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majeure partie de l'Assemblée n'entend pas ce qui se passe, et que le président enlève les décrets.

M. le Président fait une seconde épreuve.- L'Assemblée décide que la discussion ne sera pas fermée. Un de MM. les secrétaires fait lecture d'une lettre du ministre de la guerre, ainsi conçue:

J'ai eu l'honneur d'écrire à l'Assemblée nationale, le 49 de ce mois, que je me ferais rendre compte des raisons qui avaient suspendu l'exécution du décret de l'amnistie à l'égard des quatre soldats de Rouergue, détenus dans les prisons de Blois : ces informations me sont parvenues hier, et j'espère que l'Assemblée voudra bien m'accorder quelques moments pour les lui communiquer. »

« Pour bien éclaircir cette affaire, je vais d'abord donner ici une copie de la lettre circulaire, écrite le 29 septembre à tous les colonels de la gendarmerie nationale :

Il a été rendu, Monsieur, le 15 de ce mois, une loi qui accorde une amnistie générale à tout homme de guerre, prévenu, accusé ou convaincu de délits militaires. Les soldats détenus sur l'accusation de désertion devant en jouir, vous voudrez bien donner des ordres pour faire élargir ceux qui sont en prison dans les départements de votre division. Il paraît convenable de leur remettre des certificats qui constatent qu'ils ont joui de l'amnistie, afin d'empêcher qu'ils ne soient arrêtés en route en se rendant chez eux. Ces certificats leur serviront en outre à recevoir trois sous par lieue qu'il a paru nécessaire de leur faire payer pour leur subsistance, de crainte que la misère et le défaut absolu de ressources ne les portassent à commettre des excès en chemin. Je joins ici des imprimés destinés à cet usage, que vous ferez passer aux différents officiers de votre division, en quantité proportionnée au nombre des prisonniers qu'ils pourront avoir à faire élargir. Vous leur indiquerez en même temps les précautions que vous jugerez les plus propres à prévenir tout inconvénient dans l'exécution de la loi dont il s'agit. Ainsi, quand il y aura beaucoup de militaires réunis dans une même prison, il faudra n'en faire sortir que deux ou trois ensemble, et remettre l'élargissement des autres aux jours suivants, afin de prévenir les dangers, ou du moins les inquiétudes qu'occasionnerait leur rassemblement. Dans ce cas, il sera juste de donner la préférence à ceux qui auront été arrêtés les premiers. Je m'en rapporte à vous pour envoyer aux officiers de votre division, les instructions de cette nature que les circonstances rendront nécessaires.

» Vous aurez soin de vous faire informer exactement de tout ce qu'ils auront fait pour l'exécution de l'article IV de la loi du 15 de ce mois, et vous m'enverrez un état formé d'après les comptes qu'ils vous auront rendus, contenant les noms des prisonniers élargis, des régiments dont ils étaient déserteurs, et des prisons où ils étaient détenus, ainsi que les dates de leur sorties de ces mêmes prisons.

« J'ose croire, M. le président, que les mesures et précautions indiquées par cette lettre paraîtront convenables et telles que les circonstances l'exigent. Voici les faits subséquents :

Le lieutenant de la gendarmerie du département de Loir-et-Cher a envoyé au lieutenant de Blois l'ordre de mettre en liberté les soldats détenus dans les prisons, en lui recommandant de se conformer aux dispositions prescrites par ma lettre, surtout de ne pas les faire sortir tous à la fois. Le lieutenant a d'abord fait élargir un déserteur de Royal-Comtoi, ensuite un caporal du régiment de Rouergue. Ici je vous prie, M. le président, de vouloir bien vous rappeler que l'Assemblée nationale, constituante avait été dans le temps informée par son comité militaire de l'insurrection d'un bataillon de Rouergue, à son passage à Blois. Il est à remarquer que les quatre soldats qui ont donné lieu à la dénonciation, faite à l'Assemblée nationale, étaient regardés comme les principaux auteurs de cette insurrection. Une cour martiale avait été demandée contre eux, mais il résulte des procès-verbaux faits par la municipalité même, qu'il avait été dangereux et impraticable de tenir cette cour martiale; il fut donc jugé plus convenable de faire partir le régiment; mais ses chefs étant persuadés que s'ils emmenaient ces quatre hommes il était fort à craindre qu'ils n'entretinssent l'insurrection de la troupe et qu'elle ne se portât dans la route aux plus grands désordres, ils les laissèrent à Blois dans les prisons.

Je reprends l'ordre des faits: l'officier de la gendar merie nationale ayant mis en liberté, ainsi que je l'ai dit, le caporal de Rouergue, sut bientôt que cet homme avait été retrouver des gens malintentionnés de la ville, qui s'étaient précédemment coalisés avec le bataillon de Rouergue et qui l'avaient soutenu dans sa révolte. Fort de ce secours, ce soldat refusait de partir, et paraissait vouloir faire la loi. Le lieutenant de la gendarmerie craignit alors que s'il rendait la liberté aux trois autres, ces hommes réunis n'occasionnassent de plus grands désordres et sur tout qu'ils ne cherchassent, ce sont les termes même de la lettre du commandant de la gendarmerie, à corrompre les quatre compagnies des Bassigny détachées à Blois, qui y sont fort tranquilles. En conséquence, il crut devoir suspendre l'exécution des ordres qu'il avait reçus, pour en demander de nouveaux à son chef qui s'est lui-même adressé à moi pour savoir la conduite qu'il avait à tenir. » C'est ainsi, M. le président, que les choses se sont passées, et j'ose espérer que l'Assemblée nationale trouvera que chacun a fait son devoir en cette occasion. Il semble bien que les officiers de la gendarmerie nationale ont donné une extension trop grande aux ordres qu'ils avaient reçus de moi; je leur recommandais, à la vérité, de ne point faire sortir à la fois un grand nombre de prisonniers, ils ont cru ne devoir les faire sortir qu'un à un; mais ce qui arrivait, ne justifie-t-il pas cette précaution? Leurs motifs sont évidemment bons, leurs intentions vraiment louables; et chacun, je crois, s'étonnera que ces faits aient pu être interprétés, présentés d'une manière aussi infidèle et aussi injuste qu'ils l'ont été.

» Au surplus, M. le président, je reçois la nouvelle que les quatre soldats sont maintenant en liberté. »

M. CHABOT: Je demande que cette lettre soit imprimée. ( On murmure. )

M.***: Il est bien essentiel que cette lettre soit imprimée avant la distribution du procès-verbal, afin que l'on puisse examiner plus attentivement la conduite du ministre, et l'extension donnée à la loi.

M. le Président annonce une autre lettre du ministre de la guerre, relative à la prorogation du mode actuel des remplacements.

On demande le renvoi de cette lettre au comité militaire.

M. LACOMBE-SAINT-MICHEL : J'ai à faire, sur l'objet de cette lettre, quelques réflexions, pour lesquelles je demande l'attention de l'Assemblée. La lettre du ministre concerne le mode des remplacements; vous sentez tous que la voie des examens produirait un retard de cinq ou six mois. Le mode actuel de remplacement doit donc être prorogé jusqu'au 1er janvier.

Militaire de profession, législateur par le choix de mes commettants, je n'écouterai que mon devoir dans les observations qu'il me prescrit. Si je perds l'amitié de quelques compagnons d'armes, je me consolerai de leur injustice, si de l'autre côté je me concilie l'estime de quelques honnêtes gens. Je suis loin de disculper les officiers qu'il faut remplacer. Quand la patrie est en danger, fût-elle ingrate, il faut mourir pour elle. Au printemps dernier quelques mécontents sont partis, mais depuis, l'émigration est devenue épidémique; c'est aux chefs des corps, c'est à l'injustice des officiers supérieurs envers les autres officiers, qu'il faut attribuer une partie de ce mal; c'est aussi aux mauvais choix qui ont été faits dans les bureaux de la guerre, et à la malveillance des chefs de ces bureaux. Sous le despotisme, ils savaient très-bien donner au ministre les moyens de rétablir la tranquillité dans les corps; par quelle fatalité ces hommes, qui autrefois savaient tout ce qui se passait dans les régiments, ne savent-ils plus rien aujourd'hui? Depuis la révolution il y a eu assez d'occasions pour connaître le patriotisme et les intentions de chacun des officiers, mais les chefs des bureaux protégent les opinions des chefs des régiments. Comment en effet concevoir que sans un ac

cord perfide la tranquillité ne fût pas depuis long-¡ temps rétablie dans l'armée?

Tout le monde se rappelle le ministère de M. Choiseuil; les soldats étaient menés à coups de bâton; les sous-officiers et même les officiers étaient traités comme en Prusse; le ministre n'avait donc pour lui que les trois chefs des corps. Mais aujourd'hui que vous avez pour vous les soldats et les sous-officiers, et même une assez grande partie des officiers, vous ne sauriez rétablir l'ordre dans l'armée! Vous y parviendrez dès qu'elle ne sera plus soumise aux caprices et aux vengeances d'une jeunesse présomptueuse; vous y parviendrez lorsqu'on n'entendra plus, dans les antichambres des ministres, des jeunes gens tenir les propos les plus indiscrets contre la constitution; car ne peut-on pas penser avec justice qu'ils tiennent le langage le plus propre à plaire à ceux dont ils sollicitent les faveurs.

Je ne parle pas des transfuges; car je ne pense pas que ceux qui ont abandonné leur poste puissent y rentrer; nais je dis que les remords ne les quitteront pas, qu'il est parmi eux de bons officiers qui ne sont que faibles et égarés, et que le législateur qui est obligé d'être juste et sévère, ne peut cependant s'empêcher de plaindre ceux que des préjugés et le délire d'un moment ont déterminés à quitter leur pays, et peut-être leurs moyens des subsistance. Mais je vous prie de jeter un coup d'œil sur votre armée, elle brûle de se mesurer avec les ennemis de l'Etat; et s'ils nous attaquaient, ces braves soldats leur fe raient bientôt mordre la poussière; mais je vous dénonce les désagréments que l'on fait éprouver aux officiers qui sont attachés à leur patrie, vous leur devez compte de leur patriotisme, ils seraient les plus forts, s'ils n'étaient pas les plus sages. Je demande donc que vous composiez l'armée de ces jeunes citoyens qui, ayant servi depuis la révolution dans les gardes nationales, ne demandent qu' mettre en pratique leur courage et leur patriotisme. Je demande qu'à cet effet le mode actuel de remplacement soit prorogé jusqu'au 1er janvier. ( On applaudit.)

u'à

L'Assemblée charge son comité militaire de lui faire sous trois jours un rapport sur cet objet. Elle se retire dans les bureaux pour procéder à la formation du comité de commerce.

La séance est levée à deux heures et demie.

SÉANCE DU JEUDI 27 Octobre.

M. fait la seconde lecture du projet de décret relatif à l'acquittement des frais des funérailles de Mirabeau.

M. GOUJON: Je ne tirerai point d'induction en faveur de la question, de ce qui a été allégué, que Mirabeau est mort insolvable. Vous savez même que la sœur de Mirabeau a déclaré par la voie des feuilles publiques, que le fait n'était pas exact; mais je ne m'appesantirai pas là-dessus. Je dirai seulement que la loi qui a ordonné les funérailles de Mirabeau, a par cela même ordonné qu'elles seraient faites aux frais du trésor public; il est donc inutile de rendre une décision nouvelle, et je demande la question préalable.

M. ***: Voudrait-on ôter à Mirabeau la gloire d'être mort insolvable; je demande que sans autre discussion, l'Assemblée décrète que ses funérailles seront une dépense nationale.

L'Assemblée décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur la motion de M. Goujon.

Plusieurs membres se livrent à des observations grammaticales sur la rédaction du projet de loi.

M: Je demande que toutes ces minuties soient enfin écartées par la question préalable; et sur le

fond du décret, j'observe qu'avant d'être généreux, il faut payer ses dettes.

L'Assemblée ajourne à huit jours la troisième lecture du projet de loi, et passe à l'ordre du jour. Suite de la discussion sur les moyens de réprimer les troubles ayant pour cause l'influence d'une partie des prêtres non-assermentés.

M. GORGUEREAU: Je ne viens pas abuser des moments de l'Assemblée, et je serai fidèle au principe des motions d'ordre. La motion que j'ai à faire exige quelques développements; elle frappe à la fois et sur la question relative aux prêtres réfractaires, et sur la question relative aux émigrants, ou pour mieux dire, sur la manière dont ces deux questions doivent être posées; et il ne faut pas beaucoup approfondir cette matière pour savoir qu'il a été fait dans cette discussion un double emploi, d'où il est résulté une grande perte de temps, une grande divergence dans les opinions, et une très-grande indécision dans les esprits.

Je commence par la question relative aux prêtres réfractaires. Il me semble que tous les projets de loi qui vous ont été proposés sont contraires aux principes. Votre intention n'est pas de prendre des mesures répressives ni contre les prêtres, en tant que prêtres, ni contre les réfractaires en tant que réfractaires. Vous n'avez entendu réprimer que les troubles qui existent dans les départements. Or, je ne sais s'il est bien digue de l'Assemblée nationale de poser la question plutôt sous une forme théologique que sous l'aspect politique, je crois même que les eunemis de la chose publique ne sont pas mécontents de la manière dont cette question a été posée. Quelques opinants ont dit qu'il fallait être intolérants, les autres ont soutenu les principes de la tolérance.

En tout ceci la difficulté est venue de ce que l'Assemblée s'est occupée de prêtres. Encore une fois, nous ne devons nous occuper que des perturbateurs de la chose publique, et nous devons les envisager, non comme prêtres, mais comme perturbateurs; autrement il faudrait diviser la question en autant de branches qu'il y a d'hommes d'un état différent qui troublent leur république. En conséquence, je prie l'Assemblée de réduire la question aux perturbateurs de l'ordre: je crois même qu'au lieu de s'occuper des prêtres, il vaudrait mieux trouver des précautions et des moyens de rigueur contre les dépositaires des lois quí en laissent languir l'exécu

tion.

Je passe à la question relative aux émigrants. Ce n'est pas l'émigration qui peut être l'objet d'une loi pénale, c'est le but de ces émigrations qui présente une conspiration contre la tranquillité publique. Les prêtres réfractaires et les émigrants me paraissent tous devoir se confondre dans une seule question: en effet, ils n'ont qu'un même but et qu'un seul intérêt. En conséquence, je demanderais qu'après que la discussion sera fermée, on renvoyât au comité, pour présenter un projet de loi générale sur ces différentes causes de troubles

L'Assemblée passe à l'ordre du jour.

M. LEQUINIO Dans la cause importante que vous traitez, j'ai pris une route absolument différente de celle des préopinants. Je vous proposerai un projet de loi juste, efficace et sévère; il sera la conséquence d'une discussion développée, non pas dans une dissertation profonde, mais dans une adresse populaire, où je me suis attaché à parler le langage du peuple et à lui inspirer, par la simplicité des raisonnements et des exemples, le sentiment de la conviction. Je parle au peuple :

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Citoyens français, vous nous avez honorés de votre confiance, votre estime nous a portés au haut de la montagne, d'où nous portons nos regards sur le reste du royaume... (On murmure.)

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C'est la manière de parler aux gens accablés de fanatisme; vivant parmi eux, écrivant pour eux depuis long-temps, j'ai appris le langage qu'il fallait lui tenir. Je continue. Vous ne voyez, citoyens français, que l'étroit espace qui vous entoure, et nous, nous voyons d'un coup-d'œil la situation générale de tout l'empire; nous voyons les sources de de tous les désordres et les moyens d'y appliquer des remèdes efficaces. Venus de toutes les parties de la France, nous avons nos familles dispersées sur la surface du royaume, et nous avons à leur sûreté les mêmes intérêts que vous avez à la vôtre. Nous voulons être heureux, comme vous, et jamais nous ne serons heureux qu'en faisant le bonheur de nos concitoyens. Vous qui, par vos vertus pratiques, avez tant de droits au bonheur, croyez-vous que nous pourrions être heureux si vous ne l'étiez pas? Recevez de nous l'instruction et la subsistance morale, vous qui nous donnez la subsistance physique. Les désordres existent parmi vous, et vous en ignorez vous-mêmes les causes; vous vous tourmentez sans savoir pourquoi. La religion que nous aimons, comme vous, est le prétexte de ces troubles. Mais sachez donc que dans toutes les religions, la multitude a toujours été victime de son ignorance, et que des flots de sang ont coulé, que des millions d'hommes se sont déchirés, parce qu'ils ne s'entendaient pas. Tous les peuples ont une religion, et tous, même les plus sauvages, ont une manière d'adorer Dieu et de lui rendre leurs hommages. (On murmure. )

Vous voulez sans doute faire le bien, ayez la patience de m'écouter quatre minutes, c'est au peuple que je parle. C'est cette manière de rendre hommage à la divinité qu'on appelle culte; tous les cultes ont le même but, celui de célébrer Dieu, et de rendre les hommes plus sages, en leur inspirant des sentiments de fraternité. Quoi, parce que l'un differe de l'autre dans sa manière de penser, parce que l'uo accorde sa confiance à un prêtre, et l'autre a un autre...."

Plusieurs voix : Ce n'est pas-là l'ordre du jour. M. LEQUINIO: Parce que chacun exerce le culte qui lui paraît le meilleur, faut-il qu'on se haïsse; il vaudrait autant se haïr parce que l'un dit que c'est le soleil qui tourne, et que l'autre dit que c'est la

terre..

M. *** : Il n'a pas été décrété qu'il serait fait une adresse aux Français, c'est pourquoi je demande que l'on passe à l'ordre du jour.

M. LEQUINIO: Je me rends avec respect et soumission aux désirs de l'Assemblée, qui paraît vouloir que je passe à la lecture de mon projet de décret; mais j'ai l'honneur de lui observer que rien n'est plus propre à rétablir la tranquillité dans les campagnes, qu'un projet d'adresse populaire; mais, puisque vous le voulez, voici mon projet de décret."

L'Assemblée nationale considérant que la liberté la plus entière des opinions religieuses et des cultes religieux est le premier des droits imprescriptibles de l'homme, et que chaque citoyen n'en doit compte qu'à lui-même et à sa conscience, mais que la tranquillité publique et celle des particuliers ne doit être troublée par qui que ce soit à cette occasion, et que la paix sociale, au contraire, est le résultat nécessaire de cette liberté ; mais que la nation ne peut être tenue à l'entretien des ministres qui ne se conforment pas aux lois de l'Etat sur ce point, et que les fonctions religieuses doivent être entièrement séparées des fonctions civiles, décrète ce qui suit :

» Art. Ier. A compter de la publication du présent décret au chef-lieu de département, les seuls fonctionnaires

publics assermentés seront salariés par la nation, mais il sera libre aux paroisses dont les curés et vicaires ne sont pas assermentés, de conserver leurs prêtres actuels, en les payant comme elles l'entendront.

II. Toute injure dite ou faite à qui que ce soit, par écrit, gestes ou paroles, à l'occasion de son opinion religieuse ou du culte qu'il professe, quel qu'il soit, est sou mise à la police correctionnelle, et sera punie, pour la première fois, par une amende de 12 liv.; pour la seconde fois, par huit jours de prison; et pour la troisième fois, par un mois, le tout sans préjudicier aux droits de la partie injuriée.

III. La peine sera double dans le cas où la personne injuriée serait un ministre d'un culte quelconque dans l'exercice de ses fonctions.

» IV. Si l'injure est accompagnée de voie de fait, c'est un délit qui sera poursuivi selon la rigueur des lois, et les peines seront double, si la voie de fait est exercée contre un ministre de culte religieux quelconque, exerçant ses fonctions.

V. Tout fonctionnaire public ecclésiastique du culte salarié par la nation, et qui aura prêté le serment, s'il est insulté dans ses fonctions, il en pourra, dans les vingt-quatre heures, rapporter son procès-verbal, sur lequel il sera répété par-devant le tribunal de son district, dans les trois jours de la date; et sur le tout il sera fait droit, comme sur procès-verbal de tout autre fonctionnaire public laïc.

» VI. Les accusateurs publics, tribunaux et municipalités seront responsables de la lenteur de leurs poursuites, et le comité de législation présentera, sous quinze jours, un projet de décret pour établir le mode d'exécution de cette responsabilité.

VII. Le même comité présentera, dans le même délai; un projet de décret sur le meilleur mode pour constater civilement les mariages, naissances et morts des citoyens, de manière que les fonctions publiques à cet égard soient totalement séparées des cérémonies religieuses, que chaque citoyen sera libre d'observer selon son culte particulier.

VIII. Le comité des secours publics et d'éducation publique se concerteront pour proposer le plus tôt possible, un projet de décret relatif à l'assistance que l'Etat doit aux infirmes et aux vieillards, de quelque état et de quelque religion qu'ils soient.»

M. BAGNOT: Quand on considère les troubles excités par les prêtres, on sent la nécessité de faire une loi répressive. Ce mal a trois causes. 1o Je vois les prêtres non assermentés persister à vouloir faire classe à part, je les vois tromper la religion publique en affectant un zèle apostolique; du centre de leurs trames perfides ces insectes se disent les vengeurs du ciel, et prononcent des anathèmes en son nom. De l'autre côté, je vois des prêtres assermentés exercer une intolérance qui altère la confiance publique, et qui donne plus de force au parti contraire; enfin j'aperçois la partie la plus facile du peuple se laissant égarer, croyant que des hommes sont les dispensateurs des grâces celestes et les organes du ciel. Après avoir porté la vue sur la cause du mal, examinons le remède qu'il convient de lui appliquer. Les lois actuelles sont-elles suffisantes? je ne le pense pas. Elles sont trop vagues, trop générales; elles ne prononcent pas de peines pécuniaires, et cependant le plus puissant mobile des hommes est l'intérêt. Je rejette toutes les mesures qui seraient trop sévères, elles paraîtraient oppressives: le peuple regarderait comme innocent celui que la loi aurait frappé. Leur haine pour les prêtres assermentés augmenterait en raison de la persécution des autres.

M. Fauchet vous a proposé hier, au nom de l'évangile, qui commande la charité, des mesures de vengeance; mais j'aime à croire que vous ne renverserez pas les lois qui vous sont une barrière à vousmêmes. Le projet de l'évêque du Calvados peut être le produit du patriotisme, qui s'indigne de voir les lois outragées; mais l'impassibilité du législateur résiste à de pareils moyens. Je vous propose donc un projet de décret plus juste et moins rigoureux.

« Art. Ier. L'Assemblée nationale met sous la protec-
tion de la loi la liberté des cultes; en conséquence, les mu-
nicipalités, les corps administratifs et les tribunaux seront
tenus de réprimer les atteintes qui lui seront portées.

» II. Les prêtres non assermentés exerceront leur culte
à leurs frais, à la charge d'avertir la municipalité, du temps
et du lieu où ils feront leurs cérémonies.

» III. En cas de troubles, les municipalités seront tenues
d'en dresser procès-verbal et d'en envoyer copie à l'accusa-
teur public.

» IV. Tout citoyen qui aura connaissance de quelque
voie de fait, de quelques écrits séditieux, sera tenu de les
dénoncer à l'accusateur public, qui poursuivra les auteurs
des délits, et les juges demeureront responsables person-
nellement de leur lenteur et de leur négligence.

» V. Les ecclésiastiques qui seront convaincus d'avoir
troublé l'ordre public seront privés de la moitié de leurs
traitements, et en cas de récidive, de la totalité. A la se-
conde récidive, ils seront poursuivis criminellement selon
la rigueur des lois.

» VI. Tout citoyen qui sera convaincu d'avoir troublé
l'ordre public par des querelles religieuses, sera condamné
à 300 liv. d'amende, et en cas de récidive, à une amende
du double. Le comité de législation présentera incessam-
ment un projet de loi sur les moyens de constater les
actes civils. »
(La suite demain.)
N. B. La discussion n'a point été terminée.

LIVRES NOUVEAUX.

M. Gueffier jeune, imprimeur-libraire, quai des Augus-
tins, no 17; ayant fait l'acquisition du Guide du Commer-
ce, par M. Gaignat, ancien négociant de Nantes, a cru de-
voir faire ajouter à cet ouvrage précieux pour tous les
commerçants, la loi relative au timbre ;il offre cette édition,
des mieux soignées, qui contient quatre parties.

La première comprend le commerce de la Chine, celui
du Pérou, celui de l'Amérique, avec des modèles d'achat
et de vente, etc., etc..

La deuxième est la manière de tenir les livres de comp-
tes en parties simples et en parties doubles, tant en par-
ticulier qu'en société, avec instructions et modèles d'i-
ceux, et de billets, de lettres de change, de rescriptions,
d'avals, etc., etc.

La troisième contient la gestion d'une cargaison de na-
vire à l'Amérique, utile tant aux navigateurs, aux géreurs
de cargaisons ou de pacotilles, qu'aux négociants et aux
habitants des Iles, etc.

La quatrième est la manière de traiter, de troquer ou
d'acheter les noirs en Afrique, ou vulgairement dit, à
la Côte de Guinée, et d'acheter les retours en Amérique,
aussi vulgairement dit, aux Iles, pour France, etc., avec
des tableaux de traite de nègres, et d'achat en retour,
très-bien gravés en taille-douce, et très-expéditifs pour ceux
qui ne veulent pas en former, parce qu'il y en a qui sont
prêts à remplir.

Quelques auteurs ont traité sommairement des deux
premières parties, mais aucun n'a traité des deux der-
nières.

Prix: 12 liv., et 14 liv. franc de port par la poste.

Le même libraire vient de faire faire une édition de la
Constitution, purgée de toutes les fautes qui se sont glis-
sées dans presque toutes celles qui ont paru; un volume
petit in-12, 15 s.

On trouve aussi chez lui, le Sens commun, ouvrage tra-
duit de l'anglais de Thomas Paine, auteur des Droits de
l'Homme; 4 volume in-8°, 4 liv. 4 s.

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THEATRE FRANÇAIS, rue de Richelieu. Aujourd'hui,
Phedre, tragédie, suivie de la Mère rivale, comédie nou.
velle. Entre les deux pièces, M. Fodor exécutera un con-
certo de violon, de sa composition.

THEATRE de la rue Feydeau, ci-devant de MONSIEUR. -
Aujourd'hui, la 1re représentation de la Menteuse par
point d'honneur, comédie en 2 actes, suivie de la 43e du
Club des bonnes gens, opéra-folie.

Lundi, Lodoiska, opéra français.

THEATRE DE Mlle MONTANSIER, au Palais-Royal. - Au-
jourd'hui, Médée, tragédie dans laquelle M1le Sainval l'ai-
née remplira le rôle de Médée, suivie du Milicien, opéra en

un acte.

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THEATRE DE LA RUE DE LOUVois.
relâche.
Demain, la 4re représentation de Zélia, drame en 3 ac-
tes, mêlé de musique.

En attendant la 1re représentation du Roman, comédie.
THEATRE DU CIRQUE NATIONAL, au Palais-Royal.- Au-
jourd'hui la 3o représentation de l'Acteur débutant, co-
médie en 2 actes, suivie de Julien et Colette, comédie avec
son divertissement.

-

THEATRE FRANÇAIS COMIQUE ET LYRIQUE. Aujour-
d'hui, la Servante Maîtresse, opéra bouffon, les Vœux
forcés, drame en 2 actes, et le Devin du Village.

SALON DES ETRANGERS, rue du Mail, no 49. Il est ouvert
tous les jours jusqu'à telle heure qu'il plaît à MM. les
abonnés d'y rester.

PAIEMENTS DEs rentes de l'hÔTEL-DE-VILLE DE PARIS.
Six premiers mois 1791. MM. les Payeurs sont à la lettre L.
Cours des Changes étrangers à 60 jours de date.
Amsterdam.
Hambourg.
Londres.
Madrid.

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2351
231/8

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Cadix.
Gênes.

Livourne.

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491. Lyon. P. des Saints. / P.

Bourse du 27 octobre.

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Caisse d'esc.

Demi-Caisse.

Quit. des Eaux de Paris.

Empr. de nov. 1787, à 5. p.

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de 80 mill. d'août 1789.
Actions des huîtres

Assur. contre les inc.

à vie..

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Actions de la Caisse patriotique

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3940, 42, 15

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CONTRATS. 1'e classe, à 5 p. %. 93 1/2 3/4, 5/89 3/5

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2o idem, à 5 p. %, suj. au 15o.
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4o idem, à 5 p.

%, suj. au 10o, et 2 s. p. J. ..

GAZETTE NATIONALE OU LE MONITEUR UNIVERSEL.

N° 302.

Samedi 29 OCTOBRE 1791.

POLITIQUE.

POLOGNE.

De Varsovie, le 5 octobre. Un courrier français a apporté au ministre de France des dépêches relatives à l'acceptation du roi, de l'acte constitutionnel; il a continué ensuite sa route pour Pétersbourg, où il porte de pareilles dépêches. Les Français qui sont ici ont fait chanter un Te Deum dans l'église de Sainte-Marie, en actions de grâces de cet heureux événement.

Du 7. On va traiter sérieusement l'affaire de la vente des starosties, qui sont des biens royaux ou de la nation. Plusieurs projets ont déjà été présentés pour ou contre cette opération importante; mais malgré les obstacles que pourront y apporter les personnes intéressées à cette possession abusive, on s'attend que ce projet passera à la pluralité des voix, et que l'on réussira dans une entreprise qui est notre unique ressource pour combler, dans nos finances, un déficit de plus de 15 millions de florins, sans mettre de nouveaux impôts.

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On apprend de nos frontières que le reis-effendi, envoyé de Constantinople, a déjà passé le Danube, et que le prince Potemkin a fait partir à sa rencontre plusieurs généraux qui se réuniront à l'escorte de mille hommes qui sont à la suite du reis-effendi, et l'accompagneront jusqu'à Jassy. De Thorn, le 5 octobre. Nous commençons à sentir les bons effets de la révolution dans les élections de Posnanie; il y a eu des protestants élevés aux charges de la magistrature et de représentants des communes; ce qu'on n'avait jamais vu. Le capitaine Sable est entré ces derniers jours dans le port de Newfarwaser. Il avait été pris, il y a deux ans, dans ces parages par un navire suédois et conduit à Cariscrona, où il était resté jusqu'à présent. Il a obtenu pleine satisfaction, et est rentré avec un dédommagement de 74,000 rixdallers, monnaie d'argent.

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ALLEMAGNE.

De Vienne, le 14 octobre. L'empereur est arrivé ici le 42 de ce mois. Le lendemain l'ambassadeur de France a eu une audience particulière de Sa Majesté.

Les Etats du Tyrol ont envoyé ici deux députés pour se plaindre de quelques griefs et solliciter le rétablissement de plusieurs de leurs priviléges. Il parait que leurs plaintes portent à peu près sur les mêmes articles qui excitent le même mécontentement dans le royaume de Hongrie.

On remarque que la gazette de la cour n'a point encore fait mention des nouveaux troubles qui se manifestent entre les Etats de Brabant et le gouvernement des PaysBas. Le bruit commence à se répandre que Sa Majesté impériale, inquiète sur les moyens de ramener le calme au sein des provinces belges, n'est pas éloignée d'appeler la garantie des puissances qui se sont engagées à cet égard par un dernier traité à la Haye.

De la Basse-Saxe, le 14 octobre. La cour de Suède vient de faire démentir dans la gazette de Stockholm, ce qui a été avancé dans plusieurs papiers publics de l'Empire, et de là dans les papiers français, que plusieurs régiments suédois avaient déclaré ne vouloir point servir dans une guerre dirigée contre la France: « Outre, est-il dit dans la réclamation, qu'on n'a ici aucune connaissance de cette prétendue insurrection du militaire suédois; l'auteur de l'article se trompe encore grossièrement sur les motifs par lesquels il prétend la justifier. Il devrait ne pas ignorer que l'acte de garantie de 1789 laisse au roi la liberté d'entreprendre et de conduire telle guerre offensive et défensive qu'il jugera à propos, sans le consentement de la nation. Il ne devrait pas ignorer encore qu'il n'existe point en Suède d'Assemblée nationale permanente, mais seulement des Etats composés de plusieurs ordres, et une diète que le roi convoque quand il lui plaît. »

Extrait d'une lettre de Cologne, du 23 octobre. ce que l'on nous écrit de Coblentz :

Voici

Lundi 17 de ce mois, il arriva un courrier russe qui apporta des assurances renouvelées de la part de l'impératrice de Russie aux princes, frères du roi des Français, et à la noblesse française qui se trouve ici. Cette lettre doit 2e Séric. Tome I.

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Lille, le 25 octobre. Hier, la tranquillité publique a failli être troublée; mais grâces à la vigilance toujours active de notre garde nationale et de la troupe de ligne, qui, à la réquisition de la municipalité, ont été mises sur pied, l'ordre s'est rétabli sans effusion de sang. Ce mouvement d'insurrection, que les sourdes manœuvres des uns et l'excessive cupidité des autres, concouraient depuis long-temps à faire naître, a été enfin déterminé par la perte immense qu'on éprouve sur les assignats, même sur ceux de 5 liv., et par le refus opiniâtre des ouvriers de recevoir le prix de leurs travaux de la semaine, dans les manufactures, en billets de 5 et 10 sous de la caisse patriotique. Ce mouvement, qui s'est annoncé d'abord avec des caractères trèsalarmants, a heureusement hâté les dispositions de l'ouverture d'un bureau d'échange qui aura lieu, dit-on, aujourd'hui à la municipalité. Il est au moins certain qu'on a conduit à la maison commune une voiture chargée de nouvelle monnaie pour cet objet. La cavalerie est restée sur pied, à la grande place, jusqu'à dix heures, et les patrouilles ont été nombreuses pendant la nuit. Au moment où nous écrivons, tout est tranquille.

DÉPARTEMENT DE L'ALLIER.

Saint-Pourcain, le 20 octobre. Le 16 de ce mois, la garde nationale se disposait à prendre les armes à l'occasion de l'arrivée en cette ville de M. Lafayette, afin d'offrir à ce grand citoyen les témoignages de l'estime et de la reconnaissance publique. — Le premier officier, M. DelouauPersat, ancien capitaine d'infanterie, chevalier de SaintLouis, et pensionnaire de la nation, tourne en ridicule cette résolution, et refuse de commander le bataillon, en disant et répétant plusieurs fois : Je ne dois rien à cet hommelà..... - Indignée du procédé de cet officier, dont elle avait cru d'ailleurs avoir à se plaindre dans d'autres circonstances, la garde nationale se rassemble sur la place d'armes, et prononce authentiquement la destitution de ce commandant. Il en a été rédigé acte, et aussitôt le commandement a été donné au premier capitaine. Tous les habitants ont applaudi à cette destitution, et ils ont célébré l'arrivée de M. Lafayette avec toute la vivacité et l'effusion d'un patriotisme dont la malveillance ne gênait plus les

mouvements.

MÉLANGES.

Réponse du 1er régiment des chasseurs, etc. à la lettre du Roi.

SIRE,

Nous avons reçu la lettre que Votre Majesté a daigné adresser à tous les corps militaires : pénétrés de respect pour les lois, soumis à la plus exacte discipline, que nous regardons comme la force des armées, et que nous n'avons jamais cessé d'observer, nous sommes prêts à verser notre sang pour le salut de la patrie et pour la gloire de Votre Majesté. Nous désirons ardemment qu'elle soit convaincue de notre amour pour elle, et de notre dévouement à la chose publique.

Signés, NOAILLES, colonel-commandant ; MURAT, lieutenant-colonel; D'ASTANIÈRES, pour tous les capitaines: D'OUVRANDEL, pour tous les lieutenants; GENIN, pour tous les sous-lieutenants; BARON, pour les adjudants; Mouzon, pour tous les maréchaux-des-logis; LAURENT, pour tous les brigadiers; BACLET, pour tous les chasseurs.

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