mot; mais quelque naturelle que puisse paraître cette interprétation, elle doit s'effacer devant de nombreux témoignages historiques datant de toutes les époques; ainsi Michel Roset, dans une pièce de vers adressée à la cité de Genève, et qu'il a placée en tête de ses Chroniques, s'écrie: Cité de Dieu, Geneue, renommée, Pour quelques fois de son honneur et gloire On sait que Roset écrivait vers 1562 (1); en 1606, le Citadin (2) dit que dans le soleil païen fust depuis soubs le christianisme enclos et enchassé le precieux nom de IHS le vrai Soleil spirituel nostre Protecteur. Cent quarante-cinq ans après, Baulacre écrivait encore que Genève a pour cimier un Soleil d'Or avec le nom de Jésus. Peu après il répète que cette ville a mis au-dessus de ses armes un Soleil, au milieu duquel se voit le Chifre Grec du nom de JESUS (3). se trouve dans une brochure de 1707, intitulée : Pièces qui concernent les assemblées générales des Citoiens et des Bourgeois de Genève. (1) L'épître dédicatoire placée en tête de ses Chroniques est datée du 1er juin 1562. (2) Page 33 de l'édition originale. (3) Journal Helvétique, mai 1745, p. 473, et novembre, p. 409. L'emblème de la République de Genève est un Soleil de Justice, dit l'auteur de la Muse Parisienne. On pourrait multiplier les citations, celles-là doivent suffire e; on peut d'ailleurs, en jetant un coup d'œil sur la manière dont ce monogramme est écrit, se convaincre facilement qu'il exprime bien et seulement le nom de Jésus. En effet, dans les monuments où les trois lettres sont employées comme sigles, on les sépare généralement par des points, l'on ne rencontre pas le signe abréviatif, et sur la traverse de l'H s'élève le Christ crucifié, ou tout au moins le bois de sa croix, à laquelle s'ap-plique par extension la formule ci-dessus. Chez nous il n'y a rien de semblable: les trois lettres sont toujours jointes et accompagnées de l'abréviation. De plus, les monuments genevois présentent de nombreux exemples du mot Jésus écrit par les trois lettres IHS; il en est ainsi tant dans le nom de Jésus-Christ que dans l'invocation Jesus, Maria, répétés sur la plupart des anciennes cloches de nos églises (1). Après avoir été bannie pendant de longues années du disque solaire, la figure humaine y reparut au dix-septième siècle (2). (1) Cloche de Genthod, beffroi de Saint-Pierre, etc. Voy. aussi dans Spon, Hist. de Genève, t. II, p. 361 et 362, plusieurs inscriptions de chapelles et pierres tumulaires. M. Picot, Hist. de Genève, t. II, p. 428, dit qu'en 1635 on battit, par ordre du Conseil, une monnaie en argent, portant sur l'une de ses faces un soleil, ayant au centre cette devise I. H. S. Jésus sauveur des hommes. Mais le monogramme des florins et doubles florins, frappés à cette date, ne présente ni les points séparatifs, ni aucun signe qui puisse faire admettre cette hypothèse. Nous n'avons rencontré la croix sur le monogramme que dans un ou deux monuments; tel est la Carte du lac de Genève, de Jacob Goulart, publiée à Amsterdam en 1609, et la cloche de Saint-Pierre dite le Rebat, refondue en 1678. (2) Il y a quelques années que, faisant certains travaux sur la promenade de la Treille, des ouvriers rencontrèrent dans le sol plusieurs rondelles de métal. Sur l'une d'elles, qui paraît fort ancienne, on voit le Soleil figuré par une tête humaine entourée de huit rayons, quatre droits et quatre ondulés; entre ces rais l'on voit des caractères dont il C'est ainsi que le Soleil est figuré sur une hallebarde des huissiers du Conseil portant la date de 1677 (1): deux cercles lumineux concentriques entourent cette tête; le premier est formé de seize flammes, et l'extérieur de huit rayons étoilés et de huit flammes. Dans les dessins de médailles projetées en 1706 et 1707, la première à l'occasion de l'achèvement des nouvelles constructions de l'Hôtel-de-Ville, et l'autre pour le rétablissement de la concorde entre les citoyens et les Conseils de la République, on voit que les revers devaient représenter les festins célébrés à ces occasions; et dans le fond deux piliers, armoriés de la Clef et l'Aigle, auraient soutenu une arcade sur la clef de laquelle figurait le Soleil avec cette inscription, DUCENTOS UNIIT Unus, pour la première médaille qui se rapportait aux deux Conseils, et sur la seconde, UNIVERSOS UNIIT UNUS. L'auteur du projet donne de cette figure l'explication suivante : « Cette Arcade représente <«< la République de Genève qui est soutenue par le Sénat et par le Peuple, comme par deux colomnes, et la Clef repré<< sente la Protection Divine, comme l'indique le Soleil, l'Em<blème le plus ordinaire de Dieu, qui les entretient et qui les ◄ conserve tous ainsi bien unis. » La figure humaine dans le Soleil, que nous retrouverons lorsque nous traiterons du cimier, se remarque sur les boutons d'uniforme des compagnies de Volontaires, instituées à la fin du est difficile de déterminer la valeur. Cette pièce est en plomb, du diamètre de 21 à 22 lignes, et pèse environ 3 onces. En fouillant aux Contamines des Tranchées, on a également trouvé, mais appartenant à une époque infiniment plus moderne, une rondelle en terre cuite, qui offre l'image du Soleil de Genève avec la tête humaine dans le disque; les rayons de cette dernière pièce sont au nombre de trente-deux, disposés en deux rangs; celui intérieur est flamboyant, celui extérieur étoilé. (1) Cette hallebarde est représentée sur la planche XXII, fig. 2. dix-huitième siècle. La figure 13 de la deuxième planche représente l'un de ces boutons. Le rayonnement du Soleil a subi plusieurs variations: des rais au nombre de huit, seize, douze ou vingt-quatre; puis une effluve lumineuse tantôt continue, tantôt disposée en gerbes, ont à diverses époques entouré le disque; d'autres fois, seize flammes d'inégale longueur donnent au Soleil la forme d'une croix à fourchette flamboyante (1). On trouve seize rayons (2) sur des clefs de voûte de l'Hôtelde-Ville, sur plusieurs monnaies des trois derniers siècles (3) et sur l'inscription tracée, en 1584, au sujet de l'alliance perpétuelle avec les villes de Zurich et de Berne (4); le surtout de table, fait pour le festin célébré alors, l'offre également; sur ces deux monuments, le Soleil est au-dessus des armoiries des (1) Depuis le seizième jusqu'au commencement du dix-huitième siècle les six-deniers présentent cette croix, remplacée dès lors par le Soleil. (2) Les rayons sont alternativement étoilés et flamboyants lorsque nous ne spécifions pas le contraire. On trouve indifféremment, et à diverses époques, tantôt le rayon étoilé, tantôt le rayon flamboyant dans la partie supérieure du Soleil. LES. (3) Thaler ou écu de 1561 et 62 [voy. pl. II, fig. 9].-Écu pistolet de 1564. Quadruple d'or de 1641. Jeton en plomb POVR TERREAV. 1660. Pistole de 1752 à 70. Six-deniers de 1778. Un six-deniers de 1750 présente le soleil à trente-deux rais étoilés. Les jetons en plomb dont nous venons de parler offrent à l'avers la Clef et l'Aigle; ils étaient déjà en usage vers 1554; on s'en servait alors pour marquer les journées des réfugiés de Cabrières et de Mérindol, que l'on employait aux fortifications. (Voy. Roset, Chroniques, liv. V, chap. LIX.) Les autres méreaux ou jetons que l'on possède présentent la Clef et l'Aigle avec la lettre G, ou diverses indications au revers, relatives à leur usage, telles que * : POVR: * LE VIN: et POVR ESCHARGAIS ET RONDES. 1618. Ces derniers sont en cuivre et servaient pour les patrouilles. (4) Cette inscription se lit à l'Hôtel-de-Ville, dans la salle des Pas-perdus. villes alliées; sur le premier on lit cette devise, appliquée au nom de Jésus, TRIA PROTEGIT vnvs (1), et sur l'autre les mots SI DEVS EST PRO NOBIS QVI (sic) CONTRA NOS (2). Le grand tableau de l'Escalade, conservé à la Bibliothèque publique, offre aussi le Soleil à seize rayons (3). -Un drapeau de 1713 figure un Soleil au disque d'argent entouré de seize flammes, alternativement rouges et jaunes et couvrant le drap tout entier [pl. VI, fig. 6]. Cette disposition en Soleil se rencontre sur d'autres bannières des dix-huitième et dix-neuvième siècles. A une époque antérieure les flammes, rappelant les rais du Soleil, y avaient été disposées de différentes manières; nous en donnerons pour exemple le drapeau figuré sous le n° 3 de la même planche et le fameux étendard de la Remasse ou des Larmes de feu, célèbre dans les guerres du seizième siècle; ce dernier, fait par Vandel en 1530 (4) et qui a souvent flotté à la tête des troupes victorieuses de Genève, est aujourd'hui dans un grand état de vétusté; nous en donnons [pl. III] un dessin qui figure les parties conservées. Ces mêmes flammes se trouvent employées comme points séparatifs sur quelques monnaies (5). Le nom de Remasse, donné à la bannière dont nous venons de parler, vient de ce que l'on y avait peint des balais de bouleau appelés chez nous des remasses ou ramasses, ce qui, sur le drapeau, indiquait (1) Un seul en protége trois. (2) Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ?— Le surtout se voit à l'arsenal. (3) Dans ce dernier exemple, un filet noir sépare le disque des rayons; dans l'inscription de 1584 un filet réunit l'extrémité des rayons; cette dernière disposition est très-rare. (4) Baudichon fut élu capitaine-général au lieu de Jean Philippe, et en une bannière qui avait déjà été faite par Vandelli, l'an 1530, il fit peindre des larmes de feu et la ramasse ou ballay pour sortir aux champs. (Extrait de la Chronique de Piaget.) Pierre Vandelli ou Vandel, dont il est ici question, fut élu capitaine-général de la ville le 8 décembre 1535. (Extrait des Reg. du Conseil.) (5) Sur le sol de 1556 la signature E est placée entre deux flammes. |