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sieur Blaque-Bellair, en le subrogeant dans tous ses droits, priviléges et hypothèques contre les sieur et dame Rollin.

D'un autre côté, le 19 du même mois, ces derniers avaient consenti, au profit des sieurs Paillard, une obligation de la somme de 5,090 fr. de principal, et 4,000 fr. pour intérêts; et ils avaient affecté, pour sûreté de ces sommes, un domaine et ses dépendances. La dame Rollin avait, par le même acte, expressément cédé aux sieurs Paillard tous les droits et hypothèques qu'elle pouvait avoir sur son mari, résultans de son contrat de mariage, dans lesquels elle les subrogeait.

Un ordre a été ouvert sur le prix des biens vendus au sieur Jacquemard, en 1813.

La dame Rollin y a été colloquée pour la somme de 33,375 francs, montant de tous les droits et avantages résultans de son contrat de mariage. Mais elle ne pouvait profiter de cette collocation, au moyen des cessions d'antériorité et subrogations qu'elle avait consenties elle a demandé qu'au moins il fût fait distraction à son profit des sommes qui lui avaient été attribuées pour sûreté de son droit d'habitation dans la principale maison dépendante de la succession de sou mari (alors décédé), ainsi que pour son deuil et son douaire, consistans en une pension viagère et alimentaire.

Le sieur Blacque-Bellair, cessionnaire du sieur Jacquemard, à prétendu, d'un autre côté, qu'il devait être colloqué en premier ordre sur les sommes revenantes à la dame Rollin, attendu que l'obligation souscrite au profit de son cédant, et dans laquelle cette dame avait consenti une antériorité d'hypothèque, était antérieure à la subrogation que les sieurs Paillard avaient obtenue de la débitrice commune. - Mais ces derniers ont soutenu 1o que leur subrogation devait militer contre un simple consentement d'antériorité; 2o que d'ailleurs Jacquemard n'avait pas pu céder sa créance, qui s'était trouvée éteinte, par compensation, aussitôt la vente qui lui avait été faite.

Sur ces contestations, jugement du tribunal civil de Clamęcy, du 4 juillet 1822, qui, d'une part, déclare la dame

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Rollin non recevable dans sa demande, et, de l'autre, ordonne que les sieurs Paillard seront colloqués aux lieu et place du sieur Blacque-Bellair, et que le surplus sera distribué, etc. Appel de la part de la dame Rollin et du sieur BlacqueBellair.

Les moyens respectifs des parties nous ont paru être suffisamment analysés dans l'arrêt que nous allons rapporter.

Du 22 novembre 1823, ARRÊT de la Cour royale de Bourges, deuxième chambre, M. Delametherie président, MM. Deséglise, Mayet-Genetry et Mater avocats, par lequel :

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« LA COUR, 1o Attendu que la dame veuve Rollin s'est engagée solidairement avec son mari; qu'elle a garanti àJacquemard, aux droits duquel se trouve le sieur BlacqueBellair, et aux frères Paillard, le remboursement des sommes qu'ils en ont reçues; que, directement ou indirectement, elle les a subrogés les uns et les autres en tous ses droits et hypothèques résultans de son contrat de mariage; qu'ainsi, sur les biens affectés à ses conventions matrimoniales et à ses reprises, elle n'aura rien à réclamer tant que les créanciers envers qui elle s'est obligée ne seront pas entièremont soldés;

« Considérant que la dame veuve Rollin, qui ne méconnaît pas l'engagement qu'elle a contracté, soutient qu'il ne doit pas être aussi généralement étendu; qu'en s'obligeant envers quelques créanciers, elle leur a bien abandonné sa dot, ses reprises, tous ses droits ordinaires, mais qu'elle n'y a compris ni son douaire ni son deuil; que, si elle eût eu intention de les céder, elle eût dû la manifester par une clause expresse; Elle prétend que, cette clause eût-elle été insérée dans l'engagement qu'elle contractait, elle eût été nulle de plein droit: quant au deuil, parce que la somme fixée pour le deuil est moins un avantage fait à la femme qu'un moyen que la loi procure à la veuve pour honorer la mémoire de son mari; quant au douaire, parce qu'en général il est accordé à la femme pour assurer sa subsistance, et que particulièrement celui qui a été constitué est stipulé comme rente viagère et

alimentaire; excipant ensuite de l'art. 581 du Code de procé dure, et par induction de l'art. 1004 du même Code, elle prétend que les sommes et pensions pour alimens sont insaisissables et incessibles; Considérant que la dame veuve Rollin oppose encore l'art. 1395 du Code civil, qui dispose que les conventions matrimoniales rédigées avant le mariage, par acte de vant notaire, ne peuvent recevoir aucun changement après la célébration du mariage : d'où elle conclut que, les deux familles ayant voulu dans son contrat de mariage qu'elle eût pour sa subsistance une rente viagère, cette convention ne pouvait recevoir aucun changement;

« Attendu que les articles puisés dans le Code de procédure ne peuvent s'appliquer à l'espèce actuelle; que l'un d'eux, l'art. 581, disant à la vérité que les sommes et pensions pour alimens sont insaisissables, ne parle ni de la cession qu'on en pourrait faire ni de subrogation; que l'art. 1004 porte simplement défense de compromettre sur des legs et dons d'alimens; que le débat actuel n'offre rien de relatif à ces diverses dispositions; qu'il s'y agit uniquement de la garantie promise par la dame veuve Rollin, de l'engagement qu'elle a contracté de laisser ses créanciers exercer tous ses droits sur les biens de son mari;— Attendu que la distinction qu'elle veut établir entre ce qu'elle appelle la subrogation à ses droits ordinaires et le douaire et le deuil n'a aucune base solide; Qu'en effet, quel qu'ait été le motif qui ait fait accorder à la femme et un douaire et un deuil, ce que réclame aujourd'hui la dame Rollin, dans l'ordre ouvert sur le prix des biens de son mari, ce sont deux sommes d'argent tellement affectées à ses créanciers par la garantie qu'elle leur a assurée, que, si elles étaient dans ses mains, ils seraient fondés à les y reprendre, de même que toutes celles qui lui appartiennent;

« Considérant que la dame veuve Rollín invoque inutilement la loi qui assure la stabilité des conventions matrimoniales, attendu que son contrat de mariage n'éprouve aucune altération; qu'elle reçoit tous les avantages qu'il lui assure;

e seulement, au lieu de percevoir directement, ce sont créanciers envers lesquels elle est engagée par l'effet de sa rantie qui touchent pour elle et en son nom; - Qu'en vain core elle observe que, si elle eût eu l'intention de subroger créanciers avec lesquels elle a contracté à tout ce qu'elle ait à prétendre, même pour son douaire et son deuil, elle rait dû l'exprimer formellement; -Attenduque c'est au conaire à défaut de réserve expresse d'une partie quelconque ses droits, que la subrogation se trouve faite pour la totaé, parce qu'autrement, en s'exprimant comme elle l'a fait, le eût tendu un piége à la bonne foi de ceux qui ne livraient urs fonds qu'en considération d'une subrogation générale ; « 2o Attendu que le sieur Blacque-Bellair et les frères Pailrd tiennent leurs droits de la dame veuve Rollin, mais que subrogation qu'elle leur a consentie est de date différente; - Que celle au profit du sieur Jacquemard (aux droits duuel se trouve le sieur Blacque-Bellair) est du 18 février 1810, our raison de laquelle il a pris inscription le 12 mars suiant; que, celle au profit des frères Paillard n'étant que du 9 juin 1813, la dame veuve Rollin n'a pu céder à ceux-ci ue le droit qui lui restait à cette époque, c'est-à-dire celui 'être colloquée immédiatement après le sieur Jacquemard, t de prendre ce qui lui reviendrait lorsque cette première réance serait acquittée ;

« Considérant que les frères Paillard font deux objections; u'ils font résulter la première de ce que, dans l'acte du 19 in 1813, la dame Rollin les subroge en tous ses droits, et es met en ses lieu et place, et que, dans celui du 18 février 810, il n'y a point de subrogation de la part de la dame euve Rollin en faveur du sieur Jacquemard; — La seconde, e ce que le sieur Jacquemard, créancier des sieur et dame Rollin d'une somme de 51,000 fr., a acheté d'eux le même our des bois pour 225,000 fr., dont il est devenu débiteur ; u'aux termes de l'art. 1290 du Code civil, les deux créances tant également liquides, la compensation s'est opérée de

plein droit par la seule force de la loi, jusqu'à concurrence de leurs quotités respectives; d'où ils concluent qu'au mois de uin 1813, le sieur Jacquemard n'a pu céder au sieur Blacque-Bellair, sur les sieur et dame Rollin, une créance qui n'existait plus;

« Attendu, sur la première objection, que réellement l'acte du 18 février 1810 ne contient pas le mot subrogation au profit du sieur Jacquemard, mais que ce mot n'est pas sacramentel; que l'équivalent y est exprimé d'une manière bien positive, puisqu'on y lit que « les sieur et dame Rollin veu<< lent que mention des présentes soit faite sur les registres « du conservateur, et que le sieur Jacquemard soit rem«boursé du montant de la présente obligation en principal, « intérêts et frais, avant que ladite dame ne puisse exercer « aucune de ses reprises sur les biens de son mari »;

« 3° Attendu, sur la deuxième objection, que la compen sation ne peut avoir lieu qu'entre deux personnes qui se trouvent débitrices l'une envers l'autre; que, lorsque le sieur Jacquemard a acheté les bois des sieur et dame Rollin, cette propriété était grevée de l'hypothèque de plusieurs créanciers; qu'ainsi, ce n'était point à ses vendeurs qu'était dù et qu'il eût pu payer le prix de son acquisition, mais à ceux qui avaient obtenu les bois pour gage de leurs créances, et qui ne devaient rien à lui Jacquemard; d'où il suit que la loi relative à la compensation ne s'applique pas à la contestation actuelle; - INFIRME au chef qui dans la distribution a placé ‹ les frères Paillard avant le sieur Blacque-Bellair; CONFIRME au surplus, etc. »

COUR D'APPEL D'AIX.

Le paiement de la dot mobilière fait à la femme mariee sous le régime dotal, après la séparation de biens, valable s'il n'en a pas été fait immédiatement emploi

est-il

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