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nière de la dégradation morale d'un peuple, seroit de feindre des sentimens qu'il n'a pas, parce qu'il les croit des vertus.

Nous sommes Français; et des Français doivent, avec leurs lumières, être plus que des Romains.

Bons quand nous étions esclaves, nous ne devons pas être moins bons parce que nous sommes libres.

Des lois de sang ne sont pas plus dans les mœurs que dans les principes d'une république.

La peine de mort étoit à supprimer le jour même où une autre puissance que la loi l'a fait subir dans les prisons.

Le droit de mort n'appartient qu'à la nature; le despotisme le lui avoit pris, la liberté le lui rendra.

Si Louis, comme je le voulois, avoit été jugé par les tribunaux, il auroit porté cette peine qu'infligent encore les tribunaux, parce que vous n'avez pas encore eu le temps de changer le code de la justice.

Mais Louis s'est jeté lui-même devant les fondateurs d'une république, dont le plus digne moyen pour se vende la monarchie est de la faire oublier.

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Louis est un tyran, mais ce tyran est couché par terre; il est trop facile à tuer pour que je le frappe : qu'il se relève, et alors nous nous disputerons l'honneur de lui ôter la vie. Je jure que j'ai le poignard de Brutus, si jamais un César se présente dans le Sénat.

Mais en homme d'état qui consulte la morale et la politique, je demande, comine mesure de sûreté générale dans les circonstances où se trouve ma patrie, que le dernier des rois soit conduit avec sa famille prisonnière, d'ici à vingt-quatre heures, dans un de ces forts où les despotes gardoient eux-mêmes leurs victimes, jusqu'à ce qu'il ne manque plus au bonheur public que la déportation d'un tyran, qui alors pourra chercher une terre où les hommes n'aient pas de remords.

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N°. 374. Camille-Desmoulins, dép. idem. Manuel, dans son opinion du mois de novembre, a dit: un roi mort, ce n'est pas un homme de moins. Je vote pour la mort, trop tard peut-être pour l'honneur de la convention nationale. (Murmures.- Plusieurs membres demandent que Camille soit rappelé à l'ordre).

N°. 375. Sergent, dép. idem.

J'ai déjà prononcé la mort contre les ennemis de ma patrie qui avoient pris les armes contre elle; j'ai fait plus, j'ai prononcé la même peine contre des êtres foibles qui n'avaient commis peut-être d'autre crime que celui de suivre leurs époux ou leurs pères. Depuis long-temps j'étois convaincu des crimes de Louis; un de mes collègues a dit qu'un roi mort, ce n'est pas un homme de moins : je ne suis pas de son avis, et je pense que le supplice d'un roi ne peut qu'étonner l'Univers; la tête d'un roi ne tombe qu'avec fracas, et son supplice inspire une terreur salutaire. Après avoir balancé tous les dangers, il m'a été démontré dans ma conscience, que la mort de Louis étoit la mesure d'où il en pouvoit résulter le moins: je vote donc pour la mort, et contre le chef et contre ses complices.

No. 576. Dusaulx, dép. idem.

Mon opinion a été imprimée, elle est l'expression de ma conscience; je crois qu'on peut être très-bon patriote, sans tuer son ennemi par terre : je demande que le ci-devant roi soit détenu pendant la guerre, et banni à la paix.

No. 377. Thomas, dép. idem.

Si j'avois à prononcer seulement comme juge, si je

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je ne voyois que l'homme et ses crimes, certes je ne serois pas embarrassé, je voterois pour le dernier des supplices; mais je dois prononcer en législateur, en homme d'état. L'intérêt de ma prtrie est de n'avoir plus de roi : or, la mort de Louis ressuscite la royauté, j'en atteste l'histoire de tous les peuples. L'existence de Louis me paroît utile, en ce qu'elle tient en échec tous les ennemis de la liberté au dedans et au-dehors: le silence des puissances étrangères ne semble-t-il indiquer qu'elles espèrent tirer un grand parti de sa mort? Mais nous, ne pouvons-nous tirer un grand parti de sa vie? C'est un homme comme un autre, dit-on; je dis plus, c'est un homme au-dessous de tous les autres. Si, avant le siége de Lille, l'infàme gouvernante des PaysBas eût été prise, et qu'on eût pu, en la rendant, prévenir l'incendie de nos malheureux concitoyens, qui de vous n'auroit pas dit : renvoyons cette mégère ? Je conclus à la détention jusqu'à la paix, mais avec cette condition, que Louis subira la mort au moment où les puissances envahiroient notre territoire.

No. 578. Egalité (ci-devant d'Orléans), dép. idem.

Uniquement occupé de mon devoir, convaincu que tous ceux qui ont attenté, ou attenteront par la suite à la souveraineté du peuple, méritent la mort, je vote pour la mort.

N°. 379. Enlart, dép. du Pas-de-Calais.

La déportation dans une de nos îles pour y être détenu, et le bannissement de toutes les terres de la république à la paix.

No. 380. Bancal, dép. du Puy-de-Dôme.

Je ne vote point la mort actuelle de Louis Capet,

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1. parce qu'un décret de l'assemblée législative, rendu le jour même de la révolution glorieuse du 10 août, l'a déclaré un ôtage national, et que l'existence de cet ôtage peut épargner le sang des Français.

2o. Parce que Louis Capet a un très-grand nombre de complices qu'il importe à la république de connoître.

3. Parce que la mort d'un ci-devant roi, surtout dans un temps de guerre, est un événement qui peut amener une révolution dont personne ne peut calculer les suites; et lorsqu'on ne voit pas sa marche sûre; lorsqu'il y a du donte, la sagesse prescrit de rester dans l'état où on est, jusqu'à ce qu'on ait acquis de plus grandes lumières.

4°. Parce que l'histoire d'Angleterre donne une grande Jeçon à tous les peuples qui fondent des républiques.

3. Parce qu'après la mort de cet homme avili, les cours étrangères et les factions seront encore plus actives, plus puissantes, pour tenter de lui donner un suc

cesseur.

6°. Que les prétentions à des trônes ont causé le plus grand nombre des guerres qui ont affligé l'humanité et inondé la terre de sang. L'ambition fut la même dans tous les siècles : elle aime mieux périr que de renoncer à ses projets homicides.

70. Parce qu'un supplice qui ne cause qu'un instant de souffrance me paroît moins punir un criminel, qu'une vie couverte d'opprobre, surtout lorsque l'homme tombe du rang le plus élevé.

8. Parce que j'aime mieux, pour la vengeance du peuple et l'instruction du monde, voir le premier roi de l'univers condamné à faire un métier pour gagner sa vie.

que

9°. Parce que la soif de la vengeance et du sang n'est dans les individus et les factions, jamais dans une

grande nation prise en masse, surtout lorsqu'elle est victorieuse.

10°. Parce que dans toutes ses actions, le législateur doit être le fidèle interprète de la volonté générale, et je pense que la majorité des citoyens français ne voteroit pas pour la mort actuelle. Je pense que ce jugement sera celui, non des rois qui aiment mieux un roi mort qu'un roi avili, mais le jugement des nations et de la postérité, parce qu'il est celui de Thomas Payne, le plus mortel ennemi de rois et de la royauté, dont le suffrage est pour moi une postérité anticipée.

11°. Parce que la peine de mort est absurde, barbare, et propre à rendre les mœurs féroces, et est une des grandes causes des maux dont génit la société. Cependant, comme la peine de mort n'est pas encore abolie, je pourrois peut-être me déterminer à voter cette peine après la guerre, parce que je crois que Louis Capet a mérité la mort, et qu'alors les plus grands dangers seront passés; mais dans le moment présent, obligé de porter un suffrage positif, mon devoir me prescrit de préférer le bannissement, comme la mesure la plus grande, la plus efficace contre les factieux, et la plus sûre pour maintenir en France la liberté, l'égalité et la forme du gouvernement républicain; parce que quoi qu'il arrive, je vivrai et mourrai républicain: et comme le législateur doit résister aux passions privées qui l'entourent, braver avec fermeté, avec dignité, tous les périls, et n'obéir qu'à sa conscience et à la raison, je vote pour que Louis Capet continue à être emprisonné et en ôtage, et qu'après la guerre il soit bannì à perpétuité du territoire de la république.

No. 381. Barrère, dép. des Hautes-Pyrénées.

Si les mœurs des Français étoient assez douces et l'éducation publique assez perfectionnée pour recevoir

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