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L'Assemblée décide qu'il sera payé à M. Baudouin une somme de 217,000 liv.

M. BARNAVE Je demande qu'il soit accordé à M. Baudouin une gratification de 30,000 liv. J'observe qu'il résulte parfaitement du rapport du comité qu'on met M. Baudouin à couvert des engagements qu'il a pris pour l'Assemblée nationale, mais qu'il n'y a aucune espèce de proportion entre le profit qui lui appartient et les travaux et les peines très-réelles qu'il a eus. L'entreprise de M. Baudouin paraissait devoir être extrêmement lucrative, extrêmement avantageuse dans son aperçu. Il est arrivé ensuite que, par les lenteurs nécessairement attachées à une entreprise aussi vaste, lenteurs que l'Assemblée même a souvent nécessitées dans son travail, tous les journaux ont pris les devants sur lui; tellement qu'il a constamment été chargé du travail forcé par l'Assemblée pour les distributions journalières, et que les produits qui résultent des ventes au dehors n'ont pas été pour lui, mais pour les journalistes qui le devançaient. En conséquence, il est de la justice de l'Assemblée de récompenser l'activité, le désintéressement très-marqué et très-noble que M. Baudouin a mis dans sa conduite envers elle. Je conclus donc à une gratification de 40,000 liv.

L'Assemblée adopte la proposition de M. Barnave. M. le président annonce que le roi a hier donné son acceptation au décret constitutionnel rendu sur les colonies le 24 de ce mois, et qu'il se propose de lui donner la plus prompte exécution, ainsi qu'à celui du 28 du même mois, qui étend les dispositions de l'amnistie à tous les hommes de guerre.

M. Wimpfen présente la suite du Code pénal militaire. Nous le rapporterons dans un prochain numéro (1).

M. DAUCHY: Le 17 juin 1789, l'Assemblée a aboli tous les impôts existants, et en a établi de nouveaux. Il reste cependant deux branches de perception sur lesquelles il n'a point été prononcé dans le décret du 17 juin 1789. Je crois qu'il faut que l'Assemblée nationale actuelle décrète que les perceptions sur les hypothèques, que la marque d'or et d'argent et les loteries continueront à avoir lieu.

L'Assemblée adopte cette proposition.

M. MONTESQUIOU : Conformément aux intentions de l'Assemblée, le comité des finances a nommé hier des commissaires pour se transporter aujourd'hui au trésor public et pour y vérifier l'état des caisses. Nous nous y sommes rendus ce matin. Nous avons dressé le procès-verbal que je remettrai sur le bureau, et je vais avoir l'honneur de vous lire l'état des fonds et de toutes les espèces qui sont dans les caisses, et que nous avons vus. La balance de la recette et de la dépense au trésor public y laisse aujourd'hui un fonds de caisse de 35 millions 190,160 liv. Il y a en espèces, dans la caisse aux trois clefs, 12 millions 300,000 liv., et encore en espèces dans la caisse des recettes 4 millions 671,819 l., ce qui fait environ 17 millions en espèces. Il y a en assignats, qui ont été comptés devant nous, 8 millions 99,620 liv. ; le reste est en lettres de change et effets qui échoient dans les mois d'octobre, de novembre, jusqu'au mois de février. Voici le procès-verbal signé des commissaires de la trésorerie. L'état de la caisse de l'extraordinaire doit être actuellement vérifié ; car des commissaires s'y sont transportés.

L'Assemblée ordonne l'impression du rapport et du procès-verbal.

M. MONTESQUIOU: Je n'ai qu'un mot à ajouter : c'est qu'indépendamment du fonds de caisse existant au trésor public, la caisse de l'extraordinaire n'a pas encore complété ce qui est décrété pour le mois der

(1) Voir le numére suivant, page 15.

nier et ce qu'il faut pour le complément de ce moisci, de manière qu'il y a peut-être actuellement 100 millions au trésor public.

On fait lecture d'une lettre du ministre des contributions publiques.

« M. le président, j'ai l'honneur de mettre sous les yeux de l'Assemblée le second état et la seconde carte indicative des directoires de département qui ont terminé la répartition de la contribution foncière et mobilière. Le nombre de ces directoires est aujourd'hui de quarante-sept, et la somme répartie, de 196 millions 342,000 liv. Ainsi il reste trente-six directoires de département, dont les états ne sont pas encore parvenus, et dont la portion s'élève à 103 millions 158,000 I.; ce qui ne forme plus que le tiers du total des contributions foncière et mobilière. Je dois d'ailleurs observer à l'Assemblée que, sur les trente-six départements qui paraissent en retard, quinze ont promis de la manière la plus formelle, par leur correspondance, que leurs opérations seraient terminées avant la fin de ce mois; et je suis dès lors convaincu que les premiers jours de la semaine prochaine m'apporteront la certitude du complément de leur travail.

J'aurais désiré, messieurs, pouvoir présenter à l'Assemblée, avant sa séparation, un résultat plus près de son complément. Je me propose de mettre exactement, tous les huit jours, de semblables états de situation sous les yeux de la nouvelle Assemblée législative; et cette mesure, qui doit indiquer aux législateurs les points du royaume où le patriotisme est le plus vrai et le zèle pour la chose publique plus réel et plus soutenu, opérera infailliblement sur les corps administratifs l'effet que j'en ai espéré, et que vous en avez attendu vous-mêmes. »

M. CAMUS: Vos commissaires de la caisse de l'extraordinaire viennent d'en faire la vérification. Il résulte des procès-verbaux et des états qui ont été dressés, qui seront annexés au procès-verbal, qu'il a été fait en remboursements, savoir: remboursement à la caisse d'escompte, remboursements effectifs à différents particuliers pour les offices et autres objets, indépendamment des anticipations remboursées au trésor public, 1 milliard 491 millions. Il y a aujourd'hui, dans la caisse de M. Lecouteulx, 5 millions 663,000 liv. effectifs; dans la caisse à trois clefs, 5 millions 695,000 liv. effectifs; à la fabrication des Petits-Pères, 24 millions, dont la fabrication recommencera demain. Total, 35 millions 338,000 liv.

Je demande que l'Assemblée nationale veuille bien ordonner que le directeur de la liquidation continuera à régler, sur sa responsabilité, les indemnités dues pour les maîtrises et jurandes, et que lesdites indemnités soient payées sur les états signés de lui, qu'il remettra au commissaire du roi pour la caisse de l'extraordinaire. Le motif de cette demande est que ces objets ne sont susceptibles d'aucune difficulté.

Le comité de l'aliénation s'est occupé de la partie administrative. Il a renvoyé dans les bureaux du commissaire de l'extraordinaire tous ses papiers en ordre, ce qui a produit nécessairement une augmentation de dépense et de commis. En attendant que la législature prochaine détermine définitivement tout ce qui aura lieu pour ces objets, je demande que vous vouliez bien accorder 20,000 liv. par provision, à la charge par l'administrateur de la caisse de l'extraordinaire d'en rendre compte.

L'Assemblée adopte les propositions de M. Camus. Sur la proposition de M. Fermont, l'Assemblée décide que deux chaloupes canonnières seront destinées à l'instruction des canonniers garde-côtes.

M. CAMUS: Il me paraît qu'on a cru, par ce que je viens de dire, qu'il n'y avait que 35 millions dans la caisse de l'extraordinaire. Ce n'est point cela du tout, J'aj rendu compte de ce qui était dans les caisses

de la gestion, dans la caisse à trois clefs; mais j'ai l'honneur d'observer à l'Assemblée que, sur les 600 millions de dernière émission d'assignats, il n'y en a que 253 millions d'émis, de sorte qu'il reste encore 347 millions a émettre. Voilà quel est l'état des choses: vous avez ordonné une fabrication de 600 millions; sur ces 600 millions, il y en a 253 qui sont dépensés; vous avez brûlé 284 millions, de sorte que vous n'êtes pas à beaucoup près au pair.

Des 347 millions qui vous restent, une partie seulement est actuellement à la caisse de l'extraordinaire, fabriquée ; une partie aux Petits-Pères, pour être fabriquée; et le surplus est en papier, à l'imprimerie, ou bien n'est pas encore fabriqué. Voilà quelle est la situation actuelle des finances. (On applaudit.)

M. ANSON: Vous venez d'entendre le compte du trésor public et de la caisse de l'extraordinaire. Je suis chargé, par le comité des finances, de dissiper les incertitudes qui ont pu rester encore dans quelques esprits sur ce qu'il y a deux jours, pour le bien de la paix, on a passé à l'ordre du jour sur l'explication demandée relativement au rapport présenté par M. Montesquiou, au nom du comité des finances. Le comité s'est rassemblé à cette occasion. J'ai reçu de lui mission et ordre d'annoncer à l'Assemblée, à toute la France, que cet exposé est avoué du comité des finances, rédigé avec le talent que l'on connaît à M. Montesquiou, et qu'il est la vérité.

à

Nous sommes entendus ici par une portion de nos successeurs je dois leur dire qu'il m'est revenu, moi, que l'on voulait leur insinuer qu'il y avait un secret des finances qui n'était pas connu. Il est de mon devoir de déclarer, et j'espère que l'on aura assez de confiance en moi pour être convaincu que je ne parle ainsi que parce que je suis convaincu moimême, de déclarer, dis-je, qu'il n'y a point de secret des finances, que nous n'en connaissons pas ; et nous annonçons que la législature prochaine commettrait une bien grande faute si, dans les premiers mois de ses travaux, persuadée faussement qu'il y a un secret, elle cherchait ce secret, qui est bien absurde à supposer.

C'est maintenant au nom du comité des finances que j'engage nos successeurs à vérifier avec la plus grande attention toutes les pièces déposées aux archives, ce qui est la véritable route pour découvrir la vérité; et puisque, malgré la publicité la plus grande, malgré qu'aucune dépense n'ait été faite sans décret, on a même révoqué en doute l'administration du comité des finances, nous concluons à ce que l'on examine ces pièces et l'exposé de M. Montesquiou avec la plus grande exactitude.

Nous finissons par demander que la publicité de la censure soit égale à la publicité de cette déclaration.

Il est trois heures.

M. LE PRÉSIDENT: Le roi est en marche pour se rendre à l'Assemblée nationale.

L'Assemblée suspend sa délibération jusqu'à l'arrivée du roi.

Les Huissiers: Le roi ! le roi !

L'Assemblée se lève.

Le roi entre dans la salle, accompagné de ses ministres. Ils prennent la place qui leur est désignée par les décrets.

La salle retentit d'applaudissements et des cris de vive le roi!

LE ROI Messieurs, après l'achèvement de la constitution, vous avez fixé ce jour pour le terme de vos travaux. Il eût peut-être été à désirer que cette session se prolongeât encore quelque temps pour que vous pussiez vous-mêmes essayer, pour ainsi dire, votre ouvrage, et ajouter à vos travaux ceux qui,

déjà préparés, n'avaient plus besoin que d'être perfectionnés par les lumières de l'Assemblée, ou ceux dont la nécessité se serait fait sentir à des législateurs éclairés par l'expérience de près de trois années. Mais vous avez sûrement pensé qu'il importait de mettre le plus petit intervalle possible entre l'achèvement de la constitution et la fin des travaux du corps constituant, afin de marquer avec plus de précision, par le rapprochement, la différence qui existe entre les fonctions d'une assemblée constituante et les devoirs des législatures.

Après avoir accepté la constitution que vous avez donnée au royaume, j'emploierai tout ce que j'ai reçu par elle de forces et de moyens pour assurer aux lois le respect et l'obéissance qui leur sont dus.

J'ai notifié aux puissances étrangères mon acceptation de cette constitution (la salle retentit d'applaudissements et des cris de vive le roi !), et je m'occupe et m'occuperai constamment de toutes les mesures qui peuvent garantir au dehors la sûreté et la tranquillité du royaume. Je ne mettrai pas moins de vigilance et de fermeté à faire exécuter la constitution au dedans, et à empêcher qu'elle soit altérée. (Les applaudissements et les cris de vive le roi! recommencent.)

Pour vous, messieurs, qui, dans une longue et pénible carrière, avez montré un zèle infatigable dans vos travaux, il vous reste encore un devoir à remplir lorsque vous serez dispersés sur la surface de cet empire: c'est d'éclairer vos concitoyens sur le véri table esprit des lois que vous avez formées pour eux ( nouveaux cris, nouveaux applaudissements), d'y rappeler ceux qui les méconnaissent ( nouveaux cris, nouveaux applaudissements), d'épurer, de réunir toutes les opinions par l'exemple que vous donnerez de l'amour de l'ordre et de la soumission aux lois. (Nouveaux cris, nouveaux applaudissements.)

En retournant dans vos foyers, messieurs, vous serez les interprètes de mes sentiments auprès de vos concitoyens. Dites-leur bien à tous que leur roi sera toujours leur premier et leur plus fidèle ami (nouveaux cris, nouveaux applaudissements), qu'il a besoin d'être aimé d'eux (nouveaux cris, nouveaux applaudissements), qu'il ne peut être heureux qu'avec eux et par eux, et que l'espoir de contribuer à leur bonheur soutiendra mon courage, comme la satisfaction d'y avoir réussi sera ma plus douce récompense. (Les applaudissements et les cris de vive le roi! continuent pendant plusieurs minutes.)

M. LE PRÉSIDENT: Sire, l'Assemblée nationale, parvenue au terme de sa carrière, jouit en ce moment du premier fruit de ses travaux.

Convaincue que le gouvernement qui convient le mieux à la France est celui qui concilie les prérogatives respectables du trône avec les droits inaliénables du peuple, elle a donné à l'Etat une constitution qui garantit également et la royauté et la liberté nationale. Les destinées de la France sont attachées au prompt affermissement de cette constitution, et tous les moyens qui peuvent en assurer le succès se réunissent pour l'accélérer.

Bientôt, Sire, le vœu civique que Votre Majesté vient d'exprimer sera accompli; bientôt, rendus à nos foyers, nous allons donner l'exemple de l'obéissance aux lois après les avoir faites, et enseigner comment il ne peut y avoir de liberté que par le respect des autorités constituées.

Nos successeurs, chargés du dépôt redoutable du salut de l'empire, ne méconnaîtront ni l'objet de leur haute mission, ni ses limites constitutionnelles, ni les moyens de la bien remplir. Ils sont et ils se montreront toujours dignes de la confiance qui a remis en leurs mains le sort de la nation.

Et vous, Sire, déjà vous avez presque tout fait.

Votre Majesté a fini la révolution par son acceptation si loyale et si franche de la constitution. Elle a porté au dehors le découragement, ramené au dedans la confiance, rétabli par elle le principal nerf du gouvernement, et préparé l'utile activité de l'administration.

Votre cœur, Sire, en a déjà reçu le prix; il a joui du touchant spectacle de l'allégresse publique, et des ardents témoignages de la reconnaissance et de l'amour des Français. Ces sentiments nécessaires à la félicité des bons rois vous sont dus, Sire; ils se perpétueront pour vous, et leur énergie s'accroîtra à mesure que la nation jouira des efforts constants de Votre Majesté pour assurer le bonheur commun par le maintien de la constitution. (On applaudit à plusieurs reprises.)

Le roi sort de la salle au milieu des applaudissements de l'Assemblée, des tribunes, et des cris de vive le roi!

M. Target, secrétaire, fait lecture du procès-verbal de la séance.

L'Assemblée en adopte le contenu.

M. LE PRÉSIDENT: L'Assemblée nationale constituante déclare qu'elle a rempli sa mission, et que toutes ses séances sont terminées.

Il est quatre heures.

SÉANCE DU JEUDI AU SOIR.

Un de MM. les secrétaires fait lecture d'une Adresse du commerce de la ville de Bordeaux, qui remercie l'Assemblée nationale de son dernier décret sur les colonies.

-M. Guillotin présente, au nom des commissaires de la salle, un état des dépenses de l'Assemblée.

M. RABAUD SAINT-ETIENNE: La loi sur l'organisation des gardes nationales est complète. Il y a quelques articles additionnels qui ne pouvaient vous étre présentés qu'après le projet d'organisation. Nous suivons les mêmes errements dans les objets que nous vous présentons. Un autre objet a mérité notre attention c'est celui qui concerne l'obéissance des gardes nationales à la réquisition de la force publique. Je placerai les articles dans les diverses sections où ils doivent être.

Art. Ier. Les bataillons des gardes nationales seront formés, dans les districts et dans les cantons, de quatre compagnies dans lesquelles seront distribués, en nombre à peu près égal, tous les citoyens inscrits dans le registre de la garde nationale.

» II. Il sera pris, dans les diverses compagnies, de quoi en former une compagnie de grenadiers composée comme dans la garde soldée.

» III. Dans les villes, les compagnies seront composées des citoyens du même quartier, et, dans les campagnes, des citoyens réunis des communautés les plus voisines. Dans les communes qui ne pourraient pas former une compagnie, on formera des pelotons, des sections ou des escouades, selon la population de chaque communauté. »> Sous l'uniforme habit bleu de roi, on a oublié : passe-poil écarlate; » je demande que cela soit inséré dans le procès-verbal.

» IV. Dans les districts, ceux qui voudront profiter de la permission qui est accordée de mettre sur pied deux compagnies de gardes nationales à cheval, elles seront formées du même nombre déterminé pour la garde nationale volontaire à cheval; mais, outre les deux capitaines, il y aura, pour état-major, un chef d'escadron qui commandera les deux compagnics. »

Article sur les canonniers,

Art. Jer. Les villes qui ont des pièces à elles appartenant pourront en attacher deux à chacun de leurs bataillons de gardes nationales, soit sédentaires, soit volontaires, destinés à la défense des frontières ; et dans

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» L'uniforme des canonniers nationaux est réglé ainsi qu'il suit habit bleu de roi, parement et doublure écarlate, passe-poil blanc; revers blancs, passe-poil écarlate; les pattes des poches de l'habit, à trois pointes, un gros bouton sur chaque coin, le gros bouton au dessous des revers; la manche ouverte et fermée par trois boutons; la veste bleu de roi, passe-poil écarlate; culotte bleu de roi; sur le retroussis, un canon et une grenade; les boutons comme ceux des gardes nationales. »

Ces articles sont adoptés.

M. RABAUD SAINT-ETIENNE Il est important que l'Assemblée décide l'ordre du service des gardes nationales qui doit régner dans les villes où l'Assemblée doit tenir ses séances, et même dans celles autres que la ville de Paris où elle pourrait résider quelque jour.

Voici les quatre articles que votre comité de constitution m'a chargé de vous présenter à cet égard :

« Art. Ier. A Paris, et dans tous les lieux où siége l'Assemblée nationale, les dispositions pour le service ordinaire et habituel de la force publique seront concertées entre l'officier commandant la garde nationale, le directoire du département et le chef de la municipalité. Celle-ci requerra en conséquence du commandant des différents corps, soit des troupes de ligne, soit de la gendarmerie nationale, le nombre d'hommes qu'ils devront fournir pour le service.

» II. Les gardes nationales, les troupes de ligne et la gendarmerie nationale auront chacun leur poste séparé. Toutes les troupes de services seront, pendant la durée de leur service, aux ordres du commandant de la garde nationale, les officiers des différents corps conservant d'ailleurs toute l'activité qui leur appartient sur les corps qu'ils commandent, relativement à leur police et discipline intérieure, ainsi que le droit d'inspecter et de présider les postes occupés par leur troupe.

» III. En cas de service extraordinaire, le chef de la municipalité donnera au chef de division commandant de la garde nationale les ordres que les circonstances exigeront, et le commandant de la garde nationale requerra des chefs des troupes de ligne et de la gendarmerie nationale les secours dont il aura besoin.

» IV. Néanmoins, lorsqu'il y aura lieu d'employer la force publique, soit pour appliquer l'exécution de la loi, soit pour dissiper les attroupements ou émeutes, le chef de la municipalité pourra requérir immédiatement des commandants des troupes de ligne ou de gardes nationales le concours des troupes à leurs ordres. » Ces articles sont décrétés.

Sur la proposition de M. Emmery, l'article suivant est adopté :

« Les officiers de tout grade en général, employés dans les troupes de ligne, qui ont servi dans la garde nationale depuis 1789 jusqu'aujourd'hui, compteront, pour la décoration militaire, le temps de leur service dans la garde nationale avec celui de leur service dans les troupes de ligne. »

La séance est levée à neuf heures.

Rapport de M. Chapelier, promis dans le dernier

numero.

M. CHAPELIER: Il reste à votre ancien comité de constitution un devoir à remplir: il lui est imposé par un de vos décrets, et par son amour pour la chose publique, et par son désir d'assurer et de propager les principes conservateurs de la constitution qu'après deux ans et demi de travaux et d'alarmes la France vient de recevoir. Nous allons vous entretenir de ces Sociétés que l'enthousiasme de la liberté a formées, et qui, dans des temps d'orage, ont produit l'heureux effet de rallier les esprits, de former des centres communs d'opinions, et de faire connaître à la minorité opposante l'énorme majorité qui voulait, et la destruction des abus, et le renversement des préjugés, et l'établissement des droits de l'homme. Mais, comme toutes les institutions spontanées que les

motifs les plus purs concourent à former, et qui bientôt sont écartées de leur vue par un changement de circonstances et par d'autres causes diverses, les Sociétés popuJaires ont pris une espèce d'existence politique qu'elles ne doivent pas avoir. Tandis que la révolution a duré, cet ordre de choses a toujours été plus utile que nuisible. Quand une nation change la forme de son gouvernement, chaque citoyen est magistrat; tous délibèrent et doivent délibérer sur la chose publique, et tout ce qui presse, tout doit ce qui assure, tout ce qui accélère une révolution, être mis en usage: c'est une fermentation momentanée qu'il faut soutenir et même accroître, pour que la révolution, ne laissant plus aucun doute, éprouve moins d'obstacles et parvienne plus promptement à sa fin; mais lorsque la révolution est terminée, lorsque la constitution de l'empire est faite, lorsqu'elle a délégué tous les pouvoirs publics, appelé toutes les autorités, alors il faut, pour le salut de cette constitution, que tout rentre dans l'ordre le plus parfait, que rien n'entrave l'action des pouvoirs constitués, que la délibération et la puissance ne soient plus que là où la constitution les a placées, que chacun respecte assez et ses droits de citoyen et les fonctions déléguées pour ne pas excéder les unes et ne pas entraver les autres.

Trop de services ont été rendus à la chose publique par les Sociétés des Amis de la Constitution, trop de patriotisme les anime, pour qu'il soit en général nécessaire de faire autre chose envers elles que d'avertir les citoyens qui les composent des dangers qu'elles peuvent faire courir à la chose publique, et des contraventions auxquelles elles se laisseraient entraîner par des hommes qui ne les cultivent que pour les agiter, qui ne s'y font recevoir que pour se donner une sorte d'existence, qui n'y parlent que pour préparer leurs intrigues, pour usurper une supériorité scandaleuse et pour favoriser leurs projets.

C'est à nous, qui allons confier le fruit de nos travaux à la fidélité du corps législatif, à nous, fondateurs de ces Sociétés, c'est à nous à nous charger de cette instruction si utile: nous devons leur témoigner la reconnaissance de la nation en leur disant ce qu'elles doivent être, et en leur désignant les limites que leur assignent les lois constitutionnelles. C'est à votre comité de constitution, sans jamais s'inquiéter de la popularité d'un jour, fronder tous les partis, braver toutes les clameurs, mépriser toutes les injures, pour essayer de se rendre utile; c'est à lui qu'appartient l'honneur de fixer vos derniers regards et d'attirer l'attention des citoyens sur une partie si importante de l'ordre public; à lui, qui regardera comme un titre à la bienveillance future de la nation les calomnies mêmes qu'il pourra recevoir à cette occasion.

Il est permis à tous les citoyens de s'assembler paisiblement dans un pays, lorsqu'une constitution, fondée sur les droits de l'homme, a créé une patrie, où un sentiment profond attache à la chose publique les habitants de l'empire: c'est un besoin de s'en occuper et d'en parler. Loin d'éteindre ou de comprimer ce feu sacré, il faut que les institutions sociales contribuent à l'entretenir; mais à côté de cet intérêt général, de cette vive affection qu'on tient de la jouissance d'une patrie, et de la libre jouissance des droits de citoyen, se placent les maximes d'ordre public et les principes du gouvernement représentatif. Il n'y a de pouvoirs que ceux constitués par la volonté du peuple, exprimée par ses représentants; il n'y a d'autorité que celle déléguée; il ne peut y avoir d'action que celle de ses mandataires chargés de fonctions publiques. C'est pour conserver ce principe dans toute sa pureté que, d'un bout de l'empire à l'autre, la constitution a fait disparaître toutes les corporations, et qu'elle n'a plus reconnu qu'un corps social et des individus; c'est comme conséquence nécessaire de ce principe qu'elle a interdit toute pétition, toutes affiches sous un nom collectif: décret bien calomnié par ceux qui voulaient renforcer leur voix factieuse de l'autorité des Sociétés, mais décret dont la sagesse a été reconnue par tous les hommes qui ont voulu méditer un peu sur la nature du gouvernement que nous avons adopté.

Les Sociétés, les réunions paisibles des citoyens, les clubs sont inaperçus dans l'Etat. Sortent-ils de la situation privée où les place la constitution, ils s'élèvent contre elle, ils la détruisent au lieu de la défendre; et ce mot précieux do ralliement, Amis de la Constitution, ne parait plus qu'un eri d'agitation, destiné à troubler l'exercice des autorités légitimes,

Ces Sociétés sont composées en grande partie d'estimables citoyens, de véritables amis de la patrie, de défenseurs zélés de la constitution. Ils nous entendront aisément dès que nous leur dirons que, si la révolution les a quelquefois conduits à des actes extérieurs, la constitution établie les réprouve; que, sans s'assimiler aux corporations détruites, sans en former une bien plus dangereuse que les anciennes, parce qu'elle étendrait ses rameaux sur tout l'empire, elles ne peuvent avoir des affiliations, des espèces de métropoles; que cette réunion, cette correspondance politique mènent nécessairement à des résultats également funestes; que prendre une existence publique, c'est entretenir ces deux divisions que tout bon citoyen doit chercher à éteindre, et qui renaissent à chaque instant, à l'aide de bizarres et corporatives associations; qu'il s'établit une espèce de privilége exclusif de patriotisme qui produit des accusations contre les individus non sectaires, et des haines contre les Sociétés non affiliées; que des Adresses sous des noms collectifs, l'assistance à des cérémonies, la recommandation, les certificats donnés à quelques favoris, la louange et le blame prodigués à des citoyens, sont autant d'infractions à la constitution, et de moyens dont les méchants s'emparent; que des journaux de leurs débats, des tribunes placées dans l'intérieur, des salles pour y recevoir des spectateurs, sont toutes contraires à la constitution; qu'elles commettent un délit très-grave lorsqu'elles cherchent à prendre quelque influence sur les actes administratifs et judicaires; que la révolution même n'a pas pu excuser des mandats donnés à des fonctionnaires publics pour venir rendre compte de leur conduite, des voies de fait commises pour détruire des procédures commencées contre des prétendus patriotes, des places assignées dans un tribunal à des députés des clubs pour inspecter des instructions criminelles, des envois de commissaires dans divers lieux, chargés de missions qui ne pouvaient être conférées que par les autorités constituées, et appartenir qu'à des hommes publics.

Sur tous ces faits, il faut même que nous répétions qu'ils ont toujours eu pour motif et pour but de préserver nos décrets de la malveillance, et qu'en contrariant nos principes ils hâtaient l'établissement de la liberté; mais à présent ce ne serait plus qu'une forfaiture coupable, une attaque criminelle contre les autorités établies par la constitution; et ses amis, qui ont juré de la maintenir, ont contracté l'obligation de ne se faire connaitre que par le respect le plus profond aux autorités constituées, et l'éloignement le plus absolu de toute idée d'une existence politique proscrite par la constitution.

Les Sociétés qui se sont formées pour en apprendre, pour en fixer les maximes, ne sont que des réunions d'amis. Ils peuvent s'instruire, disserter, se communiquer leurs fumières; mais leurs conférences, leurs actes intérieurs ne doivent jamais franchir l'enceinte de leurs assemblées; aucun caractère public, aucune démarche collective ne doivent les signaler.

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Ces principes constitutionnels ne peuvent être contestés par personne; cependant nous les voyons encore violés les pétitions sous un nom collectif sont interdites, et on en adresse au corps constituant lui-même, on en placarde dans les rues, on en fatigue les corps administratifs et les officiers municipaux. D'où viennent ces contraventions qui ont pour auteurs les amis fidèles de la constitution? On ne les doit pas à la majorité des citoyens qui les composent, et dont les intentions sont pures, mais seulement à quelques hommes qui les égarent. Il faut donc armer tous les citoyens honnêtes contre ces autorités, qui peuvent devenir plus importantes encore quand elles sont publiques.

La constitution est confiée à la sollicitude et au courage de tous les Français: ceux qui marchent sous son honorable bannière ne souffriront pas l'idée de pouvoir être accusés de la méconnaître et de la détruire. Tout le monde a juré la constitution; tout le monde appelle l'ordre et la paix publique; tout le monde veut que la révolution soit terminée: voilà désormais l'opinion des véritables patriotes. Le temps des destructions est passé; il ne reste plus d'abus à renverser, de préjugés à combattre; il faut désormais embellir cet édifice, dont la liberté et l'égalité sont les pierres angulaires; il faut faire aimer l'ordre nouveau à ceux mêmes qui s'en sont montrés les ennemis, et regarder comme nos seuls et nos plus redoutables adversaires, les hommes qui chercheraient à calomnier ou à dégrader les autorités établies, à

s'emparer de quelques sociétés, pour leur faire jouer un rôle dans l'administration publique, et les rendre les censeurs arbitraires, les turbulents détracteurs, et peut-être les despotes des fonctionnaires publics.

Nous avons annoncé, messieurs, que nous désirions plutôt publier une instruction que de provoquer des lois répressives: nous savons que des lois faites à cet égard pourraient toucher à la liberté, qui doit être sacrée pour les législateurs, dont les actes doivent assurer et non gêner l'exercice: nous considérons d'ailleurs que notre ancien caractère, déjà amélioré par les lois nouvelles, a fait des sociétés particulières une espèce de mode dans laquelle on a voulu renchérir les uns sur les autres; et nous pensons qu'il faut laisser à la raison le soin de réformer une partie des abus. Nous croyons enfin qu'une des grandes causes de la consistance de ces sociétés a été d'avoir pour fondateurs et pour membres la majorité des représentants du peuple. Nous faisions une constitution; nous combattions une minorité ardente; nous attaquions des préjugés bien vieux, des abus bien lucratifs, et par conséquent bien protégés; nous avions besoin de nous réunir, de préparer nos armes, et de nous environner de tous les citoyens qui chérissaient les droits du peuple que nous étions chargés d'arracher des mains des usurpateurs.

Mais aujourd'hui nous devons annoncer à ceux qui, après nous, investis de la confiance publique, viennent exercer des pouvoirs que nous avons délégués au nom de la nation, entourés d'une législation sage et d'une constitution libre, qu'ils ne doivent discuter les grands intérêts de l'empire que comme législateurs et non comme simples citoyens; et que, pour accomplir leur mission, plus paisible que la nôtre, ils doivent se garantir de toute influence extérieure. La nation attend d'eux la paix et l'affermissement de l'ordre public. Leur tache est de faire jouir la France de la constitution qu'elle a faite et jurée. Ils n'ont pas besoin que l'opinion publique se manifeste par des mouvements; elle est connue. Tous les Français veulent avoir promptement tous les avantages de la liberté et de l'égalité; ils veulent, à l'abri de ces immortels droits de l'homme, rendre au commerce sa splendeur, à l'agriculture son activité, à l'industrie toutes ses ressources; ils veulent que nos ennemis ne puissent bientôt apercevoir les traces de la révolution que dans la prospérité de l'empire.

Après avoir parlé des maximes constitutionnelles et des actes qui les offensent, avons-nous besoin de dire que l'existence publique des sociétés, leurs affiliations, leurs journaux, leurs pétitions en nom collectif, leur influence illégale, sont propres à alarmer tous les citoyens paisibles, et à éloigner tous ceux qui veulent vivre sous la protection des lois. Il est dans la nature des choses que des sociétés délibérantes cherchent à acquérir quelque influence extérieure, que des hommes pervers ou ambitieux tentent de s'en emparer et d'en faire des instruments à leur ambition et à leur vengeance; et si les actes de ces sociétés deviennent publics, si des affiliations les transmettent, si des journaux les font connaître, on peut impunément diffamer un citoyen, décrier une autorité constituée, et il n'y a pas d'homme qui puisse résister à cette calomnie: il a été accusé, c'est par son ennemi; on a donné, chose trop facile, on a donné à l'accusation un air de vérité, elle a été applaudie dans la société, quelquefois accueillie; toutes les sociétés affiliées en sont instruites; et l'homme le plus honnête, le fonctionnaire le plus intègre, peut être la victime de la manoeuvre habile d'un méchant, ennemi de la morale et des mœurs, comme celui de la constitution. Il ne faut donc ni affiliation de sociétés, ni journaux de leurs débats.

Croyez, messieurs, que c'est beaucoup à cette disposition que tient l'ordre public, la confiance et la sécurité d'une foule de citoyens. Nul ne veut avoir d'autres maitres que la loi. Si les sociétés pouvaient avoir quelque empire, si elles pouvaient disposer de la réputation d'un homme; si, corporations formées, elles avaient d'un bout de la France à l'autre des ramifications et des agents de leur puissance, les sociétaires seraient les seuls hommes libres, ou plutôt la licence de quelques affiliés détruirait la tranquillité publique. Il ne faut done ni affiliation de sociétés, ni journaux de leurs débats.

Nous ne vous proposons que trois articles de loi : ils ne portent que sur ces actes qui usurperaient une partie de la puissance publique ou qui arrêteraient son action.

Tout le reste, nous l'abandonnons à l'influence de la raison et à la sollicitude du patriotisme. Voici le décret : L'Assemblée nationale, considérant que des sociétés particulières ne peuvent avoir, sous aucune forme, une existence politique, ni exercer aucune influence ni inspection sur les actes des pouvoirs constitués et des autorités légales; que, sous aucun prétexte, elles ne peuvent paraitre sous un nom collectif, soit pour former des pétitions, soit pour assister à des cérémonies publiques, soit pour tout autre objet, décrète ce qui suit :

(Voyez le décret dans le n° du vendredi 30 septembre.) M. ROBESPIERRE : La constitution garantit aux Français le droit de s'assembler paisiblement et sans armes ; la constitution garantit aux Français la communication libre des pensées, toutes les fois qu'on ne fait point de tort à autrui. D'après ces principes, je demande comment on ose vous dire que la correspondance d'une réunion d'hommes paisibles et sans armes, avec d'autres assemblées de la même nature, peut être proscrite par les principes de la constitution ? Si les assemblées d'hommes sans armes sont légitimes, si la communication des pensées est consacrée par la constitution, comment oserat-on me soutenir qu'il soit défendu à ces sociétés de correspondre entre elles ? N'est-il pas évident que c'est celui qui a attaqué ces principes qui les viole de la manière la plus ouverte, et qu'on ne les met aujourd'hui en avant que pour pallier ce qu'il y a d'odieux dans l'attentat qu'on veut se permettre contre la liberté ? Comment et de quel front enverrez-vous dans les départements une instruction par laquelle vous prétendez persuader aux citoyens qu'il n'est pas permis aux sociétés des amis de la constitution d'avoir des correspondances, d'avoir des affiliations? Qu'y a-t-il done d'inconstitutionnel dans une affiliation? L'affiliation n'est autre chose que la relation d'une société légitime avec une autre société légitime, par laquelle elles conviennent de correspondre entre elles sur les objets de l'intérêt public. Comment y a-t-il là quelque chose d'inconstitutionnel? ou plutôt, qu'on me prouve que les principes de la constitution que j'ai développés ne consacrent pas ces vérités ?

On a donné de grands éloges aux sociétés amies de la constitution: c'était, à la vérité, pour acquérir le droit d'en dire beaucoup de mal, et d'alléguer d'une manière très-vague des faits qui ne sont point du tout prouvés, et qui sont absolument calomnieux. Mais, n'importe, on en a dit au moins le bien qu'on ne pouvait pas méconnaître. Eh bien! il n'est autre chose que l'aveu des services rendus à la liberté et à la nation depuis le commencement de la révolution; il me semble que cette considération seule aurait pu dispenser le comité de constitution de se håter sitôt de mettre des entraves à des sociétés qui, de son aveu, ont été si utiles. Mais, dit-on, nous n'avons plus besoin de ces sociétés, car la révolution est finie. Il est temps de briser l'instrument qui nous a si bien servis.

Pour moi, quand je vois d'un côté que la constitution naissante a encore des ennemis intérieurs et extérieurs; quand je vois que les discours et les signes extérieurs sont changés, mais que les actions sont toujours les mêmes, et que les cœurs ne peuvent avoir été changés que par un miracle; quand je vois l'intrigue, la fausseté, donner en même temps l'alarme, semer les troubles et la discorde; lorsque je vois les chefs des factions opposées combattre moins pour la cause de la révolution que pour envahir le pouvoir de dominer sous le nom du monarque; lorsque, d'un autre côté, je vois le zèle exagéré avec lequel ils prescrivent l'obéissance aveugle, en même temps qu'ils proscrivent jusqu'au mot de liberté; que je vois les moyens extraordinaires qu'ils emploient pour tuer l'esprit public, en ressuscitant les préjugés, la légèreté, l'idolatrie; je ne crois pas que la révolution soit linie.

Je sais que, pour préparer le succès des projets que l'on offre aujourd'hui à votre délibération, on a eu soin de prodiguer les critiques, les sophismes, les calomnies et tous les petits moyens employés par de petits hommes qui sont à la fois l'opprobre et le fléau des révolutions. Je sais qu'ils ont rallié à leurs opinions tout ce qu'il y a en France de méchants et de sots. Je sais que ces sortes de projets plaisent beaucoup à tous les hommes intéressés à prévariquer impunément; car tout homme qui peut être corrompu craint la surveillance des citoyens instruits, comme les brigands redoutent la lumière qui éclaire leurs forfaits. Il n'y a que la vertu qui puisse

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