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danger; puisqu'il est constant qu'il est sorti à quatre heures et demie environ du château, et que le feu n'a commencé qu'à dix heures, plus de cinq heures après sa sortie.

Sur les cinq heures environ, un député de l'assemblée constituante, qui, comme garde nationale, se trouvoit chez le roi, proposa une pétition à présenter sur-le-champ à l'assemblée législative, laquelle consistoit à solliciter un décret pour renvoyer de Paris les Marseillois au moment même. Cette pétition fut signée d'un nombre immense de gardes nationaux, qui, dans le cas où le décret seroit rendu, se chargèrent de T'exécution; et qui, dans le cas contraire, se promirent de repousser les factieux et les mettre hors d'état de troubler la tranquillité publique.

La signature de cette pétition fut interrompue par la présence du roi, qui parut sur le grand balcon de la cour royale; à l'instant le cri de vive le roi se fit entendre dans toutes les cours; les canonniers seuls manifestèrent un sentiment contraire en criant à bas le roi. Un quart d'heure après environ, le roi descendit dans la cour, pour témoigner à la garde nationale sa satisfaction sur sa bonne intention; passa successivement en revue les gardes qui se trouvèrent rangés en bataille dans les cours

il

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des princes, royale, des Suisses et sur les terrasses des Tuileries, toujours accompagné du. cri de vive le roi, articulé par tous les gardes nationaux qui garnissoient ces endroits, à l'exception des Suisses, qui ne proférèrent aucuns. mots d'approbation ni d'improbation.

Le roi étant sur la terrasse, bordant le château, un garde national lui adressa ces mots. Sire, votre majesté devroit bien se trans" porter au pont tournant, car les esprits ne

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paroissent pas être aussi bien disposés qu'ici».

Aussi-tôt le roi s'y transporta; mais à peine

y fut-il arrivé, que l'on cria à bas le roi. L'of

· ficier municipal qui étoit resté au château, courrut au devant du roi pour le ramener dans son palais.

Alors commença le trouble de ce malheu reux jour; l'armée marseilloise, les fauxbourgs et tout le peuple arrivèrent au Carrouzel, se rangèrent en bataille devant le château. Le département et la municipalité, qui n'avoient point quittés le roi, arranguèrent ce peuple attroupé; ils lui lurent la loi contre les atro pemens, de le faire rentrer dans l'ordre.

afin

Ces officiers rentrés, tinrent entre eux, et les officiers de garde au château, un conseil, où il fut décidé qu'il seroit nommé deux gre

nadiers, deux fusilliers, deux canonniers et deux Suisses, pour porter des paroles de paix au peuple, lui demander une députation de quelques uns pour traiter accommodement et connoître ses intentions.

La députation du château eut lieu, le peuple la reçut, et envoya en députation un officier, l'on croit être marseillois; ses gestes, ceux que de M. Roederer, annoncèrent des inten tions terribles. Ce député du peuple s'étant retiré, M. Ræderer, accompagné du département, lut la loi à toute la troupe qui étoit dans le château, et lui fit prêter le serment de repousser la force par la force, et de faire feu sur le peuple, lorsque la porte seroit enfoncée. La municipalité donna le même ordre; et accompagnée du département, elle se rendit ensuite chez le roi; on lui conseilla de se retirer à l'assemblée législative.

Le roi suivit le conseil qui lui étoit donné, et toujours accompagné du département, de la municipalité et d'une multitude de gardes nationaux et de Suisses, il prit le chemin de l'assemblée. Dans sa marche, au moment où il alloit monter l'escalier de la terrasse des Feuillans, il fut arrêté par un officier Marseillois dont la fureur et la rage étoient peintes sur la

figure. Cet officier avoit le col de sa chemise défait. Par les propos les plus infâmes, et par des gestes dont la signification faisoit frémir, il s'opposa à ce que le roi montâ l'escalier et se rendît à l'assemblée. Ce ne fut qu'après une longue harangue de la part du département qu'il se détermina à laisser passer le roi et sa famille.

Les officiers du département et de la municipalité, le bataillon des filles Saint-Thomas et d'autres citoyens en très-grand nombre, qui accompagnoient le roi, peuvent en déposer.

TROISIEME

EXTRAIT.

Moi, soldat échappé du poste du grand escalier, à la porte de la chapelle le ro août, atteste, en ma conscience, que nous étions environ 900 suisses et 500 gardes nationaux, résolus à défendre la loi en défendant la famille royale, et le château des Tuileries que l'on croyoit devoir être attaqués dans la nuit du 9 au 10. Qu'après la revue de nous tous, et les rapports qui nous assurèrent que nous ne serions pas secourus par le restant de la garde nationale, puisqu'au lieu de nous envoyer du secours, on retira les canons qui étoient ordinairement à la porte du vestibule ; nous, craignant d'être hachés par le nombreux rassemblement que l'on nous disoit se faire contre nous, nous prîmes le parti de nous

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borner à quitter les cours et à garder seulement l'intérieur du château ; en conséquence les postes, furent établis tant en suisses qu'en gardes, nationaux, tant au vestibule et au grand escalier,.. que dans les appartemens, ect. que le peuple étant arrivé, et ayant jeté bas le batant à droite de la porte royale, une très-petite partie de ce peuple, persuadée que les cours contenoient l'armée de 30 mille hommes dont on lui avoit fait accroire l'existence, entra avec le ton de la timidité et de l'inquiétude, regardant de tous.: côtés et paroissant étonnée du dénuement des cours; qu'arrivée au vestibule, un piquet, à la tête de ce petit détachement, demanda la liberté de monter aux appartemens, ce qui lui fut refusé à moins, dirent les factionnaires, qu'on ne nous relève de notre poste. Pendant ce tems là le peuple s'enhardissant, et ne voyant pointd'obstacle, s'augmentoit dans la cour royale, il vint se réunir au premier détachement, et alors on parla aux sentinelles plus haut, on leur ordonna d'abandonner le poste. Ils répondirent qu'ils ne le feroient pas, et qu'on ne monteroit aux appartemens qu'après avoir passé sur leurs cadavres après environ un demi-quart d'heures de propos de part et d'autre, le poste fut assailli, cinq braves défenseurs abattus, forcèrent les

autres

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