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laud de Varennes et Vadier, mis en jugement par décret du 2 mars précédent, sont condam nés à la déportation.

1" avril (12)-Cette condamnation excite les jacobins, dont elle attaquait les principaux soutiens. Les habitants des faubourgs Saint-Antoine et Saint-Marceau marchent sur la convention, et exigent qu'on délivre sur-le-champ tous les jacobins, sans distinction, arrêtés depuis le 9 thermidor; mais mal conduits et divisés d'opinions, les rebelles se dispersent sans attendre le résultat de leur demande.

- La convention, sortie victorieuse de cette attaque, déclare néanmoins Paris en état de siége.

- Elle nomme Pichegru, revenu de Hollande à Paris, commandant en chef provisoire de la garde nationale. Cette promotion fut rendue définitive par décret du 4 suivant.

2 (13) Barrère et ses trois compagnons partent de Paris pour le lieu de leur exil, sous bonne escorte.

- Ce même jour, mort de l'astronome Lemounier (Pierre-Charles), membre de l'académie, né à Paris le 23 novembre 1715.

3 (14) La convention nomme Merlin de Douai, Cambacérès, Sieyès et Thibaudeau membres d'une commission chargée de la rédaction des lois organiques d'une nouvelle constitution. 5 (16) Un traité de paix est signé à Bâle entre la république et la Prusse, par. François Barthélemy et le baron de Hardenberg. Ce traité morelle la vaste coalition que l'Europe avait formée contre la France. Dès ce moment l'horizon s'éclaircit; l'immense réseau de fer qui cernait la république est rompu; la première brèche y est faite !

Voici ce document historique :

La république française et sa majesté le roi de Prusse, également animés du désir de mettre fin à la guerre qui les divise par une paix solide entre les deux nations, ont nommé pour leurs plénipotentiaires savoir :

La république française, le citoyen François Barthélemy, son ambassadeur en Suisse,

Et le roi de Prusse, son ministre d'Etat, de guerre et du cabinet Charles-Auguste baron de Hardenberg, chevalier de l'Aigle Rouge, de l'Aigle Blanc et de Saint-Stanislas ;

Lesquels, après avoir échangé leurs pleins pouvoirs, ont arrêté les articles suivants :

Art I". Il y aura paix, amitié et bonne intelligence entre la république française et le roi de Prusse, tant considéré comme tel qu'en qualité d'électeur de Brandebourg et de coétat de l'empire germanique.

II. En conséquence, toutes hostilités entre les deux puissances contractantes cesseront à compter de la ratification du présent traité; et aucune d'elles ne pourra, à compter de la même époque,

fournir contre l'autre, en quelque qualité et à quelque titre que ce soit, aucun secours ni contingent, soit en hommes, en chevaux, vivres, argent, munitions de guerre ou autrement.

III. L'une des puissances contratantes ne pourra accorder passage sur son territoire à des troupes ennemies de l'autre.

IV. Les troupes de la république française évacueront dans les quinze jours qui suivront la ratification du présent traité, les parties des États prussiens qu'elles pourraient occuper sur la rive droite du Rhin.

Les contributions, livraisons, fournitures et prestations de guerre cesseront entièrement, à compter des quinze jours après la signature de ce traité.

Tous les arrérages dus à cette époque, de même que les billets et promesses donnés ou faits à cet égard seront de nul effet.

Ce qui aura été pris ou perçu après l'époque susdite sera d'abord rendu gratuitement, ou payé en argent comptant.

V. Les troupes de la république française continueront d'occuper la partie des États du roi de Prusse située sur la rive gauche du Rhin. Tout arrangement définitif à l'égard de ces provinces sera renvoyé jusqu'à la pacification générale entre la France et l'empire germanique.

VI. En attendant qu'il ait été fait un traité de commerce entre les deux puissances contractantes, toutes les communications et relations commerciales sont rétablics entre la France et les États prussiens, sur le pied où elles étaient avant la guerre actuelle.

VII. Les dispositions de l'art. VI ne pouvant avoir leur plein effet qu'en tant que la liberté du commerce sera rétablie pour tout le nord de l'Allemagne, les deux puissances contractantes prendront des mesures pour en éloigner le théâtre de la guerre.

VIII. Il sera accordé respectivement aux individus des deux nations, la mainlevée des effets, revenus ou biens, de quelque genre qu'ils soient, détenus, saisis ou confisqués à cause de la guerre qui a eu lieu entre la France et la Prusse, de même qu'une prompte justice à l'égard des créances quelconques que ces individus pourraient avoir dans les Etats des deux puissances contractantes.

IX. Tous les prisonniers faits respectivement depuis le commencement de la guerre, sans égard à la différence du nombre et du grade, y compris les marins et matelots prussiens pris sur des vaisseaux soit prussiens soit d'autres nations, ainsi qu'en général tous ceux détenus de part et d'autre pour cause de la guerre, seront rendus dans l'espace de deux mois au plus tard, après l'échange des ratifications du présent traité, sans récompense quelconque, en payant toutefois les dettes particulières qu'ils pourraient avoir contractées pendant leur captivité. L'on en usera de même à l'é

gard des malades et blessés dès leur guérison. | 25 avril (6) — Elle décrète la libre circulation de

Il sera incessamment nommé des commissaires de part et d'autre pour procéder à l'exécution du présent article.

X. Les prisonniers des corps saxons, mayençais, palatins et hessois tant de Hesse-Cassel que de Darmstadt qui ont servi avec l'armée du roi de Prusse, seront également compris dans l'échange susmentionné.

XI. La république française, accueillera les bons offices de sa majesté le roi de Prusse en faveur des princes et États de l'empire germanique qui désireront entrer directement en négociation avec elle et qui pour cet effet ont déjà réclamé ou réclameront encore l'intervention du roi.

La république française, pour donner au roi de Prusse une première preuve de son désir de concourir au rétablissement des anciens liens d'amitié qui ont subsisté entre les deux nations, consent à ne pas traiter comme pays ennemi, pendant l'espace de trois mois après la ratification du présent traité, ceux des princes et États dudit empire qui sont situés sur la rive droite du Rhin, en faveur desquels le roi s'intéressera.

XII. Le présent traité n'aura son effet qu'après avoir été ratifié par les parties contractantes, et les ratifications seront échangées en cette ville de Bâle dans le terme d'un mois ou plus tôt s'il est possible, à compter de ce jour.

En foi de quoi nous soussignés ministres plénipotentiaires de la république française et de sa majesté le roi de Prusse, en vertu de nos pleins pouvoirs, avons signé le présent traité de paix et d'amitié et y avons fait apposer nos sceaux respectifs.

7 avril (18)-La convention décrète l'uniformité des poids, mesures et monnaies, basée sur le système décimal. La mise en activité de ce décret est fixée au 1er nivôse (22 décembre 1795). 10 (21) Elle rapporte son décret du 27 mars 1793 portant la mise hors la loi des ennemis de la révolution, rendu sur la motion de Treilhard. 14 (25) Elle ratifie le traité de paix conclu avec la Prusse, le 5 précédent.

17 (28) Ce jour, la campagne s'ouvre en Piémont.

Le général Moulins attaque, mais sans succès, le col de Monte, défendue par les Piémontais. 18 (29) La convention nomme une commission de onze membres pour préparer un nouvel acte constitutionnel, basé sur les principes fournis par la commission nommée le 3 précédent. Ces onze membres étaient Cambacérès, Merlin, Sieyès, Thibaudeau, la Réveillère-Lépeaux, Boissy-d'Anglas, Berlier, Daunou, Lesage (d'Eure-et-Loire), Creuzé-Latouche et Louvet (du Loiret).

23 (4 floréal) Elle reconnait solennellement, et proclame, par une loi spéciale, le baron de Staël de Holstein ambassadeur du roi de Suède près la république française.

l'or et de l'argent, qu'elle déclare marchandise, et autorise l'ouverture des bourses. 27 (8) Aux Pyrénées, quatre mille Espagnols attaquent le général Pérignon près de Bascara, dont celui-ci s'était emparé la veille; mais ils sont repoussés avec une perte considérable et rejetés dans leurs lignes. Un grand nombre d'ennemis, coupés sur la rive gauche de la Fluvia, sont massacrés ou se noient en voulant passer la rivière à la nage.

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(9) Cet échec ne décourage point le général espagnol. Dès le lendemain il revient sur ses pas, attaque Bascara et s'en empare après un combat sanglant.

Ce même jour, le général de division DesprèsCrassier, suspendu de ses fonctions, est réintégré par décret de la convention.

(11) Mort de l'auteur du Voyage d'Anacharsis, Barthélemy (Jean-Jacques), garde des médailles de la bibliothèque nationale, membre de l'académie française et de celle des inscriptions et belles-lettres, et auteur d'un grand nombre d'ouvrages sur l'antiquité grecque et romaine. Il naquit à Cassis le 20 janvier 1716.

3 mai (14)—La convention décrète que les biens qui ont été confisqués par suite de jugements des tribunaux révolutionnaires, seront restitués aux familles; elle en excepte toutefois ceux ayant appartenu à Louis XVI et à Robespierre!

4 (15) Dans l'ouest, Stofflet, le seul des chefs royalistes qui eût refusé de souscrire à la pacification de la Jaunais, fait enfin sa soumission à la république et adresse une proclamation aux habitants de la Vendée pour les inviter à la concorde.

5 (16) Aux Pyrénées, combat de Sistella; huit mille Espagnols, commandés par le marquis de la Romana, y attaquent la brigade Guillaume, forte de quinze cents hommes; mais malgré cette immense supériorité numérique, les ennemis sont repoussés, et perdent huit cents tués et cent prisonniers.

6 (17) Fouquier-Tinville (Antoine-Quintin), l'accusateur public du fameux tribunal révolutionnaire, ayant été condamné à la peine de mort avec quinze des juges ou jurés de ce même tribunal, subit sa sentence en place de Grève à Paris. Il naquit en 1747 à Herouelle, en Artois.

9 (20) Le général en chef des Espagnols, Urrutia, attaque l'armée française, nouvellement placée sous les ordres du général Schérer, sur toute la ligne de la Fluvia. Reçu vigoureusement, les ennemis, un instant victorieux, sont repoussés, et laissent le terrain couvert de tués et de blessés.

(21) Croyant pouvoir profiter de ce succès, Schérer attaque Urrutia à son tour avec dix

mille deux cents hommes dans Calabruix; mais la marche de ses colonnes ayant été mal combinée, cette tentative resta sans résultat. 16 mai (27)-Un traité de paix et d'alliance est signé ȧLa Haye entre la France et les Provinces-Unies. La Hollande cède à la république la partie de son territoire situé sur la rive gauche de l'Escaut occidental, ainsi que les deux rives de la Meuse, au sud de Venloo, cette place y comprise, et elle s'engage à lui payer, à titre d'indemnité de la guerre, cent millions de florins, argent courant du pays.

18 (29) Cet important traité, qui rejetait l'armée anglaise du continent tout en arrachant une seconde puissance à la coalition, est bientôt suivi d'un autre entre la république et la Prusse pour garantir la neutralité d'une partie de l'Allemagne. Cet arrangement fut signé à Bâle, entre François Barthélemy et le baron de Hardenberg, les signataires du traité du 5 avril. 20 (1a prairial) Tandis que la France sort ainsi de sa lutte contre l'Europe armée, les jacobins ne cessent de troubler l'ordre public au sein même de la république. Expulsés de leur salle de séance, et ayant perdu sur le peuple cette influence qui avait fait trembler plus d'une fois la convention, ils cherchent à ressaisir leur domination terrassée au 9 thermidor : c'est par un soulèvement qu'ils espèrent y parvenir. – JOURNÉE du 1er PRAIRIAL. Soixante mille hommes armés, des faubourgs Saint-Antoine et Saint-Marceau, marchent sur la convention, investissent le palais, enfoncent les portes et envahissent la salle de séance. Le député Ferraud, qui cherche à calmer la multitude, est arraché de son siége, traîné hors de la salle et massacré impitoyablement. Sa tête, mise au bout d'une pique, est portée en triomphe à la vue des députés par un misérable nommé Boucher. Heureusement les sections des environs des Tuileries, guidées par Legendre, accourent au secours de la convention, refoulent les insurgés et les forcent à prendre la fuite. - La convention, qui s'était déclarée en permanence, se voit à peine délivrée, qu'elle décrète l'arrestation de quatorze représentants du peuple. On y remarque: Duquesnoy, Albitte ainé, Goujon, Romme, Soubrany, Bourbotte, Lecarpentier, Pinet aîné, Borie, Ruhl, Fayau, Delecloi.

- Elle nomme le citoyen Fox commandant général de la force armée de Paris.

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25 (6) L'assassin du député Ferraud, Luc Boucher, est condamné à la peine de mort; les jacobins cherchent à l'arracher des mains du bourreau, mais la force armée les disperse.

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- Dans la Vendée, le général Hoche fait arrêter le baron de Cormenin, qui n'était autre qu'un intrigant nommé Désoteux, convaincu d'être l'agent des Bourbons: la guerre civile me

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nace encore une fois l'ouest, à peine pacifié. mai (7) · L'historien et diplomate Chénier (Louis de), père d'André et de Marie-Joseph, meurt à Paris ; il naquit à Montfort en 1723. (8) La convention ratifie le traité d'alliance conclue entre la république et les ProvincesUnies (voy. 16 mai).

(10) Le député Delecloi, décrété d'accusation à la suite de la journée du 1er prairial, se poignarde dans sa maison.

(11) La convention décrète, sur la proposition de Lanjuinais, la libre célébration des cultes dans les édifices employés originairement au service divin.

(12) Elle supprime, sur le rapport de Porcher de Richebourg, le tribunal révolutionnaire. 1er juin (13) Elle décrète d'arrestation les députés Sergent, Javoque, Darlygoyte, Mallarmé, J. B. Lacoste, Baudot, Monnestier et Allard, accusés de favoriser les jacobins.

2 (14) Une cérémonie funèbre est célébrée au sein de la convention en mémoire du malheureux Ferraud, massacré par les révoltés dans la journée du 20 mai (1er prairial).

5 (15) Mort de Doublet (François), médecin distingué, né à Chartres le 30 juillet 1751. 7 (19) Tandis que ces divers événements se passent dans l'intérieur de la république, l'armée de la Moselle conquiert à la France une des premières forteresses de l'Europe. La ville de Luxembourg, assiégée depuis six mois (voy. 22 nov. 1794) par le général Hatry, est obligée d'ouvrir ses portes aux troupes françaises. La garnison, forte encore de douze mille trois cent quatre-vingtseize hommes, retourne en Allemagne après avoir fait serment de ne point servir contre la république avant d'avoir été échangée. Seize cent trois hommes avaient été tués à la défense de la place; c'était le feld-maréchal Bender qui en était gouverneur. L'armée française trouve dans Luxembourg huit cent dix bouches à feu, vingt-cinq drapeaux, 14,991 fusils d'infanterie, 393 fusils de rempart, 398 mousquetons de cavalerie, 23 idem de hussards, 438 pistolets, 336,857 boulets de tout calibre, 47,801 bombes, 114,704 grenades et 1,033,153 livres de poudre d'infanterie, ainsi que le prouvent les registres du garde de l'arsenal de la forteresse.

8 (20) Le jour même où la nouvelle de cette importante conquête arrive à Paris, le fils de Louis XVI, Charles-Louis, dauphin de France, meurt dans la prison du Temple. Il était né à Versailles le 27 mars 1785. Ses restes furent inhumés le 12 suivant, à neuf heures du soir, au cimetière de Sainte-Marguerite, non dans la fosse commune comme l'ont répété plusieurs écrivains, mais dans une fosse séparée, ainsi qu'il résulte du procès-verbal de l'enterrement déposé archives de l'hôtel de ville de Paris.

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On a dit que ce fut le poison qui mit fin à la malheureuse existence de ce jeune prince; il me semble que cette accusation est plus que hasardée, surtout en présence du procès-verbal de l'ouverture du cadavre. Privé de soins, d'exercice, d'air même, brisé jusqu'au cœur par la perte tragique de son père, de sa mère et de sa tante, abandonné à la rudesse d'un gcôlier, fallait-il davantage pour conduire au tombeau un enfant de dix ans? Non, certainement; l'homme même y succomberait. Voici au reste la déclaration des médecins ; c'est un monument historique qui mérite d'être connu. « Nous soussignés Jean-Baptiste-Eugénie Dumangin, médecin en chef de l'hospice de l'Unité, et Philippe-Jean Pelletan, chirurgien en chef du grand hospice de l'Humanité, accompagnés des citoyens Nicolas Jeanroy, ancien professeur aux écoles de médecine de Paris, et Pierre Lassus, professeur de médecine légale à l'école de santé à Paris, que nous nous sommes adjoints en vertu d'un arrêté du comité de sûreté générale de la convention nationale, daté d'hier, et signé : Bergocing, président, Courtois, Gauthier, Pierre Guyomard, à l'effet de procéder ensemble à l'ouverture du corps du fils de défunt Louis Capet et en constater l'état, avons agi ainsi qu'il suit :

A l'ouverture du ventre, il s'est écoulé plus d'une pinte de sérosité purulente, jaunâtre et trèsfétide; les intestins étant météorisés, pâles, adhérents les uns aux autres, ainsi qu'aux parois de cette cavité; ils étaient parsemés d'une grande quantité de tubercules de diverses grosseurs, et qui ont présenté à leur ouverture la même matière que celle contenue dans les dépôts extérieurs du genou et du poignet.

>> Les intestins, ouverts dans toute leur longueur, étaient très-sains intérieurement, et ne contenaient qu'une petite quantité de matière bilieuse. L'estomac nous a présenté le même état; il était adhérent à toutes les parties environnantes, pâle audehors, parsemé de petits tubercules lymphatiques semblables à ceux de la surface des intestins; sa membrane interne était saine, ainsi que le pylore et l'œsophage; le foie était adhérent par sa concavité aux viscères qu'il recouvre; sa substance était saine, son volume ordinaire, la vésicule du fiel médiocrement remplie d'une bile de couleur vert foncé. La rate, le pancréas, les reins et la vessie étaient sains. L'épiploon et le mésenterre, dépourvus de graisse, étaient remplis de tubercules lympathiques, semblables à ceux dont il a été parlé. De pareilles tumeurs étaient disséminées dans l'épaisseur du péritoine, recouvrant la face intérieure du diaphragme. Ce muscle était sain.

» Les poumons adhéraient, par toute leur surface, à la plèvre, au diaphragme et au péricarde; leur substance était saine et sans tubercules; il y en avait seulement quelques-uns aux environs de la trachée artère et de l'œsophage. Le péricarde contenait la quantité ordinaire de sérosité; le cœur était pâle, mais dans l'état ordinaire. Le cerveau et ses dépendances étaient dans la plus parfaite intégrité.

» Arrivés tous les quatre, à onze heures du matin, à la porte extérieure du Temple, nous y avons été reçus par les commissaires, qui nous ont introduits dans la tour. Parvenus au deuxième étage, nous sommes entrés dans un appartement, dans la seconde pièce duquel nous avons trouvé, dans un lit, le corps mort d'un enfant, qui nous a paru âgé d'environ dix ans, que les commissaires nous ont dit être celui du fils de défunt Louis Capet, et que deux d'entre nous ont reconnu pour être l'enfant auquel ils donnaient des soins depuis quelques jours. Les susdits commissaires nous ont déclaré que cet enfant était décédé la veille, vers trois heures de relevée; sur quoi nous avons cherché à vérifier les sujets de la mort, que nous avons trouvée caractérisée par la pâleur universelle, le froid de toute l'habitude du corps, la roideur des membres, les yeux ternes, les taches violettes ordinaires à la peau du cadavre, et surtout par une putréfaction commencée au ventre, au scrotum et au dedans | 12 des cuisses.

» Nous avons remarqué, avant de procéder à l'ouverture du corps, une maigreur générale, qui est celle du marasme. Le ventre était extrêmement tendu et météorisé. Au côté interne du genou droit, nous avons remarqué une tumeur, sans changement de couleur à la peau, et une autre tumeur moins volumineuse sur l'os radius près du poignet, du côté gauche : la tumeur du genou contenait environ deux onces d'une matière grisâtre, puriforme et lymphatique, située entre le périoste et les muscles; celle du poignet renfermait une matière de même nature, mais plus épaisse.

>> Tous les désordres dont nous venons de donner le détail, sont évidemment l'effet d'un vice scrofuleux, existant depuis longtemps, et auquel on doit attribuer la mort de l'enfant.

Le présent procès-verbal a été fait et clos à Paris, au lieu susdit, par les soussignés, à quatre heures et demie de relevée, le jour et an que dessus.

Signé: J. B. E. DUMANGIN, PH. J. PELLETAN,

P. LASSUS, N. JEANROY.

juin (24) - La convention défend à toute autorité constituée de prendre désormais le nom de révolutionnaire.

15 (27) Mort du général de division Basdelaune
(Nicolas-Denis De Bas, dit); il fit les campagnes
des Alpes contre les Piémontais et s'y distingua.
16 (28) La convention décrète la réorganisation
de la garde nationale. Ce décret se trouve au
Moniteur no 271, an III. II mérite d'être con-
sulté.

- Ce même jour, les députés
*DUROY (Jean-Michel), né à Bernay en 1750, dé-
puté de l'Eure;

GOUJON (Jean-Marie-Claude - Alexandre), né à

Bourg en Bresse le 13 avril 1766, député de
Seine-et-Oise;

*DUQUESNOY (Ernest-Dominique-François-Joseph), né à Bouvigny-Boyafflers en 1748, député du Pas-de-Calais;

*ROMME (Gilbert), né à Riom en 1750, député du Puy-du-Dome;

*BOURBOTTE (Pierre), né à Vaux, près d'Avallon, député de l'Yonne;

Et *SOUBRANY (Pierre-Auguste), né à Riom en 1750, député du Puy-du-Dôme,

Accusés d'être les instigateurs du mouvement populaire du 1 prairial (20 mai), et arrêtés dans cette journée, sont condamnés à la peine de mort par une commission militaire spéciale nommée par la convention. Goujon, Duquesnoy, et Romme parviennent à se soustraire à la guillotine en se poignardant à la sortie du tribunal au moyen de ciseaux tenus cachés par l'un d'eux.

19 juin (1 messidor). - Aux colonies, les troupes anglaises évacuent Sainte-Lucie, qui tombe au pouvoir des Français.

23 (5) Ce jour, un convoi anglais de cent bâtiments de transport, escorté par l'amiral Warren avec deux vaisseaux de 74, arrive sur les côtes de la Bretagne. Cette expédition, formée sous les auspices du comte d'Artois, était montée par dix mille émigrés ou soldats étrangers que l'Angleterre avait pris à sa solde et qu'elle voulait jeter sur le sol vendéen pour y rallumer la guerre civile, étouffée depuis le traité de la Jaunais. Ces forces étaient divisées en dix régiments ou légions; Royal-Louis, RoyalEmigrant, Royal-Artillerie, Hector, Dudresnoy, Béarn, Damas, Salm, Rohan et Périgord. Les principaux chefs de cet armement étaient : le comte d'Hervilly, commandant supérieur de l'armée, le comte de Puisaye, l'âme de l'expédition, le marquis de conflans, le comte de Bootherel, le duc de Levis, le marquis de Contades, le comte de Vauban, le comte Joseph de Broglie, le chevalier de Tinteniac, etc. L'ancien évêque de Dol, René de Herré, qui avait en quelque sorte prêché cette croisade royaliste, son grand vicaire et plus de soixante prêtres bretons, se trouvaient également à bord de la flotte. Ils devaient parcourir les campagnes et appeler les habitants aux armes. Des munitions immenses avaient été fournies par le gouvernement britannique; aucune dépense ne l'avait arrêté des armes pour plus de quatre-vingt mille hommes, des habillements pour soixante mille, une artillerie nombreuse; tout était en proportion. Deux millions en numéraire, et plusieurs milliards de faux assignats fabriqués à Londres, avaient été mis entre les mains du comte d'Hervilly.

Une flotte de quinze vaisseaux de ligne cinglait en même temps vers les côtes françaises pour

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protéger l'expédition contre l'escadre du contre-
amiral Villaret-Joyeuse, sortie de Brest le
débarquement devait s'opérer pendant que les
deux armées navales seraient engagées.
juin (6) · Elles se rencontrent près de Port-
Louis, sur les côtes du Morbihan, et engagent le
combat. Pendant quatre heures entières la vic-
toire reste indécise; il est probable que la jour-
née se serait passée sans avantage pour l'une ou
l'autre flotte, lorsque l'amiral ennemi, lord
Bridfort, fatigué d'une canonnade qui n'abou-
tissait à rien, profite d'une brise favorable, fond
sur Villaret-Joyeuse, et sépare en deux l'escadre
républicaine. Villaret, paralysé dans ses mou-
vements et ayant perdu son ordre de bataille,
donne le signal de la retraite, et laisse la mer
libre à la flotte anglaise. Deux vaisseaux, le
Tigre et l'Alexandre, tombent entre les mains
de l'amiral Bridfort; un troisième, le Formi-
dable, saute en l'air.

Tandis que ceci se passe sur l'Océan, dix mille
Autrichiens, conduits par les généraux Wallis
et Balkavina, attaquent le général Laharpe
dans ses retranchements de Vado, dans les Al-
pes. Mais cette entreprise ne fut pas heureuse :
après sept heures de combat, l'ennemi, abimé
par l'artillerie française, est obligé de battre
en retraite, laissant plus de trois cents tués
sur le terrain et ayant en outre plus de cinq
cents blessés.

(7) L'ennemi est plus heureux le lendemain. Douze mille Autrichiens, commandés par le général en chef Dewins, attaquent les Français dans leur position de San Giacomo, qu'ils défendaient avec deux mille deux cents hommes, et les chassent de toute leur ligne.

Au même instant une seconde colonne autrichienne, forte de cinq mille hommes, se jette sur Melogno, défendue par Masséna avec douze cents hommes, et s'empare de cette position avant que le général républicain ait pu réunir ses troupes. La prise de cette position compromettait toute la ligne française; et il était de la plus grande importance de la reprendre avant que l'ennemi s'y fût retranché. Ce fut l'affaire de quelques heures. Revenu sur ses pas, Masséna divise sa petite troupe en différentes colonnes, aborde Melogno, l'enlève au pas de charge, et en chasse les Autrichiens étourdis par cette brusque attaque. Trois cents d'entre eux restent au pouvoir des républicains.

-Dans l'ouest, l'expédition royaliste (voy. 23 juin) vient mouiller dans la baie de Quiberon, point désigné pour le débarquement des troupes.

Pendant ce temps, Charette, instruit par les émissaires du comte d'Artois de la prochaine arrivée de la flotte anglaise sur les côtes vendéennes, reprend les armes et fait sonner le

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