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racha la vie dans un moment de violence; c'est là encore une doctrine qu'un homme de bon sens ne jugera ni bien convenable ni bien utile. Il ne lui paraîtra pas mieux

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prouvé que « la Divinité est supérieure au » destin, et que le destin est supérieur à la Divinité;» et cet aphorisme que « le monde >> est Dieu, ou tout au moins son corps ou sa > substance,» ne jettera pas un grand jour sur les premiers principes de la théologie. -Sénèque affirme que l'âme est immor» telle; mais il affirme aussi que « la » mort n'est rien, qu'elle réduit toutes > choses à néant, et que les morts jouis› sent de la même tranquillité que ceux » qui ne sont point nés (1). » — Les maximes suivantes, professées par la même école, ne paraissent pas moins défavorables à la cause du bonheur et de la vertu. « A la mort, nous sommes rendus aux › élémens qui nous ont formés, et nous > perdons toute existence personnelle. »

(1) De Consolat. ad Marc. cap. 19.

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Il n'y a point de peines ni de récom> penses futures; et il n'importe nulle»ment qu'il y en ait ou qu'il n'y en ait » pas. » Une leçon non moins étrange que les sectateurs de Zénon s'étaient toutefois réservé de donner au genre humain, c'est de vouloir inculquer à des êtres aussi fragiles que nous le sommes, à des êtres qui ont un si grand besoin de la compassion et de la bienveillance de leurs semblables, que « la pitié est indigne du sage. » Enfin cette doctrine audacieuse et impie qui enseignait, que « les âmes humaines » sont une portion de l'essence divine; » qu'un simple mortel peut devenir égal, et » à quelques égards, supérieur à la Divi>nité, pouvait-elle produire d'autre effet que de nourrir un orgueil et une présomption si extravagante, que le cœur se fermait à toute affection douce; et que l'esprit devenait également avide de connaître, et incapable de se laisser guider par les préceptes de la vraie sagesse?

En effet, malgré les principes de quel

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ques-uns de ces sages, que je ne cherche point à déprécier, et la beauté de plusieurs de leurs sentimens, auxquels je m'empresse de rendre hommage, je ne sais si, comme instituteurs des peuples, les stoïciens n'auraient pas été des guides aussi aveugles que les Épicuriens eux-mêmes. Ces derniers, professaient un athéisme non déguisé; les premiers y conduisaient presque aussi directement; et tel est à coup sûr l'effet que ne manquera jamais de produire tout faux système de philosophie, qui enseignera aux hommes à penser et à parler avec irrévérence de l'Être Suprême, et à rejeter un état de rétribution future. Milton, à qui la doctrine des stoïciens était parfaitement connue, n'en parle donc ni témérairement ni avec trop de sévérité, quand il dit : « Hélas! ayant d'eux-mêmes » des idées si imparfaites, et connaissant >> plus imparfaitement encore la Divinité, » que peuvent-ils enseigner aux hommes » sans les jeter dans l'erreur? Ils disser>tent beaucoup sur l'âme, mais ne s'ar

› rêtent à rien de solide. Ils placent la › vertu au dedans d'eux-mêmes, et s'en > attribuent toute la gloire sans en rien > rapporter à Dieu [D]. »

Cependant lorsque le temps où il devait venir fut arrivé, l'instituteur du pauvre parut enfin, non en stoïcien orgueilleux, dur et querelleur, mais comme le fils de Dieu, doux et sans affectation, rempli de compassion et d'humilité, doué d'une bienveillance et d'une sagesse divines. « Allez, dit-il aux deux disciples de » Jean qui étaient venus s'informer s'il était le messie, allez et rapportez à Jean ce » que vous avez vu et entendu. Les aveugles voient, les boiteux marchent, les lé» preux sont guéris, les sourds entendent, les morts ressuscitent, l'Évangile est an» noncé aux pauvres. » Toutes ces choses avaient été prédites par le prophète Isaïe : et la prophétie s'accomplit en Jésus. La doctrine qu'il prêcha se distinguait de celle de tous les autres docteurs, non-seule. ment par l'excellence de sa nature, et

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par ces œuvres puissantes qui en démontraient la vérité, mais parce qu'elle s'adressait tout particulièrement au pauvre, qu'elle était mise à sa portée, et par conséquent à celle de tout le genre humain. La naissance de l'envoyé céleste fut annoncée, non à quelques grands de la terre, mais à des bergers. Il prononce une bénédiction particulière en faveur de ceux qui sont pauvres d'esprit et humbles de cœur; ce qui sans contredit constitue la base du caractère du chrétien. Il choisit ses serviteurs parmi les pauvres; et en fondant une Église, il établit unesuccession perpétuelle de ministres, qui doivent prêcher l'Évangile aux pauvres et à toutes les autres classes d'hommes, jusqu'à la fin du monde. En vertu de cette merveilleuse dispensation, les plus petits d'entre les chrétiens, à moins qu'il n'y ait de leur part mauvaise volonté, peuvent, dans tous les cas ordinaires, acquérir de la vertu et du vice, de Dieu et de l'homme, de la Providence et d'un état à venir, des idées plus justes et

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