POÉSIES FUGITIVES. STATUTS POUR l'académie royale de mufique. Et dans de magiques palais, Nous, juges de l'orchestre, intendans des ballets. A tous nos fideles fujets, Vents, fantômes, démons, déeffes infernaler, Chargés d'un grand peuple à conduire, Nota. Cette ingénieufe fatyre eft de feu Barthe, & courut manufcrite en mil fept cent foixante-fept: elle n'eft guere connue que de quelques amateurs. On la fait paroître ici avec d'autant moins de fcrupule, qué la plupart des abus qu'elle attaque font des reproches à l'ancien régime de l'opéra, qui ne peuvent tomber fur l'adminiftration actuelle. On n'y a retranché qu'une ftrophe, qui n'eût pas même été piquante pour la malignité, puifqu'il n'y est question que de fujets retirés depuis long-tems, & que l'on eût affligés très-gratui tement. (1) Premiers, pas toujours. (2) Il y a des veftales à l'opóra, dans plufieurs poëmes. N& Oui notre confeil fur chaque changement Nous avons rédigé ce nouveau réglement, ARTICLE PREMIER. A tous muficiens connus ou non connus 1 I. Vu que pourtant la médiocrité Sera par nous, à grands frais protégée. Et laissant la gloire au génie De réuffir fans nos fecours (2). I I I. L'orchestre plus nombreux, fous une forte peine : Six flûtes au coin de la reine, Et fix flûtes au coin du roi; Baffe ici, baffe-là, cors-de-chaffe, trompettes, Beaucoup de bruit, beaucoup de mouvemens; Si nous n'avons pas de mufique, (1) Permiffion dont on n'abufera pas. (2) Il peut arriver cependant qu'on fe réconcilie avec un homme de génie après la mort. I V. Sur le récitatif, même fur l'ariette, Doit peu compter l'auteur des vers; V, Si tous deux, triftement féconds, Ne donnent qu'un vain bruit de rimes & de fons; V I. Des pieces les plus mal tiffues Comme on ne fait plus s'effrayer, Un fpe&acle complet en scenes décousues (4). V I I. Avions réfolu de concert De régler des ballets & le nombre & la forme, Seroit régulier & défert, Que nos ballets foient donc brillans & ridicules; (1) Il faut toujours, qu'en cas de chute, le muficien & le poëte puiflent fe confoler en s'accufant réci proquement. (2) Pourvu qu'on le puiffe encore. (3) Voyez la comédie italienne, (4) Cette idée n'eft pas de nous; plufieurs tragiques modernes en ont déja fait usage. Qu'on vienne encor comme jadis, Que la jeune Guimard, en déployant fes bras, VIII. Ordre à nos bons acteurs, pour eux, pour l'opéra, D'ufer modérément des reines de coulisses (2). Permettons à M..., P..., & cætera, I X. Pour foutenir l'augufte nom On payera mieux Dekdamie, Pollux, Armide, & Phaëton. Mais qu'ils n'efperent pas que leur fortune croiffe Ou du chaffeur de la Laitiere, (1) Nous retranchions par ce ftatut l'ufage impertiment des marques; mais nous avons reçu une députation de nos danfeurs, qui nous remontroient qu'il eft plus aifé d'avoir un maïque qu'une phyfionomie. (2) Ce ftatur eft de notre médecia. (3) Celui-ci de notre chirurgien. Rien pour l'auteur de la mufique ; Et le poëte & le muficien Doivent mourir de faim, felon l'usage antiqué §), X En attendant que pour le chœur On puiffe faire une recrue De quinze ou vingt beautés qui parleront au cœur, Et ne blefferont point la vue, Ordre à ces manequins de bois, Taillés en femmes, enduits de plâtre, De fe tenir toujours immobiles & froids, Adoffés en ftatue aux piliers du théatre (2). X I I. Tout remplis du vafte deffein De ces chantres Alûcés qu'admire l'Aufonie ; (Car c'eft ainfi qu'on les appelle) (1) Rameau alloit à pied, les direâeurs en carroffe. (2) Ne pourrions-nous pas obtenir de M. Vaucanfon qu'il nous fit deux douzaines de chanteufes de chœur? ce feroit une dépense une fois faite. (3) Toutes nos actrices n'ont eu qu'un cri là-deflus. · |