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tement imaginée, que toutes les personnes qui fréquentent les Tuileries, ou qui y font quelque service, et notamment la garde nationale qui y est jour et nuit en très-grand nombre, peuvent attester qu'au château où l'on prétend que ce comité s'assemble, il n'en a jamais existé d'autre que celui que tenoient quelquefois les ministres avant ou après le conseil. L'exposant affirme, au surplus, qu'il n'a jamais connu ni fréquenté au château, ni ailleurs, d'autre comité que celui-là, auquel il a cessé d'assister depuis le mois d'octobre dernier, époque de sa retraite du ministère, et il défie hautement le sieur Carra et tous autres, de citer le moindre fait, la moindre preuve qui puisse affoiblir cette assertion. L'imposture du sieur Carra est donc constante; et comme elle ne peut avoir d'autre objet que celui de favoriser le succès de quelque machination plus ou moins criminelle, elle mériteroit, sous ce seul rapport, de fixer toute l'attention de la police, quand même les imputations calomnieuses que le sieur Carra s'est permises contre M. de Bertrand et contre l'exposant, ne les auroit pas mis l'un et l'autre dans la nécessité d'en rendre plainte; en conséquence, adhérant à la dénonciation déjà faite par M. de Bertrand contre ledit Carra, et la renouvelant de son chef, l'exposant vous requiert d'ordonner qu'il soit informé de tous les faits ci-dessus, et qu'à cet effet il soit ordonné que les principaux officiers de la garde nationale, qui ont été de service auprès du roi, seront entendus sur le fait de savoir s'il est venu à leur connoissance qu'il se soit jamais tenu au château d'autre comité que celui des ministres, et audit cas, dans quelle partie du château se trouvoient lesdits comités, et de quelles personnes ils étoient composés; en ce qui concerne les calomnies débitées par le sieur Carra contre l'exposant, dans la séance des Amis de la Constitution, tenue aux Jacobins, le 7 du

présent mois, et publiées dans le journal des Débats de ladite société, annexé à la dénonciation et plainte rendues par M. de Bertrand; l'exposant conclut à ce qu'il lui soit donné acte de la plainte qu'il rend contre ledit Garra, et à ce qu'il soit informé des faits y contenus. En conséquence, il vous requiert de faire citer les membres de la société des Amis de la Constitution, qui ont assisté à la séance du 7 du présent mois, et dont les noms sont indiqués dans ledit journal des Débats qui rend compte de ladite séance, et des inculpations calomnieuses hasardées par ledit Carra. Au surplus, l'exposant offre d'affirmer la vérité des faits énoncés dans la présente plainte, lesquels seront attestés par les témoins indiqués ; demande acte de la remise qu'il fait entre les mains de M. Larivière, juge de paix, de ladite plainte, et le requiert d'agir conformément à la loi, se réservant de prendre telles conclusions qu'il avisera, tant contre ledit Carra, que contre tous

autres.

Fait et rédigé à Paris, en sa demeure, rue Plumet, le 14 mai 1792.

Signé MONT MORIN.

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No. II.

Lettre de Dumouriez à M. de la Rosière.

Cherbourg, 16 décembre 1789.

Votre gendre m'a raconté votre aventure à Rennes. Comme je vous ai toujours trouvé plus entiché que moi d'aristocratie, et particulièrement dans notre dernière conversation avec M. de Montmorin, j'ai eu des inquiétudes pour vous dans les présentes circons

tances: j'apprends avec bien du plaisir que vous vous en êtes si heureusement tiré.

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Restez encore paisiblement cet été dans votre manoir. J'ai grand peur qu'à cette époque vous n'ayez l'occasion d'exercer contre les étrangers vos talens militaires. Notre liberté sera attaquée par une coalition de despotes, et nos courtisans formeront un escadron de troupes légères qui voltigeront d'un parti à l'autre. C'est alors que des hommes comme nous, des hommes connus par leurs talens et leur conduite, deviendront les chefs que la nation choisira pour défendre sa liberté. Le roi est avec nous et n'abandonnera point la bonne cause, Tout ce que nous ferons en faveur de la liberté sera considéré comme légal.

» Si vous ne voulez pas vous égarer, mon vieil ami, ne perdez jamais ceci de vue. La révolution est déjà faite; les moyens nous paroîtront peut-être répréhensibles si nous écoutons encore les préjugés qui existoient il y a deux ans; mais aujourd'hui nous sommes libres, quoique peut-être aux dépens de notre repos. Vos enfans seront plus heureux que vous: imprimez bien cette idée dans leur esprit, rendez - les fiers de leur libertė, rendez-les capables de soutenir la réputation de leur père sous des auspices plus heureux; car nous étions esclaves, et nous jouissons par anticipation de leur gloire et de leur prospérité futures.

» Tels sont, mon cher amni, les nouveaux sentimens auxquels il faut nous attacher: si je les voyois s'éteindre dans le cœur de mes compatriotes, je serois le premier à tâcher de les ranimer, Cet enthousiasme patriotique est loin de détruire chez moi les douces sensations qui font mon bonheur. L'amitié est le sentiment le plus cher à mon cœur ; et sous ce titre révéré, je vous embrasse de

toute mon ame. Mes respects à inadaine de la Rosière. Assurez vos enfans que vous avez en moi un ami sincère, »

Signé DuxoÚRIEŽ.

No. III.

Lettre du maréchal Luckner au roi, à l'occasion des attentats du 20 juin.

Au quartier-général à Menin, le 28 juin.

Sire, appelé par le choix de votre majesté au comman, dement d'une des armées françaises, comme au grade le plus éminent, et honoré de plusieurs témoignages éclatens de confiance que l'assemblée nationale m'a donnés au nom de la nation, qui a daigné ne pas les désavouer, je consa: crois tous mes momens et tous mes efforts à mériter un sort aussi flatteur pour un étranger. Cette disposition particus lière, mon inviolable attachement pour la France, et ina vieille habitude militaire, qui me rend encore plus étran ger à toutes les questions politiques, non caractère, mon devoir, tout contribuoit à absorber mon temps et mon attention dans les soins du service.

Je ne connoissois pas la constitution, ouvrage d'un peuple libre ; j'ai fait le serment de la défendre. J'étois uniquement occupé de rétablir la discipline, de perfectionner l'instruction, d'assurer nos premiers pas dans le pays ennemi; déjà même ils avoient été heureux, quoiqu'un succès plus complet ne puisse s'appuyer que sur des promesses qui sont indépendantes de moi, et elles ne se sont pas réalisées déjà même je pouvois me flatter de quelques progrès et de

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beaucoup de zèle dans mon arinée, lorsque d'affligeantes nouvelles sont venues me soustraire à mes occupations.

Un grand trouble, que je n'ose caractériser, a régné dans la capitale et jusques dans votre palais. Tous les citoyens de l'empire en ont été instruits par une proclamation, où chaque sentiment exprime un nouveau titre à la reconnoissance. Je l'ai fait sur-le-champ distribuer à toute mon arinée; je connois trop bien les officiers et soldats que je commande, pour douter qu'ils ne partagent la vive émotion que j'ai éprouvée, mon indignation contre les factieux, et mon respect pour votre impassible courage. Je me trouve heureux d'être en ce moment l'interprète de ines braves compagnons d'armes, en ayant l'honneur de vous envoyer cette lettre.. Sizopa

Tous ont vu avec admiration que jamais votre majesté n'avoit montré une contenance plus encourageante pour les vrais amis de la liberté et de la constitution, et plus imposante pour ses ennemis. Que votre majesté, forte de notre confiance et de ses intentions, continue à déjouer les complots; qu'elle soit sûre que par une semblable conduite elle ne peut manquer de donner toute confiance aux uns et d'ôter toute espérance aux autres.

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Je me joins, pour l'en supplier, à un autre général, qui a acquis le droit de faire entendre sa voix, toutes les fois qu'il s'agit de la liberté et du succès d'une révolution à laquelle il a si utilement coopéré.

Je ne croirai jamais compromettre l'intérêt de mon armée, lorsque je dirai avec ma franchise ordinaire qu'elle doit ressentir une funeste influence, là où le chef suprême que la constitution nous a donné ne seroit pas respecté partout, comme il mérite de l'être; lorsque j'ajouterai que notre activité extérieure seroit nécessairement entravée par des troubles intérieurs qui viennent affliger les bons ci

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