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d'en réunir plusieurs à l'effet de quoi nous avons éteint et supprimé, éteignons et supprimons tous les corps et communautés de marchands et artisans, ainsi que les maîtrises et jurandes. Abrogeons tous priviléges, statuts et règlements donnés auxdits corps et communautés, pour raison desquels nul de nos sujets ne pourra être troublé dans l'exercice de son commerce et de sa profession, pour quelque cause et sous quelque prétexte que ce puisse être.

II. Et néanmoins seront tenus, ceux qui voudront exercer lesdits profession ou commerce, d'en faire préalablement déclaration devant le lieutenant-général de police, laquelle sera inscrite sur un registre à ce destiné, et contiendra leurs nom, surnom et demeure, le genre de commerce ou de métier qu'ils se proposent d'entreprendre; et en cas de changement de demeure ou de profession, ou de cessation de commerce ou de travail, lesdits marchands ou artisans seront également tenus d'en faire leur déclaration sur ledit registre, le tout sans frais, à peine contre ceux qui exerceraient, sans avoir fait ladite déclaration, de saisie et confiscation des ouvrages et marchandises, et de 50 livres d'amende.

Exemptons néanmoins de cette obligation les maîtres actuels des corps et communautés, lesquels ne seront tenus de faire lesdites déclarations que dans les cas de changement de domicile, de profession, réunion de profession nouvelle, ou cessation de commerce et de travail.

Exemptons encore les personnes qui font actuellement ou voudront faire par la suite le commerce en gros, notre intention n'étant point de les assujettir à aucunes règles ni formalités auxquelles les commerçants en gros n'auraient point été sujets jusqu'à présent.

III. La déclaration et l'inscription sur le registre de la police, ordonnées par l'article ci-dessus, ne concernent que les marchands et artisans qui travaillent pour leur propre compte et vendent au public. A l'égard des simples ouvriers, qui ne répondent point directement au public, mais aux entrepreneurs d'ouvrages ou maîtres pour le compte desquels ils travaillent, lesdits entrepreneurs ou maîtres seront tenus, à toute réquisition, d'en représenter au lieutenant-général de police un état contenant le nom, le domicile et le genre d'industrie de chacun d'eux.

IV. N'entendons cependant comprendre, dans les dispositions portées par les articles I et II, les professions de la pharmacie, de l'orfévrerie, de l’imprimerie et librairie, à l'égard desquelles il ne sera rien innové jusqu'à ce que nous ayons statué sur leur régime, ainsi qu'il appartiendra.

V. Exemptons pareillement des dispositions desdits articles I et II du présent édit les communautés de maîtres barbiers-perruquiers-étuvistes dans les lieux où leurs professions sont en charge, jusqu'à ce qu'il en soit autrement par nous ordonné.

VI. Voulons que les maîtres actuels des communautés de bouchers, boulangers et autres, dont le commerce a pour objet la subsistance journalière de nos sujets, ne puissent quitter leur profession qu'un an après la déclaration, qu'ils seront tenus de faire devant le lieutenant-général de police, qu'ils entendent abandonner leurs profession et commerce, à peine de 500 livres d'amende, et de plus forte punition s'il y échoit.

VII. Les marchands et artisans qui sont assujettis à porter sur un registre le nom des personnes de qui ils achètent certaines marchandises, tels que les orfévres, les merciers, les fripiers et autres, seront obligés d'avoir et de

tenir fidèlement lesdits registres, et de les représenter aux officiers de police à la première réquisition.

VIII. Aucune des drogues dont l'usage peut être dangereux ne pourra être vendue, si ce n'est par les apothicaires ou par les marchands qui en auront obtenu la permission spéciale et par écrit du lieutenant-général de police, et de plus, à la charge d'inscrire sur un registre, paraphé par ledit lieutenantgénéral de police, les noms, qualités et demeure des personnes auxquelles ils en auraient vendu, et de n'en vendre qu'à des personnes connues et domiciliées, à peine de 1,000 livres d'amende, même d'être poursuivis extraordinairement, suivant l'exigence des cas.

IX. Ceux des arts et métiers dont les travaux peuvent occasionner des dangers ou des inconvénients notables, soit au public, soit aux particuliers, continueront d'être assujettis aux règlements de police, faits ou à faire, pour prévenir ces dangers et ces inconvénients.

X. Il sera formé dans les différents quartiers des villes de notre royaume, et notamment dans ceux de notre bonne ville de Paris, des arrondissements dans chacun desquels seront nommés, pour la première année seulement, et dès l'enregistrement ou lors de l'exécution de notre présent édit, un syndic et deux adjoints, par le lieutenant-général de police; et ensuite, lesdits syndics et adjoints seront annuellement élus par les marchands et artisans dudit arrondissement, et par la voie du scrutin, dans une assemblée tenue à cet effet en la maison et présence d'un commissaire nommé par ledit lieutenant-général de police; lequel commissaire en dressera procès-verbal, le tout sans frais; pour, après néanmoins que lesdits syndics et adjoints auront prêté serment devant ledit lieutenant-général de police, veiller sur les commerçants et artisans de leur arrondissement, sans distinction d'état ou de profession, en rendre compte au lieutenant-général de police, recevoir et transmettre ses ordres, sans que ceux qui seront nommés pour syndics et adjoints puissent refuser d'en exercer les fonctions, ni que pour raison d'icelles ils puissent exiger ou recevoir desdits marchands ou artisans aucune somme ni présent à titre d'honoraires ou de rétribution : ce que nous leur défendons expressément à peine de concussion.

XI. Les contestations qui naîtront à l'occasion des mal-façons et défectuosités des ouvrages seront portées devant le sieur lieutenant-général de police, à qui nous en attribuons la connaissance exclusivement, pour être, sur le rapport des experts par lui commis à cet effet, statué sommairement, sans frais, en dernier ressort, si ce n'est que la demande en indemnité excédât la valeur de 100 livres; auquel cas lesdites contestations seront jugées en la forme ordinaire.

XII. Seront pareillement portées par-devant le sieur lieutenant-général de police, pour être par lui jugées sommairement, sans frais et en dernier ressort, jusqu'à la concurrence de 100 livres, les contestations qui pourraient s'élever sur l'exécution des engagements à temps, contrats d'apprentissage et autres conventions faites entre les maîtres et les ouvriers travaillant pour eux, relativement à ce travail; et, dans le cas où l'objet desdites contestations excéderait la valeur de 100 livres, elles seront jugées en la forme ordinaire.

XIII. Défendons expressément aux gardes-jurés ou officiers en charge des corps et communautés de faire désormais aucunes visites, inspections, saisies; d'intenter aucune action au nom desdites communautés; de convoquer au

cune assemblée ou d'y assister sous quelque motif que ce puisse être, même sous prétexte d'actes de confréries, dont nous abrogeons l'usage; et généralement de faire aucune fonction en ladite qualité de gardes-jurés, et notamment d'exiger ou de recevoir des membres de leurs communautés aucune somme, sous quelque prétexte que ce soit, à peine de concussion, l'exception néanmoins de celles qui pourront nous être dues pour les impositions des membres desdits corps et communautés, et dont le recouvrement, tant pour l'année courante que pour ce qui reste à recouvrer des précédentes années, sera par eux fait et suivi dans la forme ordinaire jusqu'à parfait payement.

XIV. Défendons pareillement à tous maîtres, compagnons, ouvriers et apprentis desdits corps et communautés, de former aucune association ni assemblée entre eux sous quelque prétexte que ce puisse être. En conséquence, nous avons éteint et supprimé, éteignons et supprimons toutes les confréries qui peuvent avoir été établies tant par les maîtres des corps et communautés, que par les compagnons et ouvriers des arts et métiers, quoique érigées par les statuts desdits corps et communautés ou par tout autre titre particulier, même par lettres-patentes de nous ou de nos prédécesseurs.

XV. A l'égard des chapelles érigées à l'occasion desdites confréries, dotations d'icelles, biens affectés à des fondations; voulons que, par les évêques diocésains, il soit pourvu à leur emploi de la manière qu'ils jugeront la plus utile, ainsi qu'à l'acquittement des fondations; et seront, sur les décrets des évêques, expédiées des lettres-patentes adressées à notre cour de parlement.

XVI. L'édit du mois de novembre 1565, portant érection de la juridiction consulaire dans notre bonne ville de Paris, et la déclaration du 18 mars 1728, seront exécutés, pour l'élection des juges-consuls, en tout ce qui n'est pas contraire au présent édit. En conséquence, voulons que les juges-consuls en exercice de ladite ville soient tenus, trois jours avant la fin de leur année, d'appeler et assembler jusqu'au nombre de soixante marchands, bourgeois de ladite ville, sans qu'il puisse être appélé plus de cinq de chacun des trois corps non supprimés, des apothicaires, orfévres, imprimeurs-libraires, et plus de vingtcinq nommés parmi ceux qui exerceront les professions et commerce de draperie, épicerie, mercerie, pelleterie, bonneterie et marchands de vin, soit qu'ils exercent lesdites professions seulement, ou qu'ils y réunissent d'autres professions de commerce ou d'arts et métiers, entre lesquels seront préférablement admis les gardes, syndics et adjoints desdits trois corps non supprimés, ainsi que ceux qui exerceront ou auront exercé les fonctions des syndics ou adjoints des commerçants ou artisans dans les différents arrondissements de ladite ville; et à l'égard de ceux qui seront nécessaires pour achever de remplir le nombre de soixante, seront appelés aussi par lesdits juges et consuls, des marchands et négociants ou autres notables bourgeois versés au fait du commerce jusqu'au nombre de vingt; lesquels soixante, ensemble les cinq juges-consuls en exercice, et non autres, en éliront trente-deux pour procéder, dans la forme et suivant les dispositions portées par ledit édit et ladite déclaration, à l'élection de nouveaux juges et consuls; lesquels continueront de prêter serment en la grand'chambre de notre parlement en la manière accoutumée.

XVII. Tous procès actuellement existants, dans quelque tribunal que ce soit, entre lesdits corps et communautés, à raison de leurs droits et privi

léges ou à quelque autre titre que ce puisse être, demeureront éteints en vertu du présent édit.

Défendons à tous gardes-jurés fondés de procuration, et autres agents quelconques desdits corps et communautés, de faire aucunes poursuites pour raison desdits procès, à peine de nullité et de répondre en leur propre et privé nom des dépens qui auraient été faits. Et à l'égard des procès résultant de saisies d'effets et marchandises, ou qui y auraient donné lieu, voulons qu'ils demeurent également éteints, et que lesdits effets et marchandises soient rendus à ceux sur lesquels ils auraient été saisis, en vertu de la simple décharge qu'ils en donneront aux personnes qui s'en trouveront chargées ou dépositaires; sauf à pourvoir au payement des frais faits jusqu'à ce jour sur la liquidation qui en sera faite par le lieutenant-général de police, que nous commettons à cet effet, ainsi que pour procéder à celles des restitutions, dommages, intérêts et frais qui pourraient être dus à des particuliers, lesquels seront pris, s'il y a lieu, sur les fonds appartenant auxdites communautés; sinon, il y sera par nous autrement pourvu.

XVIII. A l'égard des procès desdits corps et communautés qui concerneraient des propriétés foncières, des locations, des payements d'arrérages de rentes et autres objets de pareille nature, nous nous réservons de pourvoir aux moyens de les faire promptement instruire et juger par les tribunaux qui en sont saisis.

XIX. Voulons que, dans le délai de trois mois, tous gardes, syndics et jurés, tant ceux qui se trouvent actuellement en charge que ceux qui sont sortis d'exercice et qui n'ont pas encore rendu les comptes de leur administration, soient tenus de les présenter, savoir dans notre ville de Paris, au lieutenant-général de police, et dans les provinces, aux commissaires qui seront par nous députés à cet effet, pour être arrêtés ou révisés dans la forme ordinaire, et contraints d'en payer le reliquat à qui sera par nous ordonné, pour les deniers qui en proviendront être employés à l'acquittement des dettes desdites communautés.

XX. A l'effet de pourvoir au payement des dettes des communautés de la ville de Paris et à la sûrete des droits de leurs créanciers, il sera remis sans délai entre les mains du lieutenant-général de police des états desdites dettes, des remboursements faits, de ceux qui restent à faire et des moyens de les effectuer, même des immeubles réels ou fictifs, effets ou dettes mobilières, qui se trouveraient leur appartenir. Tous ceux qui se prétendront créanciers desdites communautés seront pareillement tenus, dans l'espace de trois mois, du jour de la publication du présent édit, de remettre au lieutenant-général de police les titres de leurs créances, ou copies dùment collationnées d'iceux, pour être procédé à leur liquidation et pourvu au remboursement, ainsi qu'il appartiendra.

XXI. Le produit des droits imposés par les rois nos prédécesseurs sur différentes matières et marchandises, et dont la perception et régie ont été accordées à aucuns des corps et communautés de la ville de Paris, ainsi que les gages qui leur sont attribués à cause du rachat des offices créés en divers temps, lesquels sont compris dans l'état des charges de nos finances, continueront d'être affectés, exclusivement à toute autre destination, au payement des arrérages et au remboursement des capitaux des emprunts faits sur lesdites communautés. Voulons que la somme excédant, dans ces produits, celle qui sera nécessaire pour l'acquittement des arrérages, ainsi que

toute l'épargne résultant soit de la diminution des frais de perception, soit de la suppression des dépenses de communauté qui se prenaient sur ces produits, soit de la diminution des intérêts par les remboursements successifs, soit employée en accroissement de fonds d'amortissement jusqu'à l'entière extinction des capitaux desdits emprunts; et à cet effet il sera par nous établi une caisse particulière, sous l'inspection du lieutenant-général de police, dans laquelle seront annuellement versés tant le montant desdits gages, que le produit desdites régies, pour être employés au payement des arrérages et remboursement des capitaux.

XXII. Il sera procédé par-devant le lieutenant-général de police, dans la forme ordinaire, à la vente des immeubles réels ou fictifs, ainsi que des meubles appartenant auxdits corps et communautés, pour en être le prix employé à l'acquittement de leurs dettes, ainsi qu'il a été ordonné par l'article XX ci-dessus. Et dans le cas où le produit de ladite vente excéderait, pour quelque corps ou communauté, le montant de ses dettes tant envers nous qu'envers des particuliers, ledit excédant sera partagé par portions égales entre les maîtres actuels dudit corps ou communauté.

XXIII. Et à l'égard des deftes des corps et communautés établis dans nos villes de province, ordonnons que, dans ledit délai de trois mois, ceux qui se prétendront créanciers desdits corps et communautés seront tenus de remettre és mains du contrôleur-général de nos finances les titres de leurs créances ou expéditions collationnées d'iceux, pour, sur le vu desdits titres, être fixé le montant desdites dettes et par nous pourvu à leur remboursement; et jusqu'à ce que nous ayons pris les mesures nécessaires à cet égard, suspendons dans lesdites villes de province la suppression ordonnée par le présent édit.

XXIV. Avons dérogé et dérogeons, par le présent édit, à tous édits, déclarations, lettres-patentes, arrêts, statuts et règlements contraires à icelui. Si donnons en mandement, etc., etc.

ÉDIT DU ROI, portant suppression de la Caisse de Poissy, conversion et modération des droits. (Donué à Versailles au mois de février 1776, registré en Parlement le 9 février 1776.)

Louis, etc. Il n'est arrivé que trop souvent, dans les besoins de l'Etat, qu'on ait cherché à décorer les impôts, dont ces besoins nécessitaient l'établissement, par quelque prétexte d'utilité publique. Cette forme, à laquelle les rois nos prédécesseurs se sont quelquefois crus obligés de descendre, a rendu plus onéreux les impôts dont elle avait accompagné la naissance. Il en est résulté que ces impôts, ainsi colorés, ont subsisté longtemps après la cessation du besoin qui en avait été la véritable cause, en raison de l'objet apparent d'utilité par lequel on avait cherché à les déguiser, ou qu'ils se sont renouvelés sous le même prétexte que favorisaient divers intérêts particuliers. C'est ainsi qu'au mois de janvier 1690, pour soutenir la guerre commencée l'année précédente, il fut créé soixante offices de jurés

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