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toyens, désunir les volontés, inquiéter le courage et la bonne foi.

Telle est la déclaration franche que j'ai l'honneur d'adresser à votre majesté, avec l'hommage de mon respect. Je prie le roi d'ordonner à son ministre de se rendre, en cette occasion, l'interprète de mes sentimens auprès de l'assemblée nationale.

Signé, le maréchal de France, général de l'armée, LUCKNER.

No. IV.

Lettre du roi aux armées françaises.

Français, qui portez les armes pour la défense de la patrie, c'est le roi, c'est le chef suprême que la constitution vous a donné, qui vous témoigne, dans ces circonstances périlleuses, sa sollicitude et l'intérêt constant qu'il prend à toutes vos actions.

La nation a les yeux fixés sur vous; en vous confiant le sort de l'état, elle fonde l'espoir de sa tranquillité et de son bonheur sur l'ordre, la discipline et l'obéissance graduelle qui doivent régner parmi vous. Déjà vous en avez senti les heureux effets, et par-tout où vous avez été soumis aux lois militaires, des succès ont couronné votre courage.

C'est un spectacle bien imposant que la réunion des citoyens soldats et des soldats citoyens, combattans pour la liberté, et résolus de la sauver ou de périr, et se servant mutuellement d'exemple. Je n'ai pu voir qu'avec la plus vive satisfaction des soldats novices dans le métier des armes, devenir tout-à-coup les émules des plus anciennes troupes, et prouver ainsi, que l'amour de la patrie et celui

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de la liberté sont les bases de toutes les vertus guerrières; mais, soldats, ne vous méprenez pas à ce nom sacré de liberté, songez qu'elle consiste à n'obéir qu'aux lois, et qu'elle établit pour premier devoir de leur être fidèle. Le roi s'y est soumis avec empressement et sans réserve; puisse cet exemple vous encourager à braver tous les dangers plutôt que de manquer à ce que vous avez juré d'observer! J'ai déploré d'abord l'égarement des officiers, qui, par de faux préjugés, abjuroient des sermens volontaires et sacrés. Mais depuis que vous avez combattu pour la patrie, je suis profondément indigné contre ceux qui passent lâchement à l'ennemi, et abandonnent le poste d'honneur où ma confiance les avoit placés; je les regarde comme mes ennemis personnels, comme les ennemis les plus dangereux de l'état, et il en coûtera moins à ma sensibilité, lorsque je verrai s'appesantir sur eux toute la rigueur des lois.

Sévère envers les officiers, en raison de l'importance de leurs devoirs, j'attends du soldat la plus entière soumission aux règles de la discipline. Je vous ai donné des généraux dont l'expérience, les talens et le patriotisme justifient ma confiance; vous leur devez toute la vôtre, votre sûreté même l'exige. S'il se trouve près de vous des hommes pervers qui cherchent à vous en détourner, n'écoutez pas, fuyez ces traitres qui vous trompent et qui veulent vous déshonorer.

Soldats français, illustres dans tous les temps par votre ardeur guerrière, son énergie ne peut que s'accroître depuis que vous êtes devenus citoyens et hommes libres. Combattez avec fierté, respectez les propriétés de l'homme paisible, rappelez votre humanité pour les vaincus, sachez les succès ne peuvent être que le résultat d'une confjance mutuelle et de la discipline la plus sévère. Ceux que

que

vous avez obtenus en présagent d'autres; ils vous sont garans de la reconnoissance de vos concitoyens, de l'estime des représentans de la nation et de l'amour du roi des Français.

Signé, LOUIS.
Contresigné, LAJARE,

No. V.

Discours de Vergniand sur les moyens de pourvoir à la tranquillité et à la sûreté du royaume.

Quelle est donc l'étrange position où se trouve l'assemblée nationale! Quelle fatalité nous poursuit, et signale chaque jour par de grands évènemens qui portent le désordre dans nos travaux, et nous livrent à l'agitation tumultueuse des inquiétudes, des espérances et des passions! Quelles destinées prépare à la France cette terrible effervescence, au sein de laquelle, si l'on connoissoit moins l'amour impérissable du roi pour la liberté, on seroit tenté de douter si la révolution rétrograde ou si elle arrive à son terme! Au moment où vos armées du Nord paroissoient faire des progrès dans le Brabant, et flattoient notre courage par des augures de victoire, tout-à-coup on les fait se replier devant l'ennemi; elles abandonnent des positions avantageuses qu'elles avoient conquises, on les ramène sur potre territoire, on y fixe le théâtre de la guerre, et il ne restera de nous chez les malheureux Belges, que le souvenir des incendies qui auront éclairé notre retraite. D'un autre côté, et sur les bords du Rhin, nos frontières sont menacées par les troupes prussiennes, dont des rapports ministériels nous avoient fait espérer que la marche ne se

roit pas si prompte. Telle est notre situation politique et militaire, que jamais la sage combinaison des plans, la prompte exécution des moyens, l'union, l'accord de toutes les parties du pouvoir à qui la constitution délégue l'emploi de la force armée, ne furent aussi nécessaires; que jamais la moindre mésintelligence, la plus légère suspension, les écarts les moins graves ne purent devenir aussi fu

nestes.

Comment se fait-il que ce soit précisément au dernier période de la plus violente crise, sur les bords du précipice où la nation peut s'engloutir, que l'on suspende le mouvement de nos armées ; que par une désorganisation subite du ministère on ait brisé la chaîne des travaux, rompu les liens de la confiance, livré le salut de l'empire à l'inexpérience de mains choisies au hasard, multiplié les difficultés de l'exécution et compromis son succès par les fautes qui échappent même au patriotisme le plus éclairé, dans l'apprentissage d'une grande administration? Si l'on conçoit des projets qui puissent faciliter le complètement de nos armées, auginenter nos moyens de vaincre ou de rendre nos défaites moins désastreuses, pourquoi sont-ils précédés auprès du trône par la calomnie, et là étouffés par la plus perfide malveillance? Seroit-il vrai que l'on redoute nos triomphes? Est-ce du sang de l'armée de Coblentz ou du nôtre dont on est avare?

Si le fanatisme excite des désordres, s'il menace de livrer l'empire au déchirement simultanée de la guerre civile et d'une guerre étrangère, quelle est l'intention de ceux qui font rejeter avec une invincible opiniâtreté toutes les lois de répression présentées par l'assemblée nationale? veulentils régner sur des villes abandonnées, sur les champs dévastés? Quelle est, au juste, la quantité de larmes, de misère, de sang, de mort, qui suffit à leur vengeance ? Où

somines-nous, enfin ? dans quel abîme veut-on nous entraîner? Et vous, messieurs, qu'allez-vous entreprendre de grand pour la chose publique ? vous, dont les ennemis de la constitution se flattent insolemment d'avoir ébranlé le courage; vous, dont ils tentent chaque jour d'alarmer les consciences, en qualifiant l'amour de la liberté d'esprit de faction, comme si vous pouviez avoir oublié qu'une cour despotique donna aussi le nom de factieux aux représentans du peuple qui allèrent prêter le serment du jeu de paume; que les lâches héros de l'aristocratie l'ont constamment prodigué aux vainqueurs de la Bastille, à tous ceux qui ont fait et soutenu la révolution ; et que l'assemblée constituante crut devoir l'honorer, en proclamant dans une de ses adresses, que la nation étoit composée de vingt-quatre millions de factieux ; vous, que l'on a tant calomniés, parce que vous êtes presque tous étrangers à la caste que la révolution a renversée dans la poussière, et que les intrigans qui voudroient la relever, et les hommes dégradés qui regrettent l'infâme bonheur de ramper devant elle, n'ont pas espéré de trouver en vous des complices; vous, contre qui on ne s'est déchaîné avec tant de fureur que parce que vous formez une assemblée véritablement populaire, et qu'en vous on a voulu avilir le peuple; vous, qu'on a si lâchement accusés de flétrir l'éclat du trône constitutionnel, parce que plusieurs fois votre main vengeresse a frappé ceux qui vouloient en faire le trône d'un despote; vous, à qui on a eu l'infamie et l'absurdité de supposer des intentions contraires à vos sermens, comme si votre bonheur n'étoit pas attaché à la constitution, comme si, investis d'une autre puissance que celle de la loi, vous aviez une liste civile pour soudoyer des satellites contre-révolutionnaires; vous, que par l'emploi perfide de la calomnie et du langage d'une hypocrite modération, on voudroit re

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