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Poussin

4-15-38

35759

HISTOIRE

DE LA

RÉVOLUTION DE FRANCE.

LIVRE QUATORZIÈME.

PARIS était redevenu plus calme; à cette bruyante agitation qui avait marqué les événemens du 31 mai, avait succédé tout à coup cette morne stupeur, signe caractéristique qu'offrait cette immense cité depuis l'instant où la révolution avait pris un si redoutable caractère; ces masses confuses d'habitans obéissant à des impressions si diverses, avaient peine à comprendre qu'on les eût fait servir à la destruction d'une autorité qu'elles regardaient comme pouvant prévenir seule les désordres matériels; dessus tout elles redoutaient ces désor

car par

TOME V.

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dres; mais dans une telle situation, le conseil de la commune, moteur de toutes les machinations, ne perdait pas un seul instant, et s'intitulait conseil général révolutionnaire; il s'était formé dans son sein une autre autorité qui avait pris le nom de comité révolutionnaire; ce fut à ce comité que fut dévolu le soin de toutes les arrestations, les recherches, les poursuites dont le conseil général lui renvoyait l'exécution; par une délibération du 3 juin, il reçut l'ordre de faire arrêter tous les députés qui sortiraient de Paris pendant le temps du danger de la patrie.

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Le 2 juin, toutes les autorités de Paris prêtèrent le serment du 31 mai; ce serment était ainsi conçu « Je jure d'être fidèle à la république une et indivisible, de maintenir de » tout mon pouvoir et de toutes mes forces la » sainte liberté, la sainte égalité, la sûreté des personnes, le respect des propriétés, ou de mourir à mon poste en défendant ces droits » sacrés de l'homme. Je jure de plus, de vivre » avec mes frères dans l'union républicaine; enfin, je jure de remplir avec fidélité et cou» rage les missions particulières dont je pourrais être chargé. » Et des adresses de félicitations des sociétés populaires à la commune de Paris, arrivèrent bientôt de toutes parts!

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Dès les premiers jours de juin, une multi

tude de sections et des députations des villes voisines vinrent défiler dans le sein de la Convention, tambour battant, et criant vive la république! vive le 31 mai!

Les femmes révolutionnaires formant la société fraternelle, et désignées depuis sous le nom de furies de la guillotine, annoncèrent à la Convention qu'elles se rendraient au Champ de Mars pour y prononcer le serment de vivre libre ou de mourir; elles offraient de monter la garde et de faire le service du canon.

Il y eut une procession de nègres ; les hommes de couleur qui se trouvaient à l'aris se rendirent à la Commune et prêtèrent le serment de maintenir l'égalité, la liberté, et reçurent l'accolade fraternelle du président du conseil général.

Aux révolutionnaires de la France se joignaient ceux de l'étranger. Le 15 juin, une députation des sans-culottes de Liége se présenta au conseil révolutionnaire de la Commune, et s'élevant contre l'aristocratie des richesses, demanda qu'on l'anéantît comme les autres; et ce conseil, qui représentait l'une des plus opulentes villes du monde, applaudit avec enthousiasme à cette pétition; il en ordonna la mention civique au procès-verbal. Un décret avait ordonné le partage de tous

les biens des communes; c'était l'initiative du partage des propriétés particulières.

Cependant les départemens de la Gironde, du Calvados et de l'Eure avaient envoyé à tous les départemens la délibération qu'ils avaient prise sur les événemens du 31 mai. Soixante y adhérèrent; le reste demeura constamment attaché à la Montagne. Le département du Cher fut le premier à manifester sa fidélité à la Convention, décimée par elle-même dans la journée du 31 mai; cette administration tenait ses séances à Bourges, ville qui avait été désignée comme le lieu du rassemblement des suppléans, dans le cas où la Convention aurait été dissoute à Paris.

Le 9 juin, la Convention fut instruite que la nouvelle des événemens du 31 mai avait excité des mouvemens à Bordeaux; que les sections s'y étaient assemblées et avaient arrêté d'envoyer à Paris une armée pour délivrer la Convention des tyrans qui l'opprimaient.

Les mouvemens de Marseille et de Lyon donnèrent quelques inquiétudes au parti vainqueur; il résolut d'en tirer vengeance; Lyon était dans un état de défense plus formidable; il fut résolu que les premiers coups seraient portés sur Marseille; tous les patriotes du midi furent invités à se rendre dans cette ville pour

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