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solue; qu'ils ne les possédaient qu'en vertu d'un titre personnel et non transmissible, à eux conféré par le Roi, qui avait le droit de l'accorder ou de le refuser, selon que l'individu qui sollicitait l'obtention lui paraissait ou non réunir les qualités exigées par la lỏi;~Qu'à la vérité, ils avaient la faculté de présenter leurs successeurs; mais qu'il y avait loin de cette faculté au droit de les investir de leur titre, qui n'appartenait qu'au Roi; - Qu'au gouvernement seul appartenait celui d'apprécier les qualités, le mérite et les titres de l'individu présenté, ce qui constituait un acte de haute administration; qu'il lui appartenait aussi, par la même raison, d'apprécier les causes de la démission du titulaire, les conditions auxquelles elle était consentie, et de juger les difficultés élevées à cette occasion; et que les tribunaux ne pouvaient s'immiscer, sans excéder leurs pouvoirs, dans la connaissance de ces objets, ni prononcer des condamnations relatives à l'exécution des traités passés à cet égard;

Que le sursis ordonné, dans l'espèce, par M. le garde des sceaux, n'offrait rien de contraire aux principes qui viennent d'être établis; que, des faits de dol et de fraude étant coarctés, S. Ex. ne pouvait descendre aux détails d'une instruction que la loi place dans les attributions des tribunaux, et qu'il devait nécessairement attendre l'événement du jugement qui serait rendu sur ces faits, pour prononcer sur la démission du sieur Séguin, sur sa rétractation et sur leurs effets; Mais que les tribunaux devaient se borner à juger si le sieur Boisson avait usé ou non de surprise et de fraude pour obtenir la démission du sieur Séguin, sans rien statuer sur les effets que devait produire cette démission, sur le traité dont elle avait été l'occasion, ni sur son exécution, et moins encore anéantir la rétractation dont elle avait été suivie; que l'arrêt attaqué avait réellement, et par le fait, donné au sieur Boisson l'investiture de l'office du sieur Séguin; en quoi il avait été évidemment empiété par la Cour sur les prérogatives du gouvernement.

Le sieur Séguin a dit, en second lieu, que cet arrêt avait

mal à propos appliqué à la démission d'un titre auquel sont attachées des fonctions publiques, les dispositions du Code civil relatives à l'aliénation des propriétés privées; que la Cour de Nismes aurait dû considérer qu'une partie n'a le droit de contraindre l'autre à remplir son engagement qu'autant que la convention a pour objet une chose possible (art. 1184), c'est-à-dire absolument dépendante de la volonté des contractans, ce qui ne se rencontrait pas ici, où l'exécution de la convention était subordonnée à l'agrément du Roi; Qu'elle aurait dû voir encore que l'article 1594 ne permet de vendre et d'acheter qu'à ceux à qui cette faculté n'était pas interdite, et qu'ici l'interdiction de cette faculté résultait implicitement de l'obligation imposée aux parties de recourir à l'autorité suprême du Roi pour opérer la transmission du titre.

Enfin il a ajouté que, si l'on pouvait admettre que le titulaire d'un office eût le droit d'aliéner son titre, il fallait aussi en admettre toutes les conséquences, et qu'alors l'arrêt attaqué avait été rendu en contravention aux anciens règlemens, qui accordaient l'action en regrès, en matière de vente des offices, et à la jurisprudence des anciennes Cours sur ce point, auxquels il n'a pas été dérogé par notre nouvelle législation; - Que le regrès avait la vertu d'opérer la révocation de la vente, des conventions qui y sont relatives, et de conserver l'office au titulaire, et que cette action était tellement favorable qu'elle était adınise même à l'égard des adjudications faites par décret; Que la Cour de Nismes n'a pas contredit le principe, mais qu'elle a refusé d'en faire l'application à l'espèce, sur le fondement que nos lois nouvelles n'admettent aucune modification aux effets de la vente, ni à ses règles générales, auxquelles sont soumises les aliénations d'offices comme celles de toutes les choses qui sont dans le commerce; par où elle a éludé la difficulté sans la résoudre ; — Qu'il était soutenu avec plus de raison par ·le demandeur en cassation qu'il fallait suivre les anciens prineipes à cet égard, lorsque les nouvelles lois n'y ayaient pas

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formellement dérogé : Posteriores leges ad priores pertinent, nisi contrariæ sint. ff. de legib., L. 28; et que les mêmes motifs qui avaient fait introduire l'action en regrès militaient encore aujourd'hui pour le faire maintenir dans l'état de notre législation, qui n'y offre aucun obstacle.

Outre ces moyens principaux, le sieur Séguin a fait proposer plusieurs moyens subsidiaires, qui n'ont pas eu plus. de succès que les premiers, et que nous nous dispenserons d'analyser.

Le 13 novembre 1823, arrêt de la Cour de cassation " section des requêtes, M. Lasaudade président d'âge, M. Liger de Verdigny rapporteur, M. Jousselin avocat, par lequel : « LA COUR, Sur les conclusions conformes de M. Joubert, avocat-général; Attendu que le traité qui fixe les conditions de la démission appartient au droit civil; que, sous ce rapport, la connaissance des difficultés auxquelles ce traité peut donner lieu est du ressort des tribunaux civils;

« Attendu que l'ancienne jurisprudence, qui admettait, dans certains cas, le démissionnaire à signifier des regrès, a - cessé d'avoir aucune influence depuis la promulgation du Code civil et de la loi du 28 avril 1816;-REJETTE, etc. ».

Observations. La résistance qui a été apportée dans cette cause par le demandeur en cassation ne provient que de la confusion qu'il a faite de deux choses essentiellement distinctes, l'abdication de son titre et le traité fait à cette occasion. It est bien certain que le gouvernement est seul appréciateur et juge des effets de la démission du titulaire; qu'il n'appartient qu'au Roi d'agréer ou de rejeter la présentation du successeur que la loi permet à ce titulaire de désigner à S. M., et que cet objet est placé hors des attributions des tribunaux. Mais il n'en est pas de même de la convention qui règle les conditions auxquelles la démission a été consentie, et le prix qui est mis à la transmission de l'office, lequel se compose des minutes et pièces dont le titulaire est déposi

taire, et des recouvremens à faire à raison des actes de son "ministère dont les honoraires lui sont encore dus. Les parties sont régies, à cet égard, par le droit commun; il leur est permis de traiter de gré à gré, et les contestations qui y sont relatives sont sans contredit de la compétence des tribunaux établis par la loi pour juger tout ce qui tient aux intérêts privés. L'arrêt qui rejette le pourvoi formé contre celui de la Cour de Nismes est un hommage rendu aux vrais principes. Il contribuera éminemment à éclairer l'intelligence des lois relatives aux droits des titulaires sur les offices dont ils sont pourvus. J. L. C.

COUR DE CASSATION.

Depuis l'abolition de la féodalite', une fille a-t-elle ри étre exclue, par un oncle, des biens de la succession de son père, qui faisaient partie d'un ancien fief, sous le double prétexte que ces biens étaient, par les lois féodales, exclusivement dévolus aux males de la famille, et que l'oncle étant marié avec enfans à l'époque de la suppression de la féodalite, il devait, d'après l'exception introduite par la loi du 28 mars 1790, conserver tous les avantages que lui attribuaient les anciennes lois? (Rés. nég.) En d'autres termes, l'exception introduite par la loi précitée, en faveur des individus mariés ou veufs sans enfans, ne peut-elle s'appliquer qu'à un COHÉRITIER qui, dans le partage d'une succession commune, aurait droit à une portion plus avantageuse d'après les lois féodales, et nullement à un parent non successible qui réclamerait contre des filles, seules héritières, un droit de masculinite aboli au moment de l'ouverture de la succession? (Rés. aff.)

LA DAME ROSSET, C. DE GIRARDY. Antoine-François de Girardy, baron de Limbourg, demeurant dans le grand-duché de Bade, sur la rive droite du

Rhin, mourut en 1749, laissant pour héritiers deux fils, Christophe et Thadée. Parmi les biens composant sa succession se trouvaient une ferme et des bois situés sur la rive gauche du Rhin, commune de Markolsheim, mais qui dépendaient d'un fief situé sur l'autre rive, et qui était affecté exclusivement aux mâles de la famille par les statuts locaux.

Christophe et Thadée possédèrent indivisément ces biens jusqu'à leur décès. Mais tous deux existaient encore lorsque la révolution survint, et avec eile la loi du 28 mars 1790, portant abolition de tous les priviléges féodaux, de toutes les inégalités et exclusions résultantes de ce régime, dans le partage des successions.

A cette époque les deux frères étaient mariés et avaient des enfans. Christophe, l'aîné, avait une fille, aujourd'hui mariée au sieur Rosset. Thadée avait deux fils, François et Léopold, barons de Girardy.

Christophe mourut le premier, en septembre 1791. Thadée n'est mort que plusieurs années après; et il paraît qu'il continua de posséder jusqu'à son décès les biens de Markolsheim, tant pour lui que pour sa nièce, alors mineure et seule hériritière de son père.

En 1815, la dame Rosset, majeure depuis long-temps, intenta, contre ses cousins François et Léopold, devant le tribunal de Schélestadt, une demande en partage des biens dont il s'agit..

Pour repousser cette demande, François et Léopold ont imaginé de prétendre que les biens en question faisaient partie d'un fief masculin, qui était exclusivement affecté aux mâles de la famille par les lois féodales; que Thadée, leur père, étant marié avec enfans avant l'abolition de la féodalité, avait droit à l'exception introduite par la loi du 28 mars 1790, et que, par suite, il avait conservé le privilége de recueillir les biens féodaux affectés aux mâles de sa famille par la loi existante au moment de son mariage.

Ce système a été proscrit en première instance, par un jugement du 20 novembre 1817. Le tribunal a considéré que les

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