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ment de la perfection de sa nature, de nous élever à la condition des

anges, ou de nous rendre tous égaux par la naissance ou par le génie. Les dispensations de la bonté et de la grâce divine, sont purement gratuites. Nous n'avons rien que nous n'ayons reçu de notre Créateur, et qu'il ne fût libre de ne pas nous accorder, sans porter aucune atteinte à sa bonté, et sans diminuer en rien son éternelle et inaltérable félicité.

Il ne nous est donc pas possible de juger jusqu'à quel point il entrait dans les vues de la Providence, de rendre la révélation universelle. Ses bons effets peuvent avoir également lieu, quoiqu'elle ne soit pas universellement consue: elle enseigne en effet que les hommes qui vécurent long-temps avant que notre Sauveur parût sur la terre, et qui n'ouïrent jamais parler de son nom, seront sauvés par ses mérites (1).

(1) Rom. II. 12. 14. 15. Rom. III. 29. 30,

Cela étant admis, on ne peut tirer aucune conclusion défavorable au christianisme de ce qu'il n'est connu que dans quelques parties du monde seulement, ou de ce qu'il n'a été établi que quatre mille ans après la création. Car si le christianisme eût été connu mille ans ou trois mille ans plutôt, un esprit raisonneur demanderait encore pour quelle cause il n'est pas plus ancien? pourquoi il ne prit pas naissance avec le genre humain, ou au moins à sa chute? Tout ce qui concerne l'homme a eu un commencement; et cet

Être qui gouverne l'univers, qui seul connaît parfaitement ses propres desseins, et qui embrasse d'un coup-d'œil le passé, le présent et l'avenir, peut seul déterminer aussi quand doit commencer chacune des dispensations particulières de sa Providence ; quelles doivent être la rapidité ou la lenteur de ses progrès, et dans quel temps elle recevra son entier accomplissement. Une foule de découvertes utiles au genre humain ont été faites dans les siècles

modernes. Combien ne serait-il pas absurde de tirer de la nouveauté d'une découverte un argument contre son utilité, ou contre la bonté du suprême Dispensateur qui a accordé à l'esprit humain la faculté de découvrir aujourd'hui ce qui lui avait échappé à une époque plus reculée? Tout ici-bas se fait progressivement. Si l'homme avait reçu à la fois, dès le commencement, tous les heureux dons que la libéralité du Créateur lui avait destinés, cette vie n'aurait plus été pour lui un état d'épreuve. N'ayant dès-lors aucun désir à satisfaire, aucune faculté à exercer, et plus rien à espérer et à craindre, nous eussions été également incapables d'activité et de bonheur.

Observation.

Peut-être conviendrait-il d'observer ici que c'est sans doute une sage dispensation de la Providence, d'avoir fait précéder la connaissance des vérités les plus importantes d'une foule d'erreurs. Il est certain qu'il fallait abandonner l'homme à luimême, durant un espace de temps plus ou moins

long, pour lui faire mieux connaître les bornes de son génie, et lui faire sentir davantage le prix d'une révélation. Il fallait que dans un siècle éclairé, au sein d'une nation éclairée, les Socrate et les Platon eussent échoué dans le projet d'instruire et de réformer le genre humain, pour faire mieux ressortir le triomphe du charpentier de Judée, et de douze pêcheurs ignorans et grossiers qu'il s'associa dans ses travaux. Il devenait dès-lors évident que le trésor évangélique, porté dans des vases de terre, avait une origine céleste; qu'une doctrine si sublime «< n'était point sortie des fanges du Jourdain et qu'une lumière si éclatante n'avait pu jaillir des épaisses ténèbres de la synagogue.»>

Ceux qui désireraient de plus amples détails sur ce qui fait le sujet de ce premier chapitre, pourront avoir recours au livre premier du Traité de la vérité de la religion chrétienne d'après Alphonse Turretin, par J. Vernet.

Il ne sera pas sans doute hors de propos de joindre ici sur la possibilité d'une révélation, quelques mots que nous extrairons d'un cours de théologie inédit. Cette addition, qui remplit une lacune dans ce petit traité, nous paraît d'autant plus nécessaire qu'il n'est pas rare de rencontrer sous sa main certains écrits, plus ingénieux il est vrai que solides, plus substils que profonds, où

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l'on trouve des assertions du genre de celles-ci : << Toute révélation est impossible. La philosophie de nos jours a fait trop de progrès pour que nous en soyons encore à disputer sur les communications de la divinité avec l'homme. Il n'y a plus que les sots qui croient aux idées révélées. La révélation est une absurdité; elle renferme des choses extravagantes, et reconnues impossibles par tout homme qui connaît bien la marche de la nature. >> Comme de telles assertions, qu'on sait bien ne pouvoir appuyer sur aucune espèce de preuve ni déduire d'aucun principe raisonnable, mais qu'on se flatte de faire passer à la faveur d'un ton tranchant et décidé qui impose, détruiraient à l'avance, si elles étaient reçues pour vraies, toute la suite de nos raisonnemens, il est pour nous de la dernière importance d'examiner si elles ont quelque chose de fondé. En effet si toute révélation est reconnue impossible, il est fort inutile de poursuivre notre travail. — Or làdessus nous affirmons, et nous ne demandons pas qu'on nous croie sur parole, nous désirons seulement qu'on pèse nos raisonnemens et qu'on les juge; nous affirmons qu'aucune des trois sortes d'impossibilité connues ne peut être alléguée contre une révélation.

1°. Il est évident qu'il n'implique point contra

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