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la cour; dans le soin extrême qu'il a eu de dire au roi, dans les différens rapports qu'il a faits en sa présence, que, dans un pays monarchique, la seule volonté du prince fait la loi, et que le pouvoir d'imposer constitue essentiellement la grandeur souveraine. Dans l'établissemeut des administrations provinciales, organisées démocratiquement; dans l'effrayante masse d'emprunts qui nous a valu le déficit et les états-généraux; dans la protection et l'encouragement qu'il accordoit aux libellistes, calomniateurs du roi et de la reine; dans la double représentation accordée au tiers-état; enfin, dans son opiniâtreté à demander que le siège de l'assemblée fût à Paris. Comme les vingt-sept pages employées à ces accusations, quelque bien raisonnéesqu'elles soient, ne font rien à la cause de Louis XVI, nous avons cru en devoir seulement présenter le sommaire. Passons à ce qui est personnel au roi, dans la brochure que nous analysons.

» Je trouve votre apologie, dit M. Montjoie, plus propre à égarer de plus en plus le peuple qu'à l'éclairer ; je la trouve captieuse et incompette. Il s'agit de dévoiler au peuple toute l'énormité d'un attentat dont, grace au ciel, nous n'avions point encore eu d'exemple parmi nous; et, pour faire tomber la hache qui est

levée, vous venez parler au peuple de fatalité, de hasards, de mystères de la destinée; vous placez l'inviolabilité des monarques dans l'obscurité des temps. Eh! pourquoi craignez-vous d'en montrer la base dans le ciel même? Croyez-vous que les vérités éternelles soient anéanties, parce que le sang des prêtres catholiques a coulé ? on pensez-vous devoir des ménagemens à l'impiété qui étend son sceptre de fer sur les consciences? Non, monsieur, la religion chrétienne, comme le dit Abbadie, ne demande ni voile, ni silence, ni dissimulation, ni déguisement, encore qu'elle propose des objets infiniment contraires à tous nos préjugés. Quels que soient donc les préjugés du moment, il n'en est pas est pas moins vrai que c'est dans sa religion que le peuple doit chercher et trouver la règle de sa conduite : c'est-là le flambeau qu'il faut lui présenter, lorsqu'il hésite sur la route qu'il doit tenir; avec une telle lumière, il est impossible que nous nous égarions".

M. Montjoie discute ensuite les objections sur l'inviolabilité. Comme elles sont réfutées dans plusieurs écrits de ce recueil, il est inutile d'y revenir: passons à ce qui est personnel au roi.

«Est-ce pour augmenter le respect dû à la personne de Louis XVI, que, dans une phrase astucieusement contournée vous paroissez

?

affligé de révéler qu'il s'exprime avec difficulté ? Et qu'avoit à faire le peuple de cette révélation? Mais c'est encore-là mentir contre l'évidence même : Louis ne s'est pas toujours tenu renfermé dans son cabinet. Dans combien d'occasions solemnelles ne s'est-il pas montré à ses sujets ? ne feur a-t-il pas parlé ? J'invoque le témoignage de tous ceux qui l'ont entendu. Ne s'est-il pas toujours exprimé avec facilité, avec grace, avec dignité, sans hésiter, sans éprouver aucun embarras? Soit qu'il eût préparé son discours, soit qu'il parlât sans préparation, n'a-t-il pas toujours dit ce qu'il devoit dire? N'est-on pas toujours sorti de sa présence pénétré d'amour, d'admiration pour sa personne? Dans combien d'occasions n'a-t-il pas fait couler des larmes de sensibilité des yeux de tous ceux qui l'écoutoient? Les exemples n'en sont pas encore bien éloignés : est-ce que vous auriez déjà oublié que chaque fois que Louis XVI a parlé dans une assemblée nombreuse, on a trouvé un tel charme à son accent, qu'on l'a écouté avec le plus profond silence; que les personnes les plus prévenues concevoient pour lui le plus tendre intérêt, prestige heureux qui a souvent fait desirer à ses fidèles amis qu'il pût être sans cesse au milieu de ses sujets, qu'il pût sans cesse leur parler? Pour

quoi donc révéler ce qui n'est pas, ce qui est notoirement faux? Pourquoi imprimer sur la personne de Louis même cette légère tache?

Ailleurs, vous lui faites un reproche bien plus grave, vous dites: Sans doute ce monqrque doué des qualités morales les plus essentielles, a commis des fautes d'administration; mais quel homme, vous écriez-vous ensuite perfidement, peut diriger les affaires d'un grand royaume, sans se tromper et se tromper souvent? Vous faite donc la faveur à Louis XVI de lui accorder, parmi les qualités morales qui font l'homme de bien, l'excellent roi, seulement les plus essentielles; les autres, vous les lui refusez. Ne vous tenez pas renfermé dans cette assertion vague; indiquez, nommez la qualité morale essentielle qui manque à Louis XVI. Est-ce la justice, la clémence, l'application au travail, l'amour de l'économie, la décence des mœurs, la compassion pour les malheureux, le respect pour la religion? L'oseriez-vous dire; est-ce l'intrépidité? Rappelez-vous les affreuses journées des 16 juillet, des 6 octobre 1789; celle du 20 juin dernier et dites-nous si aucun des aïeux de Louis, placé dans de telles circonstances, eût marqué plus de courage, plus de grandeur d'ame. Il a fait, ditesvous, des fautes d'administration; il s'est trompé

t

souvent. Eh! que disent de plus, dans ce moment, l'injustice et la calomnie? Soyez de bonne foi: ces fautes, ces erreurs sont elles son ouvrage? Il falloit dire: Dans le cours de son administration, il s'est fait des fautes; on s'est trompé souvent. Cet aveu n'eût point trouvé de contradicteurs, et Louis restoit alors chargé d'avoir fixé son choix sur vous. Mais ce choix même, source 'de ses malheurs et des nôtres, ne sauroit lui être imputé. L'histoire racontera par combien de ruses ténébreuses, d'intrigues sourdes, vous parvîntes à surprendre sa religion et sa confiance, la première fois qu'il vous appela auprès de sa personne. Dès qu'il vous connut, il vous repoussa. La crainte d'un soulèvement général, que vos menées alloient produire sur toute la surface du royaume, vous rappela une seconde fois à l'administrati n une seconde fois, vous futes chassé de la cour; des séditieux, la torche d'une main, le glaive de l'autre, vous reportèrent une troisième fois sur les marches du trône, les restes sanglans du prévôt des marchands, de MM. < Bertier et Foulon, furent le premier degré que vous foulâtes aux pieds pour y parvenir. Nous ne saurions donc reprocher à Louis la part qu'il vous donna dans l'administration. Vous conquîtes deux fois sa confiance par des machina

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