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minutieufe. Ses intentions font certainement trèslouables, & on ne manquera pas de profiter des obfervations qu'il propofe en fi grand nombre. Une nouvelle compagnie, qui vient de s'affocier pour travailler à la perfection de l'architecture navale en Angleterre, & qui compte entre fes membres les gens les plus diftingués de ce royau me, ne manquera pas d'accueillir ces réflexions', & d'en faire ufage pour le bien public, dans un département auffi effentiel aux vrais intérêts, à la gloire & à l'exiftence même de la GrandeBretagne.

(Analytical review. )

PLAN d'éducation nationale, confidérée fous le rapport des livres élémentaires, par ETIENNE BARRUEL. A Paris, chez Defenne, libraire, au Palais-Royal, & au Luxembourg; & chez Moutard, lib.-impr. rue des Mathurins.

ET ouvrage, comme le dit l'auteur luimême, eft le fruit d'une longue expérience. Le point de vue fous lequel il envifage l'éducation eft entiérement nouveau; & quoiqu'il femble ne la confidérer que du côté des livres élémentaires, cela n'empêche pas que, chemin faisant, il ne traite la queftion fous tous fes rapports moraux & politiques. Nous croyons, en effet, comme lui que l'important problême de l'éducation feroit aux trois quarts réfolu, fi nous avions un

cours de livres élémentaires qui renfermât un corps complet de doctrine, & qui, prenant les enfans dès le berceau, les conduisît jufqu'à la earriere qu'ils doivent un jour embraffer. Il remonte même plus haut; car, confidérant les effets terribles que les paffions des femmes produisent fur le fruit qu'elles portent, cette réflexion le conduit naturellement à penfer qu'un plan d'éducation bien ordonné, doit commencer par tracer aux femmes enceintes les devoirs que leur impofe leur groffeffe; & il propofe pour cela un catéchifme, qui renfermera de plus tout le code de l'éducation de l'enfance.

De-là il paffe à l'éducation des nourrices, & veut qu'elles aient auffi leur code particulier, fur lequel elles fubiront un examen. Vient enfuite l'introduction du premier âge jusqu'à fix ou fept ans, laquelle il réduit à favoir lire & folfier, écrire & deffiner. Tous ces arts doivent marcher enfemble, & il faut voir dans l'ouvrage même toutes les idées philofophiques de l'auteur à ce fujet. Après avoir tracé le plan des livres élémentaires deftinés à ces exercices, l'auteur entre dans le détail des méthodes d'enfeignemens qui convienneut à chacun, & c'eft-là fur-tout qu'il nous paroît avoir profondément médité fon fujer.

Après avoir ainfi traité à fond l'éducation du premier âge, il paffe à celle du feconde âge, où il parle de l'inftruction qui convient aux petites & aux grandes écoles. Ce morceau ne laiffe rien à défirer, foit dans ce qui regarde l'organisation de ces différentes écoles, foit dans ce qui a rapport aux diverfes connoiffances dont elles doivent

s'occuper. Tout eft prévu, & il n'eft aucuns détails dans lefquels l'auteur ne foit entré. Jufqu'à pré fent nous avons eu d'excellens ouvrages fur l'éducation en général; mais il nous manquoit un plan, & celui-ci remplit, dans toute fon étendue, l'idée qu'on peut attacher à ce mot. L'auteur veut furtout que l'on faffe un grand usage de la gymnastique dans les colleges, & qu'on n'y renferme plus les jeunes gens dans des claffes ou des cours fort étroites. » Il faut, dit-il, qu'ils puiffent, à toutes les heures, refpirer un air libre & pur, braver » les ardeurs du foleil ou les rigueurs des fri mats. Voyez ces arbuftes emprisonnés dans des ferres, fous la garde d'une perfide industrie, » qui défend à l'air tout accès: dans quel état » d'humilité & de rachitifme ils végetent! Si » quelques-uns portent des fruits, ou fe cou > ronnent de fleurs, ce font autant de témoins

qui dépofent contre leur impuiffance. Jettez > les yeux fur cette foule d'animaux, élevés à > l'ombre des palais de nos rois; tous font fourds > au premier vœu de la nature, tous ne pré» fentent que l'image d'une dégradation qui femble déshonorer nos climats. Voyez encore ces plantes que le luxe appelle à grands frais fur > nos tables; c'eft en vain que l'art a créé des > faisons pour elles, fi l'aftre du jour ne les a > fécondées comme elles font foibles, décolo→ rées, infipides! Et n'eft-ce pas à jufte titre, » qu'on peut leur comparer ces gens qui, fubf > tituant la nuit au jour & le jour à la nuit, › femblent ne tenir à la vie que par une forte > d'artifice?«<

B S

Une idée qui nous a paru très-heureuse, c'eft celle de donner à chaque college une forme conflitutionnelle, & de vouloir par-là que les jeunes gens y faffent, en quelque forte, un courspratique de conftitution, en y établissant les grandes bafes de notre régénération. L'auteur fait fur-tout un ufage continuel de la morale mife, tantôt en action, tantôt en inftruction. Il faut voir tout ce qu'il dit fur les exercices publics, & les différens prix qu'il propofe, entre autres fur les prix des mœurs, dont il veut que l'on faffe une espece de fête civique.

La légiflature académique qu'il établit pour préfider à tout ce qui regarde l'enfeignement, les arts, les lettres & les fciences, nous paroît encore une très-grande idée qui mérite de fixer toute l'attention de l'affemblée nationale, L'auteur dit, avec raifon, que c'eft le feu moyen de réfoudre le grand problême de l'éducation. Son but principal eft d'établir un plan d'inftruction qui foit fixe & uniforme dans tous les départemens, de maniere que l'on faffe d'auffi bonnes études dans le fond du Béarn qu'à Paris. Il embraffe, autant que cela se pent, le sysême encyclopédique des connoiffances humaines, & il prévient parfaitement le reproche qu'on pour roit lui faire, qu'il veut faire des favans. Son cours eft tellement combiné, qu'on peut y remarquer facilement diverfes époques pour ceux qui veulent acquérir plus ou moins de connoiffances; & c'eft, pour ainfi dire, goutte à goutte qu'il a l'art de les faire entrer dans la tête des enfans. Par-tout il jette des idées nouvelles fur

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la maniere d'enfeigner les langues, l'hiftoire, la géographie, les belles-lettres, la philofophie, les mathématiques, l'hiftoire-naturelle, les arts mécaniques, &c.

» Ouvrons, dit-il, aux jeunes gens ces ateliers où brille par-tout le génie de l'invention; ne dédaignons pas de les introduire chez > l'artifan pauvre & laborieux ; qu'ils voient > l'homme occupé fans ceffe à mettre à con> tribution tous les regnes de la nature, depuis le diamant fuperbe jufqu'à l'humble argile; depuis les dépouilles du monftrueux cétacée jufqu'à la précieuse chryfalide, que l'induftrie européenne a conquifes fur les riches > contrées de l'Inde; depuis le cedre orgueilleux » enfin jusqu'à la foible écorce, dont le tiffu » merveilleux rend tous les continens tributaires » les uns des autres, & tend à ne faire des > hommes épars qu'une feule & même famille,«

Il faut lire les chapitres où il traite des Livres élémentaires en général, & des Livres claffiques; on y verra les moyens ingénieux que l'auteur emploie pour fimplifier l'étude des iciences.

Nous ne pouvons nous refufer de citer encore ce morceau fur Mad. de Sévigné.

» Quelle rapidité entraînante dans ces lettres > enchantereffes, où fe peint fi bien la mobilité de fon ame ! Comme elle fait donner la > vie à tout ce qu'elle touche! C'est une me> fure d'expreffion à la faveur de laquelle tout > paffe, un fonds de fenfibilité qui eft inépuifable, une richeffe d'imagination qui répand la fécondité par-tout. Ses tableaux ont la grace

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