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les bases de nos institutions, de toute notre vie actuelle; qui découvrent chaque jour à notre admiration et ravivent de leur talent les souvenirs les plus glorieux et les plus touchants.

L'histoire vous aura de grandes obligations; car c'est pour elle surtout que vous recueillerez, que vous préparerez de précieux matériaux dont elle aura à profiter ces matériaux, elle les recevra de vos mains, contrôlés, éprouvés par une sage critique et tout prêts à être mis en œuvre.

Pour satisfaire à cette partie de votre mission, vous aimerez à porter vos investigations principalement sur tout ce qui se rattache au passé si intéressant de nos riches provinces, de nos industrieuses cités, et à l'histoire de ces illustres familles qui ont jeté tant d'éclat sur nos glorieuses annales.

Vous aimerez aussi, messieurs, à seconder et à encourager cette réaction moderne de respect et de vénération pour les monuments et les traditions de nos ancêtres; réaction généreuse, qui fait honneur à l'esprit réparateur de notre époque, mais qui a besoin d'être dirigée et éclairée. Ainsi vous acquerrez des droits à la reconnaissance de tous les amis des arts, et ce ne sera pas un de vos moindres titres aux yeux d'un pays qui doit aux arts tant de grandeur et de gloire, au sein d'une ville que plusieurs siècles de triomphes ont consacrée la métropole d'une des plus riches et des plus brillantes écoles du monde. Il y a plus, chez un peuple qui s'est toujours montré si noblement attaché à la foi de ses pères, l'art a été et devait être essentiellement religieux aussi nos plus beaux monuments sont l'expression d'une pensée pieuse, la matérialisation imposante d'une aspiration de l'homme vers la divinité. Certes, c'est là une heureure position pour notre pays; car il est incontestable que, pour le style comme pour la pensée, l'art religieux sera toujours le type le plus noble et le plus pur de la véritable grandeur.

Ainsi donc, du point de vue artistique et monumental comme du point de vue purement historique, vos travaux seront avant tout la réalisation d'une pensée nationale. Puissent-ils, à leur

tour, devenir un monument dont s'enorgueillissent un jour et la science et la Belgique !

Vous le voyez, messieurs, votre mission est grande et belle; mais vous saurez l'accomplir. En vous l'imposant, vous avez eu la conscience de vos forces et le sentiment du bien que vous êtes appelés à produire. Tous les hommes de cœur et d'intelligence ont applaudi à votre entreprise. De toutes parts, en Belgique et à l'étranger, ont éclaté les plus vives sympathies pour vos efforts; vous avez vu les hommes les plus éminents par leurs noms et par leurs talents, répondre avec empressement à votre appel et vous exprimer le plaisir qu'ils éprouvent de pouvoir s'associer à vos travaux. Ces témoignages flatteurs sont la meilleure preuve que vous avez été compris, et que l'on a confiance en vous, en vos lumières, en votre persévérance,

Ce début est trop heureux, la route à parcourir est trop belle, et votre dévouement trop réel, trop sincère, pour que vous ne deviez pas être assurés que l'avenir réserve à votre association les plus brillantes destinées. Mais, ne l'oublions jamais, en toutes choses ici bas, le travail est la première, la plus rigoureuse et la seule condition légitime de succès. Rappelons-nous sans cesse que l'on a les yeux sur nous, que le pays attend et est en droit d'attendre beaucoup de notre institution. Ainsi, je compte sur vous, messieurs, et vous, comptez sur moi j'ai été trop fier de vos suffrages pour ne pas consacrer avec bonheur tout ce qu'il peut y avoir en moi de dévouement et de lumières à la réalisation de nos communes espérances.

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N'épargnons donc aucun effort: notre récompense sera bien douce, bien complète, si nous pouvons nous dire un jour que nous aussi, nous avons coopéré aux progrès de la science; que nous aussi, nous avons été utiles à nos concitoyens; que nous aussi, nous avons contribué à la gloire, peut-être même au bonheur de notre chère patrie.

Après le discours du Président, le Secrétaire-perpétuel prend la parole, et rend compte des travaux de l'Académie en ces termes :

RAPPORT GÉNÉRAL.

MESSIEURS,

C'est une vérité incontestable, croyons-nous, qu'à aucune époque les études scientifiques et littéraires n'ont reçu en Belgique, une impulsion aussi active, aussi entrainante que celle qu'elles subissent aujourd'hui. Si cette assertion avait besoin de preuves, il suffirait de mentionner ces nombreuses sociétés savantes établies ou régénérées à une existence plus vicace, depuis quelques années, et dont la plupart rendent de si grands services aux sciences et surtout aux études historiques, qui semblent être devenues, avec les sciences exactes, les deux besoins intellectuels dominants de notre siècle. L'importance de ces associations est certes un fait que l'on ne peut révoquer en doute. Toutefois, quelque précieuse et féconde qu'eût été la pensée qui avait présidé à leur création et quelque réels que fussent les résultats de leurs travaux, il était à regretter que parmi elles il ne s'en trouvât pas une seule qui se fùt consacrée, d'une manière toute spéciale, aux diverses branches de l'archéologie. C'est ce regret qui, l'année dernière, inspira à quelques personnes, le désir de former une académie destinée à combler cette lacune; et sans vouloir exagérer nos premiers succès, nous pouvons dire hardiment que jamais peut-être l'on ne vit une société s'établir sous de plus heureux auspices que la nôtre. La sympathie que sa fondation a éveillée, tant à l'étranger que dans toute la Belgique, est un fait digne de remarque, qui constate, à l'évidence, ce nous semble, combien l'on avait été en droit de compter sur une réussite.

Comme vient de vous le dire M. le Président, cette sympathie

générale est en quelque sorte une sanction anticipée des belles destinées réservées à l'Académie, et en même temps un puissant encouragement qui la soutiendra dans ses travaux. Je crois donc devoir faire mention ici de quelques lettres d'adhésion et de remerciment qui nous ont été adressées par des hommes aussi distingués par leurs vaste savoir, que par leurs estimables qualités et leur haute position sociale. Je veux parler de M. Guizot, ministre de France, l'un des hommes les plus remarquables de notre époque; de M. Raoul-Rochette, regardé comme le plus savant archéologue de nos jours; du prince de Rheina-Volbeck, comte de Lannoy, homme d'un mérite supérieur et appartenant à l'illustre maison dont le nom rappelle tant de glorieux souvenirs pour notre pays. Permettez-moi, messieurs, de citer ici quelques passages de son intéressante lettre :

« Je suis fier, dit le prince, de la distinction flatteuse que » l'Académie d'Archéologie a bien voulu m'accorder en me nom» mant de son propre mouvement membre honoraire.... Mon nom » s'honorera d'étre inscrit parmi les vôtres............ J'ai lu votre › programme, j'ai admiré l'étendue, la profondeur et la vérité des » idées qui y sont énoncées. Le but de l'association est aussi » noble qu'utile. Cela s'appelle comprendre la science et sa portée. » L'avenir peut beaucoup attendre de notre Académie, si chacun » des prêtres de ce nouveau temple sait y entretenir religieu» sement le feu sacré. Elle peut devenir un foyer de lumières qui » rayonnera sur le monde civilisé, dont à son tour elle recevra les » clartés de toutes parts.

» Par son esprit, le conquérant ou le vandale de nos jours, ne viendra plus fouler d'un pied insolent la cendre d'un grand aïeul ou briser pour en faire des dalles, le marbre d'une illustre » tombe.....

» Par son esprit, les générations nouvelles, animées du véritable » amour du progrès, jeteront souvent un regard en arrière; elles > comprendront que nos ancêtres ont fait de grandes et belles cho» ses dont il importe de garder religieusement la mémoire; elles

>> comprendront que tout ne doit pas tomber sous la hache de >> l'innovation; elles sentiront qu'elles doivent à un passé glorieux >> les mêmes respects qu'elles demanderont un jour du fond de leurs » sépulcres à leurs arrière-neveux; elles sauront que si c'est un >> devoir pour l'humanité d'élever de nouveaux temples, c'est un >> devoir aussi pour elle de soutenir ceux qui sont encore debout, » comme d'étayer les colonnes qui menacent de s'écrouler. Elles >> comprendront enfin que l'avenir ne peut être glorieux et fort, s'il >> n'est assis sur les bases du passé »......................

.....

Aux considérations que vous venez d'entendre, qu'il me soit permis, messieurs, d'ajouter deux mots qui doivent, me paraît-il, compléter l'expression de la pensée tout entière du prince. Si le but de notre institution est noble et utile, comme il le dit, c'est qu'il est éminemment national; mérite qui doit, avant tout autre, caractériser une institution quelconque; mérite qui seul aujourd'hui peut assurer le succès. Voici, messieurs, comment s'exprime à cet égard, dans la lettre qu'il nous a écrite, l'un des nos membres les plus recommandables, M. le comte Félix de Mérode, l'un des plus beaux noms et des plus nobles caractères de Belgique : « L'esprit national, dit-il, se développe en raison de l'estime qu'un peuple conserve pour ce qu'il y a de beau dans le passé, pour tout ce qui a distingué les nations précédemment établies sur le sol natal. C'est donc, ajoute-t-il, une société vraiment patriotique, que celle qui s'occupe de pieux souvenirs et des traces laissées par les siècles. »> -Aussi le vénérable et savant prince Obolensky, en témoignant à l'Académie combien il est flatté d'en faire partie, ajoute qu'il ne cessera jamais de former les voeux les plus ardents pour la prospérité d'une semblable association, et pour qu'elle atteigne son but si intéressant. Les mêmes sentiments sont partagés par un autre illustre savant, le comte Maurice de Dietrichstein, préfet de la bibliothèque de l'empereur d'Autriche, l'une des gloires de la bibliographie en Allemagne. Parmi les hommes éminents qui ont honoré l'Académie de leur sympathie, nous ne pouvons nous refuser le plaisir de citer le comte Amédée de Beauffort, auquel les arts

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