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près les principes de sa constitution, desire que sa derniere fonction soit un hommage de son resrespect pour l'assemblée naionale, & ses vœux les plus ardens pour la perfection de ses travaux, si heureusement commencés pour le bonheur du royaume. Elle déclare, conjointement avec les représentans de tous les corps & paroisses, que les derniers instans de son existence légale sont dévoués à la patrie & au roi, & que les Orléanois donneront toujours les preuves de leur patriotisme, & de leur desir d'assurer autant qu'ils le pourront le succès des travaux qui doivent faire le bonheur de la France.

La plus saine partie de l'assemblée témoignoit sa juste impatience de voir arriver le moment où l'on passeroit à l'ordre du jour. Quelques honorables membres demandoient la parole sur des objets étrangers, mais plusieurs autres ont représenté avec raison que l'affaire de Marseille avoit été ajournée à la séance de ce soir; que la parole avoit été accordée à M. de Mirabeau, pour répliquer au mémoire du grand-prévôt de cette ville; qu'en conséquence c'étoit à lui à parler. Sur ce, les réclamations ont cessé, & M. de Mirabeau est entré en matiere.

Cet orateur, rappellant à l'assemblée ses propres principes, la sagesse de ses décrets, la fer

meté & le courage qu'elle a mis à les faire exécuter, a démontré que ces mêmes principes & . ces mêmes décrets avoient été violés par le grand prévôt de Marseille.

Pour nous en convaincre, a-t-il dit, remontons à la source des accusations intentées contre de malheureuses victimes, & qui ne sont peut-être dans les fers que par excès de patriotisme; demelons le fil tortueux d'une procédure dirigée par le ressentiment & la haine, dont les suites funestes ne présentent à l'innocence que la fatale perspective de l'échafaud. Soyons sourds, pour un instant, aux cris de ces malheureux prisonniers, à -ces cris qui rétentissent des voûtes de la bastille de Marseille jusqu'à nous; fermons l'oreille à la -pitié, mais soyons justes; suivons les devoirs de législateurs, & voyons si le prévôt de Marseille est coupable ou non; suivons le chemin qui nous est tracé par ses écrits même; bientôt yous trouverez, dans sa conduite, la violation de vos décrets, un abus du pouvoir, une tramel insidieusement ourdie contre des citoyens vertueux, & reconnus pour tels aux yeux des autres habitams, des citoyens amis de la liberté, qui ont travaillé pour la défendre, des citoyens qui venant de briser les fers de la servitude & de l'esclavage, ont

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pu s'abandonner un instant au délire de la joie & du patriotisme.

Voilà les hommes menacés du glaive du despotisme, contre lesquels on n'a cessé d'informer, & qui, sans votre sagesse, n'auroient d'autre espoir que la mort. Disons-le, Messieurs, tout le crime de ces malheureux citoyens, est d'avoir eu - le courage, dans les assemblées primaires, de dire leur sentiment & avoir voulu dessiller les yeux de leurs compatriotes, & leur avoir fait connoître qu'on ne cherchoit qu'à les faire changer de despote, qu'à empêcher une vaste cité, jalouse de sa liberté, de jouir des prérogatives attachées au titre d'homme & de citoyen. Qu'on rêfléchisse de combien de dangers & d'ennemis étoient environnés les amis de la liberté, ces généreux Marseillois que le despotisme a poursuivi ⚫ & poursuit encore, en ce moment, comme des séditieux & des rebelles; mais qu'il ne poursuit, dans la réalité, que pour tâcher de justifier ses horreurs. Ici c'est une sangsue engraissée du sang des peuples, un vampire accoutumé de cimenter ses plaisirs, ses jouissances, ses palais, ses délices, des sueurs du pauvre cultivateur; c'est un intendant qui veut appésantir les fers des citoyens qui cherchent à les rompre là c'est un corps

antique & redoutable, qui sent, dans la révolution actuelle, briser dans ses mains les chaînes que son injustice avoit forgées au peuple ; un parlement ulcéré de lire, sur l'étendard de la liberté, le signal de sa chûte prochaine, & qui multiplie d'autant plus ses effors pour traverser la ré→ volution, qu'il sent, avec douleur & désespoir, qu'ils seront inutiles contre la force du destin qui

s'avance.

Que s'ensuit-il, & que doit-on en conclure, sinon que le grand prévôt de la Provence est un agent opiniâtre du despotisme, vendu bassement à la vengeance du lieutenant, à la haine du parle ment, au mépris de vos décrets; il a continué ses poursuites criminelles, il ne pouvoit ignorer votre décret du 5 novembre sanctionné par le roi, sous le voile d'une ignorance également coupable & affectée de vos décrets, décrets que la voix publique, que la voix ministérielle n'avoit pu manquer de lui notifier; il a failli faire périr sur l'échafaud la vertu & l'innocence.. Quelle partia lité dans ce magistrat ! D'un côté, il exerce une cruauté inconcevable contre ces hommes innocens, tandis qu'il semble prendre plaisir à oublier les forfaits de vingt-trois brigands pris ravageant la ville de Marseille, & notamment lorsqu'ils livroient au pillage la maison du sieur la Flêche,

consul de cette même ville. Et ces brigans,"capables d'y causer le désordre, & les plus grands malheurs n'on encore subi aucun jugement.

M. de Mirabeau est ensuite entré dans les chefs d'accusation suivans, qui décelent évidemment la conduite trop coupaple du prévôt de Marseille.

A

Premier chef d'accusation. D'avoir pris pour lieutenant & assesseur dans la procédure criminelle, les sieurs Laget & Miolix, qui étoient dans le bataillon de la garde, nationale, qui, le 19 août, assassinerent le nommé Garsin, lorsque cette procédure avoit pour principal objet de connoître & de découvrir les auteurs de cet assas sinat. Néanmoins ce juge, passant sur le motif de Ja plainte qui suivant son systême, avoit insulté à toute autorité légitime, & notamment à la garde nationale.

zioDeuxieme chef. D'avoir informé uniquement sur des faits antérieurs à l'amnistie accordée par le roi au mois d'août dernier, entr'autres contre M.Chompre, absent de cette ville depuis quatre mois, lors de l'événement du 19 août, en viólant les principes les plus sacrés, & en`se servaht, contre lui, des lettres écrites à sa femme,, comme d'un titre d'accusation.

-il Troisieme chef D'avoir informé sur des faits chimériques sur de simples discours, & des conversations vagues.

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