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cipes qui obligent les particuliers à respecter

l'ordre établi.·

19. La République française n'est pas une puissance légitime. Née de la révolte, elle s'est établie par la violence, et n'existe que par l'usurpation et l'injustice. Usurpation à l'égard du Roi, dont quelques factieux ont envahi l'autorité contre le voen de l'immense majorité de la nation. Injustice et barbarie à l'égard des deux premiers Ordres de l'Etat, et de tous ceux que la faction dominante a bannis, spoliés, assassinés, en haine de la religion et du légitime Souverain. Ni le temps, ni les événemens n'ont lavé le titre impur de la République française. La nation toujours opprimée, toujours asservie, n'a pas sanctionné le nouvel ordre de choses par un acquiescement libre et volontaire; et quand on supposeroit cet asquiescement de la part de ceux qui ne sont point sortis du royaume, il ne détruiroit ni les droits d'une multitude innombrable de familles qui redemandent le patrimoine, le Gouvernement et la religion de leurs pères, ni les justes prétentions du Roi sur une couronne que ses ancêtres on portée plus de huit cens ans

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En traitant avec la République française, les puissances étrangères n'ont reconnu que sa possession: il ne leur appartenoit pas de discuter la validité de son titre. La victoire, les traités, la reconnoissance de tous les Gouvernemens de l'Europe ont placé la République française au rang des Etats politiques. Elle est devenue une puissance de fait, comme l'étoit Cromwel, durant son Protectorat, mais elle n'est pas une puissance de droit.

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2°. Le Gouvernement actuel de la France n'est pas un pouvoir conservateur de la tranquillité publique. Il n'est pas tellement affermi, tellement reconnu, qu'on ne puisse l'attaquer, sans ébranler et bouleverser l'ordre social. C'est un Gouvernement tyrannique, dans la double acception de ce mot; car il l'est, et dans son origine, et dans son exercice. Il a violé lui-même la Constitution qui faisoit son titre et sa loi: il ne règne que la terreur: il se joue insolemment et des droits politiques et des droits de la justice et de l'humanité. Tant qu'il subsistera, les Français ne pouront se promettre ni liberté religieuse et civile, ni paix entre eux, et avec les étrangers, ni sureté pour leurs personnes, et

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pour leurs propriétés. Un pareil Gouverne ment n'est point un ordre social, c'est une anarchie persévérante, organisée en faveur d'une poignée de tyrans.

Les sermens commandés par ce Gouver nement monstrueux ne lui donnent aucun droit sur les consciences. D'abord, les ser mens politiques prescrits par un usurpateur ne supposent nullement que l'on reconnoît son Gouvernement pour légitime: ils n'emportent que la promesse d'une soumission extérieure et passive. C'est là le sens, et tout l'effet que l'opinion des peuples, et par conséquent, le droit public donne à ces sor tes de déclarations; et cet engagement cesse, du moment que l'usurpateur n'est plus en possession de la puissance publique. Car je ne lui ai promis soumission, que parce que j'ai vu dans sa personne le Souverain de fait, dont il faut respecter la puissance, tant qu'elle est nécessaire au maintien de l'ordre public, et que le Souverain de droit est hors d'état de seconder les efforts de ses fidelles sujets. En second lieu, il est notoire, qu'à l'égard du grand nombre, c'est la violence qui a dicté les sermens contradictoires de maintenir les différentes consti

tutions qui se sont succédé depuis la naissance de la Révolution. Mais une promesse injustement extorquée ne confère aucun droit à celui qui l'a reçue, et n'oblige pas celui qui l'a faite. Si la violence m'a soumis à des tyrans, il me reste le droit incontesta ble de détester leur domination, et de m'affranchir d'un joug ignominieux par toutes les voies que m'ouvriront le courage et la prudence. Quant à ceux qui se sont rendus complices de la révolte ou de l'impiété par des sermens volontaires ou par le

serment de haine à la royauté, ils sont absous de ces lâches et criminels engagemens par l'honneur, et par la réligion.

Le parjure est vertu, quand le serment fut crime.

CHAPITRE VI.

De l'Inviolabilité

de la Puissance souveraine.

J'ai montré dans le chapitre précédent, combien étoit absurde et dangereuse la doctrine qui donne aux individus le droit de résister à la puissance publique. Dans celui-ci, j'entreprends de prouver que la nation elle-même

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n'a pas le droit de renverser son Gouverne ment, de juger, et de déposer son' Souve rain. Je n'ignore pas que l'opinion contraire à pour elle des raisons spécieuses, et des autorités imposantes. Mais, s'il faut peser les voix, à Sidney, à Locke, à Rousseau, j'opposerai Grotius, Paffendorf et Bossuet. Quant aux raisons, je ne dissimulerai pas celles de mes adversaires, et le Lecteur prononcera. L'établissement de la puissance souveraine est l'effet de l'une des conventions qui ont servi de fondement à la société civile, ainsi qu'on l'a vu dans le premier chapitre de cet ouvrage; d'où il suit que Finviolabilité de la puissance souveraine doit être regardée comme une conséquence nécessaire de la perpétuité du pacte social. Or, il est impossible de douter que le pacte social ne soit, de sa nature, perpétuel et irrévocable. Les conventions qui ont formé la société civile ne lioient pas seulement ceux qui les avoient faites: elles obligeoient leurs descendans. Car la société civile n'est pas une société à temps, elle est éternelle, comme le genre humain, qu'elle est destinée à con server et à perfectionner. Ceux qui l'ont instituée n'ont pas prétendu, sans doute,

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