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trie eft en danger. « Nous nous promenions paifiblement. Seulement nous chantions des couplets en l'honneur de la liberté, feuls dignes de l'homme régénéré. La Reine vint à paffer. Nos chants lui déplurent fans doute, ainfi qu'aux valets qui l'entouroient. Ils prétextèrent, pour nous infulter, que nous ne nous étions pas découverts. La conftitution ne parle pas de la Reine. Des hommes libres ne doivent rien à la femme du Roi; elle n'eft qu'une femme comme une autre. Nous avons cru devoir conferver la dignité d'hommes libres en refufant de faluer la Reine qui n'est rien dans l'état. Des valets de cour ont ofé attenter à la majesté du peuple François dans la perfonne de mon camarade en le maltraitant à coup de fabre ( des fabres de valets! nulle preuve), & en foulant fon chapeau aux pieds. Nous demandons justice (applaudiffemens redoublés de galeries & d'une partie de l'Affemblée). »

Un membre infifte pour qu'un témoin foit entendu. Ce témoin, garde national, attefte qu'un officier de la gendarmerie lui a dit que « des fédérés avoient infulté la Reine par des chanfons. infâmes, & n'avoient pas voulu ôter leur chapeau... Je lui obfervai, poursuit le témoià, que les mouvemens du cœur ne fe commandent pas... Les fédérés m'ont affuré n'avoir pas chanté de chanfons infultantes, & n'avoir été maltraités que pour n'avoir falué la Reine. » On voit que les plaignans font les feuls témoins pour eux dans leur caufe, & qu'un gendarme les inculpe. Il ne manquoit que de faire repéter la chanson à la barre pour juger fi elle étoit auffi infâme que tant d'autres que les amateurs ne trouvent que civiques, Les galeries applaudiffent. L'Affemblée admet les Petitionnaires aux honneurs de la féance.

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Du mardi, 17 juillet.

On renvoie à la commission des douze un mémoire apologétique de M. de Montefquiou fur fan refus de détacher de fon armée 20 bataillons pour l'armée du Rhin; un arrêté des amis de la conftitution de Langres concernant les fédérés, que ces amis deftinoient au camp de Paris, arrêté dénoncé par les adminiftrateurs du département de la Haute-Marne ; & une copie de l'inftruction commencée par des juges de paix fur les évènemens du 20 juin, que le miniftre de l'intérieur a adreffée à l'Affemblée nationale.

« Confidérant que dans un état libre tous les citoyens doivent être pourvus d'armes de guerre, &c.,» l'Affemblée a décrété tout ce qui lui a paru néceffaire pour l'établiffement & la furveillance d'une manufacture d'armes dans la ville de Moulins.

Proteftations de citoyens de Metz contre l'ar rêté du département de la Mofelle fur les attentats du 26 juin; demande d'un décret d'arcufation contre M. de la Fayette. Onze articies décrétés pour augmenter la force armée; articles que nous extrairons avec ceux qui doivent les fuivre; projet de recrutement de M. Lafource, amendé & adopté, portant que toutes les villes qui fourniront un bataillon ou une compagnie auront bien mérité de la patrie; enfin, pétition oratoire de fédérés à la bærre; nous devons en donner une idée au lecteur.

« La nation eft trahie..." (Ici les déclamations rebattues de MM. Guadet, Vergniaud, Briffot, Ifnard, &c. ) « Vous nous avez déclaré que la patric eft en danger, c'eft nous

dre qu'il faut qu'elle fit fauvée ; c'eft nous appeller à fon fecours. Si elle ne peut l'être par fes repréfentans, il faut bien qu'elle le foit par elle-même... C'est en vain que des généraux perfides & des defpotes infolens fe réuniffert pour la défigner comme une faction. Sous quelque forme qu'elle fe raffenible, en quelque temps, en quelque lieu qu'elle s'explique, elle prouvera toujours à l'univers qu'elle eft factieuse en effet dans le fens des tyrans, c'eft- lire, qu'elle est b en déterminée à les écrafer... Quelqu'évènement qu'il arrive, ne ferions-nous que 10 contre 100 comme nous fommes 100 contre 10, la victoire. de la liberté n'en eft pas moins certaine. Ua bonme libre vaut 100 esclaves, & la deftinée du vice ceft de trembler devant la vertu... On a permis que les ci-devant nobles intrigans qui avoient déshomoré le caractère de législateurs dans l'Aflemblée nationale conftituante, fe foient convertis tout, à-coup, de légiflateurs perfides, en chefs d'armée plus perfides encore. A la tête est la Fayette, le plus méprifable, le plus criminel, le plus infâme des affaffins du peuple.»

M. Hia s'eft permis d'obferver qu'il étoit impoffible que l'Affemblée entendit traiter de crimiel un citoyen qu'on n'avoit pas jugé (on violoit l'article IX de la déclaration des droits de l'homine.) It a été couvert des huées des galeries, & l'orateur a pourfu vi,

Pères de la patrie, fufpendez provisoirement le pouvoir exécutif dans la perfonne du Roi; le falut de l'Etat vous conmande cette mesure. Mettez en état d'accufatio la Fayette. Décrét le licenciement des états-majors & des fonctionnaites militaires nommés par le Roi. Deftituez & puniffez les directoires de départemens & de

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diftri&ts coalifés avec la Fayette & la cour. Enfin renouvellez les corps judiciaires...

Un bruyant orage a coupé la parole au harangueur. Le préfident lui a répondu que l'Affemblée ne défefpéreroit jamais du falut public, tant qu'il y auroit du patriotisme & des vertus en France, & a déféré les honneurs de la falle à la députation des fédérés.

Le Roi ayant accepté la démiffion de M. Terrier-Monciel, a remis, par interim, le portefeuille du département de l'intérieur à M. Dejoly, miniftre de la juftice.

On lit une lettre & des notes de M. Luckner,

qui, pour fatisfaire au décret qui le concerne,

à l'Affemblée :

« Ce compte, que je dois, comme général de l'arinée Françoile, ne rendre qu'au Roi, fon chef fuprême, & au miniftre chargé de me tranfmettre légalement fes ordres, fe trouve soit dans la correfpondance des ministres avec moi, dont l'Affemblée a demandé la communication, feit dans les regiftres de mon état-major, qui, en ce moment, ne font pas fous ma main. Tous ces objets, purement militaires, ont une grande connexité avec les opérations fubféquentes de la campagne, fur lesquelles la prudence & mon devoir me commandent le fecret. C'eft à l'Asfemblée nationale à examiner ce qui, dans la direction de la guerre, eft abfolument étranger à fes fonctions & ce que la constitution lui permet de connoître par des interpellations faites au miniftre de la guerre. »

« Je répondrai, continue M. Luckner, à la demande qui m'eft faite par le décret, de tou ce qui eft néceffaire pour le fuccès des opérations à venir, que nous devons defirer une

grande augmentation de force, une grande réu nion de moyens; qu'elle femble nous êtiel promife par les proteftations de zèle civiques & d'enthoufiafme qui fouvent retentiffent dans le fein de l'Affemblée; mais que jufqu'à préfent ces brillantes efpérances fe font peu réalisées ; que l'armée eft encore incomplette, peu nombreufe, & nullement recrutée; que fi l'Affemblée perdoit un moment pour la renforcer par tous les décrets qui peuvent dépendre d'elle, & d'après les confidérations que lui foumet l'expérience, nos forces feroient dans une immense difproportion avec celles de l'ennemi.... Je faifirai l'occafion que l'Affemblée nationale m'a offerte de lui préfenter l'hommage de mon ref pect pour les autorités conftituées. Elle me trouvera toujours ce que j'ai toujours été, en nemi des factions y étranger aux intrigues, in violablement attaché à la conftitution & au Rei que je défendrai de tous mes moyens, & profondément convaincu que l'union des bons citoyens, dont les généraux leur donnent & pe cefferont de leur donner l'exemple, peut feule fauver la France. ɔɔ

Je fuis avec refpe&t, &c..

D'après les notes, la force difponible des trois armées n'eft que de 60,000 hommes; & le maréchal n'auroit que 40,000 hommes tout au plus à oppofer aux 200,000 ennemis. Il ne peut garantir le fuccès d'une guerre offenfive, & n'espère qu'à peine pouvoir foutenir avec quelque avantage une guerre défenfive. Il propofe de lever 3 hommes par municipalité, demande furle-champ 132, mille hommes; fe plaint que les cours martiales nuifent à la difcipline & accupent un trop grand nombre de foldats, en de

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