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la plupart des faits rapportés dans l'Évangile, quoiqu'en apparence ils aient moins de grandeur, ont un rapport frappant avec les événemens prédits par des prophètes juifs qui vécurent plusieurs siècles avant la naissance de Jésus. Les particularités de la vie de César, les discours qu'il a tenus, les grandes négociations dans lesquelles il a été engagé, ne produisirent aucune révolution essentielle, si ce n'est qu'elles exercèrent peut-être, sur les sentimens et sur les mœurs du genre humain, une influence pernicieuse. Mais les œuvres qui furent faites, la doctrine qui fut enseignée par celui qui passait dans le monde pour le fils d'un charpentier de la Judée, et par quelques pêcheurs de ses amis, ont opéré, dans les sentimens et dans les mœurs de l'humanité, le changement le plus important et le plus heureux; changement qui s'étendit chez plusieurs nations, et dont nous voyons et ressentons encore aujourd'hui les salutaires conséquences.

Les preuves de la vérité de l'Évangile doivent donc être présentées, d'une manière bien différente de celle des autres monumens historiques. Je considérerai d'abord le récit évangélique, uniquement comme une portion de l'histoire ancienne. J'en parlerai en second lieu, comme étant l'accomplissement de certaines prophéties. Je rechercherai enfin si l'Évangile n'a pas été confirmé en outre par l'excellence toute particulière des connaissances que nous y puisons, ainsi que par les changemens extraordinaires qu'il a opérés dans l'ensemble des affaires humaines.

SECTION PREmière.

L'Évangile considéré comme une portion de l'histoire ancienne.

Il convient de placer ici, en tête de ce que j'ai à dire sur l'évidence de l'Évangile, considéré comme une portion de l'histoire ancienne, les remarques suivantes sur le témoignage.

Il est naturel à l'homme de parler comme il pense; cela lui est aussi facile que de se mouvoir en ligne directe. On peut marcher en arrière ou de côté; mais la chose est moins aisée, c'est une espèce d'effort contre nature. On peut en dire autant de celui qui avance ou soutient ce qui est contraire à sa conviction. C'est là du moins une règle générale. Sans doute qu'une longue habitude de mentir, comme de marcher de côté ou en arrière, peut rendre la chose facile; mais cette facilité ne s'acquiert que par un exercice prolongé.

Nous sommes naturellement portés à croire ce qu'on nous rapporte. Nous nous fions à la parole d'un homme dont nous avons éprouvé la probité; mais nous ajoutons également foi au témoignage avant l'expérience; car les enfans, qui en ont le moins, ont le plus de crédulité. Ce n'est qu'après avoir été victimes de la mauvaise foi, après avoir démêlé les motifs qui portent les hommes à tromper, que nous entrons en défiance, et que nous sommes

conduits à ne plus croire ce qu'ils nous di

sent.

En général, toutes les fois que nous élevons quelque doute sur la véracité d'une personne, nous sommes portés à le faire par l'une ou l'autre de ces quatre raisons. Ou nous jugeons ce qu'elle dit incroyable ou invraisemblable, ou nous présumons que, dans le cas particulier dont il s'agit, quelque tentation, quelque motif la pousse à trahir la vérité; ou bien, nous pensons qu'elle n'est pas juge compétent du sujet sur lequel elle rend témoignage; ou enfin, nous soupçonnons actuellement sa véra cité, parce que nous avons acquis la certitude qu'elle nous en a imposé dans d'autres circonstances. Si nous n'avons aucune raison de soupçonner sa probité; si nous reconnaissons sa compétence; si nous ne découvrons en elle aucun motif de vanité ou d'intérêt qui la porte à tromper; et si elle n'affirme rien que de croyable et de vraisemblable, nous ne balançons pas à admettre sa déclaration.

Notre foi, au témoignage d'autrui, s'élève souvent à la certitude absolue. Ainsi, la moindre teinture de l'histoire, nous fait admettre, comme positive, l'existence de certaines villes, comme Constantinople et Smyrne; et de certaines contrées, comme l'Asie, l'Afrique et l'Amérique ; nous sommes pareillement convaincus que César et Annibal ont réellement existé, et que tous deux furent de grands capitaines, l'un romain, l'autre carthaginois; que Guillaume de Normandie a conquis l'Angleterre; que Charles Ier fut décapité, etc., etc. En effet, les preuves qui établissent la vérité de ces faits, et d'autres événemens de la même nature, sont si nombreuses, si variées et si solides, que nous regardons avec raison, comme impossible, qu'ils aient été inventés.

Quand plusieurs personnes, qui n'agissent point de concert, qui n'ont aucun intérêt à déguiser la vérité ou à soutenir ce qui est faux, et qui sont juges compétens des choses qu'elles attestent, s'accordent

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