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lois invoquées par l'accusateur public. Antoinette secoue la tête en signe de négative. Sur la même interpellation faite aux défenseurs, Tronçon prend la parole, et dit Citoyen président, la déclaration du jury étant précise, et la loi formelle à cet égard, j'annonce que mon ministère à l'égard de la veuve Capet est ter

miné.

Le président recueille les opinions de ses collègues, et prononce le jugement suivant :

Le tribunal, d'après la déclaration unanime du jury, faisant droit sur le réquisitoire de l'accusateur public, d'après les lois par lui citées, condamne ladite MarieAntoinette, dite Lorraine d'Autriche, veuve de Louis Capet, à la peine de mort; déclare, conformément à la loi du 10 mars dernier, ses biens, si aucuns elle a dans l'étendue du territoire français, acquis et confisqués au profit de la république; ordonne qu'à la requête de l'accusateur public, le présent jugement sera exécuté sur la place de la Révolution, imprimé et affiché dans toute l'étendue de la république.

Le visage de la condamnée n'étoit nullement altéré. On la reconduisit en la maison d'arrêt de la Conciergerie, à quatre heures et demie du matin.

A cinq heures, le rappel fut battu dans toutes les sections; à sept, toute la force armée fut sur pied: des canons furent placés aux extrémités des ponts, places et carrefours qui se trouvent depuis le Palais de justice jusqu'à la place de la Révolution ; à onze heures, Antoinette sortit de la Conciergerie, vêtue d'un déshabillé de piqué blanc. Elle monta dans la voiture de l'exécuteur, ayant à ses côtés un prêtre constitutionnel, et escortée par de nombreux détachemens de gendarmerie à pied et à cheval.

Antoinette, le long de la route, regardoit indifféremment la force armée, qui, au nombre de plus de trente mille hommes, formoit une double haie dans les rues où elle a passé; on n'apercevoit sur son visage ni abattement ni fierté; elle avoit l'air calme, et paroissoit insensible aux cris de vive la république, à bas la tyrannie, qu'elle n'a cessé d'entendre sur son passage: en général, elle parloit peu au confesseur.

A midi, étant arrivée sur la place de la Révolution, elle devint beaucoup plus pâle qu'elle n'avoit été jusqu'alors; elle monta ensuite sur l'échafaud avec assez de courage après sa mort, l'exécuteur montra sa tête au peuple, au milieu des cris mille fois répétés de vive la république.

:

Procès-verbal de l'exécution de mort de la veuve Capet.

L'an deuxième de la république française, le vingtcinquième jour du premier mois, à la requête de l'accusateur public près le tribunal criminel extraordinaire et révolutionnaire, établi au palais à Paris, par la loi du 10 mars, 1793, sans aucun recours au tribunal de cassation, lequel fait élection de domicile au greffe dudit tribunal;

Nous Eustache Nappier (1), huissier audiencier du tribunal, demeurant rue de la Parcheminerie, soussi

(1) Ex-huissier au ci-devant Châtelet; ensuite nommé par Fouquier, huissier près la commission populaire séante à Orange, et condamné à douze années de fers par le tribunal criminel d'Avignon au moment qu'il étoit exposé aux regards du peuple sur un échafaud, des individus inconnus l'ont poignardé.

gné, nous nous sommes transporté à la maison de justice dudit tribunal, pour l'exécution du jugement rendu par le tribunal, cejourd'hui, contre la nommée MarieAntoinette d'Autriche, veuve de Louis Capet, qui le condamne à la peine de mort, pour les causes énoncées audit jugement; et de suite l'avons remise à l'exécuteur des jugemens criminels et à la gendarmerie qui l'ont conduite sur la place de la Révolution de celte ville, où, sur un échafaud dressé sur ladite place, ladite Marie-Antoinette, veuve Capet, a, en notre présence, subi la peine de mort; et de tout ce que dessus avons fait et rédigé le présent procès-verbal, pour servir et valoir ce que de raison, dont acte.

NAPPIER.

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