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Tous ceux qui dorénavant quitteront leurs paroisses sans être munis d'une attestation de bonnes vie et mœurs, signée de leur curé et du syndic de leur communauté, seront poursuivis et jugés prévôtalement comme vagabonds, suivant la rigueur des ordonnances.

Donnée à Versailles, le 11 mai 1775. Signé Louis. Et plus bas, Phélypeaux.

ARRÊT DU CONSEIL D'ÉTAT, du 2 juin 1775, portant suspension du droit d'octroi sur les grains, tant nationaux qu'étrangers, entrant par eau ou par terre dans la ville et banlieue de Bordeaux.

Le roi, occupé des moyens de pourvoir au bonheur de ses peuples par la facilité des subsistances, a reconnu qu'il est surtout essentiel d'affranchir le commerce des grains des entraves qui en arrêtent la libre circulation, et des droits de différentes natures qui en augmentent les prix.

Sa Majesté est informée que sa ville de Bordeaux jouit d'un octroi qui se perçoit à raison de 7 sous 6 deniers par boisseau de blé, de 6 sous par boisseau de méteil, et de 4 sous 6 deniers par boisseau de seigle; que quoique, dans l'ordre commun, le droit d'octroi d'une ville ne doive s'étendre que sur les denrées qui se consomment dans son intérieur, l'octroi de Bordeaux sur les grains a reçu, en différents temps, une extension nuisible à la liberté du commerce; qu'à la vérité il ne se percevait pas directement sur les grains qui passent à Bordeaux, soit en venant du pays étranger, soit en descendant des provinces de l'intérieur du royaume pour être transportés ailleurs; mais qu'à ce passage ils étaient soumis à un entrepôt fixé, par l'arrêt du conseil du 27 novembre 1757, à un bref délai de huit jours, à l'expiration duquel le fermier de l'octroi exigeait rigoureusement le droit, sans égard aux retardements forcés que peut éprouver le commerce, soit par les vents contraires, soit par la nécessité de soigner les grains qui ont reçu quelques avaries; que, pour éviter le payement de ce droit, les négociants ont été forcés d'établir leurs entrepôts hors de l'arrondissement marqué par le fermier de la ville, d'où il résultait que les opérations de leur commerce, s'exécutant loin d'eux, elles étaient moins bien faites et plus dispendieuses; que, malgré les réclamations du commerce, les lettrespatentes du 27 août 1767 ont maintenu la ville de Bordeaux dans la perception de ce droit; mais seulement par provision et jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné, voulant qu'à cet effet il fût fait distinction du produit dudit octroi dans le bail des revenus de la ville;

qu'enfin les lettres-patentes du 14 juillet 1771 ont restreint la perception dudit droit aux seuls grains déclarés pour la consommation de la ville; qu'elles ont même accordé l'entrepôt indéfini aux grains et farines qui passent à Bordeaux ou dans la banlieue pour être transportés ailleurs; mais que par ces dispositions les subsistances de la ville demeurent grevées du droit, et que les déclarations, les formalités compliquées, les enregistrements auxquels ces denrées sont assujetties, les visites que le fermier est autorisé à faire dans les magasins, les saisies auxquelles les négociants peuvent être exposés en jouissant de l'entrepôt, tendent à éloigner de la ville et de la banlieue de Bordeaux l'abondance qui devrait régner dans son port, et se répandre de là dans toutes les provinces ouvertes à son

commerce;

A quoi étant nécessaire de pourvoir: ouï le rapport du sieur Turgot, etc.; le roi étant en son Conseil, a ordonné et ordonne :

Qu'à compter du jour de la publication du présent arrêt, et jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné, la perception du droit d'octroi sur les grains, soit nationaux ou étrangers, entrant, soit par eau ou par terre, dans la ville et banlieue de Bordeaux, sera et demeurera suspendue, soit que lesdits grains soient destinés pour la consommation de ladite ville ou pour être transportés ailleurs. Fait défenses au fermier de la ville et à toutes personnes d'exiger ledit droit, même de le recevoir, quoiqu'il fût volontairement offert, et ce, sous telle peine qu'il appartiendra; se réservant Sa Majesté, après que les titres originaires de l'établissement et de la quotité dudit octroi auront été représentés et vérifiés en son Conseil, de pourvoir à l'indemnité qui pourra être due à ladite ville, ainsi qu'il appartiendra,

ARRÊT DU CONSEIL D'ÉTAT, du 3 juin 1775, qui suspend la perception des droits d'octroi des villes sur les grains, farines et pain; et qui défend aux exécuteurs de la haute justice d'exiger aucunes rétributions, soit en nature, soit en argent, sur les grains et farines, dans tous les lieux où elles ont été en usage jusqu'à présent.

Le roi ayant, par arrêt de son Conseil du 22 avril dernier, suspendu la perception de tous droits sur les grains et farines, tant à l'entrée des villes que sur les marchés, soit à titre d'octroi, ou sous la dénomination de minage, aunage, hallage et autres quelconques, dans les villes de Dijon, Beaune, Saint-Jean-de-Lône et Montbard, Sa Majesté a depuis étendu cette suspension à plusieurs droits de même nature, perçus au profit des villes dans les généralités de Besançon, de Lorraine, de Metz, de Flandre, de Picardie, de Hainaut, de Champagne, de Rouen, de Lyon, de Moulins, de La Rochelle et de Paris; les mêmes motifs qui l'ont déterminée à ordon

ner cette suspension dans ces différentes généralités, à mesure qu'on a réclamé contre les inconvénients qui résultaient de la perception de ces droits, la conduisent à rendre générale une exemption qui pourrait tourner au préjudice des villes dans lesquelles on laisserait subsister ces droits qui cesseraient d'être perçus ailleurs : Sa Majesté a pensé qu'en ordonnant cette supension elle ne faisait que remplir le vœu des officiers municipaux des villes, qui, regardant leurs revenus comme consacrés à l'avantage de leurs concitoyens, seront toujours empressés d'en faire le sacrifice, ou d'en demander le changement, lorsqu'ils croiront que la perception en pourrait être nuisible aux habitants desdites villes, et en écarter les denrées nécessaires à leur subsistance. Sa Majesté a vu avec satisfaction plusieurs villes demander elles-mêmes la suspension de ces droits, et elle a reconnu que l'abondance avait été rétablie dans la plupart de celles dans lesquelles ces droits ont cessé d'être perçus en vertu des différents arrêts de son Conseil; et, voulant répondre aux désirs que les officiers municipaux de ces villes ont de contribuer au soulagement de leurs concitoyens, de procurer dans leurs marchés l'abondance et une diminution du prix des grains, par la suspension de ces droits, dont la plupart sont assez considérables pour influer sensiblement sur ce prix, et qui peuvent donner lieu dans la perception à des abus qui augmentent encore la surcharge, elle se porte d'autant plus volontiers à suspendre ces droits, qu'elle a lieu de croire que, dans l'examen des charges et des revenus des villes, elle trouvera, par des économies et les retranchements des dépenses inutiles, les moyens de rendre cette suspension durable, sans avoir recours à des impositions d'un autre genre: et, lorsque la situation des finances des villes exigera un remplacement de revenus, Sa Majesté est persuadée qu'il sera facile d'y pourvoir par des moyens qui n'influeront pas aussi directement sur une denrée de première nécessité. Sa Majesté, en suspendant la perception des droits qui appartiennent aux villes, croit encore moins devoir laisser subsister ceux qui se lèvent au profit des exécuteurs de la haute justice, dont la perception pourrait exciter plus de troubles et rencontrer plus d'opposition dans les marchés; elle a pensé que c'était autrement qu'il fallait pourvoir à leurs salaires. Ouï le rapport du sieur Turgot, etc.; le roi étant en son Conseil, a ordonné et ordonne :

Que la perception faite par les villes, dans toute l'étendue de son royaume

et à leur profit, de droits sur les grains, les farines et le pain, soit à l'entrée, soit sur les marchés ou ailleurs, à titre d'octroi et sous quelque dénomination que ce soit, sera et demeurera suspendue à compter du jour de la publication du présent arrêt, et jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné. Fait défenses à toutes personnes de les recevoir, quoiqu'ils fussent volontairement offerts; à la charge néanmoins de l'indemnité qui pourra être due aux fermiers desdits droits pour le temps qu'ils auront cessé d'en jouir. Fait très-expresses inhibitions et défenses aux régisseurs ou fermiers desdits droits d'exiger de ceux qui introduiront des grains et des farines dans les villes, ou qui les apporteront dans les marchés, et de ceux qui feront la vente du pain, aucune déclaration, ni de les assujettir à aucune formalité, sous quelque prétexte que ce puisse être. N'entend néanmoins Sa Majesté rien changer, quant à présent, à ce qui concerne les villes de Paris et de Marseille, qu'elle a exceptées des dispositions du présent arrêt. Fait en outre Sa Majesté très-expresses défenses aux exécuteurs de la haute justice d'exiger aucunes rétributions, soit en nature, soit en argent, des laboureurs et autres qui apporteront des grains et des farines dans les villes et sur les marchés des lieux où elles ont été jusqu'à présent en usage, sauf à eux à se pourvoir, pour faire statuer au payement de leurs salaires, de la manière qui sera jugée convenable. Enjoint Sa Majesté aux sieurs intendants et commissaires départis dans les provinces, et à tous autres chargés de l'exécution de ses ordres, de tenir la main à l'exécution du présent arrêt, qui sera imprimé, lu, publié et affiché partout où besoin sera.

ÉDIT DU ROI, portant suppression d'offices de marchands privilégiés, et porteurs de grains, et abolition du droit de banalité en la ville de Rouen. (Donné à Reims, au mois de juin 1775; registré au Parlement de Rouen, le 23 des mêmes mois et an.) LOUIS, etc. Occupé dans tous les temps du soin d'assurer et de faciliter la subsistance de nos sujets, nous nous proposons de porter singulièrement notre attention sur les obstacles de tous genres qui peuvent éloigner le commerce des grains des villes où leur abondance est le plus nécessaire, ou les faire monter au-dessus de leur prix juste et naturel, par des frais accessoires. Nous sommes informé que, dans notre ville de Rouen, ce commerce important est uniquement et exclusivement permis à une compagnie de marchands privilégiés, créés en titre d'office, au nombre de cent douze, par les édits de décembre 1692 et juillet 1693; que les titres de leur création leur attribuent, non-seulement le droit de vendre seuls des grains à la halle de ladite ville, dans leurs maisons et boutiques, et d'en tenir magasin chez eux, mais encore celui de pouvoir seuls acheter les grains qui y seraient transportés d'ailleurs par des laboureurs ou des marchands étrangers; qu'ils ont même celui d'acheter seuls, exclusivement et sans concurrence, les grains dans quatre des principaux marchés de la province, aux lieux d'Andely,

Elbœuf, Duclair et Caudebec; en sorte que, tant à l'achat qu'à la vente, le commerce des subsistances de notre ville de Rouen est privé de toute liberté, et concentré dans une société unique, ce qui constitue essentiellement le monopole; qu'à la vérité l'exercice de ce privilége exorbitant et abusif a été modéré, à quelques égards, par les dispositions de la déclaration du 28 mai 1763; mais que ce qui en subsiste encore est très-nuisible au commerce, notamment par le droit de visiter tous les grains apportés dans ladite ville, de s'ériger en juges de leur bonne ou mauvaise qualité, et d'inquiéter les négociants; en sorte que les fonctions de ces marchands privilégiés ne peuvent avoir d'autre effet que de les rendre seuls arbitres du prix des grains, et d'éloigner l'abondance, tant des quatre marchés soumis à leur privilége, que de notre ville de Rouen même. Nous sommes encore informé que, dans cette même ville, les acheteurs de grains ne sont libres ni de choisir les porteurs qu'ils veulent employer, ni de convenir de gré à gré du prix de leurs salaires ;

que

le droit de faire ces transports, au moyen d'un prix déterminé et taxé est réclamé par quatre-vingt-dix porteurs, chargeurs et déchargeurs de grains, dont les offices, très-anciennement créés, abolis ensuite, ont été rétablis et confirmés par arrêt du Conseil et lettres-patentes du 28 septembre 1675, et par autres lettres d'août 1677, registrées en notre Parlement de Normandie le 5 mars 1678; l'établissement de pareils offices est aussi inutile en lui-même, que contraire à la liberté publique. Enfin, nous sommes pareillement instruit que le droit de banalité, attaché aux cinq moulins qui appartiennent à notredite ville de Rouen, est également nuisible, soit à la facilité de l'approvisionnement, soit au prix modéré du pain, puisque ce droit emporte la défense aux boulangers de la ville d'acheter ou d'employer d'autres farines que celles qui proviennent desdits moulins ; et que même, cesdits moulins ne pouvant suffire à la consommation, l'on ne se relâche de cette défense qu'en obligeant les boulangers de payer au fermier de la banalité le droit de mouture sur les farines qu'ils sont obligés de faire fabriquer ailleurs; que ce droit de banalité, qu'on annonce comme fixé seulement au treizième, augmente le prix du pain dans une proportion beaucoup plus forte; qu'en effet, les boulanger's des faubourgs, qui ne sont point sujets à la banalité, sont obligés, par ces règlements, de fournir le pain dans les marchés de la ville de

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