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la mère qui veut émanciper se présente devant le juge de paix, et lui en fait la déclaration, que le juge de paix, assisté de son greffier, constate dans un procès-verbal. (Code civ., art. 477.)

XI. « Un père, dit M. Rolland de Villargues, ne pourrait émanciper son fils par testament; ou du moins, pour que, dans ce cas, l'émancipation devînt valable, il faudrait que le testament fût présenté par le conseil de famille au juge de paix, et l'on délibérerait, dans la forme ordinaire, sur le maintien de l'émancipation. »

En d'autres termes, le testament du père serait considéré comme un simple vou, auquel le conseil de famille est libre de ne pas déférer; encore ce vœu ne pourrait-il lui être soumis que dans le cas où la mère aurait prédécédé le père, car si la mère survivait, elle seule aurait le droit d'accorder l'émancipation.

XII. Nous avons dit que le mineur resté sans père ni mère peut yous Ce modèle être émancipé par le conseil de famille, lorsqu'il a atteint l'âge de dix-huit ans. On conçoit le motif qui a engagé le législaage teur à reculer, dans ce cas, l'époque de l'émancipation. Il est

Se vol.

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peu à craindre que les père et mère l'accordent lorsqu'il y aurait du danger à le faire. Leur affection présumable et même leur propre intérêt offrent une double garantie de leur prudence. Mais il n'en est pas de même d'un tuteur, qui, pour se débarrasser plus tôt d'une charge pénible, pourrait provoquer une émancipation prématurée. (Voy. Conseil de famille, sect. 1, no 23.)

XIII. Si le tuteur négligeait de prendre les mesures nécessaires pour amener l'émancipation, le mineur aurait-il le droit de requérir le juge de paix d'assembler le conseil à cet effet?

Oui, suivant M. Toullier; non, d'après M. Duranton.

Nous adoptons l'opinion de ce dernier par deux motifs : 1° l'art. 479 ne reconnaît la faculté de requérir la convocation du conseil de famille, qu'à ceux des parents ou alliés du mineur, au degré de cousin-germain ou à des degrés plus proches, qui l'auront jugé capable d'être émancipé; 2o le mineur qui se croirait digne de l'émancipation, pourrait prier un de ses parents ou alliés de la provoquer ; et si c'est un acte de justice, si elle est vraiment méritée, il est impossible de supposer que tous les membres de la famille refusent leur concours. Ainsi, nul inconvénient à refuser au mineur le droit de réquisition; tandis qu'en le lui accordant, on s'exposerait à des demandes continuelles, qui auraient pour résultat ou de fatiguer inutilement les membres du conseil de famille,

ou de leur arracher, par obsession, un dangereux consen

tement.

XIV. Le juge de paix ni le procureur du roi ne peuvent convoquer d'office le conseil. La réquisition d'un parent est absolument nécessaire. (Duranton, Rolland de Villargues, Rogron,)

S II. Conséquences de l'émancipation.

I. Aussitôt que le mineur est émancipé, autrement que par le mariage, il doit lui être nommé un curateur par le conseil de famille. C'est en présence et avec l'assistance de ce curateur que le compte de tutelle lui est rendu (voy. Curateur, S2). L'intervention du conseil de famille pour la nomination du curateur est nécessaire même quand l'émancipation émane du père ou de la mère.

II. « Ce n'est pas, comme l'observe justement M. Rogron, que le père ou la mère, tuteurs naturels, ne soient pas de plein droit curateurs de l'enfant qu'ils émancipent, mais pour le compte de tutelle, le curateur doit toujours être nommé par le conseil de famille. Car, ou bien c'est le père ou la mère qui dépose la tutelle, et dans ce cas il faut bien que le conseil de famille nomme un curateur ad hoc, exprès pour recevoir les comptes; ou bien c'est un autre que le père et la mère, et alors le conseil de famille nomme toujours le curateur. Si l'ancien tuteur est choisi pour remplir ces fonctions, il faut de plus nommer un curateur ad hoc pour recevoir son, compte. Au reste, la loi n'exige pas que le compte soit rendu en justice, à moins que les parties ne puissent s'entendre sur les éléments qui le composent. » (Voy. Tuteur.)

M. Delvincourt enseigne la même doctrine, mais M. Rolland de Villargues prétend qu'elle n'est pas suivie.

III. Le mari est de plein droit le curateur de sa femme mineure. (Merlin, Répert., vo Curateur, § 1, no 6; Duranton, t. 2, n° 505.)

IV. Les effets de l'émancipation sont relatifs à la personne ou aux biens.

V. Quant à la personne, l'émancipation fait cesser la tutelle, et même le pouvoir paternel. Cependant un mineur émancipé ne peut se marier sans le consentement de ses père et mère, ni s'enrôler volontairement avant l'âge de dix-huit ans révolus.

VI. Quant aux biens, nous avons expliqué, aux mots Curateur, S 2, et Conseil de famille, § 1o, no 23, dans quelles

limites le mineur émancipé en acquiert la disposition. On trouvera, à l'article Mineur, de plus larges développements à cet égard.

VII. D'après l'art. 487 du Code civil, le mineur émancipé qui fait un commerce, est réputé majeur pour les faits relatifs à ce commerce. Mais le Code de Commerce, art. 2, exige, outre l'émancipation, une autorisation expresse, soit du père ou de la mère, soit du conseil de famille. (Voy. Conseil de Famille, sect. 2, no 26.)

VIII. L'émancipation fait cesser l'usufruit légal, et, par une juste compensation, le père qui a émancipé son fils, n'est plus obligé de le nourrir, si celui-ci a des revenus suffisants.

S III. Révocation de l'émancipation.

I. Quand le mineur ne répond pas à la confiance qu'on lui a témoignée en l'émancipant, quand sa gestion prouve qu'il n'en était pas digne, l'émancipation peut lui être retirée dans les mêmes formes que celles qui ont cu lieu pour la lui conférer (Code civ., art. 485). Mais la mauvaise gestion doit être prouvée par des engagements excessifs qu'il aurait contractés, et dont la réduction aurait été prononcée par jugement, en vertu de l'art. 484.

H. Si donc le père ou la mère existe encore, il suffira d'une déclaration devant le juge de paix, contraire à celle qui a conféré l'émancipation. S'ils sont décédés l'un et l'autre, le conseil de famille sera appelé à délibérer.

III. Une très-grave question s'est élevée au sujet de l'article 485 l'émancipation par mariage est-elle révocable?

Quelques jurisconsultes prétendent que, l'art. 485 s'exprimant d'une manière absolue, tout mineur émancipé, etc., il n'y a pas lieu à faire une exception en faveur du mineur qui est devenu époux et père; ils trouvent même dans les obligations et les charges qu'impose cette double qualité, un motif de plus pour prendre des précautions contre son inexpérience ou sa légèreté.

D'autres, en reconnaissant l'irrévocabilité de l'émancipation tant que dure le mariage, pensent que l'émancipation pourrait être retirée, si le mariage était dissous avant la majorité des conjoints.

Mais la cour de cassation a repoussé l'un et l'autre système par un arrêt du 21 février 1821. « Considérant, y est-il dit, qu'aux termes de l'art. 476 du Code civil, le mineur est émancipé de plein droit par le mariage; que cet article, le seul qui prononce sur l'émancipation par mariage, la confère sans

condition, ni terme, ni réserve, et, par conséquent, d'une manière absolue et irrévocable; qu'ainsi elle est acquise au mineur qui se marie, soit qu'il ait l'âge fixé par la loi pour former cette union, soit que, plus jeune, il la contracte avec dispense du gouvernement, et qu'elle lui est acquise, nonseulement pendant la durée du mariage, mais même après sa dissolution, quoiqu'alors il soit encore en minorité, etc. »

Telle est aussi la doctrine enseignée par M. Proud'hon, dans son Cours de Droit français, t. 2, p. 265, et par M. Toullier, t. 2, no 1303. Ce qui prouve, dit ce dernier jurisconsulte, que l'émancipation expresse peut seule être révoquée, c'est que l'art. 485 ordonne que la révocation sera faite en suivant les mêmes formes qu'on a suivies pour conférer l'émancipation. Or, l'émancipation par mariage n'est assujettie à aucune forme.

IV. Dès le jour où l'émancipation est révoquée, le mineur rentre en tutelle, et y reste jusqu'à sa majorité accomplie. (Art. 486.)

Si la tutelle était légale, le tuteur reprend ses fonctions, parce qu'il les tient de la loi, qui est toujours la même. Si elle était testamentaire ou dative, le conseil de famille doit être assemblé pour nommer un nouveau tuteur, car l'émancipation avait irrévocablement dégagé le premier, dont les pouvoirs ne peuvent revivre que par une nouvelle nomination. (Toullier, t. 2, n° 1303; Proud'hon, ibid., p. 266.)

V. Le mineur dont l'émancipation est révoquée, rentre non-seulement en tutelle, mais encore sous la puissance paternelle, et il n'est pas permis de l'émanciper une seconde fois. (Proud'hon, ibid.)

VI. L'usufruit légal, dont l'émancipation avait privé le père ou la mère qui l'avait conférée, revit-il en leur faveur après la révocation, si le mineur n'a pas encore atteint ses dix-huit ans?

MM. Duranton, Toullier et Favard de Langlade professent la négative. Ils se fondent sur ce que le but de la révocation est de réprimer la mauvaise conduite du mineur qui abusait de ses biens, et non pas d'en transférer le profit à son tuteur naturel, sous l'autorité duquel il va rentrer.

L'opinion contraire, adoptée par M. Proud'hon, nous paraît préférable par plusieurs motifs. D'abord, la cessation de la jouissance légale avait pour cause unique l'émancipation : Cessante causâ, cessat effectus.

En second lieu, le transfert au mineur de cette jouissance était comme une prime accordée à son intelligence et à sa

bonne conduite : il a dû en être privé quand les tribunaux ont proclamé son inconduite ou son incapacité.

Si enfin, par l'émancipation, le père avait perdu la jouissance des biens de son fils, il avait été en même temps exonéré de la tutelle. Dès qu'on l'oblige à reprendre la charge, il est juste de lui accorder une indemnité.

VII. Les créancier. du père ou de la mère ne seraient pas recevables à faire révoquer l'émancipation, sous le prétexte qu'elle contiendrait une renonciation indirecte et frauduleuse à l'usufruit légal. (Toullier, t. 6, no 368; Proud'hon, Traité de l'Usufruit, t. 6, n° 2399.)

VIII. Le droit d'enregistrement dû sur les actes d'émancipation, est de 5 fr. par chaque émancipé. (Loi du 22 frimaire an 7, art. 68, § 4, n° 2.)

La nomination du curateur n'est passible d'aucun droit particulier. (Instr. génèr., no 449.)

L'acte de révocation est sujet au droit de 2 p. 100 (Loi du 28 avril 1816, art. 43, n° 21.)

EMPÊCHEMENT. Voy. Délégation de juridiction, et Commissaire de police, S 2.

EMPHYTÉOSE. Voy. Bail emphyteotique.

EMPRISONNEMENT. C'est ou l'action par laquelle on met quelqu'un en prison, ou l'effet qui résulte de cette action. I. Nous avons traité de l'emprisonnement pour dettes à l'article Contrainte par corps: nous n'aurons à nous occuper ici que de l'emprisonnement considéré comme une peine de police. (Art. 464 du Code pénal.)

II. L'emprisonnement pour contravention de police ne peut être moindre d'un jour ni excéder cinq jours, selon les distinctions établies par le même Code (art. 465). Si le tribunal prononçait une peine inférieure au minimum ou supérieure au maximum, son jugement serait exposé à la censure de la cour suprême (Cour de cass., 22 avril 1813).

III. Il commettrait également un excès de pouvoir, s'il laissait au condamné le choix de la prison ou de l'amende (Cour de cass., 2 septembre 1825). Cette option n'appartient qu'au juge, dans le cas prévu par l'art. 463 du Code pénal.

IV. Les jours d'emprisonnement sont des jours complets de vingt-quatre heures (art. 464). Ainsi, par exemple, le condamné à un jour de prison qui se fait écrouer à midi, ne sortira que le lendemain à la même heure.

ENCLAVE. C'est l'état d'un héritage, d'un fonds qui, entouré de tous côtés par d'autres fonds, n'a aucune issue

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