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de l'horreur, de la colère, de l'amour, quoiqu'il n'ait ni nos aversions réfléchies, ni nos haines durables, ni nos amitiés constantes. L'animal à toutes ces passions premières elles ne supposent aucune connaissance, aucune idée, et ne sont fondées que sur l'expérience du sentiment. La peur est le partage des faibles, mais le sentiment d'amour leur appartient à tous. L'amitié senle fait le partage de l'homme.... Amour! s'écrie M. de Buffon, desir inné, ame de la nature, source unique et féconde de tout plaisir, de toute volupté, amour pourquoi fais-tu l'état heureux de tous les êtres et le malheur de l'homme? c'est qu'il n'y a que le physique de cette passion qui soit bon; c'est que, malgré ce que peuvent dire les gens épris, let moral n'en vaut rien, etc. »

Je ne puis m'empêcher d'observer, en passant, qu'il faut avoir une bien forte tête et une grande abnégation de cœur pour ne trouver dans l'amour rien de bon: que le physique, et pour refuser l'amitié, la mémoire, la faculté de comparér quelques sensations, l'intelligence, en un mot, à ce chien fidèle qui va chercher son maître à quatrevingts lieues de lui, qui le défend d'un vo

leur, et qui meurt de douleur et de faim sur sa tombe.

En vérité, quand on compare ce discours sur les animaux avec l'histoire de l'éléphant, on serait tenté de croire ou que ce n'est pas le même auteur qui a composé ces deux mórceaux, ou qu'il avait changé d'opinion quand il a publié le second. Dans le premier, il affirme positivement et à plusieurs reprises que les animaux sont absolument privés de mémoire; dans le second, il est obligé de reconnaître qu'elle existe dans l'éléphant. « La réminiscence, dit-il, doit être ici plus parfaite que dans aucune autre espèce d'animal; car la mémoire tient beaucoup aux circonstances des actes, et toute sensation isolée, quoique très-vive, ne laisse aucune trace distincte ni durable: réunies, elles lui aident à s'en rappeler le souvenir. Au reste, quoique l'éléphant ait plus de mémoire que les autres animaux, etc.... On ne peut pas supposer que M. de Buffon ait voulu établir une distinction entre la réminiscence, le souvenir et la mémoire; cette subtilité ne serait pas digne de lui, et la dernière phrase d'ailleurs lèverait toute équivoque : il admet positivement la mémoire dans l'éléphant, et

de l'horreur, de la colère, de l'amour, quoiqu'il n'ait ni nos aversions réfléchies, ni nos haines durables, ni nos amitiés constantes. L'animal à toutes ces passions premières elles ne supposent aucune connaissance, aucune idée, et ne sont fondées que sur l'expérience du sentiment. La peur est le partage des faibles, mais le sentiment d'amour leur appartient à tous. L'amitié senle fait le partage de l'homme.... Amour! s'écrie M. de Buffon, desir inné, amé de la nature, source unique et féconde de tout plaisir, de toute volupté, amour pourquoi fais-tu l'état heureux de tous les êtres et le malheur de l'homme? c'est qu'il n'y a que le physique de cette passion qui soit bon ; c'est que, male gré ce que peuvent dire les gens épris, le moral n'en vaut rien, etc. » canlyne

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Je ne puis m'empêcher d'observer, en passant, qu'il faut avoir une bien forte tête et une grande abnégation de cœur pour ne trouver dans l'amour rien de bon bon que physique, et pour refuser l'amitié, la mémoire, la faculté de comparér quelques sensations, l'intelligence, en un mot, à ce chien fidèle qui va chercher son maître à quatrevingts lieues de lui, qui le défend d'un vo

leur, et qui meurt de douleur et de faim sur sa tombe.

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En vérité, quand on compare ce discours sur les animaux avec l'histoire de l'éléphant, on serait tenté de croire ou que ce n'est pas le même auteur qui a composé ces deux mórceaux, ou qu'il avait changé d'opinion quand ila publié le second. Dans le premier, il affirme positivement et à plusieurs reprises. que les animaux sont absolument privés de mémoire; dans le second, il est obligé de reconnaître qu'elle existe dans l'éléphant. « La réminiscence, dit-il, doit être ici plus parfaite que dans aucune autre espèce d'animal; car la mémoire tient beaucoup aux circonstances des actes, et toute sensation isolée, quoique très-vive, ne laisse aucune trace distincte ni durable: réunies, elles lui aident à s'en rappeler le souvenir. Au reste, quoique l'éléphant ait plus de mémoire que les autres animaux, etc.... On ne peut pas supposer que M. de Buffon ait voulu établir une distinction entre la réminiscence, le souvenir et la mémoire; cette subtilité ne serait pas digne de lui, et la dernière phrase d'ailleurs lèverait toute équivoque : il admet positivement la mémoire dans l'éléphant, et

la suppose d'une manière assez claire dans les autres animaux. Il en est de même pour les idées, que d'abord M. de Buffon leur refusait, parce que, disait-il, ils sont privés de la faculté de comparer leurs sensations. Il voit l'impossibilité de refuser cette faculté à l'éléphant, et même, dans son discours sur les animaux, il donne une explication de l'effet de la peur, qui la suppose évidem→ ment. «Un jeune animal, dit-il, tranquille habitant des forêts, qui tout à coup entend le son éclatant du cor ou le bruit subit et nouveau d'une arme à feu, tressaillit, bondit, et fuit par la seule violence de la secousse qu'il vient d'éprouver. Cependant, si ce bruit est sans effet, s'il cesse, l'animal reconnaît d'abord le silence ordinaire de la nature, il se calme, s'arrête, et regagne à pas égaux sa paisible retraite. Mais l'âge et l'expérience le rendront bientôt circonspect et timide, dès qu'à l'occasion d'un bruit pareil il se sera senti blessé, atteint ou poursuivi : ce sentiment de peine ou cette sensation de douleur se conserve dans son sens intérieur, et lorsque le même bruit se fait encore entendre, elle se renouvelle, et, se combinant avec l'ébranlement actuel, elle produit un sentiment

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