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.. 377. Les courtiers interprètes conducteurs de navires sont astreints à un cautionnement sans lequel ils ne peuvent exercer, et dont la quotité est réglée par le gouvernement, qui indique aussi les places où il convient d'établir des agents de change et courtiers, et leur nombre (art. 4 et 11) (1). Ce cautionnement est spécialement affecté à la garantie des condamnations qui pourront être prononcées contre eux par suite de l'exercice de leurs fonctions (art. 12 arr. de l'an ix, et 1er loi 21 nivôse an XIII). Les faits de charge sont tous ceux où ils ont agi comme courtiers, quand même ils auraient fait des faux, s'ils se sont prévalus de leur qualité pour inspirer confiance. Toute obligation contraire à leurs devoirs, et qu'ils auraient prise à l'occasion de leurs fonctions, ne serait pas cependant fait de charge. Il faut éclaircir cela par un exemple. Un agent de change de la Rochelle avait négocié des billets faux qu'il avait fabriqués. Les porteurs concoururent sur le cautionnement. Le même agent avait garanti par son aval des billets vrais mais peu sûrs; les porteurs ne prirent point part au cautionnement, parce qu'en recevant la garantie personnelle de l'agent de change, ils savaient qu'il agissait contre les devoirs de sa charge et commettait un délit.

378. Le privilége des créanciers pour faits de charge passe même avant celui qui est accordé au fisc pour le remboursement des amendes et frais prononcés contre le courtier. C'est principalement dans l'intérêt privé de ceux qui ont recours au ministère des courtiers, que le cautionnement a été créé ; leurs droits sont aequis avant ceux que l'État peut faire résulter d'une condamnation à l'amende, même lorsque cette condamnation est antérieure à celles obtenues par les créanciers. C'est ce qui a été jugé par la Cour de cassation appliquant la maxime (1. 17 et 37, Dig. de jure fisci ) Fiscalium pœnarum petitio creditoribus postponitur,

leurs provisions de l'amiral, et n'en pouvaient faire usage qu'après les avoir fait enregistrer au greffe de l'amirauté, avoir fait expérience de leur capacité et prêté serment devant le lieutenant du siége.

(1) V. Locré, Esprit du Code de commerce, t. 1., p. 364 et suiv.; il donne par ordre alphabétique le nom de toutes les villes qui ont des courtiers, leur nombre et leurs fonctions. De nombreuses ordonnances en ont établi depuis lors dans d'autres villes. Voyez les tables du Bulletin des lois.

et l'art. 2098 C. C., suivant arrêt du 7 mai 1816 (S. 17, 1, 55).

Le privilége du bailleur de fonds passe nécessairement après celui des créanciers pour faits de charge, et même après celui du trésor pour même cause; car, d'après la loi du 25 nivôse an xi, le cautionnement, fait d'abord pour la garantie des intérêts privés, doit servir ensuite à assurer à l'État les frais et amendes résultant de l'exercice des fonctions.

379. Lorsque la caisse d'amortissement fait quelques paiements sur le cautionnement qui se trouve ainsi entamé, le courtier est suspendu de ses fonctions jusqu'à ce qu'il l'ait complété.

En cas de démission, décès ou destitution, le cautionnement est restitué au titulaire ou à ses héritiers ou ayant-droit, après justification par un certificat du syndic que la cessation a été annoncée et affichée depuis un mois à la bourse, et qu'il n'est survenu aucune réclamation sur le cautionnement (art. 17 de l'arrêté du 27 prairial an x). Divers décrets et ordonnances rendus en exécution de l'art. 7 de la loi du 28 ventôse an ix, qui disait < << Le cautionnement ne pourra excéder pour les courtiers 12,000 f., ni être moindre de 2,000 f., » et le budget de 1816 qui a porté le minimum à 4,000 fr. et le maximum à 120,000 fr., ont fixé les cautionnements des courtiers (1); mais ils sont évidemment inférieurs aux droits dont ils doivent être la garantie.

380. Les courtiers maritimes sont soumis aussi à une patente qui est de 200 fr. et le dixième en sus.

381. Les courtiers de chaque place se réunissent et nomment à la majorité absolue un syndic et des adjoints qui forment une chambre syndicale: cette chambre est chargée d'exercer une police intérieure, de rechercher les contraventions aux lois et règlements, et de les faire connaître à l'autorité publique (art. 15); elle remplit aussi les fonctions d'un tribunal de famille. S'il arrive une contestation entre les courtiers relativement à l'exercice de leurs fonctions, elle doit être portée d'abord devant la chambre syndicale qui donne son avis; et si les intéressés ne veulent pas

(1) V. l'ord. du 9 janvier 1818 qui fixe ces cautionnements pour toutes les villes.

s'y conformer, l'avis est renvoyé devant l'autorité compétente, soit le tribunal de commerce s'il s'agit d'intérêts civils, soit le procureur du Roi s'il s'agit d'un fait de police et de contravention. aux lois et règlements, sans préjudice du droit des parties. Ces fonctions durent un an; extrait de la délibération portant nomiration est, à chaque élection, envoyé dans les 24 heures au maire.

Ainsi la juridiction de la chambre n'est pas forcée; on prévient par là les abus qui naîtraient d'un droit de jugement par une corporation sur ses membres. L'expérience a démontré que ces juridictions savaient mal protéger les droits et rechercher les crimes; que l'intérêt, la complaisance, la rivalité leur permettaient rarement l'impartialité, et que l'esprit de corps faisait souvent jeter le voile sur des actions honteuses.

Les courtiers de commerce se réunissent ordinairement entre eux et avec les agents de change dans les villes peu importantes, pour n'avoir qu'une chambre syndicale.

Les agents de change et courtiers de commerce de chaque place sont autorisés à faire un règlement de discipline intérieure, qu'ils remettent au ministre de l'intérieur, pour être par lui présenté à la sanction du gouvernement (article 22, arrêté du 27 prairial, an x.)

CHAPITRE II.

FONCTIONS DES COURTIERS MARITIMES.

382. Les fonctions des courtiers interprètes conducteurs de navires peuvent être cumulées avec celles d'agents de change, courtiers de marchandises et d'assurances, jamais avec celles de courtiers pour transports par terre et par eau (art. 81 et 82 Code de commerce). La faculté du cumul doit résulter d'une autorisation donnée par l'acte du gouvernement qui institue chaque courtier.

Ces fonctions consistent, 1° à traduire seuls, en cas de contestations portées devant les tribunaux, les déclarations, chartes

parties, connaissements, contrats et tous actes de commerce dont la production serait nécessaire (art. 80 Code de commerce). On lit dans l'ordonnance de 1681, à ce sujet, une disposition qui semble toujours en vigueur, car elle n'a jamais été expressément abrogée; on applique, en effet, souvent aux agents de change, d'anciens arrêts du Conseil ; et comme aucune des lois rendues depuis lors, à l'exception de l'art. 80 du Code de commerce, ne s'est occupée spécialement des courtiers maritimes, et qu'on les a toujours confondus avec les autres courtiers, il y aurait des lacunes dans leurs devoirs si on en recourait à l'ordonnance. Elle dit, art. 4, t. 7, liv. 1, que les traductions ne font foi que lorsque les parties sont convenues d'interprètes ou qu'ils ont été nommés par le juge.

cas,

La traduction officieuse n'offre pas toutes les garanties désirables à la partie qui ne l'a pas demandée. Dans ce cas, saus repousser le premier interprète, le tribunal peut ordonner une traduction nouvelle faite par cet interprète et une autre personne, à moins de récusation portée contre l'interprète et qui serait trouvée bien fondée, ou à moins que la partie contestant la vérité de la traduction, il ne s'agisse de vérifier cette critique. Dans ces deux l'ancien interprète doit rester étranger au nouveau travail. L'interprète paraît récusable quand il est le courtier de la partie qui a fait faire la traduction. Les courtiers maritimes sont les conseils naturels des étrangers qui recourent à leur ministère; ils les dirigent dans leurs démarches, et il est presque impossible qu'un capitaine étranger se décide à plaider sans en avoir conféré avec son courtier, avoir reçu son avis, avoir lié avec lui des rapports d'intérêt et quelquefois d'affection, qui peuvent agir même à son insu sur l'interprète. Aucun soupçon ne doit être laissé à la partie adverse.

Bien que l'article 80 parle de la traduction par les courtiers devant les tribunaux, cela ne doit pas s'entendre d'autres tribunaux que de ceux de commerce. Les courtiers maritimes ne sont interprètes jurés qu'auprès du tribunal de commerce. Ils n'ont le droit exclusif de traduire que les chartes-parties, connaissements, déclarations, contrats et actes de commerce, c'est-à-dire les

choses soumises à la juridiction commerciale. Ils peuvent sans doute être appelés devant un tribunal correctionnel ou une Cour d'assises, mais ils doivent comme tout autre expert prêter alors un serment nouveau; et s'ils sont désignés par un tribunal civil, ils agiront comme tout autre citoyen sur qui cette désignation peut tomber.

Du reste, quand les parties ne peuvent être d'accord et que le tribunal ordonne une traduction, les pièces paraphées par le juge sont remises aux interprètes qui dressent procès-verbal de leur traduction (art. 5 de l'ord. de 1681).

383. 2o Les courtiers maritimes doivent seuls servir de truchements à tous étrangers, maîtres de navires, marchands, équipages de vaisseaux et autres personnes de mer, dans les affaires contentieuses de commerce et pour le service des douanes.

Ce droit est le même que le premier sous une autre forme. Il est également restreint pour les tribunaux, à ceux de commerce. L'interprète est également soumis à récusation, et doit être nommé d'office si les partics ne sont pas d'accord. Il a été jugé que le ministère des courtiers n'était pas seulement exclusif auprès de l'administration des douanes, mais encore auprès de toute administration, bureaux d'octroi, des contributions indirectes, et cela même pour arriver à l'application d'une peine, et pour condamner ceux qui avaient assisté un étranger à l'octroi (S. 31, 1, 82).

384. Les courtiers maritimes ne jouissent du droit de traduction écrite et verbale que pour les langues pour lesquelles ils sont commissionnés. Chacun d'eux ne peut servir de truchement exclusif qu'aux étrangers qui parlent une langue dans laquelle il a été reconnu assez habile pour que le public pût avoir confiance en lui. La reconnaissance de cette capacité n'étant soumise à aucune règle fixe, excepté à Marseille, ville pour laquelle un décret spécial a été fait le 22 janvier 1813, on laisse chaque tribunal de commerce acquérir cette conviction par les moyens qu'il juge utiles. On exige, en effet, de chaque candidat qui, soit pour une vacance, soit par suite d'un traité avec un courtier interprète, veut remplir ces fonctions, une pièce à cet égard et venant du

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