crime, excusable en lui-même, auquel ses lois seules ont donné l'existence. Les partisans de cette opinion disent encore que tous les prétendus avantages de ces combinaisons de droits en faveur du commerce national, contre le commerce étranger, sont illusoires; que tous leurs désavantages sont réciproques et accrus les uns par les autres; que les étrangers em

ploient les mêmes moyens contre notre commerce; que cette politique mercantile et jalouse nuit à tous les États, sans être utile à aucun; qu'elle fait du commerce, qui devrait être le lien des nations, une nouvelle source de divisions et de guerres; que l'intérêt de tous les peuples serait que le commerce fût partout libre et exempt de droits. Ils soutiennent que la première nation qui, donnant aux autres l'exemple de cette politique éclairée et humaine, affranchira ses productions, son industrie, son commerce, de toutes prohibitions et de tous droits, s'élèvera rapidement à la plus haute prospérité, et forcera bientôt les autres nations à l'imiter, au grand avantage de l'humanité entière.

Ce sont là, Sire, des questions dignes d'occuper Votre Majesté, puisque l'opinion qu'elle en prendra doit avoir la plus grande influence sur la prospérité de son royaume et le bonheur de ses peuples.

Quoi qu'il en soit, et quand on adopterait tous les principes par lesquels on prétend prouver l'utilité des droits imposés sur les marchandises transportées par le commerce, il est toujours évident qu'ils ne conduiraient qu'à établir des droits d'entrée et de sortie sur la frontière du royaume. Aucun motif, aucun prétexte ne peut conduire à faire payer des droits à une marchandise une fois entrée dans le royaume, et que le commerce fait passer d'une province à l'autre. Tout le monde convient que le commerce devrait à cet égard jouir d'une liberté entière. Mais il n'en est pas ainsi dans le fait. Quelque esprit qu'on ait mis à justifier les droits de traite par des vues politiques plus ou moins justes, il est très-certain que, dans l'origine, ils ont été partout établis comme moyens de finance. Ce moyen a été surtout mis en usage lorsque toute l'Europe était divisée en petites principautés dont les souverains mêmes n'avaient qu'une autorité médiate sur les peuples, qui n'obéissaient immédiatement qu'à leur seigneur. Tous les seigneurs puissants trouvaient plus facile de charger de droits les marchandises qui passaient par leur territoire, que de mettre sur leurs vassaux un impôt auquel ceux-ci auraient résisté beaucoup plus fortement. Les marchands qui payaient ces droits étaient regardés comme étrangers; ils étaient isolés, sans protection; et, dans l'ignorance générale qui régnait alors, le peuple s'imaginait gagner beaucoup en rejetant sur eux son fardeau. Les princes plus puissants, qui avaient dans leurs do

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