Page images
PDF
EPUB

paroisse, avec des billets imprimés qui tinrent lieu de billets d'enterrement.

3 février.

Les Chambres du Parlement s'assemblèrent pour recevoir la réponse faite la veille par le Roi au Premier Président accompagné de deux présidents à mortier qui avaient été chargés de remettre à S. M. les secondes représentations arrêtées le 30 janvier précédent sur l'affaire du Parlement de Bretagne (ces représentations étaient de la plus grande force) Attendu que cette réponse portait en substance que le Parlement de Bretagne avait repris ses fonctions, et que S. M. était dans l'intention de lui confier le jugement du procès des accusés, il fut arrêté qu'on travaillerait à de nouvelles représentations qui seraient faites dans trois jours et on nomma sur le champ des commissaires pour les rédiger. Ces représentations furent effectivement lues, à l'assemblée des chambres du vendredi suivant 7 du même mois, et il fut arrêté que les gens du roi iraient en cour savoir le lieu, le jour et l'heure où elles pourraient être présentées à S. M.

7 février. [Extrait de la Gazelle de France, article de Rennes.]

9 février. On apprit par des lettres de Metz que le mercredi 5 du même mois, le roi de Pologne, duc de Lorraine et de Bar, père de notre Reine, qui est actuellement dans sa 89e année, et qui fait sa résidence 'ordinaire à Lunéville, à 15 lieues de cette ville, venant à 7 heures du matin de finir ses prières qu'il fait toujours seul, s'étant levé pour poser sa pipe sur la cheminée, s'approcha si près du feu que sa robe de chambre fut enflammée à l'instant. Comme il est aveugle depuis quelque temps, il ne s'aperçut de cet accident que lorsqu'il en sentit les effets; il appela du secours. Le nommé Sister, son premier valet de chambre, entra sur le champ, suivi de deux autres ; ils se jetèrent sur le roi, le mirent à terre, le dépouillèrent de force en lui arrachant sa robe, sa veste et sa culotte déjà en feu. Le roi fut blessé grièvement, cependant on crut pouvoir espérer qu'il n'en résulterait rien de funeste, les brûlures n'ayant formé que de simples cloches ou ampoules. Toute la jambe gauche, une partie de la cuisse gauche, la peau du bas ventre et une partie de la joue gauche ont été prises du feu; il souffre beaucoup, mais la main gauche est ce qu'il a de plus endommagé et deux minutes plus tard S. M. était

brûlée vive. Le sieur Sister est estropié pour toujours ayant la main droite entièrement brûlée; il lui reste la gloire d'avoir sauvé le roi puisque sans son adresse S. M. périssait.

[ocr errors]

11 février. Le Parlement qui s'était assemblé la veille le matin et le soir, quoiqu'il ne soit pas d'usage d'entrer au Palais les jours gras, et cela sur des avis reçus que non-seulement la commission de Bretagne n'était point révoquée, comme le Roi le leur avait fait entendre dans sa dernière réponse, mais qu'au contraire elle continuait toujours ses opérations par rapport à l'instruction du procès des accusés, crut devoir faire des protestations contre tout ce que pouvait tenter ou entreprendre la dite commission, qu'on savait avoir été transférée à St-Malo par de nouveaux ordres, et arrêter en même temps, de nouvelles remontrances qui seraient présentées au Roi le jeudi suivant. La délibération fut tenue secrète, on eut même la précaution de faire retirer les huissiers hors de la Grand Chambre.

[ocr errors]

13 février. M. le Premier président s'étant rendu à Versailles assisté de deux présidents à mortier, en vertu de l'arrêté du mardi précédent, le Roi lui fit la réponse suivante : « Mon Parlement aurait dû attendre avec respect et confiance l'effet de mes intentions que j'avais bien voulu lui faire connaître. Elles n'ont point changé. J'ai rappelé en conséquence la commission de St-Malo et j'ai laissé à mon Parlement de Bretagne la connaissance du procès criminel dont vous me parlez; au surplus, j'examinerai vos remontrances et vous ferai savoir le jour où je jugerai à propos d'y répondre. »

14 février.

[Compte-rendu au Parlement de la réponse du Roi par le Premier président : parti pris en conséquence.]

19 février. Le Parlement informé que M. le chevalier de la Chalotais, chargé de solliciter à Paris en faveur de son père et de son frère, avait été arrêté à Versailles, conduit à la Bastille et de là transféré à St-Malo, et que Mlle de la Chalotais avait recu des ordres de se retirer dans un couvent, ayant tout lieu d'ailleurs de soupçonner que les intentions du Roi, manifestées si formellement dans sa dernière réponse, n'avaient pas encore été effectuées, arrêta, toutes les chambres assemblées, qu'il serait nommé des commissaires qui travailleraient le soir même à de quatrièmes représentations, lesquelles seraient lues

JOURNAL DE HARDY I

3

le lendemain à l'assemblée et portées le même jour à S. M. par les gens du roi.

Le même jour, le prince de Condé étant allé jouer à la paume rue Mazarine, et ayant jugé à propos de s'y faire apporter à dîner, ceux de ses gens qui étaient chargés des mets furent arrêtés par les suppôts de la police préposés pendant le carême pour veiller à ce qu'il ne se transporte point de gras dans les rues, et ayant fait résistance sur ce qu'ils appartenaient au prince, cela occasionna un bruit assez considérable, on se battit de part et d'autre, les plats furent renversés. Le peuple se rangea du côté des domestiques du prince, à qui on fut obligé de faire à dîner une seconde fois. Cette affaire ne laissa pas que de causer de l'inquiétude au lieutenant de police.

[ocr errors]

20 février. [Les gens du Roi sont chargés de porter à Choisy les nouvelles représentations lues dans l'assemblée des chambres concernant Paffaire de Bretagne. Réponse qui leur est faite de la part du Roi. Dénonciation faite en la chambre du conseil du Châtelet d'un refus de sacrement au village de Montmagny, près St-Denis; parti que prend cette compagnie.]

21 février. [Le Procureur du roi au Châtelet rend compte à la compagnie de ses démarches auprès de l'archevêque de Paris.]

22 février.

[ocr errors]

[Rapport de M. Duval, conseiller au Châtelet, des informations faites à Montmagny; parti pris par la compagnie sur le vu de ces informations.]

23 février. Les gens du roi s'étant rendus à Versailles suivant l'ordre qu'ils avaient reçu le jeudi précédent à Choisy, pour y attendre la réponse du Roi, S. M. leur remit une lettre cachetée qui portait en substance qu'Elle ferait avertir son Parlement quand elle jugerait à propos de lui faire connaître ses intentions.

25 février.

[Parti pris par le Parlement, chambres assemblées, sur la lettre clause présentée par les gens du roi.]

26 février. [Assemblée des Chambres du Parlement concernant l'affaire de Bretagne ; avis très fort contre le rapporteur et le ProcureuTM général de la Commission. Le sieur Duval, conseiller au Châtelet se transporte par ordre de sa compagnie au village de Montmagny pour faire administrer la malade à laquelle on refusait les sacrements; com ment se fait cette administration; rappel du curé de Montmagny exilé depuis 14 ans.f

27 février. [Notification faite aux gens du roi par les chambres assemblées sur ce qu'ils ne s'étaient point trouvés au Parquet pour donner

leurs conclusions dont on avait besoin dans l'affaire de Bretagne. Le Premier président reçoit des ordres de porter le lendemain à Versailles les protestations faites par le Parlement contre les entreprises de la commission nommée pour l'affaire de Bretagne.]

28 février. On apprit par des lettres de Bretagne que le Parlement de Rennes, composé pour lors d'environ trente de ses membres, avait enregistré des lettres patentes qui lui enjoignaient de juger définitivement le procès des accusés, et que ce prétendu Parlement était extrêmement offensé des remontrances de celui de Paris, qui avaient été dénoncées par un des conseillers comme lui étant injurieuses. Sur quoi il avait été arrêté que les gens du roi seraient chargés d'en faire l'examen, et que, pendant ce temps, le Parlement de Paris serait sommé de déclarer s'il avouait les dites remontrances.

La Gazelle de France de ce même jour annonça que Stanislas Ier, roi de Pologne, duc de Lorraine et de Bar, père de notre reine, était mort à Lunéville, le dimanche au soir,' 23 du même mois, des suites de l'accident qui lui était arrivé le mercredi 5. Les derniers sacrements lui avaient été administrés la veille par le cardinal de Choiseul, archevêque de Besançon. Il était dans sa 89e année.

[ocr errors]

Jer mars. On fit dans l'église Notre-Dame la cérémonie du catafalque et un service solennel pour le repos de l'âme de M. le Dauphin. L'archevêque de Paris officia pontificalement. M. le Dauphin, fils du défunt était à la tête du deuil, dont le duc d'Orléans et le prince de Condé firent les honneurs. Trente six prélats, tant archevêques qu'évêques, assistèrent à ce service ainsi que toutes les cours et l'Université suivant l'usage. L'archevêque de Toulouse (de Brienne) prononça l'oraison funèbre. M. le Dauphin arriva à l'archevêché à 10 heures et demi du matin et y dîna, ne devant se rendre à l'église qu'à midi. Il était plus de 3 heures lorsque la cérémonie fut entièrement achevéc. On laissa le catafalque illuminé pendant plus d'une heure, afin que le public pût jouir de ce spectacle qui fut trouvé des plus brillants.

Le même jour, à 7 heures du matin, les chambres du Parlement s'assemblèrent, jusqu'à l'heure où l'on partit pour Notre-Dame, où presque tout le Parlement se rendit. C'était pour recevoir la réponse que le Roi avait faite la veille au Premier président et aux deux présidents à mortier, qui lui avaient

porté, suivant les ordres reçus de S. M., les protestations du 11 février contre la commission de Bretagne en formes légales. Cette réponse portait que le Roi leur ferait incessamment connaître ses intentions. On ne sut point ce qui fut arrêté sur cette réponse.

[ocr errors]

2 mars. - Le Roi cassa dans son conseil l'arrêté pris par le Parlement de Paris le 11 février portant protestations contre tout ce qui s'était fait ou pouvait se faire par la commission de Bretagne. 4 mars. Les Chambres du Parlement s'assemblèrent à 11 heures du matin, mais on ne put savoir le résultat de leurs délibérations.

Le même jour, dans l'après-midi,le Roi reçut dans sa chambre, étant dans son fauteuil, au milieu de ses ministres et des grands de sa cour, les nouvelles remontrances que lui apportait une députation de treize membres du Parlement de Rouen qu'il avait mandés. Après avoir pris ces remontrances, il leur dit de se retirer et qu'il allait tenir son conseil. Quelque temps après, il les rappela, leur fit une sévère réprimande et leur remit la réponse faite la veille au Parlement de Paris, qu'il leur ordonna de méditer, et à laquelle il leur enjoignit très expressément de se conformer, sous peine d'encourir son indignation. Ces députés qui avaient eu défense de passer par Paris, eurent ordre de s'en retourner sur le champ.

5 mars.

[L'archevêque de Paris reçoit des ordres du Roi de faire faire des prières de quarante heures pour le rétablissement de la santé de la Reine.]

[ocr errors]

6 mars. Les Chambres du Parlement s'assemblèrent vers les 11 heures du matin, et cette assemblée dura jusqu'à 3 heures après-midi. Tout ce qu'on put savoir, c'est que les gens du roi avaient été chargés de se retirer sur le champ, par devers S. M. pour savoir le lieu, le jour et l'heure, où elle jugerait à propos de recevoir tout son Parlement en corps.

8 mars. Les gens du roi qui s'étaient rendus la veille à Versailles, en conséquence de l'arrêté fait toutes les chambres assemblées, qui les chargeait de remettre au Roi les motifs par écrit de la députation que son Parlement demandait à lui faire, annoncèrent à l'assemblée des Chambres, qui se fit à 11 heures du matin, que S. M. ne voulait point que son Parlement vint en entier, qu'il recevrait seulement la députation de qua

« PreviousContinue »