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par partir, et, une fois réunis, ils se déclareront la majorité. Peut-être partiront-ils cette nuit. >

M. Saladin. J'ai à vous communiquer un fait qui tient essentiellement à la question que vous traitez dans ce moment. Vous connaissez l'incivisme du département de la Somme. La ville d'Amiens est en général dans l'esprit de ce département; le roi y est attendu ; les dispositions les plus précises sont faites pour l'y recevoir. Il s'y trouve en ce moment un régiment de chasseurs commandé par M. Alexandre Lameth. Le cent quatrième régiment y est aussi, et les Suisses y sont attendus de moment en moment. Les membres du directoire étaient logés à l'intendance avec leurs ménages. Ils en sont délogés depuis quelques jours et ont remeublé cet hôtel à neuf.

› Il serait possible que la translation fût demandée pour Amiens. M. La Fayette n'en est éloigné que de vingt-deux lieues, et cette circonstance pourrait bien entrer dans le plan de la cour. ›

M. Robespierre démontre qu'il est bien difficile de croire à ce projet de translation. Il est plus probable, selon lui, que si la proposition en est faite, si les Maury de la législature viennent se plaindre de mauvais traitemens, ce sera pour détourner l'assemblée de la grande question qui est à l'ordre du jour. Il engage les patriotes à ne pas être dupes de cette manœuvre, à renvoyer toute discussion qui aurait pour objet les prétendues insultes faites à des députés, comme on passait à l'ordre du jour à l'assemblée constituante sur les plaintes des Maury, et enfin à aborder avec courage la grande question de la déchéance du roi.

La séance est levée à onze heures. (Journal du club, n. CCXXXXVI.)

ASSEMBLÉE NATIONALE; SÉANCE DU JEUDI 9 AOut.

[Le conseil permanent de la commune de Strasbourg envoie à l'assemblé deux lettres qu'il a découvertes, adressées par un émigré servant dans l'armée de Condé, à un membre du directoire du BasRhin, que l'assemblée nationale a cassé. Il résulte de ces lettres que les émigrés ne sont point, comme on l'a dit, à l'arrière

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garde; six mille gentilshommes au contraire marchent à l'avantgarde. Les différentes colonnes de l'armée de Condé sont parties. Le signataire annonce qu'il a fait neuf lieues en un jour, qu'il est rendu de fatigue. Il est armé pour Dieu, son roi et sa dame. Dans peu de jours il sera sur la terre de France. Quel doux moment pour son cœur!

Ces deux lettres sont envoyées an comité de surveillance.

Les administrateurs du département du Loiret envoient à l'assemblée une adresse, dans laquelle ils s'élèvent contre les parjures qui veulent attenter à la Constitution; ils jurent d'y mourir fidèles.

Le renvoi à la commission extraordinaire est décrété.

La section des Thermes de Julien proteste contre la pétition présentée par le maire de Paris, et jure de rester fidèle à la nation, à la loi et au roi.

Un membre demande la mention honorable.

Les tribunes. A bas!

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N..... Il faut faire descendre les tribnnes dans la salle p rendre les décrets.

La section de Henri IV désavoue la même pétition.

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M. Bazire. Je déclare que j'ai déposé sur le bureau plus de vingt adresses de mon département, qui toutes demandent la déchéance. (Les tribunes applaudissent.)

On commence la lecture de l'adresse du directoire de la SeineInférieure.

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Cette lecture est interrompue par des membres qui demandent le renvoi de l'adresse à la commission.

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M. Tarbé. On entend ici tous les jours les pétitions de la municipalité de Paris. Je demande, au nom du département de la Seine-Inférieure, qu'on lise l'adresse.

M. Bazire. Je prie M. Tarbé de ne pas confondre les citoyens de son département avec le directoire.

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MM. Thuriot, Albitte, Goupilleau, Monteau du Gers s'élèvent contre la lecture.

Le renvoi à la commission est décrété.

Une lettre du commandant général de la garde nationale parisienne, offre à l'assemblée l'hommage de la garde nationale, et l'assure qu'elle veillera au maintien des propriétés et à la sûreté

des personnes.

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M. Lamarque. Depuis le commencement de la session le pouvoir exécutif nous trahit; c'est une vérité sentie par tous les membres de l'assemblée. (Quelques murmures et des applaudissemens. It cherche tous les moyens de nous avilir pour nous faire perdre la confiance de la nation; et nous l'aurions bientôt perdue, si nous avions perdu celle de la capitale. Pour perdre la confiance de la nation, il ne nous faudrait qu'un petit nombre de décrets contradictoires avec l'opinion publique. ( Les tribunes et une partie de l'assemblée applaudissent.) A cet égard, je n'ai nulle crainte; si l'assemblée n'est pas infaillible, elle est incorruptible. Mais un grand danger environne la chose publique. Le pouvoir exécutif, après avoir insinué qu'on ne doit pas compter sur l'assemblée, jettera dans la foule quelques-uns de ces hommes qui sont toujours à ses ordres, pour agiter le peuple déjà trop indigne des trahisons dont il est la victime. Quand le trouble sera bien excité, ce même pouvoir exécutif, au lieu de faire marcher la vraie garde nationale, rassemblera autour de lui les chevaliers du poignard, les correspondans de Coblentz, tous ces hommes affreux qui brûlent de rougir leurs armes atroces du sang du peuple. On corrompra l'armée, on fera agiter simultanément les ennemiş étrangers; c'est à vous de prévenir ou d'arrêter ces désordres, et cette situation avilissante dont nous sommes menacés. Parmi les moyens d'y réussir, je regarde comme indispensables les mesures suivantes que je propose à l'assemblée de renvoyer à l'examen de sa commission :

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1° L'assemblée sera en séance permanente jusqu'à ce que la grande question de la déchéance ait été décidée.

2o Tous les citoyens qui ne sont point domiciliés à Paris depuis un an, les fédérés exceptés (On rit et on murmure.), seront tenus d'exhiber, devant les juges de paix ou autres officiers de police, des certificats de civisme de leurs municipalités ; fante

de quoi ils seront tenus de se retirer dans le lieu de leur domicile. 3o Ceux qui refuseront de satisfaire aux dispositions de l'article précédent, seront arrêtés comme suspects de trahison, et détenus jusqu'à la fin de la guerre.

4o Les municipalités seront autorisées à prohiber les journaux connus pour prêcher l'incivisme (Plusieurs voix: Et l'insurrection), à la charge d'en donner avis à l'assemblée nationale et au pouvoir exécutif.

5° Il sera nommé par l'assemblée quatre commissaires chargés d'extraire des procès-verbaux de ses séances, toutes les réquisitions faites depuis le commencement de la guerre au pouvoir exécutif, pour le complétement et l'approvisionnement] des armées, les réponses des ministres, et leurs promesses. Les commissaires seront chargés de tirer un résultat et de le présenter l'assemblée.

6° L'assemblée ayant jugé avantageux l'envoi des commissaires à Soissons, décrète que ces mêmes commissaires, auxquels il en sera joint quatre autres élus de la même manière, c'est-à-dire á haute voix, seront envoyés aux armées du Nord et du Rhin, pour rendre compte à l'assemblée de leur position. (Quelques applaudissemens.)

Ces propositions sont renvoyées à la commission extraordinaire.

M. Lamarque. Je dois annoncer que je suis informé que les cidevant gardes du roi qu'on retenait à Paris avec 40 sous par jour, ont encore reçu aujourd'hui une augmentation.

M. le président. Il y a au bureau de MM. les secrétaires plusieurs lettres de différens membres de l'assemblée. On va en donner connaissance.

Plusieurs voix. Oui, la lecture.

Un de MM. les secrétaires lit les lettres suivantes

Paris, ce 9 août 1792.

Monsieur le président, sortant hier de l'assemblée par la porté du Manège, j'ai été poursuivi jusqu'à l'entrée de la rue du

Dauphin. Une femme, armée d'un couteau, a voulu m'en frapper. J'ai été assez heureux pour le faire tomber d'un coup de canne. Alors un individu, en habit de garde national, m'a pris au collet; ce n'est qu'avec beaucoup de peine et en me débattant que je me suis arraché à sa fureur. Je suis un représentant du peuple français. Je sortais de mon poste. J'ai eu, sur plusieurs de mes collègues, l'avantage de savoir me taire. Je suis et je serai toujours un homme du peuple. Mais je demande qu'on m'assure l'inviolabilité de mon caractère et la liberté de mes opinions.

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Signé MÉZIÈRES, du département de l'Aube.

Monsieur le président, je sortais bier avec M. Lacuée. Arrivé à la porte de la rue Saint-Honoré, je me suis vu environné d'une multitude d'hommes en uniforme national avec des bonnets rouges sur la tête. Là j'ai entendu distinctement délibérer qu'on me mettrait à la lanterne. (Il s'élève de longs murmures d'indignation.) Alors j'ai réclamé mon inviolabilité et mis en évidence mon cordon de député. On m'a répondu que c'était pour cela qu'il fallait me pendre. En cet instant un homme en veste m'a pris par derrière et m'a soulevé. (Un mouvement d'horreur se manifeste dans l'assemblée.) Alors est survenu un grenadier du bataillon de Sainte-Opportune, nommé Lavilette, qui, le sabre à la main, et secondé de quelques-uns de ses braves camarades, m'a dégagé, m'a conduit au département, d'où un détachement m'a ramené chez moi. Je supprime toute réflexion. Je ne puis plus assister aux séances de l'assemblée. J'instruirai mes commettans de ma conduite. Signé, REGNAUlt-Beaucaron. ›

Monsieur le président, après le décret rendu hier sur l'accusation de M. La Fayette, lorsque nous sortions de la salle, les citoyens qui occupent la tribune de l'extrémité gauche répandirent un torrent d'injures et nous menacèrent des gestes les plus affreux. M. Dumoslard et moi nous nous tenions par le bras, dans la cour du Manége. Ils reconnurent M, Dumoslard pour un des orateurs qui avaient parlé en faveur de M. La Fayette. Alors il devint l'objet particulier de leurs insultes. Après avoir répété plusieurs fois :

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