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ruques démesurées qui cachoient fous un luxe exagéré des cheveux artificiels, la parure variée dont la nature a couvert la tête de l'homme, fes fouliers rehauffés en pointes, qui cachoient la forme du pied au- lieu d'en deffiner les contours: tout cela n'étoit-il pas un figne visible de l'efprit romanefque du monarque, & de la fauffe gran deur qui entroit alors dans l'efprit public?

Sous le regne de Louis XV, où le monarque occupé de fes feuls plaifirs ne laiffoit pas même à fon peuple l'illufion d'une grandeur apparente, lorfque les erreurs du prince n'avoient rien d'impofant & de magnifique, le peuple imita l'in fouciance de ceux qui le gouvernoient, l'esprit public difparut, & le peuple ne chercha plus dans le luxe que ce qui lui parut agréable & commode.

Dans ces derniers momens où le defpotisme perdit tout pour avoir abufé de tout, & où les exeès d'un gouvernement vieilli & corrompu rendirent aux François les droits primitifs des fociétés vierges & naiffantes, la liberté eut fon influencé fur les modes comme fur les mœurs, & l'on vit reparoître fans poudre & fans frifure les cheveux courts & bouclés qui flottoient fur le manteau des Grecs & fur la toge des Romains! Je fuis loin de condaniner cet ufage en lui-même; il eft digne d'un homme libre de ne pas perdre une heure chaque matin pour donner à fes che veux des formes que la nature leur a refufées! Il y a je ne fais quelle franchise à ne déguifer ni leur rareté, ni leur couleur, ni même la vieil leffe que trahiffent les cheveux blancs; mais cé

qui eft bien en foi-même peut devenir ridicule lorfqu'il contrafte avec d'autres ufages, & que Fenfemble de l'habillement préfente un tout & hétérogene & bizarre. Je dirois à nos jeunes pa triotes fi vous refpectez la parure naturelle & primitive en laiffant à vos cheveux leurs ondulations & leur couleur, pourquoi l'outrager dans nos habillemens : interrogeż un peintre ou un fculpteur, & demandez-lui s'il pourra retrouver les formes du corps humain dans ce gilet qui s'arrête à votre estomach, & dans ces culottes qui doublent la longueur de vos cuiffes aux dépens de votre ventre & de vos jambes. Croyez-vous en paroître mieux faits? Regardez les proportions de l'Apollon & de l'Antinous, & n'ordonnez plus à vos tailleurs de perfectionner ou de gâter la

nature.

LE VIEILLARD.

Journal de Paris.)

Ile. LETTRE DU VIEILLARD.

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Na dit fouvent que, pour avoir une bonne législation, il n'étoit pas toujours néceffaire de créer des loix nouvelles, & qu'il fuffiroit quelquefois de remettre en vigueur les loix anciennes que le tems avoir vieillies, & dont l'exécution étoit négligée. Cette opinion doit plaire aux vieillards, qui font bien ailes de voir qu'il n'eft pas néceffaire d'être moderne pour être fage!

L'affemblée nationale doit s'occuper des moyens d'abolir le duel, cette coutume barbare qui naquit chez les peuples polis; je demande s'il ne fuffiroit pas de mettre en vigueur l'édit que Pharamond, fuivant un auteur grave, publia il y a plus de 1300 ans ; je le tranfcris ici, fans en garantir cependant l'authenticité, pour le foumettre à l'opinion publique & à la fageffe des législateurs.

Pharamond, roi des Gaules, à tous les bons & fideles fujets, falut. D'autant qu'il eft venu » à notre connoiffance royale, qu'au mépris de > toutes les loix divines & humaines, la coutu> me s'eft introduite, parmi la nobleffe & les > gentilshommes de ce royaume, fur la moin

dre légere occafion, de même que pour de > grieves infultes, de s'appeller en duel, afin > de terminer ainfi leurs demêlés par eux-mê> mes & de leur propre autorité. Nous avons > cru qu'il étoit de notre devoir de remédier à

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cet abus; & après une recherche exacte des caufes qui produifent d'ordinaire de fatales di> vifions, nous trouvons que, malgré toutes les > regles que l'humanité, le pardon des injures, » qu'on peut regarder comme le plus grand ef>fort de l'efprit humain, eft avili & rendu in

fame, par cette malheureufe coutume; que > tous les devoirs de la fociété civile & d'une > converfation honnête font renversés par-là ; que > les hommes fiers, les impudens & les débauchés

infultent ceux qui font modeftes, discrets & > d'une vie exemplaire; qu'enfin la vertu eft > foulée aux pieds & le vice encouragé, danş

cette feule démarche, qui rend un homme › capable d'affronter la mort. Nous avons remar> qué d'ailleurs avec un extrême chagrin, que, > par une longue impunité, caufée par des af

faires plus importantes qui nous occupoient > alors, ces cruels défis font devenus honorables, & qu'il y a de la honte à les refufer. » Nous voyons auffi que les perfonnes qui ont le plus de mérite & de capacité, de même » qu'une plus forte paffion pour la véritable > gloire, fe trouvent plus expofées au péril qui nait de cette licence effrénée à ces causes, » après avoir mûrement réfléchi fur tout ce qui eft allégué ci-deffus, & confidéré qu'il eft déja » pourvu, par des loix antécédentes, à tous les > cas de cette nature, où il arrive que l'injure > eft trop fubite ou trop criante pour pouvoir la foutenir; & que de moindres injuftices, qui naiffent de l'ingratitude, ou de quelqu'autre > mauvais principe, ne fauroient tomber fans » un réglement général, nous avons réfolu de bannir de l'efprit de tous nos fujets cette cruelle mode, qui ne refpire que la vengean» ce, & d'ordonner ce qui s'enfuit :

1o. Toute perfonne qui enverra ou qui ac>ceptera un cartel, ou la postérité de l'un &

de l'autre, quoiqu'il ne foit pas fuivi de la > mort d'aucun des combattans, deviendra in» capable, après la publication de cet édit, d'avoir aucun emploi dans les terres & pays de > notre domination.

2o. Toute perfonne qui donnera des preu>ves convaincantes de l'envoi ou de l'accepta

>tion d'un cartel, obtiendra la jouiffance de tous

les biens meubles des deux parties intéreffées, » & leur hérier immédiat fera d'abord mis en poffeffion de leurs biens immmeubles, comme > s'ils étoient actuellement morts.

3°. » Dans tous les cas, où il s'agit d'un meur. > tre, & où les loix que nous avons déja données, admettent un appel; fi le prévenu eft > alors condamné, non-feulement il fouffrira la > mort, mais tous fes biens, meubles & im> meubles pafferont aufli-tôt à l'héritier immé > diat de la perfonne dont le fang a été répandu.

4°. Qu'il ne fera plus à l'avenir au ponvoir de notre perfonne royale, ni de nos fucceffeurs, de pardonner un tel crime, ou de rétablir les coupables dans leurs biens, hon»neurs & dignités.

» Donné à notre cour de Blois, le 8 février > 420, & la feconde année de notre regne. < (Journal de Paris.)

DETAILS curieux fur les chiffres.

THEOPHANE, hiftorien de Conftantinople,

qui vivoit dans le neuvieme fiecle, dit expreffément que les Arabes ont retenu les fignes numériques des Grecs, n'ayant pas de caracteres pour marquer tous les nombres. Quand on réfléchit aux progrès & à la communication des arts & des fciences de premiere néceffité, on eft

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