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d'autre but que de rétablir le calme, et que leur séjour ne durera que le tems nécessaire pour garantir la sûreté publique, objet de sa prévoyance. Il dit à l'autre qu'il vouloit seulement en imposer à la licence du peuple qui s'étoit porté à des excès scandaleux, et que la force armée se retireroit aussitôt que les magistrats chargés de la police ne jugeroient plus sa présence nécessaire. A une troisième, à celle qui présenta l'adresse éloquente, mais bien insidieuse, de Mirabeau, il répondit en ces termes :

<< Personne n'ignore les désordres et les scènes scandaleuses qui se sont passées et renouvellées à Paris et à Versailles sous mes yeux et sous ceux des états-généraux. Il est nécessaire que je fasse usage des moyens qui sont en ma puissance pour remettre et maintenir l'ordre dans la capitale et les environs. C'est un de mes devoirs principaux de veiller à la sûreté publique. Ce sont ces motifs qui m'ont engagé à faire un rassemblement de troupes autour de Paris. Vous pouvez assurer les étatsgénéraux qu'elles ne sont destinées qu'à réprimer, ou plutôt à prévenir de nouveaux désordres, à maintenir le bon ordre et l'exécution des loix, à assurer et protéger même la liberté qui doit régner dans vos délibérations

Si pourtant la présence nécessaire des troupes dans les environs de Paris causoit encore de l'ombrage, je me porterois, sur la demande de l'assemblée, à tranférer les états-généraux à Noyon ou à Soissons, et alors je me rendrois à Compiègne pour maintenir la communication qui doit avoir lieu entre l'assemblée et moi. (1)

Après la lecture la plus réfléchie de ces réponses, qu'elle induction peut-on en tirer contre Louis XVI? Aucune, absolument aucune. Elles déposeront au contraire, comme nous l'avons déja dit, en faveur de ses sentimens pour le peuple français.

Il n'a éloigné cette armée que lorsque la prise de la bastille et l'insurrection générale lui ont appris que le peuple étoit victorieux. -- Et sur qui, je le demande, le peuple a-t-il remporté une victoire? Quel est l'ennemi qui menaçoit la France? Etoient-ce les troupes réunies autour de la capitale ? le peuple ne les a point attaquées, et elles ont demeuré dans l'inaction à la vue même de ses crimes, malgré le dessein qu'on leur supposoit de tout exterminer. Etoit-ce la bastille? - Précisément. Voilà le triomphe du peuple. Ah! n'en déplaise à ces illustres

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(1) Voyez les procès-verbaux de l'assemblée.

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vainqueurs que nous avons vu depuis reparoître si souvent sur la scène, pour demander une récompense de leur bravoure, le triomphe étoit bien facile. D'ailleurs Louis XVI avoit le premier détruit la bastille par l'abolition des lettres de cachet et des ordres arbitraires, formellement exprimée dans sa déclaration du 23 juin. Mais au reste je ne vois pas encore pourquoi on fait un crime à Louis XVI de n'avoir éloigné les troupes qu'après l'attentat horrible commis sur le gouverneur Launay. On ne prétendra pas sans doute qu'il devoit obéir à la demande de l'assemblée. Elle n'étoit point juge compétente de la force publique qu'exigeoit le maintien de l'ordre, et les provinces n'avoient pas envoyé leurs députés pour s'ingérer dans les fonctions du pouvoir exécutif. Ce soin tout entier regardoit Louis XVI. On ne prétendra pas non plus que le peuple souverain avoit parlé. On ne connoissoit pas alors la sainte insurrection; et quand même le principe auroit été avoué, il étoit permis, lorsque les provinces ne s'étoient point exprimées, de ne pas regarder le vœu du peuple parisien comme le vœu du peuple de toutes les villes de l'Empire: il étoit permis au contraire de croire la volonté de tous les autres citoyens, diamétralement opposée à

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celle de la capitale, puisqu'on avoit dans le cahier de chaque balliage, l'expression formelle de cette volonté. La seconde accusation

tombe donc d'elle-même. Passons à la suivante.

S. III.

Après ces événemens et malgré les promesses que vous aviez faites le 15 dans l'assemblée constituante, et le 17 dans l'hôtel de ville de Paris, vous avez persisté dans votre projet contre la liberté nationale ; vous avez longtems éludé de faire exécuter les décrets du 11 août, concernant l'abolition de la servitude personnelle, du régime féodal et de la dîme. Vous avez longtemps refusé de reconnoître la déclaration des droits de l'homme; vous avez augmenté du double le nombre de vos gardes du corps et appelé le régiment de Flandres à Versailles; vous avez permis que dans des orgies faites scus vos yeux, la cocarde nationale fût foulée aux pieds, la cocarde blanche arboréé et la nation blaspl:êmée. Enfin, vous avez nécessité une nouvelle insurrection, occasionné la mort de plusieurs citoyens, et ce n'est qu'après la défaite de vos gardes que vous avez changé de langage, et renouvellé des promesses perfides. Les preuves de ces faits sont dans vos observations du 18 septembre sur les décrets du 11 août, dans les procèsverbaux de l'assemblée constituante, dans les évènemens de Versailles des 5 et 6 octobre et dans le dis cours que vous avez tenu le même jour à une députation de l'assemblée constituante, lorsque vous lui dites que vous voulez vous éclairer de ses conseils, et ne jamais vous séparer d'elle.

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Réponse de Louis XVI.

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J'ai fait les observations que j'ai cru justes sur les deux premiers objets. Quant à la cocarde cela est faux, cela ne s'est pas passé devant moi.

OBSERVATION S.

Avant que de suivre pas à pas les différens articles dont est composé ce troisième paragraphe de l'acte d'accusation, je ferai une remarque que j'aurois dû placer en tête de ce mémoire. C'est que la postérité ne concevra pas, qu'après la réformation du code criminel, la convention ait pu, dans le procès de Louis' XVI, renouveller les abus affreux des anciennes cours judiciaires. La loi ne voyoit jamais. qu'un coupable dans un accusé; et cet usage barbare, contraire aux droits de la nature contraire au bien de l'humanité, contraire â toute justice, les représentans de la nation qui devroient être l'image vivante de la sagesse, le suivent encore. Ils ne craignent pas de mettre dans leurs discours une parfaite assurance, au heu d'une louable hésitation. On diroit qu'il n'est pas permis de balancer, et que leur défibération ne doit intervenir que comme une vaine formalité; c'est-à-dire qu'ils sont bien résolus, quelles que soient les réponses de Louis

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