Page images
PDF
EPUB

nie avec les impulsions du cœur et les variations du mouvement artériel; l'exposition des propriétés des organes formés de tissu fibreux et du mode d'irritation qu'y fait naître la distension forcée des fibres, au moyen de laquelle se développent dans ce tissu, regardé comme si peu sensible, la sensibilité la plus vive et les plus fortes douleurs ; enfin, les rapports comparés des fonctions et des inflammations des membranes muqueuses, séreuses et fibreuses, spécialement dévelop pées aussi dans le premier ouvrage publié par Bichat, son Traité des

membranes.

Comparaison avec les

ouvrages antérieurs.

La distinction importante sur laquelle est fondé le Traité des membranes, avoit déjà été indiquée en 1797 dans la première édition de la Nosographie de M. Pinel qui, le premier, avoit fait remarquer cette différence, et avoit établi sur elle une des divisions de sa classe des phlegmasies. Bichat le reconnoît, et lui fait hommage d'une conception à laquelle il attache une grande importance; mais quand il n'auroit pas lui-même, sous les rapports anatomiques et physiologiques, donné aussi sur cet objet des développemens nouveaux et curieux, tant d'autres parties des ouvrages dont nous venons de donner l'analyse portent le caractère de l'invention et du génie, que l'on peut les regarder comme ayant agrandi la science et ouvert de nouvelles voies à l'anatomie et à la physiologie. L'idée d'un ouvrage sur la vie et la mort avoit été déjà conçue par Aristote, (Tegi (was i Javátou), et Bichat lui-même reconnoît lui devoir, ainsi qu'à Buffon, Morgagni, Haller et Bordeu, des données dont il a profité; mais personne ne lui disputera de s'être rendu propres toutes les idées de ces hommes célèbres, par des développemens, des applications et des conséquences qui n'appartiennent qu'à lui.

L'impulsion des grands talens se propage, et l'art d'imaginer et d'exécuter des expériences, que Bichat avoit à un point très-remarquable, semble avoir donné naissance à une émulation, dont l'institut a vu des effets heureux dans les expériences physiologiques qui lui ont été présentées depuis par des hommes d'un talent distingué, tels que MM. Dupuytren, Nysten, Provençal, Magendi, Laroche, Legal lois, etc. ; et cette espèce de communication et d'inspiration heureuse est encore un des services que nous rendent les hommes de génie.

Que de titres pour couvrir, en supposant qu'ils fussent mérités, quelques reproches que plusieurs personnes ont pu faire aux œuvres de Bichat! Sans doute, s'il eût vécu, il auroit revu, changé ou perfectionné quelques-unes de ses idées, auxquelles la rapidité de ses conceptions a peut-être enlevé quelque degré de précision et d'exactitude; mais c'est moins sur ces légers défauts que doivent porter nos regrets, que sur les services éminens qu'un pareil homme auroit pu rendre à la médecine et aux sciences.

III. RAPPORT SUR LE COURS D'ANATOMIE MÉDICALE
DE M. PORTAL. (M. Pelletan, rapporteur).

PARMI les nombreux ouvrages que M. Portal a donnés au Public, le Jury a distingué celui qui a pour titre: Cours d'Anatomie médicale. Nous devons, aux termes du Décret, donner une connoissance plus détaillée de cet ouvrage intéressant.

Plusieurs médecins, avant M. Portal, ont eu le projet de rapprocher la connoissance de l'homme malade de celle de l'homme considéré dans l'état sain. Mais ces projets n'avoient jamais eu qu'une exécution partielle. M. Portal a embrassé le premier le système complet d'une anatomie pathologique ; et il suffira de l'analyse rapide que nous allons faire de cet ouvrage pour en démontrer l'utilité : elle est telle qu'aucun autre ouvrage en médecine ne peut l'emporter sur celui-ci sous ce point de vue particulier.

Nous observerons cependant que M. Portal auroit dû intituler son ouvrage : Cours d'Anatomie pathologique, et non pas médicale, puisqu'en effet il n'entre dans son plan que de donner une nosographie anatomique, et qu'il ne s'occupe jamais du moyen de guérir, qui constitue la médecine proprement dite. Certes, sa tâche étoit assez grande, et nous allons voir avec quel succès il l'a remplie.

Dans son introduction, M. Portal fait ressortir de la simple division du corps humain en parties molles et en parties dures, des connoissances aussi positives qu'intéressantes sur l'endurcissement successif de tous nos organes; endurcissement nécessaire dans quelques-uns pour la parfaite exécution des fonctions auxquelles ils sont destinés ; qui, , pour d'autres, n'arrive que dans un âge avancé, et devient pré

judiciable

judiciable aux fonctions qui dépendent de la souplesse des organes; tandis que tous marchent sans cesse et à la fois vers un terme d'endurcissement qui deviendroit celui de la vie, si des maladies sans nombre n'empêchoient l'homme d'arriver à la vieillesse. On ne sauroit exprimer avec plus de précision ce grand point de physique animale que ne le fait ici M. Portal, et il l'appuie de faits et d'autorités du plus grand poids.

L'Auteur entre en matière et commence par l'Ostéologie. Rien de plus vulgaire, en apparence, que la description des os; mais leur simple énumération fournit à M. Portal l'occasion de faire connoître par combien de causes ils varient en nombre et en volume dans le même individu; comment et par quelles maladies quelques-uns se trouvent retardés dans leur accroissement, tandis que d'autres en acquièrent un excessif. Souvent aussi des centres d'ossification, trop éloignés les uns des autres, arrivent trop tard pour la solidité nécessaire

à l'os.

Si M. Portal compare entre eux les squelettes des différens âges et ceux des différens sexes, c'est une occasion pour lui de donner les détails les plus intéressans sur les variétés, dont la stature de l'homme est susceptible; en même temps qu'il ne laisse rien à désirer sur les modifications successives qu'éprouve l'assemblage des os du corps humain depuis l'état d'embryon jusqu'à la vieillesse ; et celles qui caractérisent lesquelette de la femme, soit pour sa délicatesse, soit pour les fonctions particulières auxquelles la nature l'a destinée.

L'organisation des os rappelle les expériences décisives ou contradictoires de Haller, Duhamel, Fougeroux et Bordenave sur l'ossification du périoste pour la formation des os primitifs, ou celle des os secondaires. Les exostoses, les caries, le spina ventosa, et autres maladies qui attaquent la substance des os, trouvent ici leurs places. Celles qui ont leur siége aux articulations, et qui comprennent leurs ligamens, leurs cartilages, les glandes synoviales et la moelle, ne sont pas traitées avec moins de sagacité.

[ocr errors]

En passant rapidement sur tous ces objets, nous sommes arrêtés par un article qui offre des détails aussi curieux qu'intéressans, et d'une première utilité sur la conformation générale du crâne et ses variétés, sur la structure de chacune de ses parties, leur développement natu

rel, quelquefois excessivement augmenté par l'amas d'un fluide aqueux qui constitue l'hydropisie cérébrale, ou resserré d'une manière inconcevable quand on considère l'état d'intégrité que le cerveau conserve malgré cette disposition vicieuse du crâne. L'érudition la plus attachante orne ce morceau qui est terminé par une saine théorie des diverses lésions dont le crâne et le cerveau sont si souvent le siége.

Il faudroit nous arrêter sur chaque article de la description des os, comme M. Portal l'a fait, si nous voulions faire connoître l'étendue et la sagacité avec lesquelles il a détaillé toutes les maladies dont sont susceptibles les os et leurs appartenances, sans que ces détails nuisent en rien aux descriptions anatomiques, qui sont partout de la plus grande exactitude, partout réunies aux explications physiologiques, et chaque découverte attribuée, par une saine critique, à leurs véritables auteurs.

Le second volume de l'ouvrage de M. Portal traite des muscles; leur description est précédée de celle du tissu cellulaire, partie intégrante de tous nos organes. L'auteur fixe l'attention sur ce tissu cellulaire, ef traitant des maladies dont il est particulièrement le siége, et de la propriété qu'il a de transmettre les humeurs d'une partie dans une autre, quelquefois au grand avantage du malade, le plus souvent avec des résultats dangereux ou mortels. L'énoncé de ces divers événemens est appuyé sur des observations intéres santes tirées, la plupart, de la pratique de l'auteur, ou fournies par les praticiens les plus distingués.

La description des muscles n'étoit susceptible que d'une grande exactitude. Winslow et Albinus sont, depuis long-temps, en possession de fournir aux anatomistes la seule marche à suivre dans cette description. M. Portal leur rend la justice qui leur est due; et, d'après l'exemple de ce dernier, il désigne chaque muscle sous les noms variés qu'ils ont reçus depuis Vésale jusqu'à MM. Chaussier et Dumas.

Winslow a laissé peu de choses à désirer sur l'analyse des mouvemens exécutés par les grands muscles du corps, et M. Portal a renchéri ces détails de mécanique et sur les phénomènes qui résultent de la combinaison de ces organes entre eux et avec les parties soumises à leur action.

Fidèle à son projet ; M. Portal traite des maladies propres aux

muscles:

1.o De leur volume augmenté ou diminué;

2.o De l'altération de leur couleur ;

3. De leur inflammation, suppuration, gangrène ou sphacèle; 4.° De leur ramollissement;

5o. De leur desséchement ou racornissement;

6. Des altérations dont sont susceptibles les humeurs dont ils sont pénétrés ;

7.° De leur déplacement;

8. Enfin de leur rupture partielle ou totale.

Chacun de ces points est traité avec précision et sagacité, et appuyé d'une érudition judicieuse, et sur des observations propres à

l'auteur.

que

Le troisième volume traite de la circulation du sang et de ses organes. Ce M. Portal dit sur le cœur et sur les maladies dont il est susceptible, ainsi que sur celles qui affectent le péricarde, peut être regardé comme le complément de nos connoissances sur cette partie. Anatomie, physique proprement dite, systèmes physiologiques sur les fonctions de cet organe; enfin, histoire des maladies de tout genre tous ces points, dis-je, sont traités avec sagacité d'une manière aussi concise que luminense, et, comme tout le reste, ornés d'érudition et appuyés d'observations.

Nous en dirons autant de l'histoire des vaisseaux lymphatiques qui suit immédiatement.

La description des artères, des veines et des vaisseaux lymphatiques, est d'une grande étendue et d'une exactitude scrupuleuse ; elle est accompagnée de l'histoire des anévrismes, dont les diverses branches artérielles sont susceptibles; et nous y en avons rencontré plusieurs d'une connoissance nouvelle, et dont les faits appartiennent à l'expérience particulière de l'auteur.

L'anatomie du cerveau, qui commence le quatrième volume, nous a paru un chef d'oeuvre de science et d'intérêt. Nous laissons à part la partie anatomique sur laquelle il étoit si difficile de dire du nouveau, pour n'entretenir la classe que de la science médicale qui en fait la principale utilité. Les maladies y sont rargées avec

« PreviousContinue »