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paffages, rompant les chemins, les ponts, faifant des abattis dans les bois; enfin, en lui coupant les vivres, en attaquant fes fourrages avec beaucoup de cavalerie, pendant que votre armée refte en bataille, pour empêcher qu'il ne puiffe envoyer du fecours.

II. Si vous êtes maître de la campagne, partagez votre armée en autant de cops que vous pouvez en faire agir enfemble & en même

tems.

Portez la terreur dans le pays; faites paroître votre armée beaucoup plus forte qu'elle ne l'eft en effet, en envoyant de gros partis fur différens points, ou en faifant courir des bruits à cet égard.

Levez des contributions, prenez des otages dans les endroits que vous ne pouvez garder. Enlevez les principaux du pays, s'ils vous font fufpects, en ufant avec eux des meilleurs procédés.

III. Campez près de l'ennemi, côtoyez les marches.

Mettez des garnisons par-tour, & tâchez de furprendré & d'enlever les magasins de l'ennemi. Campez entre l'ennemi & les points d'où il tire ses vivres, afin que toute communication avec eux lui foit interceptée.

1 Faires femblant de craindre l'ennemi, & retirez-vous devant lui pour l'attirer dans un terrein défavantageux; retournez enfuite fur vos pas, & attaquez-le.

11. Défenfives.

I. CHANGEZ fouvent de pofition, & choififfez-en toujours de bonnes.

II. Tenez-vous près de la mer ou près d'une grande riviere, & fortifiez vous par-tout.

III.. Mettez fucceflivement plufieurs partis en campagne, pour découvrir les embufcades, lest détachemens, & pour éclairer les mouvemens de l'ennemi.

(Bibliothèque de l'homme public, &c )· (La fin au journal de février.)

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EUVRES morales de PLUTARQUE, traduites en françois par M. l'abbé RICARD, de l'académie des Sciences & belles lettres de Toulouse. Tome XIII. A Paris, chez la veuve Desaint, 1791.

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Au premier premier coup-d'œil jeté far ce

volume, on s'attendroit à y trouver un ouvrage tel que celui qu'Horace dénonce aux Pifons dès le commencement de fon Art poétique : tant les matieres qu'il renferme femblent, offrir de bi garrures & même de contraffes. 1

Plutarque y differté d'abord ¡très-longuement fur la face que préfente: la lune.¡¡Il établit enfuite un parallele entre les animaux de terre & ceux de mer, pour montrer la fupériorité des premiers. Les bêtes ont elles lufuge de la raison? grande quef tion que Plutarque fe propofe, qu'il traite en

dialogue, & qu'il réfout, non-feulement en leur accordant de la raifon, mais en décidant qu'elles en font un meilleur ufage que la plupart des hommes. Rien de moins lié à ces questions que le traité qui fuit, fur l'ufage des viandes. Ce volume eft terminé par des Questions platoniques morceau de métaphyfique qui n'offre pas le même degré d'intérêt.

A ces difparates, on voit que notre Montaigne a eu chez les anciens fon modele pour le découfu de fes idées. Suivons Plutarque & fon commentateur dans leur marche : car la traduction de ce philofophe, quoique pure & élégante, n'est pas le principal mérite de M. l'abbé Ricard.

Le traité fur la lune paffe pour un des plus favans que Plutarque nous ait laiffés, quoiqu'il s'y trouve beaucoup de lacunes: » Il eft rempli (dit > M. Ricard) d'excellentes obfervations fur la

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nature & la fubftance du giobe lunaire, fur > la maniere dont il réfléchit les rayons du fo» leil, duquel il tire fa lumiere, fur les divers.. >> mouvemens de cette planete, fur les taches » qui couvrent fa furface, & qui ont une apparence de figure humaine. Plutarque y rappelle les diverfes opinions phyfiques auxquelles > ce phénomene avoit donné lieu; il les difcute; > il les combat, & traite par-tout fa matiere > en homme inftruit, «<

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Qu'eft-ce donc que cette efpece de face humaine que nous croyons voir dans la lune? Les interlocuteurs expofent ici les fyftêmes de divers philofophes.. L'un y voyoit le miroir d'une grande mer; les Stoïciens y trouvoient un compofé d'air

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& de feu; d'autres, une fubftance mixte, fem-blable à notre globe, & qui ne nous éclaire qu'en réfléchiffant les rayons du foleil. Plutarque voit dans la figure de la lune l'effet des cavités & des hauteurs qui partagent fa furface. — La lune eft-elle ou peut-elle être habitée? Autre queftion que le philofophe débat avec fes amis, & fur laquelle il fe décide pour la poffibilité.

Les éclipfes de lune prouvent la folidité de cette planete. Si de trois corps qui font frap» pés par la lumiere du foleil, la terre, la lune » & l'air, nous voyons la lune éclairée, non » comme l'air, mais comme la terre, il faut > néceffairement que ces deux planetes aient une › même nature, puifqu'une même cause produit

fur elles les mêmes effets. « La lune a donc la plus grande analogie avec la terre. La nuit > eft l'ombre de la terre, comme l'éclipfe de

foleil eft l'ombre de la lune, qui fait que > notre vue se replie fur elle-même. Quand le foleil fe couche, il difparoît à nos yeux, parce que la terre fe place entre cet aftre & nous; » & lorfqu'il s'éclipfe, il nous eft dérobé par > la lune. <

L'obfcurité à laquelle une éclipse donne lieu ne peut être la même que celle de la nuit. La fabftance du corps qui caufe la nuit eft bien de la même nature que cellé du corps qui produit l'éclipfe; mais leur grandeur n'eft pas égale.

Quant à l'existence poffible des habitans de la lune, tout se paffe en tours de force d'efprit parmi les philofophes interlocuteurs ; mais on voit que Plutarque avoit déja une idée précise

de

de l'influence de la lune fur les marées. Le récit fabuleux de l'ifle d'Ogygie, dont il a emprunté le nom d'Homere, qui veut qu'Ulyffe y ait été retenu fept ans par Calypfo, eft une allégorie où font retracées les opinions des philofophes.

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Le trait fuivant mérite d'être remarqué; il eft attribué à Sylla, l'un des interlocuteurs. » Toute > ame qui fort du corps avec ou fans entende> ment, eft obligée par une loi du deffin d'errer > pendant un certain tems dans la région qui » eft fituée entre la terre & la lune ; mais ce »tems n'eft pas le même pour toutes. Celles qui » ont été injuftes & débauchées y fubiffent la > peine de leurs crimes. Les ames vertueuses y

font détenues jufqu'à ce qu'elles aient été pu» rifiées des taches que leur a fait contracter leur > commerce avec le corps, ce principe fécond » de mal; mais elles font dans un lieu où elles > refpirent l'air le plus pur; on l'appelle le › Verger de Pluton, & elles y paffent un tems » déterminé. Enfuite, rappellées comme d'un long exil dans une terre étrangere, elles rentrent dans leur patrie, & y goûtent une joie • semblable à celle que reffentent ceux qui font initiés aux myfteres, joie mêlée de trouble & > d'étonnement, & chacune avec fes efpérances particulieres. a

En traduifant le Traité des animaux de tèrrẻ & de mer, M. Ricard trouve d'heureux rapprochemens entre Plutarque & l'écrivain connu fous le nom de Phyficien de Nuremberg. Ses lettres, (dit-il) ouvrage plein de réflexions profundes » & de vues fines, étoient le fruit d'une longue Tome Ier.

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