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un règlement admirable pour l'arrivée et le départ des voitures, au commencement et à la fin du spectacle, ainsi que pour procurer partout aux environs une circulation libre pendant tout le temps qu'il durerait. Ce règlement qui établissait le bon ordre, et empêchait toute espèce de confusion avait été imprimé et affiché plusieurs jours auparavant et ne devait avoir lieu que pour les six premières représentations seulement. Comme on n'avait point fixé le nombre des billets de parterre qui furent distribués à profusion et sans mesure, plusieurs personnes s'y trouvèrent très incommodées de la grande chaleur et de l'odeur de la peinture et les cris de la multitude qui était fort mal à son aise, empêcha qu'on ne put exécuter le premier acte comme il aurait dû l'être. Les bâtiments neufs du Palais-Royal se trouvaient achevés à cette époque, excepté l'aile gauche donnant sur le jardin, dont il paraissait qu'on avait abandonné pour un temps les réparations ainsi que de la galerie qui conduisait aux deux ailes, qu'on s'était d'abord proposé d'abattre et de changer en une belle grille de fer. On parlait beaucoup d'une grande place qu'on avait dessein de former en face du palais, en reculant le Château-d'Eau de la profondeur de trois maisons et l'on avait déjà démoli la maison faisant le coin de la rue St-Honoré et de la rue Fromenteau qui ne devait point être rebâtie, le terrain en étant destiné à former un espace d'angle pour un des côtés de la place. On voyait même à la jambe étrière de la maison voisine, qui venait d'être reconstruite, la naissance d'un cintre d'arcade qui paraissait devoir figurer dans l'architecture de la place projetée.

19 janvier. [Extrait de la Gazette de France relatif au procès du sieur Billiard. Lettres patentes concernant les demandes en interdiction enregistrées au Parlement. Déclaration du Roi concernant les unions de bénéfices également enregistrée. Le curé de St-Jacques de la Boucherie quitte son presbytère et disparaît sans qu'on sache ce qu'il était devenu.]

21 janvier.

[Une députation du Parlement de Rennes, concernant l'affaire de M. le duc d'Aiguillon et de MM. de la Chalotais, a audience du Roi à Versailles.]

22 janvier. [Assemblée des Chambres du Parlement, réponse du Roi concernant la déclaration relative à la caisse des amortissements et l'édit des 2 sols pour livre du dixième, enregistrée. Mort et inhumation de M. Le Peletier, ancien Premier Président du Parlement. Nouvelles concernant les magistrats du Conseil souverain du Port au Prince.]

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25 janvier. [Bruits publics relatifs à l'inoculation. Billets distribués aux cochers de place pour parvenir à retrouver le curé de StJacques de la Boucherie.]

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31 janvier. [Le général de l'ordre des Prémontrés commence son travail chez l'archevêque de Narbonne pour la réforme des statuts.]

1er février. [Arrêt du Conseil d'Etat qui soumet au dixième les pensions et gratifications.]

2 février.

[Le sieur Gardin, principal du collège de Louis-le-Grand, maintenu dans sa place par ordre du Roi.]

3 février. On apprend que l'archevêque de Reims avait obtenu du Roi que tout ce qui se trouvait pour lors imprimé de la nouvelle édition du Dictionnaire encyclopédique qui se faisait aux frais des libraires Dessaint et Panckouke, chez le sicur Lebreton, imprimeur, rue de la Harpe, serait et demeurerait saisi (il y en avait, disait-on, trois volumes totalement finis) et que le lieutenant de police, qui d'abord avait consenti, sur les représentations des libraires, que cette édition fût déposée dans un magasin sur lequel il avait apposé les scellés, avait ensuite donné de nouveaux ordres pour que le tout fut transporté au château de la Bastille (1) et que le sieur d'Hémery avait été chargé d'exécuter ces ordres. On assurait que le chancelier avait reçu des libraires un présent de 1000 louis pour favoriser cette entreprise et que le sieur Corby, commissaire des guerres et ci-devant colporteur de livres, en avait reçu autant pour soudoyer les différentes personnes qui pourraient aider ces mêmes libraires de leur crédit.

Le même jour, à la Comédie-Italienne, vers le quatrième acte de la pièce qui s'y représentait et qu'il ne fut pas possible d'achever, il s'éleva une voix qu'on crut être partie de l'amphithéâtre et qui se mit à crier au feu, ce qui excita sur le champ la plus grande confusion, tout le monde cherchant à se sauver promptement. Quelques personnes mal intentionnées et qui probablement avaient occasionné tout exprès ce tumulte en profitèrent pour escroquer autant qu'elles le purent diamants et bijoux. On débitait que l'on avait arrêté 8 jeunes gens, tous

(1) Sur cette saisie qui fut maintenue jusqu'en 1776, on consultera le dossier 10305 de l'inventaire des Archives de la Bastille rédigé par M. F. Funck-Brentano (tome IX du Catalogue des Manuscrits de l'Arsenal). et l'article consacré à la première Encyclopédie dans la Grande Encyclopédie (tome XV), ainsi qu'un opuscule intitulé Un Factum inconnu de Diderot 1901, in-8).

très bien vêtus et qui composaient une petite société de filous qui commençait à faire l'essai des opérations qu'elle projetait pour les fêtes du mariage du Dauphin.

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5 février. Le même jour on apprend que la sentence du Châtelet de l'année dernière qui avait admis le sieur Mouton, ci-devant élève de notre Académie de peinture Royale à Rome, à faire la preuve par écrit des faits qu'il avançait contre le sieur Natoire, directeur de la même Académie, avait été confirmée au Parlement, et qu'on se disposait à juger au Châtelet sur cette preuve, sauf encore l'appel au Parlement.

5 février. [Départ de l'archevêque de Lyon pour son diocèse ; it donne le visà au curé de Pomponne. Lettre de l'archevêque de Paris

au desservant de St-Séverin.]

7 février. Ce jour, vers les six heures du soir, il s'éleva une espèce d'ouragan qui dura jusqu'au lendemain six heures du matin; le vent était si furieux qu'il faisait tomber de tous côtés dans les rues beaucoup de tuiles et de plâtras; il y eut des arbres de déracinés en plusieurs endroits, un entre autres dans la grande allée du Luxembourg qui conduit aux Carmes deschaux. Nombre de carreaux de vitres furent cassés en différentes maisons et étant obligé de sortir à six heures du soir, je fus presque enlevé de terre sur le quai de la Tournelle, près de l'hôtel de Nesmond.

8 février. Ce même jour, il se répand que le duc de Choiseul avait fait lecture au conseil du Roi d'une lettre qu'il avait reçue de notre ambassadeur à la cour d'Espagne, contenant un détail des mieux circonstanciés du sage parti que venait d'embrasser le roi Charles III, pour remédier au dérangement de ses finances. Sur ce que les ministres de ce monarque lui avait proposé : d'abord de supprimer des pensions qui se payaient aux descendants de personnes qui avaient rendu des services à l'Etat, mortes depuis fort longtemps, et d'imposer ensuite sur ses peuples de nouvelles charges en exigeant d'eux quelque imposition, ce prince bienfaisant, après avoir demandé si l'on ne connaissait point d'autres remèdes que ceux que l'on venait de lui indiquer, avait répliqué: « J'en connais un, moi, dont je crois devoir faire usage avant que de recourir à ceux-là ; c'est de « commencer par établir la plus grande économie dans les ⚫ dépenses de ma maison, et d'ordonner, jusque dans mes dépen

« ses même personnelles, tous les retranchements justes et << raisonnables. Quand cette opération sera achevée, si elle ne « se trouve pas suffisante pour fournir les moyens de liquider « les dettes de mon Etat, on verra à prendre un autre parti « qui puisse me mettre dans le cas d'acquitter tous mes enga«gements et l'on ne trouvera nulle résistance dans mes peuples. « à m'aider autant qu'il le deviendra nécessaire, suivant les <«< circonstances, quand ils verront que je leur aurai montré « l'exemple le premier ». Tous les ministres avaient applaudi, suivant la lettre, à des dispositions si équitables et si généreuses. Le Roi de France et tous ceux qui assistaient à son conseil avaient, dit-on, écouté ce récit avec la plus grande attention et dans le plus grand silence. Tout le monde s'était retiré sur le champ sans se permettre de dire en aucune manière son avis sur un évènement qui semblait donner les plus fortes leçons dans un temps où il eût été plus nécessaire que jamais d'en faire usage. Le seul abbé Terray, nouveau contrôleur général, avait dit en s'en allant qu'un arrangement de cette espèce était bon pour l'Espagne, mais qu'en France, le roi devait se conduire tout différemment.

8 février. [Le sieur Billiard, caissier de la ferme des Postes, décrété de prise de corps.]

9 février. Ce jour, l'abbé Delamotte, prêtre du diocèse d'Orléans, l'un des docteurs exclus de la Faculté de théologie de Paris pour l'affaire de la constitution Unigenitus, chanoine et archidiacre de Sézanne, en l'église cathédrale de Troyes, ancien grand vicaire de feu M. Bossuet, évêque de cette ville, d'où il était exilé depuis nombre d'années, avec permission cependant de demeurer à Paris ou aux environs, et qui vivait retiré chez les prêtres de l'Oratoire de Notre-Dame des Vertus, au village d'Aubervilliers, meurt à 11 heures du matin, de la petite vérole, âgé de 74 ans, rue St-Dominique, faubourg St-Germain, maison de la dame de Chastelus. On regardait, et avec raison, cette mort comme une suite malheureuse de la pratique de l'inoculation, car dans cette même maison, on venait d'inoculer une personne, et on en avait fait un mystère. Cet évènement faisait désirer encore davantage qu'on pût prendre les moyens d'en arrêter les progrès. Dom Deforis, religieux bénédictin, du couvent des Blancs-Manteaux, et l'un des auteurs chargés du travail concernant la collection complète de

tous les ouvrages du grand Bossuet, dont on se proposait de donner une nouvelle édition, imaginant sans doute qu'il trouverait chez cet ecclésiastique beaucoup de renseignements et même des manuscrits dont il pourrait faire usage, crut devoir se transporter chez le lieutenant de police, dès qu'il fut instruit de son décès, et obtint de ce magistrat un ordre du Roi à l'aide duquel il se fit assister d'un commissaire et força le sieur Delamarre, exécuteur testamentaire, de lui remettre tous les papiers et tous les manuscrits du défunt. Quelques personnes blamèrent les procédés de ce religieux qui leur parut violent et assez extraordinaire.

Le même jour, on est assuré que les bruits qui avaient couru le mois précédent d'une suspension totale des travaux du bâtiment de l'église Ste-Geneviève, étaient destitués de tout fondement et que ce qui avait pu donner lieu à ces bruits, c'était le parti pris par les entrepreneurs de vendre leurs chevaux qui leur étaient à charge pendant l'hiver, se proposant d'ailleurs d'employer à l'avenir les voituriers ordinaires pour transporter la pierre, ne devant faire usage que du St-Leu, jusqu'à l'entablement qu'on devait poser cette année, après lequel il ne resterait plus qu'une seule assise de pierre dure à placer pour asseoir le commencement des voûtes. Il n'en était pas moins vrai que le sieur Patte, architecte, avait donné un mémoire pour décrier le plan du sieur Soufflot; mais ce mémoire ne paraissait pas avoir fait une grande impression et n'avait point produit l'effet qu'il avait plu au public de lui attribuer.

9 février. [Desservant nommé à St-Jacques de la Boucherie. Bruits relatifs à l'évasion du curé.]

12 février. Ce jour, Henry Camille, marquis de Béringhen, chevalier des ordres du Roi, premier écuyer de S. M., gouverneur des ville et citadelle de Châlons-sur-Saône, lieutenant général pour S. M. de la province de Bourgogne en Châlonnais, gouverneur du château de la Muette et de Madrid, capitaine du parc et des chasses du bois de Boulogne, meurt subitement après dîner de la goutte remontée dans la poitrine, en son hôtel, rue St-Nicaise, âgé de 76 ans.

15 février. Les grand-prieur et chanoines réguliers de l'abbaye royale de St-Victor, font célébrer la messe annuelle et solennelle, fondée en 1764, pour la conservation du Roi et de la famille royale. (Le Roi entrait ce même jour dans la 71o

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