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»cation peu lettrée ne l'empêcha point de se » former une juste idée du prix des fciences. » Les arts & les lettres reçurent quelques en>>couragemens de la protection & de la mu»nificence de Conftantin. Dans l'expédition » des affaires, il étoit d'une activité infatiga »ble. Son efprit étoit dans une occupation » prefque continuelle, étant toujours à lire, » à écrire ou à réfléchir, à donner audience » aux ambaffadeurs, & à examiner les plaintes » de fes fujets. Ceux mêmes qui cenfuroient » fes deffeins & fes mefures furent forcés d'a» vouer qu'il avoit du génie pour concevoir » & de la patience pour exécuter les projets » les plus difficiles, n'étant jamais arrêté ou » par les préjugés de l'éducation ou par les clameurs de la multitude. Dans les combats, il fut communiquer fon courage intrépide » à fes troupes, qu'il commandoit avec les » talens d'un général expérimenté; & l'on doit » attribuer 'plus à fon habilité qu'à fon bonnheur les victoires fignalées qu'il remporta » fur les ennemis étrangers & domestiques de » l'état. Il aimoit la gloire comme la récompense, peut être comme le motif de fes tra»vaux. L'ambition démefurée, qui, depuis le » moment qu'il reçut la pourpre à York, fut » toujours la paffion dominante de fon ame, » pourroit être justifiée par les dangers aux» quels il fût expofé, par le caractere de fes » rivaux, par le mérite fupérieur qu'il fe con» noiffoit, & par la perspective que fes fuccès » lui préfenterent d'être en état de rendre la

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» paix & l'ordre à l'empire bouleverfé. Dans » les guerres civiles qu'il eut avec Maxence » & Licinius, il gagna en fa faveur les ef» prits du peuple, qui comparoit les vices » réels de ces tyrans, avec l'efprit de fageffe » & de juftice qui fembloit diriger la mar» che générale de la conduite de Conftantin.

» Si Conftantin fût mort fur les bords du » Tibre ou dans les plaines d'Andrinople, »tel feroit le caractere, qui, à quelque chofe » près, eût été tranfmis à la postérité. Mais » la fin de fon regne (fuivant la fage & déli» cate réflexion d'un écrivain du même fiecle) » l'a fait defcendre du rang qu'il avoit obtenu » à côtés des plus grands princes Romains. Dans » la vie d'Augufte, nous voyons le tyran de » l'état, changé prefqu'infenfiblement en pere » de fa patrie & de l'humanité. Dans celle de » Conftantin, nous pouvons contempler un » héros, qui, après avoir inspiré long-tems de » l'amour à fes fujets & de la terreur à fes » ennemis, a dégénéré en un monarque cruel » & diffolu, corrompu par la fortune, élevé » par fes conquêtes au - deffus de la néceffité » de la diffimulation. La paix générale qu'il » maintint pendant les quatorze dernieres an»nées de fon regne, fut plutôt l'époque d'un » état apparent que d'une profpérité réelle; & » les derniéres années de Conftantin furent dés» honorées par un mêlange de deux vices con» traires, la rapacité & la prodigalité. Les tré» fors confidérables trouvés dans les palais de » Maxence & de Licinius furent follement con

fumés; lés différentes innovations introduites » par le vainqueur coûterent immenfement; » les dépenses des édifices, de fa cour & des » fêtes qu'il donnoit, exigeoient continuelle»ment de forts fubfides; & l'oppreffion du » peuple étoit la feule base fur laquelle étoit » appuyée la magnificence du fouverain. Ses » indignes courtifans, enrichis par la fotte » prodigalité de leur maître, ufurperent avec » l'impunité le privilege de voler & de cor» rompre. Une fecrete; mais générale, déca » dence fe faifoit fentir dans chaque partie de » l'administration publique, & l'empereur lui» même, quoiqu'il maintînt toujours fes fujets » dans l'obéiffance, ne tarda pas à perdre par » degrés l'eftime publique. La maniere de s'ha » biller, & fes mœurs fur la fin de ses jours, »ne. fervirent qu'à lui faire perdre beaucoup » dans l'efprit des hommes. La pompe afiati» que, que la vanité de Dioclétien avoit adop "tée, prit un air de molleffe efféminée dans » la perfonne de Conftantin. Il est représenté » avec une fauffe chevelure de différentes cou» leurs, ouvrage des plus habiles artistes du >>tems; avec un diadême très-riche & d'un » nouveau genre; avec une quantité de pier»reries & de perles, de colliers & bracelets, » & une robe de foie à longs plis & à fleurs » d'or, fupérieurement brodée. Dans cet ap» pareil, à peine pardonnable à la jeuneffe & » à la folie d'Eliogabale, nous avons peine à » découvrir la fageffe d'un monarque âgé, & » la fimplicité d'un yétéran Romain. Une ame

» ainsi amollie par la prospérité & la molleffe, » étoit incapable de s'élever à cette grandeur » qui dédaigne les foupçons, & qui fe fait: » gloire de pardonner. La mort de Maximien » & de Licinius ne peut être justifiée que pare les maximes de politique qui font enfeignées: » aux écoles desh tyrans Mais une relation impartiale des exécutions ou plutôt des meur-: tres, qui fouillerent les dernières années de: ➜ Conftantin, infpirera toujours aux efprits » droits & finceres l'idée d'un prince, qui n'a » point balancé à facrifier les loix de la justice & » les fentimens de la nature aux mouvemens

de fes paffions ou de fes propres intérêts: « • En faisant mention de la famille de Conftantin, l'auteur préfente le fidele & intéreffant tableau des vertus de Crifpus, dont la malheureuse destinée imprimera fur. Conftantin le déshonneur ineffaçable d'avoir violé bäffement: les droits de l'amour paternel. PiùGeurs écrivains sont attribué la trifte fin de ce prince: aux artifices de Faufta, fa belle mere, dont Fimplacable haine ou l'amour fruftré, comme l'obferve notre auteur, renouvella dans le pa lais de Constantin l'ancienne: tragédie d'Hyp polite & de Phedre Le feul sévénement pu-blic&important du bregne des Conftantin, après cette époque eft la guerre de Sarmatie, après laquelle il vécut peu de tems. It finite fes jours dans le palais d'Aquyrion dans les fauxbourgs de Nicomédie, où il s'étoit retiré pour la falubrité de l'air, & dans l'espoir de

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rétablir des forces épuifées, par l'ufage des bains chauds.

M. Gibbon développe, avec fon exactitude & fa jufteffe ordinaire, les noires intrigues qui fuivirent la mort de Conftantin, & qui furent terminées par le maffacre d'une grande partie de la famille impériale. Tant il eft vrai que, fous le gouvernement Romain, la nouvelle capitale eft devenue de bonne heure la fcene de ces horreurs domeftiques, qui depuis fe font renouvellées tant de fois dans la maison Ottomane!

Après une fuite d'événemens tragiques, d'u furpations, de guerres civiles, nous voyons dans le dix-neuvieme chapitre, Conftance, feul empereur de la domination Romaine. L'article où il eft question des eunuques, nous a paru affez intéreffant pour être expofé fous les yeux de nos lecteurs,

» Les provinces divifées de l'empire Romain » furent réunies par la victoire de Conftance; » mais comme ce foible prince n'avoit aucune »des qualités effentielles, foit pour la paix, foit » pour la guerre; comme il craignoit les gé,

néraux & fe méfioit de fes miniftres, le » triomphe de fes armes ne fervit qu'à établir » le regne des eunuques fur l'empire Romain, » Ces êtres malheureux, l'ancien fruit de la » jalousie & du defpotisme oriental, furent in»troduits dans la Grece & dans Rome par la » contagion du luxe afiatique. Leur progrès » fut rapide; & les eunuques, qui, au tems d'Augufte, avoient été abhorrés comme le

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