Page images
PDF
EPUB

› ̈ Un fait, dit-il, qu'il eft bon de faire connoître, & qui s'eft paffé fous les yeux de la > commune de Ceffey, canton de Genlis, de> montre la vérité de ce que j'avance. M. Bartet, cultivateur & maire de cet endroit, qui fuit, pour les femailles, la méthode que fes > peres lui ont enfeignée, avoit préparé aux » femailles de l'année derniere 1790, deux facs

de femens, l'un de quatre mefures, l'autre de » deux & demi, pour semer deux champs, con» tenant, l'un un journal, l'autre deux tiers de journal. Les quatre mefures étoient deftinées au champ du journal: mais le domestique chargé de femer les deux champs, échangea les deux facs par mégarde, il fema les deux > mesures & demie dans le journal, & les quatre > mesures dans les deux tiers. Quand fon erreur fur » découverte. M. Bartet crut que cette étourderie lui feroit préjudiciable: mais fe rappellant fur le champ ce que je lui avois dit plufieurs fois au fujet des femailles, it regarda > cet accident comme une expérience que le » hafard le forçoit de faire; elle lui a parfai> tement réuffi. Son journal, femé avec deux > mesures & demie, a été la plus belle piece, la > plus productrice de fa récolte; au contraire,

le champ de deux tiers de journal, dans le> quel on avoit femé quatre mefures, qui étoit > auffi bien cultivé, auffi bien engraiffé que » l'autre, a produit, proportion de la conte»nance gardée, bien moins que le premier. >> Ce n'est point fur un feul journal, continue > M. Calignon, fur une quantité médiocre de

terrain, que je pratique cette méthode. J'ai » femé, l'année derniere, plus de deux cents > journaux de froment, dans lesquels je n'ai > pas mis plus de deux mefures de femens par

journal. Cependant ma récolte a été, non> feulement fort belle, mais encore très-fupé→ rieure à celle des autres cultivateurs du pays. > Mes voifins croyoient au mois d'Avril, que > mes bleds étoient beaucoup trop clairs; j'ai > même effuyé à ce fujet quelques ironies, quel>ques plaifanteries ameres, fur lesquelles j'ai > gardé le filence, bien certain que le résultat » de la récolte y répondroit mieux que tous > mes raifonnemens. En effet, ces voifins ont paru très-étonnés, à la moiffon, que mes bleds aient produit une quantité de gerbes » pour le moins égales aux leurs ; mais quelle » différence n'ont-ils pas remarqué dans la grof

feur & la bonté des épis? Elle eft telle, qu'il > faut à mes voifins douze gerbes, & qu'il n'en faut que huit des miennes pour faire une mesure. «

Mais, difent quelques cultivateurs, vous êtes peut-être redevable de cet avantage à la maniere dont les faifons fe font conduites cette année. » Et voilà, pourfuit M. Calignon, l'ob

jection qui m'a été faite par quelques gens » obstinément attachés à la routine). Si l'hiver > eût été violent, fi les infectes ou d'autres ac>cidens euffent détruit une partie de vos grains » de femences, alors vos bleds auroient été > beaucoup trop clairs, les mauvaises herbes y

auroient pouffé en abondance, & auroient » étouffé le bon grain, &c. Je réponds, 19. que,

> depuis environ douze ans, je fuis toujours le. > même procédé, & qu'il m'a toujours réuffis » 20. Les infectes & autres animaux destructeurs: > ne portent pas autant de préjudice aux fe-. › mences claires, qu'à celles qui font épaiffes;:

c'est ce que l'expérience m'a toujours prouvé, > même cette année, dans un canton où les

darbons, espece d'infectes reffemblans à de, > groffes chenilles courtes, ont travaillé, où

mes champs ont été moins maltraités que: > ceux de mes voifins, & où ma récolte a été. > excellente. D'ailleurs, le chaulage que je pra

tique met mes femences à l'abri des ataques » de plufieurs insectes, des limaçons, &c. 3o, Dans, > un hiver rigoureux, les bleds femés clair ré

fiftent beaucoup mieux aux gelées & aux fri > mats que ceux qui font épais, parce que les > premiers font plus forts, plus vigoureux &

mieux enracinés; c'eft ce que j'ai éprouvé pen> dant l'hiver de 1788 à 1789, ma récolie » ayant été, cette année, beaucoup plus abondante que celle de mes voifins. 4o. Enfin, les bleds femés clair font bien plus aifés à farcler & à nettoyer que les autres ; & il n'y a pas à craindre que, dans un terrain, bien » cultivé, les mauvaifes herbes pouffent avec abondance; d'ailleurs, la plus mauvaise herbe > pour le bled, c'est le bled lui-même.

Fort de fon expérience, M. Calignon invite les cultivateurs à renoncer à leur ancienne més thode; ils épargneront ainfi au moins un tiers de femences, & recueilleront au moins un quars de plus. Il pardonne d'avance à ceux qui tien c s

nent encore trop aux préjugés de la routine; pour effayer fur la totalité de leurs femailles ; mais il leur demande d'effayer dans deux our trois journaux, en faisant ces effais dans des terres égales à celles qui devront leur fervir de pieces de comparaison.

La feconde partie de fon mémoire eft confacrée à démontrer les avantages du chaulage. C'eft une chofe fi connue, & dont nous avons parlé tant de fois, que nous nous contenterions de renvoyer aux expériences de M. Tillet & de M. l'abbé Teffier, fi M. Calignon n'employoit une méthode particuliere. Nous ignorons jusqu'à quel point on doit y avoir de la confiance mais il affure qu'il l'emploie, depuis plufieurs années, avec un égal fuccès, & qu'elle eft le réfultat des confeils qui lui ont été donnés par plufieurs favans qu'il a confultés, entr'autres par M. Chauffier, profeffeur de chymie de l'a cadémie de Dijon, ce qui eft fans doute un préjugé de plus en fa faveur. Il obferve d'ail leurs qu'avec cette méthode, il a conftamment défendu fes bleds de la nielle & de la carie ou du charbon, tandis que l'autre avoit toujours été infuffifante, pour atteindre un but auffi intéreffant, ce qui peut dépandre d'un défaut de précautions.

Quoi qu'il en foit, nous croyons devoir rap porter ce qu'il dit à ce fujet. Pour chauler, fix mefures de froment mesuré fee (je parle toN» jours de la mesure de Dijon, pefant 45 livres ); fe place un tonneau défoncé d'un bout fur des » chamiers élevés affez hauts pour mettre def→

>> fus un rondeau ou cuveau. Je remplis ce ton> neau d'eau ordinaire jusqu'à la moitié. J'y fais > fondre huit à dix livres de chaux vive. Pen> dant que ma chaud fe fond, j'ai placé sur le → feu une grande chaudiere remplie d'eau à moitié, dans laquelle je fais diffoudre une livre de couperofe verte & une demi-livre d'alun. > J'ôte ma chaudiere du feu, & j'y mets cinq à > fix livres de cendres de bois neuf. Il faut avoir > l'attention de ne mettre les cendres que par

poignées, & d'avoir fous fa main de l'eau froide > pour arrêter l'effervescence du mêlange, qui ⚫ pourroit s'élever & s'épancher au-deffus des bords du vafe. Lorfque l'effervefcence eft paffée, je verfe ce mêlange fur la chaux fondue ; ⚫ je remue, j'agite bien la liqueur; après quoi → j'y mets peu-à-peu, & en remuant continuel> lement, avec un bâton, les fix mesures de bled qui ont été préalablement bien criblées. J'obferve que mon tonneau ne foit pas entiérement › rempli de bled, & que la liqueur s'éleve au→ deffus du bled de quatre à cinq pouces ; s'il

furnage des grains talés, il faut les enlever. Je » laiffe mon bâton dans le tonneau, pour re> muer le bled deux ou trois fois pendant l'ef

pace de tems qu'il y demeure. Mais, ce qu'il > importe de bien remarquer, je laisse ainfi trem> per mon bled pendant vingt-quatre heures, afin » qu'il foit bien pénétré d'eau, & disposé à une

germination prompte & vigoureufe, ce qui eft > le fecond objet que je cherche dans cette opé» ration. Au bout de ce tems, je fais écouler a l'eau du tonneau par un trou que j'ai pratiqué

« PreviousContinue »