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l'homme lui-même a l'idée de cette seconde existence, qu'il en a le desir et l'espoir, qu'il en appuie la certitude sur des preuves positives, il ne doit pas plus douter de sa vérité que de son existence actuelle dont il a le sentiment intime et la conviction absolue.

CHAPITRE II.

Certitude d'un avenir pour l'homme, tirée de sa double constitution physique et morale.

La preuve que nous avons cherché à établir

de la certitude d'un avenir pour l'homme, resterait incomplète aux yeux de ceux qui n'admettraient point qu'il est composé de deux substances, l'une corporelle, l'autre spirituelle, si nous ne devions pas prouver encore que la constitution morale de l'homme est fondée sur des rapports très-différens de ceux que son organisation physique comporte; et comme c'est encore ici une preuve de fait et de sentiment intime commun à tous les individus de l'espèce humaine, elle porte jusqu'à l'évidence la certitude d'un avenir, indépendamment de toutes les opinions.

C'est une erreur de penser qu'une démonstration géométrique donne à une vérité quelconque une évidence supérieure à celle que donne une preuve tirée du sentiment intime.

Les illusions de l'esprit, les bornes naturelles de son insuffisance, ne peuvent altérer cette preuve dont la clarté dissipe le doute auquel nos connaissances intellectuelles ne sont que trop assujetties. La certitude que j'ai d'avoir une ame m'est bien mieux démontrée par le sentiment que j'ai de son existence, que par tous les raisonnemens qu'on pourrait faire pour me prouver que mon corps ne saurait penser.« Nous raisonnons quand nous ne sentons pas, a dit un auteur moderne (a), et le raisonnement, qui est le tâtonnement de la raison, cesse où le sentiment commence. Le raisonnement est donc pour les ouvrages de l'homme, et le sentiment pour ceux de la nature; mais en unissant le raisonnement au sentiment, on obtient le plus grand degré d'évidence, et par conséquent de certitude, dont l'homme soit capable. »>

Pascal avait dit long-temps avant : « La connaissance des premiers principes est aussi ferme qu'aucune de celles que nos raisonnemens nous donnent; et c'est sur ces connaissances d'intelligence et de sentiment qu'il que la raison s'appuie.... Les principes

faut

(a) Rivarol.

se sentent, les propositions se concluent; et il est aussi ridicule que la raison demande au sentiment et à l'intelligence des preuves de ces premiers principes pour y consentir, qu'il serait ridicule que l'intelligence demandât à la raison un sentiment de toutes les propositions qu'elle démontre. » (a).

Nulle vérité ne nous paraît effectivement plus claire et plus facile à saisir que celle que nous découvre le sentiment; il vaut mieux pour nous que toutes les autres sciences: celles-ci du moins ne nous coûte rien à acquérir, elle naît avec nous, n'emprunte rien de notre mémoire, survit à toutes nos erreurs, et de sa douce lumière éclaire encore les dernières incertitudes de notre esprit. N'est-ce pas cette espèce d'instinct moral, sublime apanage de la pensée, qui élève l'homme jusqu'à l'auteur de son être, qui le rend religieux et juste, qui lui donne le goût, et je dirais presque la passion de tout ce qui est bon et honnête, qui le pousse vers tout ce que l'héroïsme de la vertu a de plus noble et de plus généreux, et qui grave dans son cœur le desir toujours croissant de se survivre à

(a) PASCAL, Pensées, § 21.

lui-même, et de s'occuper souvent avec plus d'ardeur qu'on n'en a pour des biens périssables, d'une gloire que l'immortalité lui présente dans le lointain de l'avenir? Ce sentiment n'est point une illusion: le but en est tellement certain que l'intelligence humaine semble être en contact avec lui; elle le voit comme l'œil voit la lumière et peut-être d'une manière plus sûre; les sens peuvent se tromper, tandis que le sentiment qui nous porte

vers le but moral de notre existence ne saurait nous induire en erreur : car, sous ce rapport, ainsi que l'a dit un homme célèbre, «Rien n'est faux dans l'univers entier; ». tous les êtres qui le composent y marchent, sous les lois données par l'auteur de la nature, à une destination invariable, à un but déterminé, et, dans le systême des êtres organisés, nulle erreur n'en trompe le mouvement ou n'en détourne l'instinct. Les astres mêmes obéissent à ces lois; les élémens y sont soumis. La terre nourrit les végétaux; le feu les développe et les anime; l'air entretient tous les êtres vivans; l'eau suit la pente qui l'entraîne; la plante cherche constamment la lumière; l'instinct de l'animal ne le trompe jamais, et le porte sans cesse à sa reproduc

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