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« Fœdus cum quibus volet facere liceat, uti liceat divo Augusto (1). » La généralité des termes employés indique bien que la prérogative impériale n'avait à subir aucune restriction ni aucun contrôle.

1. Barbeyrac. Vol II, no16.

CHAPITRE III

DE LA FORME DES TRAITÉS

SECTION I

Forme juridique des traités

Nous avons vu que le droit de faire les traités appartenait en principe au peuple; que celui-ci ne l'exerçait directement que pour la ratification des traités les plus importants; que pour la négociation, et même parfois pour la ratification le sénat ou les magistrats agissaient en son nom. Nous allons examiner maintenant comment et dans quelles formes ces différentes autorités exerçaient leurs pouvoirs; nous allons chercher quelles étaient, en dehors de la compétence, les conditions de validité d'un traité public.

Le formalisme des Romains se fait sentir aussi bien dans leur droit public que dans leur droit privé. Etant donnée l'importance qu'ils attachaient à la forme extérieure des actes, il est naturel que les contrats publics, autrement graves pour la nation que les contrats privés, aient été régis par des prescriptions pour le moins aussi rigoureuses.

Au point de vue juridique, les Romains regardaient les traités internationaux comme de véritables contrats ; et

cette conception est d'ailleurs absolument exacte. Les traités furent donc, quant à la forme, assimilés aux contrats privés et soumis à la condition essentielle dans les idées d'alors à la naissance d'une obligation, je veux dire une promesse verbale; ils étaient passés dans les formes de la stipulation (1) Gaïus nous a conservé les termes de l'interrogation pour un traité de paix. Quand on était tombé d'accord sur la convention, le général romain disait au représentant du peuple étranger: «pacem futuram spondes? » celui-ci répondait : « spondeo, » et dès lors le contrat existait (2).

On a fait remarquer qu'il y avait là une exception à la règle que seuls les citoyens romains pouvaient s'engager par la formule spondeo, puisqu'ici elle était employée entre deux contractants dont l'un était forcément un peregrinus. Gaïus n'est pas de cet avis (3): d'après lui la promesse du chef étranger n'engendrant aucune action de droit civil, on ne peut dire qu'il y ait ici sponsio dans le sens de celle réservée en droit privé aux citoyens romains.

Cette formule de stipulation était primitivement la seule forme extérieure des traités. Elle fut bientôt jugée insuffisante et de bonne heure nous la voyons précédée d'un acte écrit. Tite-Live en mentionne l'existence dès les premières années de Rome dans un traité passé avec Albe: ut illa palam prima postrema ex illis tabulis

1. V. Mommsen. t. I, p. 281, traduction Girard.

2. Gaïus 3, 94.

3. id. « quod nimium subtiliter dictum est, quia si quid adversus pactionem fiat, non ex stipulatu agitur sed jure belli res vindicatur

cerave récitata sunt sine dolo malo (1). » On rédigeait par écrit toutes les clauses, et c'est ensuite qu'intervenait la promesse verbale jugée nécessaire à la naissance des obligations. On avait là comme une morale uniforme. applicable à tous les genres de convention: « fœdera alia aliis legibus, ceterum eodem modo omnia fiunt (2). »

Ceci nous donne l'explication des consponsores que nous voyons intervenir à côté du général; puisqu'on employait les formes de la stipulation, rien n'était plus facile que de faire intervenir des engagements accessoires, en outre de celui qui était contracté par l'agent principal. Toutefois ce n'étaient pas de véritables cautions: « On se gardera, dit Mominsen, de l'idée fausse qui consisterait à voir ici un cautionement dans lequel le général jouerait le rôle de débiteur principal et les personnes qui s'engagent à côté de lui celui de cautions. Cette idée doit être rejetée par la simple raison que l'ancien droit des obligations connaît bien des plures rei debendi, mais ne connaît pas de cautionnement au sens moderne, ne distingue pas entre les personnes engagées dans leur propre intérêt ou dans l'intérêt d'autrui. On pourrait plutôt comparer les consponsores des conventions de ce genre aux cotuteurs qui prennent un engagement verbal pour le compte du pupille (3). »

Cette intervention de plusieurs consponsores était surtout utile en l'absence des féciaux dont nous allons bien

1. Liv I, 24

2. Live XXXIV, 57

3. Mommsen op. cit. p. 281 n. 3

tôt voir le rôle. Comme la validité du traité pouvait alors être mise en doute on prenait de plus grandes précautions en exigeant l'engagement personnel d'un assez grand nombre de personnes. Les consponsores étaient des hommes notables, très souvent des officiers supérieurs de l'armée. Dans la plupart des cas nous les voyons intervenir au nombre de vingt (1) Si plus tard le traité n'était pas ratifié, les consponsores pouvaient comme le général être soumis à la dédition.

SECTION II

Forme religieuse des traités.

Ces règles de forme empruntées au droit civil semblèrent aux Romains tout-à-fait insuffisantes pour la validité d'actes aussi graves que l'étaient des traités publics. La religion qui tenait une si grande place dans la vie politique de Rome ne pouvait pas être absente de ses relations internationales: l'état Romain invoquait toujours et partout les dieux, il devait avoir besoin de leur protection, plus encore vis-à-vis des étrangers que dans ses rapports avec ses propres citoyens. Et en effet ce peuple. chez lequel tous les prètres étaient des magistrats publics, qui donnait à tous ses actes un caractère sacré, avait fait des traités une œuvre presque aussi religieuse que profane. « La religion, dit M. Fustel de Coulanges, qui exerçait

1. Appien-Samn 4; Iber 83. Live IX, 5, III, 4. Dionys XVI,5.

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