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Xaupy, doyen de la faculté, avaient cru devoir y faire pour ne point déplairé au gouvernement. Ces retranchements roulaient sur l'article de la puissance royale par rapport à la tolérance civile à l'égard des mécréans. Les sieurs Lecorgne Delaunay, chanoine et premier archidiacre de l'église de Paris, et Lelarge, supérieur du séminaire St-Nicolas, parlèrent dans cette assemblée avec beaucoup de véhémence et s'échappèrent jusqu'à dire sur cette matière des choses fort répréhensibles.

4 décembre. [Ordonnance de l'archevêque de Reims contre l'évêque de Boulogne, son suffragant, dans l'affaire du sieur Miellet, ancien curó du village de Sorgues. Asemblée des Chambres du Parlement, nouvel édit et nouvelle déclaration du Roi relative à la liquidation des dettes de l'Etat enregistrées.]

6 décembre. On s'aperçut au collège de Navarre, Montagne Ste-Geneviève, qu'on avait fait dans la sacristie de co collège un vol d'argenterie qui fut évalué environ à la somme de 10 à 12.000 livres, et on reconnut que l'auteur de ce vol était le sous-sacristain, homme marié et jouant du serpent à St-Etienne-du-Mont. Ce particulier avait conduit cette entreprise avec beaucoup de finesse et l'avait menée de fort loin. Comme il avait été metteur en œuvres, et que par conséquent il savait travailler les métaux, il avait eu l'adresse de substituer au pied du soleil qui était de vermeil, un autre pied de cuivre doré qu'il y avait adapté. Il avait fondu en différents temps l'argenterie provenant de ses vols et en avait fait des lingots. Lorsqu'il aperçut qu'il allait être découvert, il demanda à sa femme, comme un troublé, qu'elle lui allât chercher du poison, parce qu'il avait fait un mauvais coup, et qu'il n'avait point d'argent pour se sauver, sur quoi sa femme lui donna sa montre et sa tabatière et le détermina à partir sur le champ, ce qu'il fit. On n'a plus entendu parler depuis de cette affaire et on prétendit dans le public que, comme sa mère avait nourri le fils de M. le duc de Chevreuse, gouverneur de Paris, il avait été aidé de la protection de ce seigneur pour se mettre à couvert des poursuites de la justice.

11 décembre. Vers les 6 heures du matin, les 12 cmballeurs de l'Hôtel-Dieu, qui ont coutume de conduire au cimetière de Clamart le chariot des morts de cet hôpital, ayant insulté le long du chemin le prêtre qui les accompagnait, et se faisant un plaisir de courir fort vite pour lui faire pièce, cet

ecclésiastique en ayant porté ses plaintes à un sergent du détachement du guet qu'il rencontra sur la route, le sergent du guet leur ayant représenté qu'ils devaient aller plus doucement, ils lui répondirent par des injures et l'envoyèrent promener, disant qu'ils se moquaient de lui. Ce sergent, piqué de leur insolence, fit rassembler sur le champ un certain nombre de soldats des différents corps de gardes les plus voisins pour les attendre au retour, et comme ils tournaient la rue Gallande pour enfiler celle du Petit-Pont, le sergent s'étant présenté devant eux pour les arrêter, celui qui portait la sonnette lui en donna un coup au travers du visage, sur quoi le sergent qui se sentit blessé ayant crié à ses soldats de faire main basse, les 12 emballeurs se battirent contre le guet pendant un espace de temps assez considérable et ne se rendirent que lorsque 3 d'entre eux ayant été blessés assez dangereusement, ils furent enfin conduits chez le commissaire de la place Maubert qui en envoya 2 en prison; les autres furent renvoyés à l'HôtelDicu.

14 décembre. [Démarches de l'évêque de Boulogne contre les ordonnances de l'archevêque de Reims, son métropolitain, dans l'affaire Miellet.]

17 décembre. [Visa donné par l'archevêque de Lyon au sieur Beauregard, curé de Maine, pourvu en cour de Rome d'un canonicat de StCloud.]

17 décembre. [Aventure d'un musicien de l'Opéra, suivi vers minuit par un particulier qui lui demande l'aumône et n'accepte que 6 livres sur les douze que lui offrait le musicien.]

18 décembre. Les chambres du Parlement s'étant asscmblées, et un de Messieurs ayant dénoncé les lettres patentes sur lesquelles le jugement du procès du sieur de Chanvallon, (ci-devant intendant de l'île de Cayenne) et consorts, avait été évoqué à la personne du Roi, et confié en conséquence à une commission, qui, suivant les mêmes lettres patentes, devait agir sous les ordres du sieur Chardon- maître des requêtes, cidevant lieutenant particulier au Châtelet où il avait eu plusieurs démêlés, envoyé depuis aux îles Sainte-Lucie d'où on l'avait rappelé, comme étant les sus dites lettres patentes contraires au bien commun de tous les citoyens, comme n'ayant été enregistrées suivant l'usage ordinaire par aucun tribunal, pas même par celui de la Commission, et comme le procès ayant été instruit contre le dit sieur Chanvallon et consorts,

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sans qu'au préalable il ait été prononcé contre eux aucun décret, qui est la première et comme la plus essentielle des formes qui ont coutume de s'observer dans toute procédure criminelle : la matière mise en délibération, il fut arrêté que le sieur Chardon serait invité de venir prendre séance en l'assemblée des Chambres, le lendemain matin pour s'y disculper sur les soupçons qu'on avait conçus de sa conduite dans cette affaire, à l'effet de quoi, il lui serait envoyé un huissier de la Cour.

19 décembre. [Assemblée des Chambres du Parlement,compte-rendu par le Procureur général concernant l'affaire du sieur Chardon, maître des Requêtes; nouvelle dénonciation de faits personnels au dit sieur Chardon arrêté pris en conséquence.]

22 décembre.- [Assemblée des Chambres du Parlement : une grande députation mandée par le roi se rend à Versailles. Discours de S.M. à cette députation; compte-rendu de ce discours, remise à statuer.]

23 décembre. Ce jour, on apprend que le sieur Coeur-deRoi, Premier président du Conseil souverain de Lorraine, établi à Nancy, qui avait ouvert l'avis de donner l'expulsion à tous les Jésuites de cette province, et le second président qui ayant opiné le premier, s'était opposé à cet avis et avait été suivi de toute la chambre, étaient mandés l'un et l'autre à la suite de la Cour sur les plaintes formées contre cette démarche par la Reine, dangereusement malade, qui avait témoigné au Roi sa surprise de ce qu'on avait pas pour elle le ménagement d'attendre qu'au moins elle cut les yeux fermés pour procéder contre ces Pères dans cette province.

23 décembre.-[Assemblée des Chambres du Parlement; arrêt vigoureux contre le sieur Chardon maître des requêtes, imprimé et publié. Le Premier Président du conseil souverain de Lorraine mandé à la suite de la Cour. Mort funeste du sieur Rogeault.]

29 décembre. [Le Parlement mandé par le Roi se rend à Versailles en corps de cour et porte ses registres à S. M. qui y bâtonne elle-même l'arrêt rendu contre le sieur Chardon, maîtres des requêtes Arrêt du conseil qui casse et annule cet arrêt.]

30 décembre. [Assemblée des Chambres du Parlement sur ce qui s'était passé la veille à Versailles, commissaires nommés.]

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1768

5 janvier. — [Les Magistrats du Grand Conseil reprennent l'exercice de leurs fonctions; l'enregistrement qu'ils font de lettres patentes pour leur rétablissement contraire aux droits du Parlement.]

8 janvier. Dans la nuit de ce jour au vendredi suivant, 3 femmes furent brûlées dans leur chambre pour s'être endormies sur des chaufferettes, attendu la rigueur du froid, l'une sur la paroisse St-Eustache, l'autre sur la paroisse StBenoît et une autre sur la paroisse St-Paul.

12 janvier. [Assemblée des Chambres du Parlement : compte-rendu des lettres patentes portant rétablissement du Grand Conseil ; arrêté pris en conséquence.]

13 janvier. La débâcle des glaces commença vers les 11 heures du matin avec un fracas horrible. Elle fut occasionnée par une crue d'eau de 5 pieds, des plus subites. Elle fut telle que depuis longtemps personne ne se souvient d'en avoir vu une semblable. Grand nombre de bateaux furent brisés et l'on perdit beaucoup de denrées de toute espèce. Elle ne finit pas le même jour et ne s'acheva que le vendredi suivant, 15 du même mois, vers les 9 heures du soir. Comme le froid qui avait commencé la nuit du 21 au 22 décembre précédent avait été très considérable jusqu'au lendemain des Rois et, suivant certains thermomètres, avait excédé les derniers jours d'un degré celui de 1709, les glaçons avaient 10 pouces d'épaisseur et s'unirent souvent ensemble de manière qu'ils ressemblaient à d'énormes blocs de pierre les plus gros qu'on tire des carrières. On fit déménager par ordre tous ceux qui demeuraient près les ponts et on craignit beaucoup surtout pour le pont Marie et pour le pont Notre-Dame. Le pont de Sèvres eut beaucoup à souffrir, celui de Neuilly fut mis dans un état à ne plus permettre aux voitures de passer, ce qui détermina le Conseil du roi, attendu le projet de nouvelle construction de ce pont et de celui de Sèvres, à donner des ordres pour qu'il fût pris dans St-Cloud des alignements à l'effet d'aviser aux moyens d'y établir la grande route de Normandie et de Bretagne.

18 janvier. [Affaire assez sérieuse entre le lieutenant du roi de la ville de St-Quentin et le lieutenant criminel de la même ville.]

1er février. Il se répand dans le public que M. le duc de Fronsac, fils du maréchal duc de Richelieu, veuf depuis quelque temps, qui avait conçu la passion la plus vive pour une jeune demoiselle très jolie, fille d'un ancien marchand de la rue St-Honoré, qu'il suivait depuis fort longtemps, et qui se trouvait, fêtes et dimanches, à la même messe que la mère et la fille avaient coutume d'entendre dans l'église des religieuses de la Madeleine de la Ville-l'Evêque, au sortir de laquelle église il prit une fois sur lui de les accoster toutes deux et de faire à la mère différentes propositions, se répandant beaucoup en éloges sur la beauté de la fille, propositions que la mère avait constamment. rejetées et qui lui firent même prendre le parti d'aller entendre la messe dans d'autres églises; ce qui n'avait pas empêché que le duc de Fronsac s'obstinât toujours à la suivre comme auparavant, jusqu'à ce qu'enfin, las de faire de vaines poursuites, il se détermina à user d'un stratagème assez singulier qui fut d'aller un soir assez tard, avec un nombre de gens appostés crier au feu près du logis de cette dame, cherchant à lui persuader que le feu était chez elle, pour l'engager à sortir de son appartement avec sa fille, faisant même plus, les déterminant à descendre dans la rue pour observer où était le feu. Ce qui réussit assez bien pour que la demoiselle s'étant trouvée un instant sans madame sa mère, on saisit l'occasion pour lui jeter une couverture sur la tête, l'enlever et la placer dans un carosse qui n'était pas loin de là. La mère revenue de son effroi et cherchant en vain sa fille qu'elle avait crue remontée chez elle, après avoir fait inutilement toute perquisition possible dans le voisinage, fut porter ses plaintes à M. le Lieutenant de police, qui mit sur le champ son monde en campagne pour découvrir ce que la jeune personne pouvait être devenue. On la trouva chez une femme de mauvaise vie; elle donna les preuves de la plus vive douleur à l'exempt qui fit cette découverte, annonçant qu'elle était une fille perdue et déshonorée. M. le lieutenant de police ayant fait en Cour son rapport sur cette affaire, les ducs et pairs s'assemblèrent plusieurs fois, pour aviser au parti qu'il y aurait à prendre sur un délit aussi grave, commis par un d'entre eux. Pendant leurs assemblées et avant qu'ils eussent statué, des personnes de considération s'employèrent pour négocier un accomodement et persuadérent aux père et mère de la demoiselle qui d'abord paraissaient bien décidés à poursuivre la réparation d'un outrage aussi

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