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» quelques hommes actuellement résidans à Paris; » justement indignée des provocations coupables » et des placards criminels qui lui ont été dénon» cés; considérant que le devoir du corps législa»tif est de maintenir la constitution et l'inviola»bilité du représentant héréditaire de la nation; » mais que les lois ont remis entre les mains des » autorités constituées tous les moyens qui leur » sont nécessaires pour assurer l'ordre et la tran» quillité publique, déclare qu'il n'y a pas lieu à » prendre de nouvelles mesures législatives; mais » invite, au nom de la nation et de la liberté, tous » les bons citoyens, à la fidélité desquels le dépôt » de la constitution a été remis, à réunir tous » leurs efforts à ceux des autorités constituées » pour le maintien de la tranquillité publique, et » pour garantir la sûreté des personnes et des » propriétés. L'assemblée nationale décrète que » le présent acte du corps législatif sera envoyé, » par le pouvoir exécutif, au département de » Paris, pour être publié et affiché; et elle or» donne que le ministre de l'intérieur lui rendra, » tous les jours, un compte exact de l'état de la » ville de Paris. >>

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La persécution qu'éprouvoient alors les ministrcs, s'accordoit bien peu avec les principes qui avoient dicté ce décret, qu'on peut regarder comme le dernier acte de cette assemblée qui ne soit pas un crime. En effet, deux jours après, elle prostitua

scandaleusement ses applaudissemens et les honneurs de la séance à une députation des vainqueurs. de la Bastille, des prétendus hommes du 14 juillet, qui étoient aussi les hommes du 20 juin, et qui venoient lui porter leurs plaintes des persécutions, des calomnies, des outrages dont ils étoient l'objet. Quoique leur pétition, rédigée dans un style plus modéré, et plus pathétique que l'adresse des jacobins de Dijon, ne fût guères moins séditieuse (1), l'assemblée en ordonna l'impression, et l'envoi aux quatre-vingt-trois départemens!

Pour expliquer ces inconséquences, il faut se rappeler que le corps législatif étoit divisé en deux partis, dont l'un étoit composé des constitution

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(1) Cette pétition contenoit les passages suivans : « Nous » qu'on persécute, qu'on outrage, qu'on calomnie: eh! pourquoi? parce que nous avons été indignés du renvoi » des ministres patriotes, parce que nous avons voulu jouir de la plénitude de nos droits.... Lorsque le despotisme de la cour menaçoit la capitale et l'assemblée, » nous prenions la cocarde nationale, nous renversions » la Bastille.... nous nous rallions sans cesse autour de » l'assemblée qu'on veut dissoudre.... C'est le pouvoir >> exécutif qui est cause de tous nos maux.... Législateurs, » vous n'avez point d'autres amis que nous.... Pouvez>> vous vous dissimuler que vous seriez confondus avec » nous dans les vengeances des tyrans?... Oui, tous ceux qui ont défendu l'égalité, périroient sur des échafauds. » (Cette pétition fut présentée dans la séance du 25 juin ; elle est rapportée dans tous les journaux.)

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nels, et l'autre des jacobins de toutes les nuances. Le second, moins fort par le nombre, dominoit presque toujours le premier, par son audace et par son énergie. Il arrivoit quelquefois néanmoins que les constitutionnels, se voyant souvent entraîner plus rapidement et plus loin qu'ils ne vouloient aller, s'éloignoient momentanément des jacobins ; mais ils s'en rapprochoient bientôt, soit par lâcheté, soit par la crainte de voir trop rétrograder la révolution; et plus l'affreuse catastrophe qui devoit la consommer approchoit, plus ces disparates devenoient fréquentes: elles étoient, en quelque sorte, les convulsions de l'agonie du parti constitutionnel.

Les manoeuvres continuelles qu'employoient les jacobins, pour entretenir et augmenter la fermentation que les évènemens du 20 juin et l'arrivée des Marseillais avoient excités dans la capitale, me confirmèrent dans l'opinion que le roi n'avoit pas d'autre parti à prendre que celui de sortir de Paris le plutôt possible. Sa majesté m'avoit permis de lui proposer un plan à cet égard; et voici la note que j'ai conservée de celui que j'eus l'honneur de lui adresser le 25 juin.

1o. Rétablir sur-le-champ la garde constitutionnelle, et en instruire l'assemblée par une lettre au président, dans laquelle sa majesté annoncera que, son intention étant d'en exclure tous les officiers et soldats, contre lesquels il y a

des dénonciations graves et appuyées de preuves, S. M. prie l'assemblée de les lui faire connoître. 2o. Ordonner en même temps que les trois mille Suisses qui sont à Courbevoie, en partiront par détachemens de cinq-cents hommes ou environ, et seront placés dans les principaux villages et bourgs sur la route de Fontainebleau, pour y attendre le du roi. passage

3o. Aussitôt que la garde sera rétablie, ce qui ne peut pas exiger plus de trois jours, parce que les officiers et soldats sont tous à Paris, écrire à l'assemblée, que la santé du roi et celle de la famille royale exigeant qu'ils aillent respirer l'air de la campagne, sa majesté se propose d'aller passer quelques jours à Fontainebleau, et qu'elle prendra les mesures nécessaires pour que ce voyage ne nuise point à l'expédition des affaires ; écrire une lettre pareille à la municipalité, et ne faire remettre l'une et l'autre que dans le moment même où leurs majestés monteront en voiture pour partir, de manière qu'elles ne soient connues que lorsque le roi et la famille royale seront hors des barrières, dans les mêmes voitures où l'on est accoutumé de voir leurs majestés aller se promener; ne mettre personne dans la confidence de ce voyage, avant le moment de l'exécution, et éviter avec le plus grand soin tous les préparatifs quelconques qui pourroient indiquer le moins du monde un projet de départ.

4o. Il n'y aura qu'une seule voiture, accompagnée du même nombre de gardes à cheval et de gendarmes nationaux, qui accompagnent la famille royale quand elle va se promener; mais les ordres seront donnés, de manière que trois cents gardes à cheval se rendront sur la route de Fontainebleau, à une lieue de Paris, un quart-d'heure avant l'arrivée du roi, pour en imposer aux gendarmes nationaux, en cas qu'ils veuillent empêcher sa majesté de continuer sa route. Le reste de la garde à cheval sera réparti dans les différens postes où seront placés les détachemens de la garde suisse.

5o. Une heure après le départ de la famille. royale, M. de Laporte, ou telle autre personne de confiance que le roi chargera de cette commission, fera avertir les personnes de la maison, ou du service de sa majesté qu'elle jugera à propos d'appeler à sa suite, leur recommandera de partir séparément, et à une demi-heure d'intervalle les unes des autres, pour éviter qu'une longue suite de voitures sur la même route n'excite l'attention et l'inquiétude du peuple.

Dans sa réponse, le roi écrivit ces mots à la marge du plan : « Un départ aussi précipité, sans » préparatifs, sans suite, et avant que l'assemblée » en soit prévenue, ressemble trop à une fuite; » et si j'attendois pour partir, que l'assemblée » eût reçu ma lettre, et qu'elle eût délibéré, elle

passeroit à l'ordre du jour, et, pendant ce temps,

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