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Du Vendredi 25 Novembre 1791, l'an troisième de la liberté.

A L'ouverture de la féance, il a été fait lecture du Procès-verbal

de celle d'hier matin.

M. Bafire a fait part à l'Affemblée de trois lettres à lui adreffées, l'une de la Municipalité d'Auxonne, la feconde de M. Vollon, & la troisième de M. Gilles, Citoyen de Dijon, qui prioit M. Bafre de faire paffer à M. Varnier une lettre de crédit indéfini.

Il a été ordonné que ces trois pièces refteroient déposées aux Archives de l'Affemblée Nationale.

Un Membre a dit qu'il s'étoit élevé une conteftation dans l'affemblée adminiftrative du Diftrict de Florac, dans le Département de la Lozère, entre les Adminiftrateurs du Confeil & ceux du Directoire que le Confeil prétendoit que le Directoire lui devoit le compte des fommes qui lui font attribuées pour fes frais de bureaux & d'établissement; que le Directoire au contraire avoit foutenu qu'il ne devoit le compte qui lui étoit demandé qu'à l'Administration du Département. Le même Membre a demandé que l'Affemblée renvoyât à l'examen de fon Comité de Légiflation, la question de favoir files Directoires de Diftrict devoient rendre compte aux Confeils ou aux Départemens. Quelques Membres ont demandé le renvoi au Pouvoir exécutif. D'autres ont foutenu que la Loi concernant l'organisation des Corps adminiftratifs étoit précise; que les Directoires de District devoient rendre compte de toute geftion quelconque aux Confeils de District; qu'il n'y avoit lieu à aucun renvoi, & qu'ils demandoient qu'on paffàt à l'ordre du jour. Cette propofition a été décrétée.

Un Membre a lu une lettre d'un Officier-général Autrichien au

Maire de Thionville, o il témoigne fon regret de n'avoir pu faire punir les auteurs d'infultes faites à plufieurs Français par des Emigrans français raffemblés à Gevenmaker, & où il déclare avoir requis le Général de ces émigrés de faire la recherche des coupables; vû, disoit-il, qu'on ne fouffre aucun excès chez nous. Différéntes motions ont été faites relativement à cette nouvelle preuve des attentats des ennemis de la Conftitution.

On a propofé de décréter l'interdiction à tous les Français de

fortir du Royaume fans paffe-ports.

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On a propofé que le Comité Diplomatique fût chargé de préfenter un Projet de décret pour punir les manœuvres intérieures & réprimer les attentats extérieurs, que les ennemis de la Conftitution ne ceffent de multiplier avec une audace jufqu'ici encouragée par l'impurité..

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On a propofé enfin de former un Comité de Surveillance.

L'attention de l'Affemblée s'eft fixée fur cette dernière motion. Plufieurs amendemens relatifs à la dénomination & à la compofition de ce Comité ont été difcutés.

Le Décret définitif a été prononcé ainfi qu'il fuit:

« L'Affemblée Nationale décrète qu'il fera formé un Comité de Surveillance, lequel fera compofé de 12 Membres, & fera renouvellé par moitié tous les trois mois ».

On a demandé enfuite qu'il fût procédé à la nomination de ce Comité, féance tenantes cette motion a été adoptée, & l'Affemblée s'eft retirée à l'inftant dans fes Bureaux.

La lettre de l'Officier Autrichien a été renvoyée à ce Comité. L'Asemblée a décrété, en outre, que le Comité de Surveillance lui présenteroit inceffamment un Projet de décret fur les mesures définitives à prendre contré la conjuration des ennemis de la Patrie.

Le Comité de l'Inspection de l'Imprimerie nationale a fait lecture de Procès-verbaux qui conftatent une mutinerie de la part de quelques

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imprimeurs à la preffe de cette Imprimerie, & il a propofé un Projet de Décret, qui a été adopté en ces termes :

« L'Affemblée Nationale, après avoir entendu le rapport de fon Comité de l'Infpection, décrète qu'expédition des deux Procèsverbaux dreffés par fes Commiffaires-Infpecteurs de l'Imprimerie nationale, dans l'après-dîner du jour d'hier & ce matin, fera envoyée dans le jour au Procureur de la Commune de Paris, à l'effet de pourfuivre par voie de police correctionnelle, ou même de dénoncer à l'Accusateur public, s'il y a lieu, les auteurs de la mutinerie arrivée hier parmi les compagnons imprimeurs employés au fervice de l'Affemblée Nationale ».

Un Membre a observé que l'on a fixé à la féance de Dimanche l'admiflion des Commiffaires de la Comptabilité à la barre, pour préfenter leurs hommages à l'Affemblée Nationale ; mais que la nomination de ces Commiffaires n'a pas été préalablement notifiée à l'Affemblée, & qu'on ne les connoît encore que par les murmures fourds que le choix de plufieurs d'entr'eux a excités dans le public; que ces murmures peuvent être mal fondés ; mais que ces places, créées par un Décret du 15 Septembre dernier, font fi importantes, qu'il eft effentiel pour l'Affemblée Nationale, & pour ces Commiffaires. cux-mêmes, que l'opinion ait le temps de s'éclairer sur ce point. En conféquence, il a demandé que les perfonnes annoncées pour Dimanche, fous le titre de Commiffaires du Bureau de Comptabilité, ne puissent être admifes à la barre de l'Afïemblée Nationale qu'à une féance poftérieure à celle où l'état de leur nomination aura été notifié officiellement à l'Affemblée par le Pouvoir exécutif.

Cette motion a été mife aux voix & adoptée.

Sur une lettre du Juge-de-paix de la Section de Sainte-Geneviève, qui a procédé cette nuit à l'appofition des fcellés fur les papiers du fieur Delattre, mis hier en état d'accufation, par Décret de l'Affemblée Nationale, il a été décrété que les papiers concernant

la tutèle dont le fieur Delattre eft chargé, & ceux relatifs à ses affaires domeftiques & particulières feront exceptés de l'inventaire que le Juge-de-Paix a été chargé de dresser.

Le Ministre de la Guerre ayant adreffé à M. le Président deux lettres, l'une du Général Luckner, l'autre du général Wimpffen au Général Luckner, ces lettres ont été lues.

L'Affemblée a ordonné l'infertion dans fon Procès-verbal de ces deux lettres, avec mention honorable de celle du Général Wimpffen Suit la teneur de ces lettres :

Lettre du Général Luckner au Miniftre.

Strasbourg, le 17 Novembre 1791.

« J'ai l'honneur, Monfieur, de vous adreffer une lettre que je reçois de M. de Wimpffen, par laquelle il me rend compte des démarches qui viennent d'être faites près de lui pour l'entraîner dans le parti des Emigrans. Comme elle renferme des détails que vous jugerez peut-être de quelque intérêt, & une expreffion digne d'éloges de cet Officier-général, j'ai l'honneur de vous la faire paffer en original.

» Le Commandant en chef des cinquième & fixième Divisions. » Signé LUCKNER ».

«<MON GÉNÉRAL,

Colmar, ce 13 Novembre 1791.

» Ayant été interrompu hier au foir dans ma correspondance, qu'il me foit permis de la continuer aujourd'hui, & de ne vous envoyer au lieu d'une copie littérale de la lettre que j'ai reçue, que la substance de fon contenu & celle de ma réponse.

» N'ayant ni Aide-de-camp ni Secrétaire, je fuis forcé d'être laconique, d'écrire de mémoire & de fuite, fans faire de minute & fans pouvoir garder de copie d'aucune de mes lettres; je me répéte

rai donc quelquefois dans les chofes où je croirai qu'il eft effentiel que je fois bien compris.

» La lettre de l'Emigrant porte fur mon premier ferment d'être fidèle au Roi, & croyant fans doute, ou fe picifant à le fuppofer, que Sa Majefté n'a pas accepté de bonne foi la Conflitution, il effaye de me difpofer à livrer dans l'occafion Neufbrifack aux Princes au nom defquels il me parle; & pour me déterminer à cette horrible trahison, il me dit qu'en fuivant la route de l'honneur par ma fidélité à mon premier ferment, je travaillerai efficacement au bien-être de ma famille.

» Cet homme fair que j'ai douze enfans, & nalle autre fortune que les bienfaits de la Nation; mais il ignore qu'ayant infpiré mes fentimens à mes enfans, ils aimeroient mieux fe voir dans l'abandon & dans le malheur, que de devoir leur bien-être à l'infamie de leur père. J'ai répondu avec franchife, que je terois à mon ferment plus qu'à la vie, & que je fuis prêt à mourir à chaque inftant pour la Patrie; que les Princes au nom defquels il m'écrit, auroient abandonné il y a long-temps leurs efpérances, fi tous ceux dont le devoir eft de combattre pour le maintien d'une Conftitution que le Roi vient d'accepter, étoient pénétrés des mêmes principes que moi, principes d'honneur & de fidélité, qui ne m'ayant jamais abandonné dans le cours de la carrière la plus traversée par des viciffitudes fans nombre, m'animeront jufqu'à mon dernier foupir; & afin d'ôter à cet avanturier tout espoir que l'invafion dont il femble me menacer puiffe jamais s'effectuer impunément, & lui montrer que fon projet eft un projet purement romanesque, je lui fais entendre qu'il y a, prêt à marcher & à agir en maffe, par-tout où les circonftances l'exigeroient, plus de 10,000 hommes à qui j'ai infpiré les mêmes fentimens que je manifefte, & que je confens qu'il fafle connoître aux Princes, s'il eft vrai, comme il l'avance, qu'il me parle en leur nom.

» Ces Emigrans ifolés ne feront redoutables, que dans le moment

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