Page images
PDF
EPUB

qu'il avait appelé à son aide, et le comité royal des monnaies, et le premier commis des monnaies, et un détachement de la cour des monnaies, je le dirai, et je prouverai que les vices de votre régime monétaire proviennent, en très-grande partie, de ce tronc et des branches gourmandes du système monétaire actuel.

N. B. Je ne parlerai pas dans ce travail de l'arrondissement de chaque hôtel des monnaies, et je ne parlerai pas de la perfection de nos monnaies, en ce qui concerne la nouvelle forme à donner aux carrés pour, autant qu'il est possible, garantir de l'usement l'empreinte de nos espèces.

Je ne parlerai pas non plus ni de la pesanteur et de la dimension des pièce, ni d'un nouveau genre de gravure pour rendre nos espèces plus parfaites, ni des types et légendes monétaires à adopter.

Mais lorsque la constitution monétaire sera déterminée, je présenterai ces différens objets à l'examen de l'assemblée nationale.

DE LA CONSTITUTION MONÉTAIRE.

MESSIEURS,

Je vais exposer la DOCTRINE MONÉTAIRE telle que je l'ai conçue..

Cette matière est extrêmement importante. Nonseulement la théorie de l'art monétaire est une des

premières bases de la science des finances, ce ressort principal de la prospérité des empires, mais elle a des rapports intimes avec la politique de toutes les nations, qui semblent unies par ce lien commun, pour montrer que les peuplades éparses sur le globe ne peuvent jamais cessér d'être une famille de frères destinés à s'entr'aimer, à s'aider mutuellement dans la jouissance des droits imprescriptibles de leur nature.

Une monnaie loyale est le signe de tout ce qui peut se vendre; mais tout ce qui peut se vendre ne croît pas; n'est pas produit aux mêmes lieux. Dans les admirables combinaisons de son système, l'auteur de tout ce qui existe a permis que des mers pussent séparer les nations; mais il a défendu à ces mers de les désunir. Les hommes ont des besoins si variés, qu'ils ne peuvent les satisfaire sans communiquer ensemble, et sans être obligés de chercher même au loin des secours mutuels. Là où dans les entrailles de la terre mûrit l'amalgame de l'or et de l'argent, là un sol stérile se refuse à la production végétale. Là où les mines d'or et d'argent sont en abondance, là un soleil dévorant seconde la paresse, appelle le sommeil, affaisse les facultés morales et physiques, chasse l'industrie et l'activité; tandis que sous une zone plus tempérée, tout ce qui est nécessaire à la vie croît avec profusion; et l'esprit reçoit de la nature cette intelligence exquise, et surtout cette puis

sance de méditation' qui lui dérobe des secrets dont l'homme enrichit l'œuvre de ses mains.

De ces diverses productions de la terre et du génie résulté le commerce le plus varié, qui ne peut s'effectuer qu'avec le signe commun, le signe représentatif de tout ce qui peut être vendu, supplément universel de l'échange, cette source intarissable de discorde.

Et ce signe n'est pas seulement un signe commercial; il facilite encore les moyens de maintenir la balance entre les nations; il les contient chacune dans les limites que le droit politique a posées; il arrête ou repousse le bras sanguinaire des princes que tourmente l'amour d'une fausse gloire; il aiguise l'industrie, il féconde la richesse, il centuple le travail; avec ce signe, les forces, le temps, les lieux, le nombre, tout se compense.

Attendez de la saine doctrine monétaire un bien d'une plus grande importance, lorsque, unie à la liberté, ce double flambeau éclairera toutes les nations sur leurs véritables intérêts. Alors elles reconnaîtront la possibilité d'une monnaie universelle et commune, qui ne dépendra ni de la fécondité des mines, ni de l'avarice, ni du caprice de leurs possesseurs; alors la confraternité trop oùbliée de l'espèce humaine s'entrelacera par une circulation plus amiable et plus active dans tous les rapports politiques et commerciaux; alors on pourra dire de la doctrine monétaire ce que l'ora

teur de Rome disait de la loi : » elle est une, elle » est universelle; elle est la même pour Rome et » pour Athènes; il n'y a rien à y ajouter, rien à y retrancher, elle n'a besoin d'aucun commentaire.» Puissions-nous voir cette heureuse époque! et s'il faut un exemple, que ce soit l'empire des Français qui le donne!

Mais, pour y parvenir, commençons par simplifier notre régime monétaire.

Cette tâche est plus longue que difficile: car, messieurs, en examinant sa dégénération, vous verrez se développer naturellement les vices innombrables qui y sont introduits, et le remède se présentera de lui-même. Il est tout entier dans le retour aux idées naturelles.

Je tâcherai de découvrir les principaux abus de l'administration et de la manipulation des monnaies. J'espère que l'on m'entendra; car je substituerai un idiome intelligible à cette langue technique que l'on n'avait hérissée de mots barbares et inusités que pour donner une teinte scientifique à une doctrine très-simple.

Et dans ce mot doctrine je comprends la surveillance autant que la fabrication des monnaies; car je ne confonds pas avec ces deux genres d'opération les connaissances historiques, métallurgiques, physiques, et moins encore les connaissances politiques, qui constituent le véritable monétaire.

Je ne jetterai qu'un coup d'œil rapide sur l'ori

gine et les progrès des monnaies, parce que, s'il est nécessaire d'en esquisser l'histoire pour faciliter les déductions élémentaires, c'est l'examen du régime actuel qui nous importe; et certes, il ne présente que trop d'observations et de détails pour fatiguer votre attention.

J'indiquerai les principaux traits de la législation monétaire de Rome, mais de Rome dans la vigueur de sa toute-puissance. Ce sont les lois de cette époque qu'il faut admirer, et non celles qu'ont promulguées les despotes de Rome asservie et dégénérée.

Dans ce développement sommaire, on verra le principe fondamental des monnaies assis sur une base immuable; et il naîtra de lui plusieurs vérités secondaires qui deviendront autant de principes.

J'ai fouillé dans nos décombres scientifiques pour y trouver quelques lambeaux relatifs à mon sujet; et je dois avouer qu'en vous soumettant ce fruit de mes recherches, je ne vous ferai pas un magnifique présent..

Je vous dirai ensuite comment la cupidité, l'orgueil, l'ignorance et le démon de la fiscalité ont renversé le principe fondamental, et déguisé les vérités secondaires; comment une des branches les plus importantes de notre administration a été viciée, ce qui s'en est suivi; et j'établirai la possibilité de rendre au système monétaire son lustre primitif, en le ramenant à la simplicité inhérente à son essence.

« PreviousContinue »